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II. Le recrutement de cellules innées

1. Les ILC ou cellules lymphoïdes innées

Les cellules immunes sont divisées en deux catégories selon qu’elles font partie de l’immunité acquise ou innée. Cette distinction est basée sur l’expression d’un récepteur reconnaissant spécifiquement des antigènes, comme les TCR et BCR, respectivement à la surface des lymphocytes T et B, dont l’édition est dépendante des gènes Rag1 et Rag2 (Recombination activating genes). Les cellules immunes innées, elles, n’ont pas de récepteurs spécifiques d’antigène. Parallèlement aux macrophages et les CD a récemment été décrit une population de cellules lymphoïdes innées : les ILC.

Les ILC peuvent ensuite être divisées en 3 sous-groupes différents sur la base de facteurs de transcription et de cytokines impliqués dans leur développement, ainsi que leur capacité à produire des cytokines de type Th1, Th2 et Th17 (Spits et al., 2012) (Buonocore et al., 2010) (Cella et al., 2009) (Figure 10).

Figure 10: Les différents types d'ILC avec leurs correspondances en lymphocytes T. L'existence des ILCreg est à ce jour, hypothétique (Cherrier et al., 2012)

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Les ILC peuvent répondre directement à une stimulation par des cytokines provenant de cellules myéloïdes ou de cellules immunes comme les cellules épithéliales, et contribuent à la protection de la barrière épithéliale intestinale contre les infections, les inflammations et le maintien de l’homéostasie intestinale.

Le groupe 1 des ILC est défini par la capacité des cellules à produire de l’IFNγ et la nécessité de Tbet comme facteur de transcription (Figure 11). La cellule-type de ce groupe est la cellule NK. Les cellules NK ont été mises en évidence pour la première fois en 1975, en tant que lymphocytes innées effecteurs possédant une activité cytotoxique envers les cellules tumorales (Kiessling et al., 1975) (Herberman et al., 1975).

Depuis, d’autres rôles leur ont été attribués, comme la surveillance tumorale, l’élimination des cellules infectées par des virus et l’amplification des réponses inflammatoires (Talmadge et al., 1980) (Gorelik et al., 1982 (Robbins et al., 2007) (Krebs et al., 2009) (Arase et al., 2002) (Mandelboim et al., 2001). Le mécanisme central à toutes ces fonctions est l’induction du relargage depuis des granules cytotoxiques du granzyme et de la perforine, ainsi que la production d’IFNγ et de TNF. Les ILC de type 1 sont dispersés dans les organes lymphoïdes organisés secondaires et les organes périphériques, où ils reconnaissent et tuent leur cible. Ils présentent la capacité de reconnaître le CMHI, et peuvent donc éliminer toutes les cellules infectées ou tumorales présentant une expression du CMHI altérée par la présence d’un pathogène. La présence du microbiote ne semble pas indispensable au développement de cette population, mais il semblerait que leur activité cytotoxique soit réduite en absence de microbiote, comme le suggère l’expression réduite de granzyme et d’IFNγ chez des souris axéniques (Ganal

et al., 2012). Cette donnée suggère que le microbiote, pourrait exercer un rôle sur la fonction de

ces cellules, plutôt que sur le développement et le maintien de cette population.

L’autre composante de ce groupe est représentée par les ILC1. Ces cellules sécrètent aussi de l’IFNγ mais présentent une faible cytotoxicité. Le rôle du microbiote dans l’établissement de cette population n’a pas été encore décrit.

Un deuxième groupe de cellules lymphoïdes innées a été identifié chez les souris Il25-/- Ces dernières présentent une diminution dans les MLN de la population à l’origine de la production d’IL4, d’IL-5 et d’IL-13 (Figure 11), corrélée à une élimination moins efficace des helminthes.

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L’isolement par cytomètrie en flux de cette nouvelle population depuis les MLN puis leur stimulation in vitro avec de l’IL-25 entraînait la production d’IL-4, IL-5 et IL-13 (Fallon et al., 2006). Ces cellules seront appelées nuocytes, d’après « nu », la treizième lettre de l’alphabet grec et leur capacité à produire de l’IL-13 (Neill et al., 2010). Ces cellules sont aussi retrouvées au sein des tissus adipeux associés au mésentère de l’intestin grêle. En plus d’être stimulées par l’IL- 25, elles peuvent produire de l’IL-5, de l’IL-6 et de l‘IL-13 en réponse à l’IL-33 afin de lutter contre les infections à helminthes (Moro et al., 2010).

