• Aucun résultat trouvé

Partie 2 : Mécanisme de retard d’hydratation

V. F.2 Hydratation en pâte de ciment

Pour vérifier que les résultats obtenus en suspension dans une solution d’hydroxyde de calcium peuvent être extrapolés à l’hydratation en milieu concentré, une étude de l’hydra- tation en pâte de ciment est réalisée. Le principe de cette étude est de réaliser un suivi calorimétrique sur des pâtes de ciment adjuvanté. L’évolution du flux calorimétrique en fonction du temps permet ainsi de distinguer différents événements au cours de l’hydrata- tion caractéristiques de l’action des adjuvants. Des stoppages de l’hydratation en pâte de ciment sont alors effectués à des temps judicieusement choisis d’après le suivi calorimétrique. La complémentarité entre les analyses par spectrométrie infra-rouge, analyse thermique et diffractométrie des rayons X permet alors de caractériser et de comprendre assez finement les différents événements observés par calorimétrie.

L’étude en pâte de ciment a été réalisée sur le panel des cinq éthers de cellulose usuelle- ment employés : les HEC H1, N1, N7 et les MHPC U2 et P1. Pour plus de clarté, seul le cas des molécules U2 et H1 est traité en détail. Toutefois, l’ensemble des résultats expérimen- taux peut être consulté en annexe de ce mémoire (cf. Annexe D paragraphe V). Les suivis de calorimétrie isotherme sont réalisés avec un mélange externe. Ainsi, le pic de mouillage ne peut pas être observé sur nos résultats expérimentaux. Pour l’hydratation en présence d’éthers de cellulose, deux pics de flux de chaleur sont distingués (figure 99).

Figure 99 : Calorimétrie isotherme à 25 ˚C de l’hydratation en pâte de ciment avec mélange externe, L/S = 0,4 etP/C = 0,5 %

Paragraphe V.F : L’hydratation du ciment À partir des expériences de calorimétrie, des stoppages de l’hydratation sont effectués à différentes échéances, correspondant au sommet ou à la base d’un des deux pics calori- métriques (figure 100). Les résultats de diffractométrie des rayons X indiquent que pour les adjuvants H1 et U2, le premier pic calorimétrique (d’assez faible intensité et de courte durée) coïncide avec une consommation du gypse et une formation d’ettringite. Par contre, aucune trace de portlandite n’est détectée durant cette période. Le premier pic calorimé- trique correspond donc à l’hydratation des phases aluminates en ettringite et des phases silicates en C-S-H. Concernant le second pic calorimétrique, les diffractogrammes montrent qu’il semble débuter lorsque la portlandite commence à précipiter.

Figure 100 : Diffractogrammes des stoppages d’hydratation avec L/S= 0,4 et P/C= 0,5 %

Cet effet sur le début de précipitation de la portlandite est également observé par spec- trométrie infra-rouge (figure 101). En utilisant la bande à 3640 cm−1 (caractéristique de

la vibration ν-OH de la portlandite), il est possible de déterminer la durée d’hydratation nécessaire à l’apparition de la portlandite. Une nouvelle fois, la portlandite ne commence à précipiter qu’à partir du second pic calorimétrique.

Figure 101 : Spectres IR (mode ATR) des stoppages d’hydratation avec L/S= 0,4 etP/C= 0,5 %

Chapitre V : Impact des éthers de cellulose sur l’hydratation des phases cimentaires Enfin, l’analyse thermique est parfaitement cohérente avec les résultats générés par la diffractométrie des rayons X et la spectrométrie infra-rouge. Les thermogrammes montrent que le début de la précipitation de la portlandite semble coïncider avec la base du second pic calorimétrique (figure 102).

Figure 102 : Thermogrammes des stoppages d’hydratation avec L/S = 0,4 et P/C = 0,5 % (pro-

grammation linéaire de température de 10˚C.min−1 sous balayage d’argon)

Ainsi, les résultats obtenus en pâte sont parfaitement cohérents avec ceux obtenus en suspension diluée. L’analyse thermique permet de déterminer la cinétique de formation de la portlandite pour une formulation donnée. Indéniablement, les éthers de cellulose ont un effet inhibiteur important sur les C-S-H, et retarde le temps du début de précipitation de la portlandite. Le début de précipitation de la portlandite apparaît d’autant plus tardive- ment que l’adsorption des polymères sur le C-S-H est considérable (figure 103). En outre, les adjuvants ralentissent d’autant plus la vitesse de précipitation de la portlandite que l’adsorption des polymères sur la portlandite est important.

Figure 103 : Cinétique de formation de la portlandite avec L/S = 0,4 et P/C = 0,5 % (A) et

Paragraphe V.F : L’hydratation du ciment En outre, de manière analogue à ce qui est observé en suspension diluée dans une solution d’hydroxyde de calcium (figure 98), la nature du ciment employé est un paramètre primor- dial pour l’effet retard engendré par l’éther de cellulose en pâte de ciment (figure 99 et 104). Le second pic calorimétrique (correspondant à nouveau à la précipitation de la portlandite d’après une étude par diffractométrie des rayons X) est bien plus retardé dans le cas de l’hydratation avec le ciment gris sans C3A, comparativement à l’hydratation avec le ciment

blanc à fort C3A ou avec le ciment gris. Une nouvelle fois, la teneur en C3A apparaît un pa-

ramètre intéressant pour expliquer les différences constatées sur les profils calorimétriques. Cependant, en absence d’élément probant, il convient de rester assez prudent sur l’origine de la variation de l’effet retard sur la précipitation de la portlandite en fonction de la nature du ciment utilisé.

Figure 104 : Calorimétrie isotherme à 25 ˚C de l’hydratation en pâte de ciment avec mélange externe, L/S= 0,4 etP/C = 0,5 %

L’étude en pâte de ciment permet d’établir les mêmes conclusions que l’étude en suspen- sion de ciment. Les éthers de cellulose présentent un effet inhibiteur sur la précipitation du C-S-H, mais également de la portlandite. Le ralentissement du début de la précipitation de la portlandite est probablement lié à l’effet inhibiteur des adjuvants sur la germination- croissance des hydrosilicates de calcium (qui est proportionnelle à la capacité des polymères à s’adsorber sur le C-S-H). Par contre, le ralentissement de la précipitation de la portlandite indique certainement une action des éthers de cellulose directement sur la portlandite. Cet effet semble lié à la capacité des polymères à s’adsorber sur la portlandite. Enfin, la na- ture du ciment employé est extrêmement importante. En effet, des paramètres encore mal identifiés semblent pouvoir exacerber l’effet inhibiteur induit par les éthers de cellulose.

Chapitre V : Impact des éthers de cellulose sur l’hydratation des phases cimentaires