• Aucun résultat trouvé

Influence des paramètres opératoires sur l’oxydation Fenton

3. Oxydation Fenton

3.2. Influence des paramètres opératoires sur l’oxydation Fenton

3.2.1. pH de la solution

La nécessité d'acidifier le milieu est souvent mentionnée comme un des principaux inconvénients de la réaction de Fenton. Cela signifie non seulement des coûts supplémentaires, provenant de la consommation de réactifs pour l’acidification et la neutralisation ultérieure, mais aussi une augmentation de la charge en sels de l'eau traitée.

De nombreux travaux sur les procédés Fenton ont montré que le pH doit être compris entre 2 et 4 pour une dégradation optimale des polluants organiques. Pour comprendre ces observations, il faut examiner les diagrammes de spéciation des espèces ferreuses et ferriques. En solution aqueuse, le fer forme des complexes aqueux de la forme [Fe(OH)x(H2O)6-x](2-x)+ ou (3-x)+

dont la concentration relative dépend du pH. Par souci de simplification, les molécules d’eau associées aux espèces ne seront pas représentées. Par ailleurs, en augmentant le pH, le fer dissous a tendance à précipiter. La figure I.2 montre ainsi la distribution des espèces ferreuses et ferriques en solution selon le pH et les équilibres avec une des phases solides possibles : Fe(OH)2 pour Fe(II) et goethite FeO(OH) pour Fe(III).

Concernant les différentes espèces en solution aqueuse, la figure I.2a montre que le fer ferreux est essentiellement présent sous la forme de l’ion Fe2+ libre (i.e. uniquement hydraté par six molécules d’eau, espèce (1,0)) jusqu’à pH neutre, puis à mesure que le pH augmente les formes [Fe(OH)]+ (1,1) et [Fe(OH)2] (1,2) deviennent non négligeables.

Pour ce qui est des espèces ferriques à faible concentration (10-5-10-3 M), l’ion Fe3+ (espèce (1,0) de la figure I.2b) prédomine dans la solution pour un pH < 2. Pour des valeurs de pH supérieures, les espèces suivantes deviennent dominantes :

• [Fe(OH)]2+ (1,1) à pH = 3

• [Fe(OH)2]+ (1,2) entre 4 < pH < 7

32

• [Fe(OH)4]- (1,4) lorsque pH > 9

Le complexe [FeIIIOH]2+ qui prédomine à pH = 3 catalyse la dismutation du peroxyde d’hydrogène, tandis que des valeurs de pH trop acides (<2) favorisent la complexation de Fe3+ et Fe2+ par H2O2 et entrainent une diminution de la concentration de ces ions dans le milieu

réactionnel (Gallard et coll., 1998 ; Pignatello, 1992).

Figure I.2 – Haut : Distribution en fonction du pH des espèces hydrolysées de a) Fe(II) et b) Fe (III) à I=1 M et 25°C dans une solution à différentes concentrations de fer dissous (10-3 M pour Fe(II) et 10-1 M et 10-5 M pour Fe(III)) (d’après Baes et Mesmer, 1976). Les courbes en pointillés montrent les régions sursaturées par rapport au précipité (respectivement (Fe(OH)2(s) et α-FeO(OH)s).

Bas : Diagrammes de solubilité de Fe(OH)2 (gauche) et α-FeO(OH) (droite).

Les diagrammes de solubilité (figure I-2 bas) montrent clairement qu’à pH identique la solubilité des phases solides en équilibre avec Fe(II) est nettement supérieure à celles des (hydr)oxydes du Fe(III). C’est donc la solubilité de Fe(III) qui pose essentiellement problème. Ce précipité étant très stable, la réduction de Fe3+ en Fe2+ devient très lente et la régénération de Fe2+, comme initiateur de production de radicaux HO•, devient encore plus limitante. Ainsi, au-dessus d’un pH de 4, la solubilité des ions ferriques est insignifiante (< 10-8 M).

33 3.2.2. Concentration de fer et source de fer

En conditions Fenton standards, c’est-à-dire pour une valeur de pH autour de 3 et une concentration en fer dissous inférieure ou égale à 1 mM, les études démontrent que l’augmentation de la concentration en fer conduit toujours à une augmentation de la vitesse de réaction (Gernjak et coll., 2003 ; Gernjak et coll., 2006 ; Krutzler et coll., 1999 ; Sarria et coll., 2003). Cependant, cette augmentation n'est pas toujours proportionnelle, et la vitesse finit par se stabiliser aux concentrations élevées. Les réactions de Fenton homogènes se produisent entre le peroxyde d'hydrogène et Fe2+ ou Fe3+ selon les équations (I.1) et (I.4) et conduisent à la production de radicaux hydroxyles hautement réactifs qui attaquent et détruisent les molécules organiques. Cependant les valeurs très différentes des constantes associées suggèrent que les vitesses de dégradation des polluants doivent dépendre de la nature du fer introduit.

