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IMPLICATION DES JASMONATES DANS L’ACCLIMATATION AUX STRESS MECANIQUES

Les voies de signalisation impliquant l’acide jasmonique jouent un rôle central dans l’intégration et la coordination de la majorité de réponses de plantes aux stress (Bruce et al., 2007). Les jasmonates (JAs) ont des rôles dans le développement (croissance, partition de carbone, sénescence, reproduction…) et dans la régulation de la réponse aux stress (Browse et Howe, 2008). Les attaques des pathogènes et la blessure causée par les insectes herbivores induisent leur biosynthèse et donc, après leur perception par les cellules des plantes, ces dernières activent divers mécanismes de défense par l’intermédiaire de la reprogrammation de l’expression des gènes (Pauwels et al., 2008).

2.1- Voie de biosynthèse et de régulation de la biosynthèse des jasmonates

La biosynthèse de l’acide jasmonique débute quand les lipases libèrent l’acide linolénique (C18:3) des membranes plastidiales (fig.8) (Galis et al., 2009). La lipoxygénase (LOX), étant responsable de la production des précurseurs des jasmonates à partir des acides gras polyinsaturés libres (Chehab et al., 2009), catalyse la première étape dans la biosynthèse de l’acide jasmonique (Galis et al., 2009). A l’aide des enzymes allène oxyde synthase (AOS) et allène oxyde cyclase (AOC), les enzymes LOX transforment C18:3 en oxo-phytodienoic acid (OPDA). L’OPDA est transformé en JA (acide jasmonique) à l’aide d’OPDA réductase (OPR) et d’une série de β-oxydations dans les peroxysomes (Galis et al., 2009). Le JA est sujet à de plusieurs transformations enzymatiques pour générer une série de dérivés qui diffèrent dans leur activité biologique (Browse et Howe, 2008). L’OPDA estérifié et le dn- OPDA (dinor-OPDA) sont créés probablement au niveau de la voie des galactolipides. Les ligases JAR occupent la place finale dans l’activation de JA : la formation du conjugué jasmonyl-isoleucine (JA-Ile) (Galis et al., 2009). D’autres modifications de JA incluent la conjugaison en sucres, en ACC (amino-cyclopropane carboxylic acid) et en MeJA (methyl jasmonate) (Galis et al., 2009) qui est l’un des composés organiques volatiles impliqués dans la défense par signalisation aérienne (Kessler et al., 2006).

Figure 9 : Modèle de signalisation de JA en réponse à une attaque herbivore (Browse et Howe, 2008).

(A) Un faible niveau intracellulaire de JA-Ile (étoiles vertes) favorise l’accumulation des protéines JAZ qui répriment l’activité de MYC2 qui régule positivement les gènes de réponses aux jasmonates. (B) La blessure du tissu causée par les insectes herbivores induit une accumulation rapide de JA actif qui déclenche une ubiquitination de JAZ via le complexe SCFCOI1 ce qui entraine sa dégradation via le protéasome 26S. Cette élimination des protéines JAZ induit l’activité de MYC2 et donc l’expression des gènes de réponse précoces.

JA-Ile est fortement active à promouvoir l’interaction entre la CORONATINE INSENSITIVE (COI1), une protéine de type F-box impliquée dans la voie de protéolyse par le protéasome via l’ubiquitine et JAZ (jasmonate ZIM-domain) d’une manière dose- dépendante. Ainsi, en présence de JA-Ile, COI1 se fixe aux protéines JAZ induisant leur dégradation spécifique par le protéasome 26S (Thines et al., 2007), libérant ainsi MYC2 (un facteur de transcription de type bHLHzip) (fig.9). Or MYC2 agit comme activateur et répresseur de l’expression de divers gènes de réponse au JA (Lorenzo et al., 2004). Par ailleurs, les transcrits de JAZ s’accumulent d’une façon dépendante à MYC2. En effet, les gènes JAZ, inductibles par les jasmonates, sont constitutivement surexprimés chez des plantes non traitées surexprimant MYC2 et moins exprimés chez des mutants myc2 traités. Ceci montre que MYC2, bien qu’il soit réprimé par JAZ, effectue un rétrocontrôle positif sur JAZ (Chini et al., 2007) et régule négativement sa propre expression (Dombrecht et al., 2007).

