CHAPITRE 3: PROCESSUS DE TRANSFORMATION POSTSOCIALISTE: MISE EN
3.3 Analyse du processus de privatisation
3.3.3 Impact de la structure de propriété sur la performance des
Nous nous intéressons dans cette section à la manière de mesurer la
performance des entreprises. Il existe différents types d’études comme nous
allons expliquer ici. Procéder à cette distinction permet d’approfondir l’analyse
sur la performance des entreprises. A titre d’exemple, les études quantitatives et
qualitatives n’aboutissent pas aux mêmes résultats par exemple.
La littérature suggère que la privatisation a des effets différents en fonction des
« types de privatisation » et des actions des nouveaux propriétaires. Mais la
littérature traitant de l'économie de marché ne dit rien sur la meilleure forme de
propriété pour avoir une restructuration optimale. Coase (1988) et Demsetz et
Lehn (1985) expliquent qu’il n’existe pas de relation entre type de propriété et
restructuration. Selon ces auteurs, l’entreprise choisit la forme de propriété qui
minimise les coûts de transaction, de sorte que les types de propriété sont
déterminés de façon endogène dans une économie de marché, alors que dans les
économies en transition, la propriété est déterminée de façon exogène,
puisqu’elle est déterminée par des processus politiques et administratifs.
De nombreux auteurs ont cherché à expliquer pourquoi les firmes privatisées
ont des résultats décevants après restructuration. Ils ont donc évalué l’impact de
la structure de propriété sur l’efficacité des firmes. Deux types d’études vont être
menés:
1. les études qui comparent la performance des entreprises avant et après
leur privatisation ;
2. les études qui cherchent à évaluer la performance des entreprises, dans
un même environnement et un même marché ; les auteurs cherchent dans
ce cas à comparer les entreprises publiques et les entreprises privées.
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Par ailleurs, la performance des entreprises est mesurée soit à partir
d’indicateurs quantitatifs, soit à partir d’indicateurs qualitatifs. Earle (1998)
mesure la performance des entreprises en utilisant des données comptables
donc quantitatives, puisqu’il mesure la performance par la prévision de ventes
de l’année étudiée. Carlin et al. (2001) utilisent plutôt des informations
qualitatives sur la réorganisation de l’entreprise, c’est-à-dire des données sur
l’introduction de nouveaux produits. Les variables quantitatives sont plus
utilisées par les auteurs, car elles reflètent plus directement le niveau de
performance des entreprises, qui révèlent le degré de restructuration.
Une des premières analyses menées sur ces questions est celle de Djankov et
Murrell (2000). Ils réalisent un survey de la littérature. Ils suggèrent que la
privatisation a une incidence positive sur l’amélioration de la performance
autant qualitative que quantitative des entreprises postsocialistes. Ils montrent
aussi que les outsiders (représentés par des étrangers à l’entreprise privatisée,
comme des investisseurs étrangers ou des fonds d’investissements) vont
procéder à plus de restructurations qu’en cas de reprise de l’entreprise par des
insiders (salariés de l’entreprise devenus propriétaires). Ils expliquent aussi que
les résultats diffèrent en fonction des PECO et que nous ne pouvons pas trouver
un consensus dans les résultats.
Frydman et al. (1999) réalisent une étude sur 218 entreprises privées et
publiques en Hongrie, en Pologne et en République tchèque entre 1990 et 1993.
Pour mesurer la performance des entreprises ils tiennent compte du chiffre
d’affaires, de l’emploi, de la productivité du travail et du coût unitaire de
production. Les auteurs cherchent à mesurer l’impact de la privatisation sur les
performances des entreprises. Ils arrivent à montrer que globalement dans les
trois pays, la performance des entreprises est améliorée, même si des disparités
existent en fonction des critères observés. La privatisation a un effet meilleur sur
le chiffre d’affaires et elle est plus efficace, d’après les auteurs, dans le cas où les
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entreprises sont dominées par les outsiders, c’est-à-dire des étrangers à
l’entreprise.
Anderson et al. (2000) s’intéressent à 211 entreprises privées et publiques en
Mongolie en 1995. Les auteurs se sont intéressés à la transition mongole et ont
buté sur un manque de données disponibles pour évaluer la performance des
entreprises du pays. Ils vont donc se concentrer sur la performance sur une
année en évaluant le PTF. Les auteurs retiennent, pour mesurer la performance
des entreprises, la valeur ajoutée et le chiffre d’affaires par travailleur. Ils
montrent que la Mongolie est spécifique pour son manque d’institutions
formelles de marché. Ils trouvent que les firmes privées dominées par des
insiders (donc par les salariés des entreprises) sont plus efficaces que celles
dominées par les outsiders. Nous retrouvons le même résultat dans l’étude
menée par Čapek et Mertlik (1996) en République tchèque.
Par ailleurs,Carlin et al. (2001) utilisent des variables différentes, puisqu’ils vont
quant à eux utiliser des données provenant d’une enquête menée sur 3000
entreprises de 25 pays. Les auteurs trouvent que la privatisation n’a pas
directement eu d’effet sur la productivité des entreprises ou la croissance des
ventes, mais ils trouvent qu’elle a eu un effet significatif sur l’adaptation du bien
vendu au marché. La modernisation des produits va avoir un effet plus direct sur
les ventes et la croissance de la productivité. La privatisation des entreprises
aura donc un effet indirect sur les performances des entreprises.
Anderson et al. (2000)trouvent que la propriété privée a un impact positif sur la
performance des entreprises et par conséquent sur la restructuration quand les
différents propriétaires d’une entreprise ont un pouvoir décisionnel dans un
conseil d’administration. Il en est de même pour Claessens et Djankov (1999)
dans leur étude sur la République tchèque. L'analyse a été faite sur 706
entreprises tchèques et les résultats montrent que lorsque la propriété est
concentrée, alors nous assistons à une hausse de la rentabilité de l'entreprise et
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une plus grande productivité du travail. De leur côté, Weiss et Nikitin (1998) ne
trouvent qu’un faible lien entre cette concentration de la propriété et la
performance des entreprises privatisées. Ils suggèrent que c’est plutôt le type de
propriétaire (étrangers, fonds d’investissements, banques, etc.) qui va avoir un
impact positif sur la performance. Claessens et Djankov (1999)ainsi que Weiss
et Nikitin (1998) se rejoignent sur le fait que la mauvaise performance de
nombreuses entreprises privatisées est due à l’existence de propriétaires
possédant un certain pouvoir [décisionnel/stratégique] au sein de l’entreprise,
mais qui ont des stratégies de court terme.
Il n’y a donc pas d’unanimité quant aux réformes à mener pour une
restructuration efficiente des entreprises postsocialistes. Un consensus existe
cependant sur les points suivants (Djankov et Murrell, 2000):
1. les marchés et la concurrence prennent de plus en plus d’importance ;
2. l’entreprise est devenue plus proche du consommateur ;
3. les entreprises sont davantage à l’abri de faillites causées par des budgets
trop contraignants (rappelons que sous le régime socialiste, les
entreprises subissent des contraintes trop restrictives qui leur laissent
que très peu de marge de manœuvre).
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Dans le document
L'impact des investissements directs étrangers (IDE) sur la dynamique industrielle de la République tchèque
(Page 67-71)