• Aucun résultat trouvé

Neon reference

Chapitre 5 : Etude expérimentale de la

5.3 Étude de la déformation plastique par essais de fluage des composites eutectiques in situ binaires

5.3.3.1 Cas des éprouvettes déformées sous une contrainte de 70 MPa

De manière similaire aux essais par sauts de contrainte, au cours des essais par sauts de température, les paliers de températures ont été effectués deux fois, pour deux taux de déformation différents. Ce protocole expérimental a été utilisé, comme précédemment, pour vérifier une éventuelle influence du taux de déformation sur la valeur de l’énergie d’activation calculée au cours d’un saut sur un intervalle de température donné. La figure 5.7 résume l’évolution de la vitesse de déformation avec le taux de déformation pour les essais par sauts de température réalisés sur les trois eutectiques binaires.

Un léger écart subsiste entre les vitesses de déformation calculées pour les mêmes températures, après un saut croissant ou décroissant. Or, les essais par sauts de température durent plus longtemps que les essais par sauts de contrainte, et il est clair que, d’après la figure 5.7, dès le premier palier, le stade secondaire du fluage est atteint. En effet, la vitesse reste constante après que le taux de déformation ait atteint 0,5 %. Il est donc probable que, lors des essais par sauts de contrainte, la diminution de ε&II pour une contrainte donnée est due à la fois à un effet de durcissement, et à des changements de contrainte un peu trop rapides, notamment en début d’essai. Ce dernier point explique d’ailleurs l’écart que l’on peut constater entre certaines valeurs de vitesses de déformation mesurées au cours des essais par sauts de contrainte et celles mesurées par sauts de température, particulièrement pour les basses contraintes et les basses températures.

Etude expérimentale de la déformation plastique des composites in situ

149 Figure 5.7Evolution de la vitesse de déformation

en fonction du taux de déformation pour les composites eutectiques binaires : (a) Al2O3 - YAG,

(b) Al2O3 - ErAG, (c) Al2O3 - GdAP.

Figure 5.8Evolution de la vitesse de déformation en fonction de l’inverse de la température pour les

eutectiques binaires déformés à 70 MPa : (a) Al2O3 - YAG, (b) Al2O3 - ErAG,

(c) Al2O3 - GdAP. (a) (a) (b) (c) (b) (c)

La variation, en fonction de l’inverse de la température, des vitesses de déformation mesurées au stade secondaire pendant les essais par sauts de température à 70 MPa, est reportée sur la figure 5.8. Pour chaque saut de température, une énergie d’activation apparente a été calculée. Ces valeurs sont résumées dans le tableau 5.5.

Composite 1 440 1 490°C 1 490 → 1 440°C 1 490 → 1 530°C 1 530 → 1 490°C Al2O3 - YAG 350 398 637 698 Al2O3 - ErAG 270 322 606 608 Al2O3 - GdAP 440 587 600 648

Tableau 5.5Valeurs, exprimées en kJ.mol-1, des énergies d’activation mesurées au cours des essais par sauts de température sous une contrainte de 70 MPa pour les composites

eutectiques binaires.

A partir de la figure 5.8 et du tableau 5.5, deux types de comportement bien distincts, selon le système eutectique, se dégagent :

− Les composites in situ Al2O3 - YAG et Al2O3 - ErAG, d’une part, qui présentent clairement deux régimes de déformation, puisque les énergies d’activation varient du simple au double entre le saut entre 1 440 et 1 490°C et le saut entre 1 490 et 1 530°C. Cette transition, très marquée, est bien visible sur la figure 5.8a et 5.8b : la pente de la droite, qui est directement proportionnelle à l’énergie d’activation, augmente très nettement pour les valeurs élevées de température.

− Le système Al2O3 - GdAP, d’autre part, qui ne semble pas présenter plusieurs régimes de déformation. En effet, même si les valeurs d’énergies d’activation varient pour les différents sauts, la différence n’est pas assez significative pour être interprétée comme un changement de régime de déformation, surtout pour la deuxième partie de l’essai.

