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leurs enjeux – Filières d’aujourd’hui et systèmes techniques de demain

C ONCLUSIONS B IBLIOGRAPHIE

1. Les filières biomasse pour l’énergie aujourd’hu

1.3 La filière bois

À l’heure actuelle, le bois est une ressource qui a de nombreux usages, comme le bois d’œuvre pour la construction et le mobilier, ou le bois industrie pour le papier ou les panneaux-bois. Ainsi, la biomasse compte pour 5 % dans l’approvisionnement de la chimie et des nouveaux matériaux composites, 10 % des matériaux de construction, 20 % des emballages et 100 % des supports d’impression. La chaîne de valeur du bois se décompose en l’étape de scierie qui permet de produire

31 du bois d’œuvre et des produits connexes de scierie. Ceux-ci (plaquettes forestières, sciures, écorces, dosses et délignures, chutes) peuvent être ensuite valorisés par l’industrie de la trituration – ou « bois-fibre » – ou à des fins énergétiques. Les bois qui ne peuvent être sciés et les rémanents forestiers peuvent soit être triturés, soit être valorisés énergétiquement. (CGAAER, 2011)

Exploitation de la forêt française

L’organisation de la filière bois a depuis longtemps été stratégique pour la société. Dès le Moyen- Âge, les pouvoirs publics ont cherché à rationaliser l’utilisation du bois, en en réservant une partie pour la construction terrestre ou navale, par exemple. Les surfaces de forêts ont ainsi fortement fluctué au cours du temps. Les défrichages du moyen-âge, pour agrandir les zones de culture et de pâtures ainsi que le développement d’une industrie basée sur le bois (métallurgie, verre, céramique, etc.), ont progressivement fait passer la surface de forêt française de plus de 30 Mha à moins de 10 Mha avant la mise en place du code forestier en 1827. Les forêts françaises ont depuis retrouvé leur vitalité et couvrent à l’heure actuelle près de 15 Mha, soit 30 % de la superficie du pays. (CGAAER, 2011)

Pour l’État, la forêt française a plusieurs enjeux stratégiques, comme le rappelle le rapport de Jean Puech pour la mise en valeur de la forêt française et du développement de la filière bois. Premièrement, le bois est une ressource dont tout le potentiel n’est pas valorisé. Il stocke durablement le carbone et c’est une source d’énergie renouvelable, à condition d’être gérée rationnellement. Il répond donc à la fois aux exigences de Kyoto, de l’UE et du Grenelle de l’Environnement. La filière bois souffre pourtant d’une balance commerciale déficitaire de près de 7 milliards d’euros. En effet, malgré un équilibre en volume, il existe un fort différentiel de valeurs : import de bois d’ameublement, produit transformé donc cher, et export de grumes et billons, produits bruts, bon marché. En outre, les tentatives politiques de mobilisation accrue de l’accroissement forestier annuel et un prélèvement progressif de volume bois sur pied excédentaire n’ont pas porté leurs fruits. (Puech, 2009)

La forêt française métropolitaine fait vivre près de 450 000 personnes, emplois directs et associés. Elle est constituée de 41 % de chênes, de 22 % d’autres feuillus (hêtre, châtaigner, charme, etc.) et de 37 % de résineux. Elle est divisée en une forêt publique, de près d’un quart de la surface forestière métropolitaine, et d’une forêt privée. (Puech, 2009)

La forêt publique est divisée en forêts communales et domaniales, qui sont gérées par un organisme unique : l’ONF (Office National Forestier). Il s’agit d’un Établissement Public à caractère Industriel et Commercial (EPIC) qui « gère convenablement ses [4,6 millions d’hectares de] forêts » selon le rapport Puech.

