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Influence d’un traitement thermique après durcissement

Chapitre 1 : Généralités et état de l’art sur l’irradiation des matériaux inorganiques hydratés

1.3.7 Influence d’un traitement thermique après durcissement

Chaque géopolymère peut former différentes phases cristallines par traitement thermique. Le type de phases dépend du cation utilisé lors de la synthèse des géopolymères. Dans les géopolymères, la température de cristallisation de ces phases dépend du ratio Si/Al. En effet, plus ce ratio est faible, plus la température de cristallisation de phase est basse. Cela peut même conduire à la non-formation ou disparition de certaines phases cristallines [39]. Par contre, la quantité de phase cristalline observée diminue quand le rapport Si/Al augmente.

Dans le cas de géopolymères au sodium et pour des ratios Si/Alfaibles (inférieurs à 1,4), la Faujasite (Na2Al2Si2,4O8.8, 6,7H2O), qui peut être présente dès la synthèse à température ambiante, disparaît

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vers 500 °C pour laisser place à la Nepheline (Na3KAl4Si4O16) à 650 °C. Dans le cas de ratios plus élevés, la Faujasite est peu présente et la Nepheline apparaît vers 700 °C [40].

Figure 10 : Pourcentage de kaliophilite et de leucite lors d’un traitement thermique de géopolymères au potassium pour différents ratios Si/Al et comparaison avec la Nepheline présente dans les géopolymères au

sodium aux mêmes ratios [40]

Les géopolymères au potassium forment la Kaliophilite [41] (K2O Al2O3 2SiO2) dès 600 °C pour les plus faibles ratios. Pour des ratios supérieurs à 1,15, deux phases se forment : la Kaliophilite dès 650 °C et la Leucite (K2O Al2O3 4SiO2) dès 800 °C (Figure 10).

Les géopolymères au césium cristallisent à haute température. La phase formée, appelée Pollucite (Cs2O Al2O3 4SiO2), apparaît dès 900 °C [42]. Les pics de diffraction sont beaucoup plus visibles à partir de 1 150 °C.

Applications

1.4

L’application envisagée initialement dans les années 70 pour les géopolymères était d’offrir une alternative aux polymères de par leur résistance au feu. Depuis ce temps, ils se sont développés dans différents domaines : protection des structures en bois [43] ou encore adhésif haute résistance [44].

 Kaliophilite  Leucite  Nepheline

Si/Al = 1,15 Si/Al = 1,4 Si/Al = 1,65

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Aujourd’hui, les géopolymères sont majoritairement envisagés en tant que liants dans les matériaux de construction.

Une application plus spécifique serait l’enrobage de déchets de divers types : déchets boratés, métaux lourds, césium [45-47]. Ils remplaceraient les ciments utilisés traditionnellement mais dont les caractéristiques ne permettent pas leur utilisation dans ces cas particuliers. Ils sont aussi envisagés en tant que matrice de confinement des déchets radioactifs [48, 49].

Lors de ces travaux de thèse, l’application visée est l’immobilisation de déchets nucléaires spécifiques. Dans le cadre du conditionnement des déchets magnésiens radioactifs (gaines de combustible des anciens réacteurs UNGG (Uranium Naturel / Graphite / Gaz), Photographie 1), une solution d’enrobage optimale doit être trouvée.

Photographie 1 : Gaine de combustible pour réacteur UNGG

La solution classique pour les déchets de faible et moyenne activité est l’utilisation des ciments du fait de leurs propriétés : faible coût, synthèse à basse température, eau interstitielle à pH très basique pour insolubiliser de nombreux radioéléments. Cependant, dans le cas des déchets magnésiens, au phénomène de la radiolyse de l’eau se superpose l’interaction de la matrice cimentaire avec les alliages de magnésium : la corrosion des gaines de combustible [50] entraîne un dégagement de dihydrogène supplémentaire. Ce gaz est potentiellement explosif et son rejet doit être limité. La formation d’hydroxyde de magnésium selon la réaction Eq 1 à la surface de l’alliage devrait limiter la corrosion [51].

