• Aucun résultat trouvé

L'écologie fondamentale est l'étude de la diversité des organismes et des interactions entre les organismes et leurs environnements abiotiques et biotiques (Begon et al., 2009). L’un des objectifs principaux est donc d’améliorer les connaissances générales, et même si les résultats peuvent parfois sembler prévisibles, ils ne sont pas toujours certains (Courchamp et al., 2015). Contrairement à l'écologie appliquée qui elle est motivée par des objectifs spécifiques et liés à la résolution de problèmes environnementaux tels que la préservation de la biodiversité (Hastings & Gross, 2012). La curiosité et la compréhension des systèmes complexes par les écologistes sont souvent les moteurs de la recherche fondamentale. L'écologie étant une discipline encore relativement jeune, les connaissances acquises sur le fonctionnement des interactions des espèces ainsi que sur les processus sous-jacents à

103

la biodiversité sont loin d’être approfondies et complètes. De plus, il existe des exemples de progrès dans la compréhension de l'écologie fondamentale qui ont pu à leur tour influencé l’écologie appliquée (Courchamp et al., 2015). Notre utilisation des théories écologiques et d’expériences sur le terrain pour améliorer la compréhension des mécanismes structurant les communautés et la répartition animale après coupe forestière fait donc de cette étude un bel exemple de recherche en écologie fondamentale. De plus, plusieurs implications pour la conservation de la biodiversité peuvent résulter de ma thèse, en particulier en ce qui a trait au chapitre 1.

L'un des principaux objectifs de la gestion durable des écosystèmes est de maintenir la biodiversité tout en maintenant les services économiques (Bengtsson et al., 2000). Les stratégies de gestion écosystémique des forêts tentent de maintenir la biodiversité de l’écosystème en développant des pratiques sylvicoles qui simulent les perturbations naturelles (Gauthier et al., 2010b). Le feu étant la principale perturbation naturelle en forêt boréale (Bouchard et al. 2008), il s’agit donc de la perturbation à imiter. Par exemple, les plans de gestion peuvent impliquer des temps de rotation entre coupe similaires aux cycles de feu pour maintenir la biodiversité (Bergeron et al., 1999). Par conséquent, la coupe totale pourrait avoir sa place au sein d'un régime d'aménagement écosystémique de la forêt boréale. Nous avons observé certaines différences au niveau de la composition des communautés à la suite d’une coupe dans le chapitre 1, mais ces différences observées chez les coléoptères vont peu à peu disparaître durant les 30 premières années de croissance de la forêt. Certaines recommandations de gestion forestière (Bichet et al., 2016) impliquent que des cycles de rotation aussi cours que 50-60 ans pourraient être envisagés. Notre étude indique que de telles rotations pourraient ne pas avoir d’impacts importants sur les assemblages d’espèces pour certains groupes taxinomiques. Des études sur d’autres groupes taxinomiques seraient toutefois nécessaires avant de pouvoir tirer des conclusions générales quant à l’impact des cycles de rotation de coupe sur la biodiversité boréale. Nos résultats du chapitre 1 indiquent que les assemblages d’espèces animales en début de succession sont largement composés de populations résiduelles des forêts matures. De plus, la colonisation aléatoire peut jouer un rôle important dans l’apport

104

d’individus après perturbations (Walker & del Moral, 2003), notamment après coupe (Saint-Germain et al., 2005). Notre étude a montré l’importance que peuvent avoir les individus provenant des peuplements adjacents à travers la dispersion aléatoire puisque les processus stochastiques jouent un rôle fondamental dans la structuration des communautés. Cependant, une fois les espèces installées, il faut qu’elles puissent persister et se reproduire. Par ailleurs, nous avons également démontré l’existence d’une forte relation entre les espèces de coléoptères et les espèces d’arbres dominantes dans le peuplement. Ceci peut s’expliquer par une préférence pour les mêmes espèces d'arbres, comme l'épinette noire ou le sapin baumier (Janssen et al., 2011). Le chapitre 3 nous a également permis de noter l’importance de la couverture de canopée dans le peuplement pour le campagnol à dos roux, et de souligner le rôle essentiel joué par le bois mort durant ses déplacements à l’intérieur de son habitat. Notre étude indique donc que la foresterie devrait prendre en compte la composition et la structure dans les peuplements après coupe (laisser de gros débris ligneux au sol), ainsi que le paysage environnant (garder des parcelles de forêt mature à proximité) pour conserver la biodiversité régionale et avoir une gestion durable de la forêt. Par exemple, laisser de gros débris ligneux en place après coupe devrait permettre au campagnol de se déplacer efficacement durant la succession et possiblement favoriser la colonisation en début de succession. L'influence des caractéristiques du paysage devrait être particulièrement pertinente pour la conservation des espèces de coléoptères volantes (Janssen et al., 2009).

Le chapitre 2 démontre l’intérêt de l’utilisation des comportements de sélection d’habitat et d’alimentation comme indicateurs d’interactions entre espèces pour mieux comprendre les effets des perturbations anthropiques sur la faune, et ultimement améliorer les stratégies de conservation (Morris et al., 2009). En identifiant les mécanismes biologiques influençant la répartition d’une espèce durant la succession après perturbation anthropique, il est plus facile de prendre des mesures de gestions adéquates. Par exemple, pour limiter les impacts de la coupe sur le campagnol à dos roux en début de succession, il faudrait limiter les effets négatifs de la compétition apparente avec la souris. L’utilisation des coupes partielles pourrait être une approche de gestion efficace pour limiter les impacts négatifs sur la faune plus typique des

105

vieilles forêts par rapport aux coupes plus intensives (Vanderwel et al., 2007). En utilisant les coupes partielles, on pourrait ainsi limiter la surface dans les parterres de coupe où les souris sont plus efficaces dans l’utilisation des ressources et où les campagnols sont potentiellement plus sensibles aux prédateurs aviaires.

Documents relatifs