Ces valeurs d’énergie d’activation sont très comparables à celles mesurées, dans des conditions équivalentes, lors de la déformation de monocristaux Al2O3 ou Y3Al5O12, qui constituent certaines des phases eutectiques des composites in situ [Cannon, 1983 ; Corman, 1991 ; Deng, 1995 ; Deng, 1996]. Notamment, les valeurs d’énergie d’activation, mesurées dans les systèmes à base de grenat, sont très proches des valeurs d’énergie d’activation mesurées pour l’auto-diffusion des atomes d’oxygène dans la phase grenat (T < 1 500°C) [Corman, 1993], et dans la phase alumine (T > 1 500°C) [Oishi, 1960 ; Heuer, 2008].

Etude expérimentale de la déformation plastique des composites in situ

151

Afin de vérifier si cette transition n’est pas due à un artefact expérimental, ou à une mesure erronée des vitesses de déformation, un essai de fluage supplémentaire, par sauts de température, sur le composite Al2O3 - ErAG, a été réalisé. Tout d’abord, le premier palier de température a été maintenu deux fois plus longtemps qu’au cours de la première série d’essais (dont les résultats sont exposés en figures 5.5 et 5.6). De plus, les températures choisies pour cet essai l’ont été de manière à compléter celles auxquelles ont été réalisés les sauts lors du premier essai sur ce composite. Ainsi, les cycles thermiques suivants ont été adoptés :

− Au cours du premier essai, les températures de déformation avaient été fixées à 1 440°C, 1 490°C, 1 530°C, puis à nouveau 1 490°C et enfin 1 440°C.

− Pour le deuxième essai, le premier palier de déformation a été effectué à 1 470°C, puis les paliers suivants ont été effectués à 1 490°C, 1 510°C et 1 530°C pour la partie « chauffe ». Deux derniers paliers, à 1 500°C et finalement 1 470°C, complètent l’essai.

Les évolutions de la vitesse de déformation en fonction du taux de déformation et de l’inverse de la température sont reportées en figure 5.9. A nouveau, une diminution de la vitesse de déformation, lorsque l’éprouvette se déforme, est observée : la vitesse de déformation obtenue pour le deuxième palier de température effectué à 1 470°C est légèrement inférieure à celle mesurée pendant le premier palier. Dans le cas de cet essai, c’est bien l’hypothèse d’un durcissement du matériau qui est privilégiée, car les conditions expérimentales ont été choisies afin de s’assurer que le stade secondaire du fluage est atteint au cours du premier palier. L’allure de la courbe représentée en figure 5.9a nous en apporte la confirmation, puisque le premier palier, qui correspond à environ 3% de déformation, présente une vitesse quasiment constante sur une plage d’environ 1%. Ceci indique clairement que le stade secondaire est atteint et ce, dès le premier palier. Ainsi, la seule origine possible de l’écart de vitesse de déformation entre le premier et le dernier palier de température, réalisés à la même température, est l’existence d’un stade secondaire quasi-stationnaire.

Figure 5.9Résultats de l’essai complémentaire par sauts de température, sous une contrainte de 70 MPa, effectué sur le composite Al2O3 – ErAG : (a) évolution de la vitesse de déformation en

fonction du taux de déformation, (b) vitesses de déformation en fonction de l’inverse de la température.

L’évolution de la vitesse de déformation en fonction de l’inverse de la température, représentée sur la figure 5.9b, est similaire à celle obtenue au cours du premier essai par sauts de température effectué sur le système Al2O3 - ErAG. Cet essai confirme, ainsi, l’existence de deux régimes de déformation pour les composites in situ Al2O3 - YAG et Al2O3 - ErAG.

Les composites binaires à base de grenat présentent un comportement différent du composite Al2O3 - GdAP, qui associe l’alumine à une phase pérovskite. Ces observations suggèrent que, si la phase associée à l’alumine n’influence que peu la vitesse de déformation globale du matériau, elle perturbe, en revanche, les mécanismes qui contrôlent cette déformation. En effet, comme les figures 5.5 et 5.7 l’indiquent, les essais par sauts de température, sous une contrainte de 70 MPa, montrent une nette différence de comportement entre les composites in situ Al2O3 - YAG et Al2O3 - ErAG, d’une part, et Al2O3 - GdAP, d’autre part.