𝑀𝑔 + 2𝐻2𝑂 → 𝑀𝑔(𝑂𝐻)2 Eq 1

Or dans le cas des ciments, la présence de gypse et d’agents de mouture affecte l’efficacité de la couche de protection [52]. Le magnésium continue de se corroder et donc de former de l’hydrogène.

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Des fluorures peuvent être ajoutés à la formulation afin de former une couche de passivation et inhiber cette corrosion [53, 54]. En ajoutant une faible concentration de fluorures (< 10-1 mol / L), le taux de corrosion peut être fortement diminué selon la concentration, le pH et la nature du contre-ion du fluorure. Cependant, la présence de calcium dans les matrices cimentaires usuelles empêche la formation d’une couche fluorée de passivation à la surface du déchet magnésien par une précipitation préférentielle de fluorure de calcium [55]. Cette précipitation a pour conséquence une hydratation incomplète du ciment ce qui pourrait expliquer l’apparition de fissures [56].

Une solution alternative consiste à privilégier un matériau avec des propriétés similaires à celles des matrices cimentaires mais ne contenant pas dans sa composition de calcium, ou tout autre élément susceptible d’empêcher la formation d’une couche de passivation. Les géopolymères correspondent à cette description et plus spécifiquement ceux synthétisés avec du métakaolin comme source alumino-silicatée, car ce dernier ne contient pas de calcium et ne présente qu’une faible teneur en impuretés. Une étude a par ailleurs montré que l’ajout d’une concentration de 1,25 mol / L de NaF dans la solution d’activation du géopolymère réduit significativement le dégagement de dihydrogène dû à la corrosion du magnésium [57]. Le même ajout à la solution interstitielle de ciments Portland ordinaire n’a aucun effet. De plus, l’ajout de fluorures dans cette gamme de concentration ne semble pas entraîner de modifications dans le mécanisme de géopolymérisation ou dans la structure finale du matériau. Une matrice de géopolymères à base de métakaolin constitue donc une proposition crédible pour le conditionnement de ce type de déchet. Il est toutefois nécessaire d’étudier le comportement d’une telle matrice sous irradiation.

2 Généralités sur l’irradiation

Interaction rayonnement-matière

2.1

Le rayonnement peut être de plusieurs types :

 Photonique ou électromagnétique comme l’UV / visible, les rayons X ou gamma,

 Composé de particules massiques comme les électrons, les neutrons, les rayons alpha (noyaux d’hélium) ou les ions lourds.

Les rayonnements utilisés lors des différentes expériences de cette thèse sont les rayons gamma, les électrons et les ions lourds. Ils produisent au passage dans la matière des :

 Ionisations (éjection d’un électron du cortège électronique),  Excitations (passage d’un électron à un niveau d’énergie supérieur).

24 2.1.1 Rayonnement gamma

A la suite d’une désintégration, la désexcitation d’un noyau atomique radioactif entraîne l’émission d’un rayonnement électromagnétique appelé rayon γ. Ces rayons perdent une partie de leur énergie lors de leur interaction avec les atomes du milieu traversé. Ce sont des photons de haute énergie très pénétrants, c'est-à-dire que leur énergie n’est que progressivement atténuée lorsqu’ils traversent un matériau. Le 60Co est souvent utilisé comme source de rayons gamma dans les irradiateurs industriels et expérimentaux. Les rayons gamma peuvent avoir une énergie allant de quelques keV à quelques centaines de GeV.

L’interaction des rayons gamma avec la matière donne lieu à trois types d’effet :  Effet photoélectrique,

 Effet Compton,

 Création de paires électron-positron.

2.1.1.1 Probabilités des effets

Les probabilités de ces différents effets sont mesurées grâce au coefficient d’atténuation linéique global µ. Il représente la somme des coefficients relatifs à chaque interaction.

𝜇 = 𝜏 + 𝜎 + κ Eq 2

avec τ la contribution de l’effet photoélectrique, σ celle de l’effet Compton et κ celle de la production de paires. Ces grandeurs sont exprimées en m-1.

La Figure 11 présente les probabilités d’occurrence de chacun des effets en fonction de l’énergie du rayonnement pour tous les milieux [58]. Chaque milieu est caractérisé par le numéro atomique de l’atome qui le compose ou éventuellement d’une moyenne pour un milieu composé de plusieurs atomes.