La forêt privée est très morcelée et est donc compliquée à exploiter (3,5 millions de propriétaires pour 10,6 Mha). En dessous de 4 hectares, la rentabilité de la gestion sylvicole n’est plus du tout assurée, or 20 % de la forêt privée est constituée de bois de moins de 4 ha possédés par 3 millions de propriétaires (qui ne savent pas toujours qu’ils possèdent un actif forestier). Ces petites propriétés constituent de plus des entraves à la bonne exploitation des propriétés voisines. (Puech, 2009) Les forêts privées sont gérées par des organismes professionnels regroupées en trois établissements (CNPF, Forestiers privés de France et l’Union de la coopération forestière française) et qui communiquent sous une marque commune : Forêt Privée Française.

32 Les produits de l’exploitation forestière alimentent en aval les industries du sciage (bois d’œuvre), de la trituration (bois industrie) et de l’énergie (bois énergie).

Bois d’œuvre et bois industrie

Premier maillon de la chaîne de transformation, le secteur du sciage représente 4500 entreprises, de tailles très variables : 80 % des sciages sont réalisés par 20 % des scieries et seulement une centaine de scieries peuvent prétendre rivaliser sur les marchés internationaux. Le secteur de la construction est le débouché numéro un, avec 65 % des sciages et 40 % des panneaux. Sa structure a évolué sous l’impulsion de l’accord cadre interprofessionnel et interministériel « Bois Construction et Environnement » de 2001 et l’avènement des réglementations thermiques dans le bâtiment. (CGAAER, 2011) La structure de la forêt française ne permet néanmoins pas de produire suffisamment de résineux et trop de feuillus. Le secteur du sciage recourt donc aux importations. Le rapport Puech recommande ainsi de ne pas calquer le modèle français à celui des pays scandinaves ou à l’Allemagne.

Seconde « armature essentielle » de la filière, le secteur de la trituration ou du « bois-fibre » comprend 10 usines de pâtes et 23 usines de panneaux. Il transforme 15 Mt de bois par an, dont 60 % de rondins provenant de l’exploitation forestière et 40 % de produits connexes de scierie, et consomme en outre 5 Mt/an de papiers issus du recyclage. Ses débouchés sont les marchés de la construction (panneaux), de l’emballage (papiers et cartons) et du l’impression (papier) et ses principaux acteurs sont de grands groupes industriels mondiaux (International Paper, UPM, Stora Enso, etc.). (CGAAER, 2011)

Bois-énergie

Le secteur du chauffage au bois domestique, de la fabrication à l’installation des appareils, emploie environ 14 000 personnes en France. Son chiffre d’affaires s’élève à 2 milliards d’euros. De nombreux acteurs français sont positionnés sur l’ensemble des

activités, de la conception à l’installation. Les ventes d’appareils de chauffage au bois domestique (poêles, inserts, chaudières et cuisinières) avoisinent les 500 000 unités par an, après avoir fortement décru jusqu’au début des années 2000. La part de marché des poêles à bois a fortement progressé au détriment des inserts et des foyers, comme le montre la figure 1.7.

Les performances varient fortement entre les appareils traditionnels – à l’efficacité comprise entre 10 et 30 % – et les installations modernes, dont l’efficacité peut atteindre 90 % (Lako, Simbolotti, 2010). En France, le label Flamme Verte garantit un rendement minimum de 70 % pour les poêles, inserts et chaudières et supérieurs à 80 % pour les chaudières manuelles et automatiques.

Figure 1.7 : Évolution des ventes d’appareils de chauffage au bois domestique (Syndicat des énergies renouvelables, 2012)

33 Pour les usages collectif/tertiaire/industriel, nécessitant des puissances comprises entre 200 kW et 20 MW, les chaudières à grille présentent le meilleur compromis coût-efficacité (IEA Bioenergy, 2009). Les chaudières à grille à marches sont couramment utilisées dans les unités d’incinération des ordures ménagères (UIOM), les chaudières à alimentation dispersée sont dérivées de centrales à charbon et sont notamment utilisées pour valoriser la bagasse, résidu de broyage de la canne à sucre.

