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programmes d’action

II.6 Les indicateurs dans les programmes d’action « pesticides »

II.6.1 Indicateurs pour évaluer l’utilisation des pesticides

Certains indicateurs ont pour objectif d’estimer la quantité de produits appliqués sur les parcelles agricoles, soit à partir des volumes commerciaux vendus soit à partir d’enquêtes ou de références sur

les pratiques. Ainsi, l’indicateur QSA est la Quantité de Substances Actives vendues par les distributeurs de produits phytopharmaceutiques/an (échelle nationale). Son calcul à l’échelle régionale ou locale est difficile, en raison d’un accès limité aux données. Il reflète indique cependant les molécules les plus utilisées en fonction des pratiques actuelles.

L’indicateur NODU se calcule en fonction de la Quantité vendue de chaque substance active par an

(QSA) / « dose unité » qui lui est propre. Le NODU est un indicateur de suivi du plan Ecophyto et essaie d’estimer les ventes de produits phytopharmaceutiques. Il est difficile à calculer à l’échelle régionale (manque de données) et il est donc suivi au plan national pour évaluer l’évolution à la hausse ou à la baisse de l’utilisation des pesticides. Il affiche pour la première fois depuis sa mise en place en 2008, un léger recul montrant une baisse de 2,7% des ventes de produits phytopharmaceutiques entre 2014 et 2015. Pour tenir compte des aléas climatiques qui peuvent influer sur la pression parasitaire, le NODU est analysé en moyenne glissante sur trois années afin de lisser cet effet. En utilisant cette méthode, l’indicateur augmente de 12% en moyenne triennale entre la période 2009-2011 et 2012- 201421.

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Figure 39 : Variation des indicateurs de vente et d’utilisation des pesticides à l’échelle

nationale (source Hossard et al, 2016)

La variation récente de l’ensemble des indicateurs (Figure 39) ne montre pas de diminution significative sur la période 2008-2013. En fait, leurs valeurs sont plutôt en augmentation. Ces chiffres

interpellent directement l’efficacité des politiques mises en œuvre pour réduire l’utilisation des pesticides. Un indicateur souvent mobilisé est la quantité de substances actives apportée par les

agriculteurs, soit en valeur absolue, soit à l’hectare, sur le territoire d’action. Cet indicateur reflète la pression exercée par rapport à une molécule spécifique (glyphosate, metolachlore etc.). Il peut apporter une information intéressante (quantité apportée/quantité transférée) lorsqu’un modèle hydrologique est mobilisé dans le contexte du programme d’action. Il peut refléter soit les pratiques diverses et obtenues par enquêtes sur un petit territoire, ou encore une typologie réalisée à partir d’enquêtes sur échantillon et/ou d’expertise (groupe d’experts) si la taille du territoire d’action le demande. C’est le cas de l’indicateur PREMA (Pression En Matière Active) mobilisé dans le cadre du programme du BAC Coulonge dans le bassin de la Charente.

L’indicateur de fréquence de traitement (IFT) a été développé à partir du milieu des années 1980

au Danemark pour répondre au fait que le recours croissant à des produits à faible grammage (dose homologuée libellée en g/ha) n’était pas visible dans les statistiques portant sur les quantités totales de substances actives vendues (Gravesen, 2003). Le ministère en charge de l’Agriculture et l’INRA ont adapté la méthode au contexte français (Champeaux, 2006). Calculé à une échelle nationale, régionale ou territoriale, l’IFT permet le partage d’un diagnostic commun, tout autant que la définition d’une vision partagée d’un objectif à atteindre. L’IFT est mobilisé dans le cadre de mise en œuvre de

politiques publiques telles que les Mesures Agroenvironnementales territorialisées (MAET) du

programme de développement rural hexagonal (PDRH) visant à réduire progressivement l’utilisation des pesticides. Il est également utilisé dans le cadre du réseau DEPHY Ecophyto et plus généralement dans toutes les actions d’accompagnement des agriculteurs dans leur démarche de réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires. Il est devenu un indicateur « institutionnel ».

La variabilité inter-régionale des IFT par culture traduit des situations de production et des contextes agro-climatiques différents. Les données disponibles pour la région Poitou Charentes sont présentées dans le Tableau 5 et le Tableau 6.