Üstün et coll. (2010) ont étudié pendant 24 heures la dégradation et la minéralisation de l’acide indole-3-butyrique en solution aqueuse à 0,5 mM, par oxydation Fenton classique (Fe2+/H2O2) et oxydation « Fenton-like » (Fe3+/H2O2) à pH = 3 en utilisant un rapport

[H2O2]/[Fe3+ ou 2+] égal à 5. La phase initiale de la réaction, correspondant aux 5 premières

minutes, est bien différente selon le réactif utilisé : la constante vitesse de dégradation de l’acide indole-3-butyrique (cinétique de 1e ordre) est en effet presque deux fois plus élevée pour le système Fe2+/H2O2. Cependant, après les 5 premières minutes de réaction, le

mécanisme réactionnel est indépendant du système choisi car Fe3+ prédomine dans les deux cas. Ces conclusions sont en accord avec celles de Pignatello (1992) qui indique qu’en présence d’un excès de H2O2, le taux et la vitesse de minéralisation des polluants organiques

sont indépendants de l’état d’oxydation du fer, car Fe2+ est très rapidement oxydé.

3.2.3. Concentration d’oxydant

L'influence de la concentration d’oxydant sur la cinétique a été étudiée par plusieurs auteurs et leurs conclusions peuvent se résumer par le fait qu’il existe une plage de concentrations optimales pour le peroxyde d’hydrogène : une concentration trop faible conduit à une réduction de la vitesse de réaction, une concentration trop élevée conduit les radicaux hydroxyles à réagir préférentiellement avec H2O2 (équation I.7) plutôt qu’avec le

34

l'évolution de la réaction Fenton (Gernjak et coll., 2006 ; Bacardit et coll., 2007a ; Bacardit et coll., 2007b), et une addition contrôlée de peroxyde d'hydrogène pourrait conduire au degré de minéralisation désiré. L'optimisation de la quantité de peroxyde vis-à-vis de la stœchiométrie théoriquement nécessaire pour la minéralisation du polluant dépend fortement de ce substrat et de sa concentration.

Bien que le mécanisme de Dorfman (équations I.25 et I.26) postule que l’utilisation du peroxyde devrait être plus efficace en présence d’oxygène dissous, puisque le radical R• peux régénérer le peroxyde d’hydrogène par réaction (I.9) (von Sonntag et coll., 1997), aucune preuve expérimentale n’en a été apportée. Considérant l’impact élevé de la consommation de peroxyde d'hydrogène sur le coût du procédé, des recherches supplémentaires doivent être effectuées de façon à pouvoir la réduire.

3.2.4. Température

La température améliore la vitesse des réactions impliquées dans le mécanisme d’oxydation Fenton (selon la loi d’Arrhénius), mais elle favorise aussi la décomposition de H2O2 en oxygène et eau, en particulier au-delà de 60°C. Il n’y a pas de consensus sur l’effet

de la température (valeur optimale ou valeur la plus haute préférable), mais en général des températures supérieures à 60°C ne sont pas utilisées (Khamaruddin et coll., 2011).

3.2.5. Effet de l’oxygène dissous

L’oxygène dissous provoque d’abord une oxydation directe de Fe(II) :

Fe2+ + O2 → Fe3+ + O2•- (I.39)

Cependant cette réaction est assez lente en milieu acide (Haddou, 2010).

O2 est aussi à l’origine de la formation de radicaux peroxyles organiques ROO• (éq.

I.25), à leur tour impliqués dans les réactions suivantes (Legrini et coll., 1993 ; Kolthoff et Medalia, 1949) :

ROO• + H2O → ROH + HO2• (I.26)

ROO• + Fe2+ + H+→ ROOH + Fe3+ (I.40)

35

RO• + RH → ROH + R• (I.42)

RO• + Fe2+ + H+→ ROH + Fe3+ (I.43)

ROO• + RH → ROOH + R• (I.44)

Ces radicaux contribuent donc également à l’oxydation de Fe(II) et à la formation des radicaux peu actifs HO2•, mais d’un autre côté ils limitent la réaction de dimérisation des

radicaux R•.

Ainsi en oxydation Fenton, l’effet net de l’oxygène dissous peut être positif ou négatif selon les conditions opératoires utilisées, mais généralement il ne modifie que peu le plateau de minéralisation atteint (Haddou, 2010).

Par ailleurs, certaines réactions, notamment celles mettant en jeu les radicaux HO2• et

O2•- produisent de l’oxygène moléculaire avec des constantes de vitesse non négligeables

(entre 105 et 1010 mol-1.L.s-1) et il est donc difficile de travailler en l’absence totale d’oxygène dissous (Flotron, 2004).