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Indication et résultats actuels

Approches thérapeutiques

II. Transplantation de microbiote fécal

4. Indication et résultats actuels

Un nombre croissant de travaux scientifiques rapportent l‘intérêt thérapeutique du transfert de flore digestive ou transplantation de microbiote fécal (TMF) dans certaines pathologies. En particulier, la TMF a émergé au cours de ces dernières années comme le traitement le plus efficace des récidives d‘infections à Clostridium difficile (IRCD). Des observations préliminaires suggèrent aussi que la TMF pourrait aussi jouer un rôle dans le traitement d‘autres maladies telles que les maladies inflammatoires chroniques de l‘intestin, l‘obésité et les maladies métaboliques ou bien encore les troubles du spectre de l‘autisme.

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4.1. L’infection à Clostridium difficile

À ce jour, la littérature scientifique concernant l‘utilisation de la TMF dans le cadre des IRCD comprend des séries de cas, une méta-analyse, 3 revues de la littérature et un essai clinique randomisé récent. Au total, plus de 500 patients environ ont été traités par cette procédure avec un succès thérapeutique allant de 81 % à 100 %.

Dans une revue de la littérature (couvrant une période allant jusqu‘au 15 avril 2011), Gough et al. Ont recensé 317 patients ayant eu une TMF à partir de 27 publications de 8 pays différents. Le taux global de guérison clinique était de 92 % dont 89 % après l‘administration d‘une seule TMF.Le taux de succès thérapeutique était plus important lorsque l‘administration avait été réalisée par coloscopie (88,9 %) ou par lavements (95,4 %) (Par rapport à la gastroscopie ou à la sonde naso-duodénale = 76,4 %) et lorsque le donneur appartenait à l‘entourage du receveur (93,3 % versus 84,0 % pour un donneur anonyme). Il est cependant difficile d‘interpréter ces différences car les groupes ne sont pas homogènes et varient sur de nombreux autres paramètres (poids de selles utilisées, volume de la suspension administrée, mode de préparation, prétraitement ou non des patients, etc.). Par ailleurs, une étude récente a indiqué un taux de succès thérapeutique de 90-92 % après TMF réalisée à partir des selles congelées d‘un donneur « universel ».

Mattila et al. (Finlande) ont rétrospectivement analysé 70 dossiers de patients souffrant d‘IRCD et ayant reçu une TMF par voie coloscopique après lavement au PEG. Sur les 36 patients infectés par la souche épidémique hypervirulente BI/NAP1/027, 32 (89 %) ont été considérés guéris tandis que 4 patients, présentant des comorbidités lourdes et un terrain affaibli, n‘ont pas

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répondu et sont décédés par la suite. Tous les patients infectés par une autre souche de C. difficile ont été considérés comme guéris, avec un suivi de 12 semaines après la TMF. Dans l‘année qui a suivi, 4 patients seulement ont présenté une nouvelle récidive qui a été traitée avec succès soit par une nouvelle TMF soit par antibiotique.

En 2013, Rubin et al. (États-Unis) ont rapporté une série de 89 TMF administrées par voie naso-gastrique chez 87 patients sur une période de 9 ans dans le même établissement. Le taux de guérison clinique dans les deux mois qui ont suivi était de 79 % après l‘administration d‘une seule TMF.

Patel et al., à la Mayo Clinique en Arizona (États-Unis),ont réalisé 30 TMF en deux ans chez des patients ayant des IRCD avec un taux de succès thérapeutique (amélioration de la diarrhée) de 97 % obtenu en moyenne en 3 jours. Récemment, le premier essai randomisé a comparé, chez des patients souffrant d‘IRCD, un traitement par TMF (précédée d‘un prétraitement par 4 jours de vancomycine per os et d‘un lavement) administrée par voie

naso-duodénale à un traitement de 15 jours par vancomycine à fortes doses (500 mg 4 × /j) précédé ou pas d‘un lavement. Cet essai a été interrompu

