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Impact de l’essor de la chimie biosourcée sur la production de bioénergies

compte des externalités des biocarburants

4. Impact de l’essor de la chimie biosourcée sur la production de bioénergies

Les principales hypothèses sous-jacentes à la réalisation du scénario sont les suivantes :  Scénarios tendanciels de disponibilités des ressources agricoles et forestières ;

 Pas d’importations de commodités, afin de ne considérer que les ressources métropolitaines potentiellement disponibles ;

 Les coûts des procédés de production de biocarburants avancés sont divisés par deux en 30 ans pour rendre compte des courbes d’apprentissage de ces technologies non encore matures.

Figure 5.14 : Évolution de la production totale de bioénergie en fonction de l'essor de la chimie biosourcée

En 2050, dans le cas d’un scénario où le taux de croissance de la production des grands intermédiaires chimiques est de 0,5 %, sous le jeu d’hypothèses de gain de part de marché des produits biosourcés présentés au paragraphe 3.2, la production finale de bioénergie serait diminuée de 14 %. Si le taux de croissance est de 2 %, la compétition sur les ressources entraînerait une diminution de 24 %.

Les procédés mis en jeu sont aussi modifiés : la production accrue d’éthanol pour répondre aux demandes en éthylène et propylène implique le recours à la gazéification de biomasse lignocellulosique car les disponibilités en betterave sucrière ne sont pas suffisantes. La diminution de la demande en biocarburants entraîne une disponibilité accrue d’huile de colza, qui est valorisée en biocarburéacteur par hydrotraitement. Enfin, pour la production de chaleur et d’électricité, la forte demande en produits chimiques biosourcés entraîne un recours accru au cycle combiné à gazéification intégrée de la biomasse au détriment de la technologie lit fluidisé circulant et turbine à condensation. La meilleure efficacité globale de la première permet de mieux valoriser la quantité plus faible de biomasse lignocellulosique.

193 Pour compléter cette étude prospective et être en cohérence avec le chapitre 4, on se pose maintenant la question de l’influence de l’essor de la chimie du végétal dans le cas où le contexte réglementaire des biocarburants serait celui retenu par le parlement européen : c’est-à-dire avec mise en place d’un plafond d’incorporation pour les biocarburants de première génération de 7 %PCI et avec mise en place du comptage double et quadruple en fonction de la nature de la biomasse pour les biocarburants avancés.

Figure 5.15 : Évolution des productions de bioénergie selon le contexte réglementaire pour le scénario de développement modéré de la demande en produits biosourcés

La figure 5.15 présente les évolutions de la production finale de bioénergie en fonction des deux contextes réglementaires retenus : actuel et futur pour un taux de croissance de la production française des produits chimiques de 0,5 %. On constate que le changement de contexte réglementaire permet une plus grande production de bioénergies, de l’ordre de 13 % en 2020, puis de 5 % et de 7 % en 2050.

En 2020, cette différence est essentiellement due à la comptabilité distincte des biocarburants avancés. Dans le scénario contexte réglementaire futur, la quantité de biocarburants effectivement produite est moindre, ce qui permet au final de produire plus d’énergie avec les mêmes ressources. Après 2020, où le comptage multiple n’est plus implémenté, la différence est due à la structure des consommations en bioénergie. La production de biocarburants est réduite au profit de la production de biochaleur, comme le montre la figure 5.16, du fait du plafond d’incorporation de biocarburants 1G. Or l’efficacité énergétique de la production de biochaleur est nettement supérieure à celle de production de biocarburants, notamment ceux de deuxième génération.

Figure 5.16 : Consommation de biochaleur (à gauche) et de biocarburants (à droite) pour les scénarios de contexte réglementaire actuel et futur.

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Conclusions

Bien qu’il soit le secteur le plus ancien de la chimie, le secteur de la chimie biosourcée est encore très porteur et pèse de 10 à 15 milliards de dollars au niveau mondial. En France, l’Union des Industries Chimiques s’est engagée à utiliser des matières premières d’origine végétale dans 15 % de sa production d’ici 2017. Des études récentes ont confirmé le potentiel de ce secteur. C’est notamment le cas de l’étude du PIPAME qui estime qu’en 2030, 100 % du carbone utilisé pour la chimie pourrait être du carbone renouvelable.

Nous nous sommes servis d’une approche similaire à celle de l’étude PIPAME pour implémenter le secteur de la chimie biosourcée dans le modèle bioénergies. En effet, plutôt que de modéliser chacun des procédés de production des nombreux produits chimiques biosourcés prometteurs, nous avons considéré les sept intermédiaires chimiques majeurs – ou building blocks – de la chimie conventionnelle. Leurs procédés de production biosourcés ont été implémentés dans le modèle et des scénarios de demande ont été construits sur la base de leurs productions en France en 2010. Ils sont construits en deux temps : projection de la demande totale (en produits conventionnels + biosourcés) jusqu’en 2050 selon deux taux de croissance – 0,5 % et 2 % – et définition d’un taux d’incorporation de produits biosourcés fonction du temps. Pour chaque année et pour chaque intermédiaire chimique, le produit du taux d’incorporation et de la demande nous donne la quantité de produits biosourcés à produire. Ces demandes en produits chimiques biosourcés, dont les procédés de production ont des coûts nuls, sont produits en priorité, conformément à la hiérarchisation des usages privilégiée par les législateurs français et européen.

L’impact sur le secteur des bioénergies est étudié en ne s’intéressant qu’aux ressources métropolitaines (les importations sont interdites) pour les deux scénarios de développement. On constate que l’essor de la chimie biosourcée pourrait avoir un impact significatif sur le potentiel de développement des bioénergies, avec une diminution de la production de 14 % à 24 % en 2050. La compétition sur les usages se traduit aussi par un changement du mix énergétique. La production d’éthanol de première génération est ainsi prioritairement allouée à la production d’éthylène et de propylène. La différence pour atteindre les objectifs en bioessence est compensée par le recours à du BtL. Pour l’électricité, l’utilisation de cycle combiné à gazéification intégrée de biomasse, dont le rendement est le plus élevé, permet de compenser une partie de la diminution de la ressource. Enfin, l’essor de la chimie biosourcée, avec le contexte réglementaire sur les biocarburants préconisé par le parlement européen, entrainerait une augmentation de la production de chaleur mais une diminution de la production de biocarburants.

Ce chapitre a permis d’étudier le cas concret de l’intégration d’un secteur non énergétique dans un modèle TIMES. C’est une preuve supplémentaire de la flexibilité de cette approche, qui permet de prendre aussi bien en compte les enjeux environnementaux, réglementaires et de concurrence des usages. Le chapitre suivant présentera une étude de type Monte Carlo qui tâche de prendre en compte l’ensemble des enjeux présentés précédemment.

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Chapitre 6 : Contributions de la méthode

Monte Carlo à la réflexion prospective –