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3.1 Importance de la méthylation du génome

On retrouve des altérations de le la méthylation de l’ADN dans de nombreux cancer. En effet, dans les cellules cancéreuses on retrouve une déméthylation globale de l’ADN mais une hyperméthylation au niveau de certains promoteurs de gènes au niveau des groupements CpG (Herman et Baylin, 2003). Ceci est l’origine d’un changement de la conformation de la chromatine, à l’activation et/ou à l’inactivation anormale de certains gènes et à l’instabilité génomique. En effet, dans une cellule normale, les groupements CpG à proximité des promoteurs de certains gènes sont protégés de la méthylation pour permettre la transcription de ces gènes alors que dans les cellules cancéreuses ces groupements sont hyperméthylés empêchant ainsi la transcription. De même, des régions qui étaient hyperméthylées deviennent hypométhylées dans les cellules cancéreuses permettant ainsi l’expression de gènes qui devraient être normalement éteints dans des cellules normales. Par exemple, une étude a montré que la perte de l’expression du gène codant pour la protéine p16 par hyperméthylation de son promoteur facilitait l’initiation de la tumorigénèse (Foster et al., 1998). L’hypométhylation des régions péricentromérique est la source de l’instabilité génomique des cellules cancéreuses puisqu’elle prédispose les cellules aux DSBs et aux réarrangements chromosomiques. Les modifications épigénétiques étant réversibles, cela ouvre des perspectives prometteuses pour la thérapeutique. En effet, des inhibiteurs de méthyl-transférases comme le 5-azacytidine permettent la réexpression des gènes suppresseurs de tumeurs éteint par hyperméthylation. Plusieurs dérivés ont été testés en essais cliniques et ont donné des résultats prometteurs dans certaines leucémies (Villar-garea et al., 2003).

3.2 Remodeleurs de la chromatine et modifications des histones

En plus de l’hyperméthylation des promoteurs, il existe des modifications d’histones à l’origine d’inactivation épigénétique. En particulier, la tri-méthylation de la Lysine 27 de l’histone H3 (H3K27me3) contribue fortement à l’inactivation de nombreux gènes. L’inactivation des gènes via le dépôt de cette marque implique la famille des protéines Polycomb. Pour préciser, c’est la protéine EZH2 qui est responsable du dépôt de cette marque inactivatrice au niveau de l’histone H3. Cette marque va permettre ensuite le recrutement du complexe Polycomb PRC1 qui va

ubiquitinyler la Lysine 119 de l’histone H3 pour maintenir l’état condensé et donc répressif de la chromatine.

La protéine EZH2 est retrouvée surexprimée dans de nombreux cancers et notamment dans les cancers du sein (Kleer et al., 2003) et de la prostate (Varambally et al., 2002). Cette augmentation d’expression est associée au développement de tumeurs particulièrement agressives et de mauvais pronostic (Bachmann et al., 2006).

Plusieurs autres études ont identifié des mutations au niveau de la Lysine 27 d’un variant de l’histone H3, H3.3 (Schwartzentruber et al., 2012 ; Sturm et al., 2012 ; Wu et al. 2012). Ces études ont identifié cette mutation sur un allèle du gène H3F3A codant pour le variant H3.3 dans 60% des cas des patients atteints d’un gliome. Chez ces patients, le niveau de H3K7me3 est globalement réduit. Cependant, les auteurs observent également que la marque H3K27me3 et le niveau d’expression d’EZH2 sont augmentés localement altérant ainsi l’expression de nombreux gènes. Ceci indique donc que cette mutation est à l’origine d’une reprogrammation totale de l’expression des gènes menant ainsi à la tumorigénèse (Chan et al., 2013).

Par opposition à son rôle d’oncogène, des mutations inactivant EZH2 ont été également observées dans des leucémies myéloïdes lui suggérant un rôle de suppresseur de tumeurs (Khan et al., 2013). Ainsi, l’activité d’EZH2 et en conséquence le dépôt de la marque H3K27me3 est perturbé par des mécanismes variés dans de nombreux cancers.

Pour conclure sur cette partie, le séquençage du génome des cancers humains a recensé plus de 300000 mutations, 120 de ces gènes ont été identifiés. La moitié de ces gènes code pour des protéines qui régulent la conformation de la chromatine par des modifications d’histones ou de l’ADN (Vogelstein et al., 2013). Parmi ces gènes on retrouve les gènes codant les protéines p300 et CBP. De nombreuses mutations au niveau de ces gènes sont retrouvées dans plusieurs cancers dont le cancer hépatocellulaire, le cancer du sein, le cancer colorectal et le cancer gastrique (Iyer et al. 2004). Une autre étude a montré que des mutations au niveau des gènes codant les protéines CBP est p300 sont associées au syndrome de Rubinstein Taybi caractérisé par un retard mental et une prédisposition au développement de cancer chez l’enfant (Spena et al., 2015).

3.3 Inactivation des gènes suppresseurs de tumeurs : Exemples des gènes suppresseurs de tumeur, TP53 et HIC1

La réponse aux dommages à l’ADN joue le rôle de barrière à la progression

tumorale en empêchant la prolifération cellulaire par l’activation de gènes suppresseurs de tumeurs (Halazonetis et al., 2008). Ainsi, il n’est pas surprenant de voir que les tumeurs malignes montrent la perte des protéines clés de la DDR telles que les protéines ATM ou P53. Dans des cellules normales et en absence de dommages à l’ADN, la protéine P53 est très peu exprimée. En effet celle-ci est conduite au protéasome afin d’être dégradée grâce à l’action de la protéine MDM2, une E3 ubiquitine ligase. Par contre, en présence de DSBs, la protéine P53 va être stabilisée par différentes MPTs et notamment par plusieurs phosphorylations réalisées par la kinase CHK2 (pS15) à travers l’activation de la voie ATM/CHK2, la kinase CHK1 (pS20) à travers l’activation de la voie ATR/CHK1 (Bode et Dong, 2004) et via la kinase HipK2 qui va phosphoryler la Sérine 46 de la protéine P53 (Hofmann et al., 2002). Ces phosphorylations sont importantes pour l’activation transcriptionnelle des protéines pro apoptotiques telles que PUMA (P53 Up regulated Modulator of Apoptosis) ou Noxa. La protéine P53 peut également agir en dehors du noyau pour activer l’apoptose directement en stimulant la mitochondrie via les protéines Bax et Bak (Chipuk et al., 2004). La protéine P53 est un régulateur central dans l’induction de la mort cellulaire par apoptose induite par la présence de DSBs non réparées dans les cellules cancéreuses. Cependant, le gène TP53 est fréquemment muté dans de nombreux cancers (Freed-pastor et Prives, 2012).

Un autre exemple d’inactivation de gène suppresseur de tumeur est celui du gène

HIC1 (Hypermethylated In Cancer 1), celui-ci fera l’objet de la dernière partie de ce

manuscrit.

IV/ Le gène suppresseur de tumeur HIC1 (Hypermethylated In

Cancer 1)