Il existe une troisième population d'ILC, appelée ILC3. Les ILC du groupe 3ont définis par leur

dépendance au facteur de transcription RORγt (Figure 11).

En 1992, Kelly et Scollay rapportent l’existence, dans les ganglions lymphatiques des nouveau- nés, d’un nouveau sous-type de cellules CD4+ n'exprimant pas le CD3 mais exprimant les lymphotoxines α et β sous forme d’un hétérotrimère LTα1β2. Il fallut attendre quelques années pour qu’une fonction claire leur soit attribuée. Ces cellules, « inductrices de tissus lymphoïdes » ou iTL, sont présentes dès le stade fœtal chez l’Homme comme chez la souris. Ces cellules expriment l'intégrine α4β7 ainsi que le récepteur à l'Il-7 et jouent un rôle dans la formation d'organes lymphoïdes comme les ganglions lymphatiques (Mebius et al., 1997) et les PP (Yoshida et al., 1999). Les iTL produisent de l’IL-17 ainsi que de l’IL-22 durant la vie foetale mais ne produisent plus que de l’IL-22 chez l’adulte (Sonnenberg et al., 2008) (Sawa et al., 2011).

L’IL-22 est aussi sécrétée par une autre population d’ILC3, dispersée dans la lamina propria de

l’intestin et exprimant le récepteur NKp44 chez l’Homme ou le NKp46 chez la souris (Satoh- Takayama et al., 2008) (Sawa et al., 2011). A l'origine, le NKp46 a été démontré comme étant exprimé plus particulièrement et très spécifiquement par les NK (Biassoni et al, 1999) (Sivori et

al., 1997). Cependant, afin de faciliter l'étude de ces cellules NKp46+, Satoh-Takayama et al. ont utilisé des souris possédant une GFP exprimée sous le contrôle du récepteur Ncr1, gène codant NKp46 (Gazit et al., 2006). Ils ont alors identifié que ces cellules étaient principalement dispersées dans la lamina propria et absentes des cryptes intestinales. Etant donné l'expression d'un marqueur caractéristiques des NK, les auteurs ont ensuite cherché à vérifier si ces cellules NKp46+ présentaient des caractéristiques fonctionnelles de NK, à savoir être cytotoxiques via la production de perforine, et la capacité de produire de l’IFNγ. Ils ont ainsi déterminé que ces

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cellules NKp46+ de l’intestin ne présentent pas d’activité cytotoxique et expriment peu voire pas d’IFNγ. Ils ont ensuite comparé les profils de transcription entre des NK et les cellules NKp46+ de l'intestin, chez lesquelles ils ont identifié une forte transcription du facteur Rorc et du gène codant pour l'IL-22, renforçant l’hypothèse d’une nouvelle population cellulaire. Des souris exprimant la GFP sous le contrôle du promoteur codant pour RORgt présentent une expression de GFP dans les cellules NKp46+ mais pas au sein des NK classiques NKp46+ et NK1.1+. Cette donnée indique que l'expression de RORgt semble n'être pas une caractéristique partagée avec les NK, mais une caractéristique des cellules intestinales NKp46+. Bien que ces cellules NKp46+ soient RORgt+, comme les LTi, elles n'en sont pas moins différentes puisqu'elles n'expriment pas le CD4 et ne sont pas présentent dans les cryptes intestinales. Ces cellules CD3-CD4-NKp46+ et dépendantes de RORgt+ sont appelées les ILC3 et constituent la source majeure d’IL22 dans

l’intestin (Qiu et al., 2013) (Satoh-Takama et al., 2008) (Sonnenberg et al., 2012).

Figure 11: Classification des ILC selon leur caractéristiques fonctionnelles (Spits et al.,2013)

Les fonctions protectrices des ILC3 sont intimement liées à leur faculté à produire de l’IL-22. En

effet, beaucoup de modèles murins déficients pour les ILC le sont aussi pour l’IL-22. Dans la prochaine partie, je vous présenterai l’IL-22 et illustrerai le rôle protecteur des ILC à travers cette

56 production d’IL-22.