De plus, Chini et al. (2007) a montré que l’activation des réponses aux jasmonates est régulée par un mécanisme de type rétrocontrôle négatif impliquant les protéines MYC2 et JAZ. Ceci pourrait donner une explication au pic de JA obtenu et suivi, ensuite, par une période de désensibilisation des cellules aux jasmonates (fig.7). En effet, l’hormone, en se fixant à son récepteur induit une dégradation des protéines JAZ via le protéasome libérant ainsi MYC2 et permettant l’activation de la transcription des jasmonates. Par la suite, puisque les gènes JAZ sont des cibles de MYC2, leur expression rapide induite par ce facteur de transcription contribue à l’auto-répression de MYC2 (Chini et al., 2007). Ainsi, dans notre projet de recherche, l’étude de l’expression des deux gènes MYC2 et JAZ, après divers traitements, sera très intéressante.

2.2- Impact des jasmonates dans les réponses aux sollicitations mécaniques

Les jasmonates (JAs) sont impliquées dans les réponses thigmomorphogénétiques chez les plantes suite à des stimulations mécaniques. Tretner et al. (2008) ont montré que la stimulation mécanique (par le toucher) des plants de Medicago truncatula engendre la production transitoire d’un fort niveau de jasmonates dans les racines et les tiges. Ces plants sont devenus plus riches en chlorophylle avec des racines plus courtes et une biomasse plus importante. De plus, les racines mécaniquement perturbées ont montré une plus faible élongation couplée avec une augmentation du JA. Ces modifications thigmomorphogénétiques représentent un phénotype similaire à celui observé chez des mutants cev1 d’Arabidopsis qui produisent constitutivement des niveaux élevés de jasmonates

Ainsi, suite aux stimulations mécaniques, les jasmonates peuvent jouer un rôle dans la voie de transduction relative à la thigmomorphogenèse (Chehab et al., 2009).

Par ailleurs, chez Arabidopsis, un nombre de facteurs de transcription de type C2H2 sont induits par le MeJA. Ces protéines à doigt de zinc de type C2H2 : ZAT10 et AZF2, qui contiennent un domaine de répression (ERF-associated amphiphilic) et qui fonctionnent comme des répresseurs transcriptionnels (et qui sont homologues de PtaZFP2), peuvent se fixer sur le promoteur de LOX3, codant la première enzyme de la voie de biosynthèse des jasmonates (Pauwels et al., 2008). De plus, la stimulation par le toucher, le vent ou la blessure cause une augmentation dose dépendante de la quantité de transcrits de la lipoxigénase (LOX) chez des plants de blé (Triticum aestivum L.). Cette réponse a été transitoire et a eu lieu après 1 heure de traitement (Mauch et al., 1997).

Concernant le gène AOC, il possède aussi un rôle crucial dans la synthèse de jasmonates en catalysant une étape régulatrice dans cette voie (Tretner et al., 2008). Pour OPR, Pauwels et al. ont montré que les OPDA réductases OPR2 et OPR3 sont régulés positivement et rapidement suite à un traitement avec le MeJA chez Arabidopsis. Chez le maïs aussi, le niveau de transcrits d’OPR1/2, OPR5 et OPR8 a augmenté après exposition au cis-3-hexenyl acétate qui induit des réponses de type ‘endurcissement’ chez cette espèce (Galis et al., 2009). De plus, la production systémique de JA-Ile induite par la blessure nécessite OPR3 et a été montré comme étant largement dépendante de l’activité de JAR1 vu que la conjugaison de JA en JA-Ile nécessite cette enzyme (Koo et al., 2009). Ainsi, les gènes AOC, OPR et JAR seront intéressants à étudier.

Tous ces résultats nous ont donc amené à étudier l’expression des gènes de biosynthèse de JAs en réponse à des stimulations mécaniques dans le but de mieux comprendre le phénomène d’acclimatation des plantes au stress mécanique.

Afin d’étudier l’implication des jasmonates dans la réponse aux sollicitations mécaniques, nous avons ciblé des gènes clefs de la voie de biosynthèse et de régulation des jasmonates et qui sont : LOX3, AOC, OPR, JAR, JAZ et MYC2.