• Aucun résultat trouvé

E.3 Impact des adjuvants sur la croissance du C-S-H

Partie 2 : Mécanisme de retard d’hydratation

V. E.3 Impact des adjuvants sur la croissance du C-S-H

L’éther de cellulose a une influence considérable sur la croissance du C-S-H (figure 86). L’impact des éthers de cellulose sur la croissance des C-S-H parallèle ou perpendiculaire à la surface du C3S est examiné. Ces régimes de croissance ont été présentés précédemment

(cf. I.B.1). Pour cette problématique, le point d’inflexion des courbes conductimétriques, correspondant également au point d’inflexion des courbes d’avancement de l’hydratation du C3S en C-S-H, est particulièrement intéressant. Ce point représente le moment où les

premiers îlots de croissance de C-S-H coalescent pour former une couche continue de C-S-H autour du grain de C3S [Nicoleau, 2004; Garrault, 1998]. Dans un premier temps, nous

effectuons l’approximation de négliger la quantité de C-S-H précipitant sur les éthers de cellulose dissout en solution, par rapport à la quantité de C-S-H précipitant à la surface du C3S (ce point pourra faire l’objet d’une étude ultérieure). Le cas de l’hydratation du

C3S dans une solution d’hydroxyde de calcium à 20 mM, en présence des adjuvant U2 ou

H1, est étudié (figure 87). Même si les tendances sont exacerbées pour la molécule H1, un comportement commun peut cependant être dégagé :

⊲ Plus la quantité d’éther de cellulose est importante, plus le temps de précipitation de la portlandite (et plus la sursaturation atteinte lors de cette précipitation) est élevée. ⊲ Le point d’inflexion a tendance à survenir plus tardivement en présence d’adjuvant. L’éther de cellulose retarde la formation de la couche continue de C-S-H à la surface du grain de C3S. Plusieurs hypothèses sont alors envisageables : l’adjuvant diminue

le nombre de germes de C-S-H, l’adjuvant gêne la croissance parallèle du C-S-H à la surface du grain de C3S, ou alors l’adjuvant ralentit de façon identique la vitesse

parallèle et la vitesse perpendiculaire de croissance du C-S-H.

⊲ La conductivité au point d’inflexion augmente avec la concentration en polymère. Ce résultat indique que lorsque la couche continue d’hydrate apparaît, cette couche est d’autant plus épaisse que le taux d’adjuvant introduit est important (si la quantité de C-S-H qui précipite sur les éthers de cellulose est négligeable). Cette observation est cohérente avec l’hypothèse d’un changement du mode de croissance de C-S-H (comme le ralentissement de la vitesse de croissance parallèle du C-S-H) et/ou de la diminution du nombre de germes de C-S-H.

Paragraphe V.E : La précipitation du C-S-H

Figure 87 : Hydratation du C3S avec L/S = 100, [Ca(OH)2] = 20 mM et différents P/C (A) et

caractéristiques du point d’inflexion conductimétrique en fonction du rapport P/C (B)

La concentration en hydroxyde de calcium est un paramètre très influent sur la quantité de germes de C-S-H qui précipite initialement ainsi que sur le mode de croissance du C- S-H [Garrault, 1998]. L’effet des polymères H1 et U2 sur l’hydratation du C3S, avec une

concentration initiale en hydroxyde de calcium de 15 mM, est étudiée. Dans ces conditions d’hydratation, la première chose remarquable est le fait que l’éther de cellulose H1 ne retarde pas la précipitation de la portlandite. Au contraire, plus le rapport H1 sur C3S introduit

est important, plus le temps du début de la précipitation de la portlandite est précoce (figure 88). Les résultats reportés sur les figures 87 et 88 sont les plus explicites. D’autres données expérimentales réalisées pour l’hydratation du C3S dans une solution d’hydroxyde

de calcium à 10 mM, ainsi que tous les profils conductimétriques correspondant à l’adjuvant U2, sont détaillés en annexe de ce mémoire (cf. Annexe D paragraphe II).

Figure 88 : Hydratation du C3S avec L/S = 100, [Ca(OH)2] = 15 mM et différents P/C (A) et

Chapitre V : Impact des éthers de cellulose sur l’hydratation des phases cimentaires De prime abord, ce comportement paraît assez surprenant. Cependant, l’ensemble des caractéristiques concernant le mode de croissance du C-S-H, décelées pour l’hydratation à 20 mM, est à nouveau vérifié pour l’hydratation à 15 mM :

⊲ Plus la quantité d’éther de cellulose est importante, plus la sursaturation maximale à atteindre pour la précipitation de la portlandite est élevée.