Les IFT moyens sont calculés pour que 70% des exploitations les respectent, cela reflète donc les pratiques d’une majorité d’exploitations. Il existe toutefois une forte variabilité intra-régionale en fonction des contextes et des systèmes agricoles : l’effort d’une exploitation pour réduire les IFTs sera donc plus ou moins important selon son système de culture et ses pratiques.

Tableau 5 : IFT de référence par culture en Poitou- Charentes (Agreste, 2011)

Tableau 6 : IFT de référence en Poitou Charentes pour la vigne (source : DRAAF, Juin

2016)

Après plusieurs années d’utilisation de l’indicateur IFT, différentes pistes d’améliorations ont été identifiées, pour éviter certaines dérives. En effet, l’utilisation croissante de produits multi-substances actives peut entraîner une réduction de la valeur de l’IFT sans pour autant réduire la dépendance aux pesticides du système de culture. L’objectif de réduction de l’IFT masque alors le véritable objectif qui est la réduction de la pression en pesticide et l’amélioration de la qualité de l’eau.

L’amélioration de la qualité de l’eau fait partie des enjeux prioritaires du PDRH 2014-2020. Dans le souci de répondre aux exigences de la DCE, une déclinaison environnementale de l’IFT au regard de l’enjeu de production d’eau potable a été envisagée. Elle permettrait d’apporter des éléments d’information supplémentaires sur l’utilisation des substances actives présentant un fort potentiel de transfert vers les eaux. Cette amélioration de l’IFT a été envisagée dans deux directions : un IFT « substance active » (IFT SA) pour éviter les dérives « multi substances » et un IFT « potentiel de transfert » déterminé à l’aide de l’outil SIRIS pesticide (Guichard, 2014). Ce nouvel IFT n’a cependant pas été accepté et diffusé par l’administration.

Indicateur de fréquence de traitement (IFT) régional moyen du Poitou-Charentes selon les espèces

Blé tendre Blé dur Orge Triticale Colza Tournesol Pois protéagineux Maïs fourrage Maïs grain

IFT herbicides 1,1 1,4 1,3 1,1 1,9 1,4 1,0 1,3 1,9

IFT fongicides 0,9 1,5 1,1 0,5 1,2 non diffusé 0,6 0,0 non diffusé IFT insecticides 0,2 non diffusé non diffusé non diffusé 2,8 non diffusé 1,3 non diffusé non diffusé

IFT total 2,5 3,4 2,7 1,7 6,2 1,5 2,9 1,4 2,1

Calculs Blé tendre Blé dur Orge Triticale Colza Tournesol Pois protéagineux Maïs fourrage Maïs grain

IFTHH 1,4 2,0 1,4 0,6 4,3 0,1 1,9 0,1 0,2

C’est toujours l’IFT «produit» qui est actuellement mobilisé dans les programmes d’action. L’IFT est exprimé en « nombre de doses de référence par hectare » appliquées sur une unité spatiale pendant une période donnée. L’unité spatiale est le plus souvent la parcelle et la période est la campagne culturale. Cet indicateur peut être agrégé à l’échelle d’un ensemble de parcelles, d'un système de cultures, d’une exploitation, d’un territoire ou d’une région. Il peut également être exprimé par type de produits phytosanitaire (herbicide, fongicide…) ou de culture. Les modalités de calcul et d’agrégation de l’IFT sont décrites dans un guide méthodologique produit par le Ministère de l’Agriculture en 2015.

Malgré ses défauts, l’IFT est intégré dans de nombreux outils informatiques d’assistance à la gestion des agriculteurs ou des conseillers agricoles. Des objectifs de réduction de l’IFT (25% par exemple) sont très fréquemment posés dans les programmes d’action. Mais la manière d’atteindre cet objectif est souvent laissée dans le flou ! En fait, l’IFT, avec tous ses défauts, est utilisé car il est pratique. Il donne une estimation de l’intensité des pratiques agricoles mais en revanche il ne permet pas d’évaluer le risque potentiel de transfert sur le territoire d’action car il ne tient pas compte du contexte pédoclimatique (Charbonnier et al, 2016).