précocement suite à une analyse intermédiaire montrant une supériorité significative de la TMF par rapport aux 2 autres bras de l‘étude. Il a été considéré alors comme non éthique de poursuivre cet essai du fait de la perte de chance pour les patients des bras traités par vancomycine. Sur les 16 patients ayant reçu la TMF, 15 (94 %) ont guéri de leur infection à C. difficile après l‘administration d‘une ou deux TMF alors que le taux de guérison chez les patients recevant de la vancomycine seule ou en association avec un lavement était respectivement de 31 % et 23 % à p < 0,001. Il convient néanmoins de

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souligner que l‘étude a été réalisée chez des patients adultes, immunocompétents ne recevant pas d‘antibiothérapie concomitante au moment de l‘inclusion. Par ailleurs, le délai de suivi des patients était de 10 semaines. D‘autres études randomisées sont actuellement en cours (83).

4.2. Les maladies métaboliques : obésité et diabète type 2

Un essai clinique (Vrieze et al. 2012) de transplantation fécale chez des sujets souffrant d‘un syndrome métabolique a été conduit par une équipe hollandaise. Cet essai a consisté à évaluer les effets du transfert du microbiote intestinal de donneurs maigres (IMC < 23 kg/m²) à des receveurs masculins atteints de syndrome métabolique (IMC > 30 kg/m² et glycémie à jeun > 5,6 mmol/L) sur la composition du microbiote du receveur et le métabolisme du glucose.

Les patients ont été randomisés en 2 groupes recevant chacun une transplantation fécale. Une biopsie intestinale suivie d‘un lavage intestinal ont été réalisés sur tous les patients. Ils ont ensuite reçu l‘échantillon par sonde duodénale, soit à partir d‘un donneur allogénique soit de leur propre microbiote intestinal.

La mesure de la sensibilité à l‘insuline, ainsi que l‘étude de la biopsie intestinale et des échantillons fécaux a été réalisée juste avant la transplantation et 6 semaines après.

L‘étude des selles des personnes obèses avant le transfert a montré, en comparaison aux sujets maigres, une diminution de la diversité globale, avec une augmentation des Bacteroidetes et une diminution des Firmicutes. Après le transfert, l‘étude des selles des patients des 2 groupes n‘a pas montré de

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différence quantitative dans la population bactérienne, mais la diversité microbienne a été largement augmentée dans le groupe ayant eu une greffe allogénique, alors qu‘elle était inchangée dans le groupe autologue. Les variations marquantes sont une augmentation de 2,5 fois du nombre de bactéries productrices de butyrate : Roseburia intestinalis, avec une diminution de la présence d‘AGCC dans les fèces (acétate de 49,5 à 37,6 mmol/kg fèces ; butyrate, de 14,1 à 8,9 mmol/kg fèces).

Après 6 semaines, une amélioration de la sensibilité à l'insuline périphérique a été observée dans le groupe ayant eu la transplantation de microbiote intestinal allogénique.

L‘étude des biopsies intestinales n‘a pas montré de différences quantitatives entre les 2 groupes après la greffe. Mais les bactéries Eubacterium hallii également productrices de butyrate ont été augmentées dans la muqueuse de l'intestin grêle après le transfert allogénique du microbiote intestinal. Alors que leur quantité a été diminuée par 2 dans le groupe traité par autogreffe.

Les AGCC, et notamment le butyrate semble donc jouer un rôle dans l‘amélioration de la sensibilité à l‘insuline, notamment par sa capacité à prévenir la translocation de composés bactériens responsable de l‘endoxémie métabolique. Ces AGCC semblent être des acteurs clés dans la régulation de diverses cascades de signalisation associées au métabolisme du glucose et des lipides humains (86).

Ces résultats de transplantation de microbiote fécal chez des sujets atteints de syndrome métabolique semblent prometteurs. D‘autres études sont nécessaires, notamment chez des sujets avec un stade avancé de diabète de type 2.

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