Disponibles depuis les années 1970, les technologies à lit fluidisé – suspension de particules inertes et de combustible finement broyé dans de l’air chaud – ont des coûts d’investissement et de fonctionnement plus élevés. Seules des unités de grande taille, de capacité supérieure à 30 MW, sont envisagées pour bénéficier d’économies d’échelle suffisantes. Elles présentent des efficacités supérieures aux chaudières et peuvent être alimentées avec de la biomasse plus humide. (Lako, Simbolotti, 2010)

Les caractéristiques du combustible ont de plus nécessité la mise au point de systèmes de stockage permettant d’éviter l’inflammation spontanée due à l’auto-échauffement, des systèmes d’alimentation permettant de pallier le faible PCI et les taux d’humidité et d’inorganiques parfois élevés. Des exemples de ces différentes technologies sont présentés figure 1.8, figure 1.9 et figure 1.10.

Les acteurs de la chaleur et de l’électricité sont des collectivités locales, qui mettent en place leurs propres réseaux de chaleur ou qui sous-traitent à des ESCOs (Energy Service Companies), comme Dalkia ou Cofely. Pour le bois-énergie individuel, les acteurs sont des installateurs.

La production d’électricité à partir de biomasse se fait en couplant une turbine à vapeur ou un moteur en sortie du dispositif de combustion. Là encore, l’efficacité varie notablement selon le type d’unité considérée. Pour des unités de capacité inférieure à 1 MWe, l’efficacité électrique est de l’ordre de 10 %. Elle peut atteindre 40 % pour les unités à lit fluidisé circulant couplé à une turbine à vapeur de capacité supérieure à 50 MWe (IEA Bioenergy, 2009). Cette technologie permet en effet d’atteindre des températures et des pressions plus élevées. En France, du fait de la tension sur la ressource bois et des nombreux usages existants, les usages privilégiés sont la chaleur et la cogénération, c’est-à-dire la production simultanée de chaleur et d’électricité. Cette voie présente en effet une plus grande efficacité énergétique, de 80 à 90 % quand il y a une bonne adéquation pour les besoins en chaleur (Jean-Claude Lenoir, Alain Liébard, 2008).

D’après la figure 1.11, la puissance installée et la production électrique des centrales à biomasse augmentent depuis 2009. Le taux d’utilisation de la puissance électrique, ou facteur de charge, augmente aussi au cours du temps et se situe autour de 20 %. Cette valeur peut paraître faible pour un moyen de production qui bénéficie d’un accès garanti au réseau. Une raison évoquée est que ce sont majoritairement des installations de cogénération qui doivent moduler leur production électrique en fonction des besoins chaleur. (Syndicat des énergies renouvelables, 2012)

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Figure 1.8 : De gauche à droite : insert, poêle et chaudière « fourneau » à usages domestiques (Syndicat des énergies renouvelables, 2012)

Grille à marches (ou step grate) Alimentation dispersée (ou spreader stoker)

Figure 1.9 : Exemples de chaudières à grille (Bioénergie International, 2014)

Lit fluidisé et périphériques les plus courants Lit fluidisé circulant

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Figure 1.11 : Évolution de la production électrique, des capacités installées et du taux d'utilisation des centrales au bois- énergie (EUROSTAT, 2014)

Une autre option envisageable est la co-combustion de biomasse dans des centrales fonctionnant au charbon. À notre connaissance, elle n’est pas encore employée en France. Cependant, la tranche de 150 MW de la centrale de Gardanne (E.ON) fonctionnant initialement au charbon est en cours d’adaptation pour recourir majoritairement à la biomasse. La co-combustion est par contre pratiquée dans d’autres pays européens, et est donc réalisable techniquement, moyennant des adaptations du train d’approvisionnement, des conditions de combustion et du traitement des fumées. La torréfaction de la biomasse, traitement thermique anaérobie, pourrait de plus permettre de rapprocher les caractéristiques physico-chimiques de la biomasse de celles du charbon (PCI, taux d’humidité, broyabilité) et faciliter son incorporation dans des centrales existantes.