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Chapitre 6 : Interprétation du comportement en fluage des

6.3 Analyse de la déformation des systèmes eutectiques binaires

6.3.1.2 Influence de la phase associée à l’alumine

Pour identifier l’influence de la nature cristallographique de la phase associée à l’alumine, les comportements des systèmes eutectiques Al2O3 - ErAG et Al2O3 - GdAP seront comparés. Ces deux systèmes, qui associent, respectivement, une phase grenat et une phase pérovskite à l’alumine, présentent des microstructures de morphologie et de taille comparables (voir figures 3.46 et 3.48).

Les résultats des essais de fluage des eutectiques binaires Al2O3 - ErAG et Al2O3 - GdAP sont rappelés figures 6.4 et 6.5. Pour ces deux compositions, les vitesses de

1 Afin de simplifier la lecture des figures du chapitre 6, seule une vitesse de déformation moyenne, calculée à partir des vitesses mesurées pour tous les paliers réalisés dans les mêmes conditions, a été

Interprétation du comportement en fluage des céramiques eutectiques

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déformation mesurées, à conditions égales, sont du même ordre de grandeur. On note toutefois un écart à basse contrainte et/ou basse température, bien visible sur la figure 6.5. Cet écart correspond à la différence d’énergie d’activation mise en évidence dans ces conditions (σ = 70 MPa, T < 1 500°C) avec Q ~ 300 kJ.mol-1 pour le système Al2O3 - ErAG, et plus de 550 kJ.mol-1 pour Al2O3 - GdAP. Globalement, le système Al2O3 - GdAP présente toutefois des vitesses de déformation légèrement inférieures.

Figure 6.4Vitesses de déformation des systèmes binaires Al2O3 - ErAG et Al2O3 - GdAP mesurées

au cours des essais par sauts de contrainte.

Figure 6.5Vitesses de déformation des systèmes binaires Al2O3 - ErAG et Al2O3 - GdAP mesurées au

cours des essais par sauts de température.

En considérant le rapport température d’essai sur température de fusion, cette différence entre Al2O3 - GdAP et Al2O3 - ErAG est d’avantage mise en évidence. En effet, comme l’indiquent les valeurs résumées dans le tableau 6.4, les températures d’essais, rapportées à la température eutectique, correspondent à des températures relatives plus élevées pour le composite Al2O3 - GdAP.

Composite Teutectique (°C)

Température relative pour 1 450°C 1 525°C Al2O3 - ErAG 1810 0,82 Teut. 0,86 Teut. Al2O3 - GdAP 1710 0,86 Teut. 0,90 Teut.

Tableau 6.4Valeurs des températures relatives correspondant aux températures d’essais pour les composites eutectiques binaires.

Ainsi, une comparaison normalisée de ces deux composites eutectiques binaires nécessite de prendre en compte les valeurs des vitesses de déformation pour des températures relatives équivalentes. Dans le cas présent, comme indiqué dans le tableau 6.4, les essais de fluage comparables sont ceux réalisés à 1 525°C pour Al2O3 - ErAG, et 1 450°C pour Al2O3 - GdAP. Ces essais de fluage mettent ainsi en évidence une meilleure résistance relative du composite Al2O3 - GdAP par rapport aux deux autres composites. En effet, pour une contrainte de 70 MPa, et une température relative de 0,86 × Teut., la figure 6.4 indique, pour Al2O3 - ErAG, 7 1

II=2,1⋅10 s

ε& , alors que, dans le cas de Al2O3 - GdAP,

1 8 II=8,1⋅10 s

ε& .

Si, comme nous venons de l’exposer, la vitesse de déformation de ces matériaux dépend peu des caractéristiques structurales des phases eutectiques associées à Al2O3, les mécanismes de déformation mis en jeu semblent différer selon le domaine de température ou de contrainte imposé. L’évolution du paramètre n, similaire quelle que soit la phase associée à l’alumine (voir tableau 6.1), pourrait indiquer que la phase alumine α pilote probablement la déformation plastique de l’éprouvette. Dans le cas du système Al2O3 - YAG, cela se traduit par un régime de déformation actif à basse température (T < 1 500°C) et à basse contrainte, et un autre régime de déformation actif aux températures plus élevées (T > 1 500°C) et/ou sous forte contrainte.

Cette hypothèse du contrôle de la déformation du composite par la phase alumine est également confortée dans le cas de l'eutectique Al2O3 - YAG si l’on considère les températures d’activation des systèmes de glissement de chacune des phases constituantes :

− Pour la structure grenat, le glissement de dislocations n’a été mis en évidence que pour des températures supérieures à 1 500°C [Corman, 1993 ; Karato, 1994],

− Dans le cas de l’alumine, le système de glissement basal du saphir est activable à des contraintes raisonnables (de l’ordre d’une centaine de MPa) dès 1 100°C [Castaing, 1997], conditions vérifiées lors de nos essais.

Nous rappellerons que la déformation plastique de l’alumine est assurée par trois systèmes de glissement (figure 6.6) :

− Le système de glissement basal 12 10 0001

{ }

qui est le principal système de glissement pour des températures supérieures à 700°C [Castaing, 1997], ainsi que le montre l'évolution en fonction de la température de la contrainte de cisaillement critique résolue dans ce plan de glissement (voir figure 6.7),

− Le système de glissement prismatique 10 1 0 12 10

{ }

qui est le plus favorable en dessous de 700°C, mais pour des contraintes très élevées [Lagerlöf, 1994 ; Castillo Rodríguez, 2008] (voir figure 6.7),

− Les systèmes de glissement pyramidaux, avec un vecteur de Burgers de type 1 3 10 1 1 , dans les plans 01 1 2

{ }

ou 10 1 1

{ }

.

Interprétation du comportement en fluage des céramiques eutectiques

175 Figure 6.6Représentation schématique des systèmes de glissement de l’alumine α (le plan de

glissement est hachuré, la direction de glissement est représentée par une flèche épaisse) : (a) système de glissement basal – (b) système de glissement prismatique – (c) systèmes de

glissement pyramidaux.

Figure 6.7Evolution de la contrainte de cisaillement critique résolue nécessaire aux glissements basal et prismatique en fonction de la température [Castillo Rodríguez, 2008].

A ce point de l’étude, il apparaît difficile d'avoir une interprétation plus avancée des courbes de fluage qui permettrait de comprendre le rôle joué par chacune des phases au sein de chaque eutectique. Une étude MET des microstructures déformées a donc été entreprise, afin d’obtenir des informations à l’échelle locale sur les mécanismes intervenant au cours de la déformation.

Nous présenterons dans le paragraphe suivant les observations réalisées sur le système eutectique Al2O3 - YAG, et une interprétation de celles-ci, en relation avec les résultats expérimentaux de fluage. Les différences ou les similitudes de comportement avec les

eutectiques associant l’alumine à une phase pérovskite seront ensuite présentées dans le cadre des observations réalisées sur le composite Al2O3 - GdAP.

6.3.2 Eutectiques Al2O3 - LnAG : cas du système Al2O3 - YAG