⊲ L’éther de cellulose retarde la formation de la couche continue de C-S-H à la surface du grain de C3S. En effet, le point d’inflexion apparaît d’autant plus tard que la

quantité d’adjuvant est élevée (si la quantité de C-S-H précipitant sur les éthers de cellulose en solution est négligeable).

⊲ L’accroissement de la conductivité au point d’inflexion augmente avec la teneur en polymère. L’adjuvant pourrait induire un changement du mode de croissance des C- S-H, en ralentissant la vitesse de croissance parallèle du C-S-H à la surface du C3S.

⊲ Enfin, l’hydratation à 15 mM montre un effet des éthers de cellulose sur la perméa- bilité de la couche de C-S-H qui n’était pas observable pour l’hydratation à 20 mM. En présence d’adjuvant, la durée de la période de croissance limitée par la diffusion est d’autant plus courte (et la valeur de la pente durant cette période d’autant plus élevée) que la teneur en adjuvant est importante. Ainsi, l’éther de cellulose semble augmenter la perméabilité aux ions et à l’eau de la couche de C-S-H.

L’ajout d’éther de cellulose a le même effet sur la croissance du C-S-H quelle que soit la concentration en Ca(OH)2. La formation de la couche continue de C-S-H autour du

grain de C3S serait ralentie, car la vitesse de croissance parallèle des C-S-H serait moins

élevée en présence d’adjuvant. En outre, quand cette couche apparaît, elle semble être plus épaisse et plus perméable que la couche de C-S-H formée en absence d’adjuvant. Mais comment expliquer les comportements différents observés sur le retard de la précipitation de la portlandite à 15 et 20 mM ? En fait, le début de précipitation de la portlandite est un marqueur cinétique de l’hydratation des phases silicates qui dépend principalement de la germination-croissance du C-S-H. L’adjuvant ralentit la germination du C-S-H, ce qui tend à retarder le début de la précipitation de la portlandite. Mais le polymère augmente également la perméabilité de la couche du C-S-H, ce qui tend à accélérer le début de la précipitation de la portlandite.

Paragraphe V.E : La précipitation du C-S-H Ainsi, l’éther de cellulose modifie les caractéristiques de germination-croissance du C-S- H qui ont des effets contraires sur la précipitation de la portlandite. Pour l’hydratation du C3S dans une solution de Ca(OH)2à 20 mM, les phénomènes de germination du C-S-H sont

cinétiquement prédominants. Comme l’adjuvant ralentit la germination du C-S-H, le temps de début de la précipitation de la portlandite est retardé dans ces conditions d’hydratation. En revanche, pour l’hydratation du C3S dans une solution de Ca(OH)2 à 15 mM, la période

de diffusion à travers la couche de C-S-H représente une durée bien plus importante que la période de germination du C-S-H. Or, comme l’éther de cellulose diminue la perméabilité de la couche de C-S-H, le début de précipitation de la portlandite intervient plus tôt dans ces conditions d’hydratation. P˚ar conséquent, observer une accélération du début de pré- cipitation de la portlandite en présence d’éther de cellulose ne peut avoir lieu que dans des conditions très particulières d’hydratation, où la germination du C-S-H a un faible poids cinétique comparativement à la durée de la période de croissance limitée par la diffusion. Or, ces conditions ne peuvent pas être satisfaites dans le cas d’une hydratation en pâte de ciment. Ainsi les conditions cinétiques de germination-croissance du C-S-H en pâte de ciment sont très proches de celles obtenues pour l’hydratation en suspension diluée, avec une solution saturée par rapport à la portlandite.

En outre, les éthers de cellulose induisent une augmentation de la valeur de conductivité atteint lors de la précipitation massive de la portlandite (figure 87 A et 88 A). Le degré de sursaturation maximale atteint pour précipiter la portlandite est d’autant plus élevée que la quantité d’éther de cellulose initialement introduite est importante. Or nous avons mis en exergue un faible impact des éthers de cellulose sur la complexation des ions calcium (cf. Chapitre IV). Ainsi l’adsorption spécifique de l’éther de cellulose sur la surface de la portlandite, parfaitement mise en évidence dans la suite de ce mémoire (cf. figure 96 B), est une hypothèse crédible pour expliquer l’influence des adjuvants sur le degré de sursatu- ration nécessaire à la précipitation de la portlandite.

L’étude de l’apparition des points d’inflexion des courbes conductimétriques lors de l’hy- dratation du C3S indique que l’éther de cellulose tend à retarder la formation de la couche

continue de C-S-H autour du grain de C3S, ainsi que de ralentir la croissance du C-S-H

Chapitre V : Impact des éthers de cellulose sur l’hydratation des phases cimentaires