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b.iii Rôle de l'oxygène dans la fusion par illumination

Dans le document Rupture et fusion d'un cristal bidimensionnel (Page 143-146)

suggère qu'une certaine quantité d'"impuretés" soit formée pendant l'éclairage. L'idée que nous avons voulu mettre en évidence est que ces impuretés résultent d'une modification chimique au niveau du groupement fluorescent de la molécule. Les processus de fusion ou de blanchiment seraient alors liés à une réaction photochimique réversible, d'après les observations décrites dans les paragraphes IV.2.b.i et IV.2.b.ii . Le groupement NBD qui le constitue semble susceptible de réagir avec l'oxygène de l'air, peut-être de façon réversible. Le but a été de tester cette hypothèse en observant le photoblanchîment du cristal pour divers pourcentages d'oxygène environnant la monocouche.

Le principe de l'expérience est le suivant. La cuve de Langmuir est isolée dans un volume de faibles dimensions à l'aide de films alimentaires étirables transparents. Malgré les précautions apportées à l'isolement du système, le volume n'est pas totalement étanche à l'air. Un flux d'azote (ou d'argon) est alors envoyé dans le système, de façon continue, à faible débit toutefois pour ne pas créer de mouvements hydrodynamiques dans la cuve gênant l'observation

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d'un cristal. On évalue le taux d'oxygène présent dans le système à l'aide d'un appareil placé dans un circuit annexe dans lequel circule, à circuit fermé, le gaz contenu dans notre système (figure IV.16). Cet appareil est un oxymètre qui comporte une pastille d'un réactif de l'oxygène.

Fig. IV.16: Schéma du principe utilisé. Le système est isolé par une feuille de plastique transparente. Nous diminuons le taux d'oxygène, présent dans ce système, en envoyant un flux continu d'azote. Le taux d'oxygène restant est contrôlé en faisant circuler le gaz dans un oxymètre.

Premières observations :

• En travaillant à taux d'oxygène réduit, la perte de fluorescence du cristal due à une excitation lumineuse donnée est nettement plus faible que dans l'air : lors de l'illumination du cristal, la présence d'oxygène environnant semble nécessaire au photoblanchîment.

• Utilisant toujours la même intensité d'excitation lumineuse, le temps au bout duquel apparaît la fusion du solide est beaucoup plus long lorsqu'on travaille à faible pourcentage d'oxygène.

• L'action de l'oxygène dans les processus qui nous intéressent est réversible. Faisant varier le taux d'oxygène dans le système en changeant le flux d'azote, on remarque que le temps de fusion des solides est une fonction bien déterminée de

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la quantité d'oxygène environnant la monocouche.

Ces trois observations nous montrent que l'oxygène joue un rôle essentiel dans le processus de fusion par illumination. De la mesure de la quantité d'oxygène dans le système et du temps de fusion des cristaux, nous avons déduit l'évolution du temps de fusion des cristaux en fonction de la proportion d'oxygène les environnant. Les résultats sont représentés sur le graphe de la figure IV.17 en échelle semi-logarithmique. Chaque point du graphe représente une moyenne de 5 mesures du temps de fusion ; pour un taux d'oxygène donné, l'incertitude sur la mesure du temps de fusion est inférieure à 10 secondes.

0 50 100 150 200 250 300 350 400 0,01 0,1 1

temps de fusion (sec.) : t'

M

proportion d'oxygène environnant la monocouche (Y) (semi-log.)

Fig. IV.17: Temps d'éclairage nécessaire à la nucléation de liquide dans le cristal en fonction de la proportion d'oxygène dans l'atmosphère au-dessus du cristal, en échelle semi-logarithmique. La largeur des cristaux étudiés dans cette expérience est de 40µm en moyenne. La température de la sous-phase est fixée à 19±0.1°C.

Remarque :

Le temps de fusion, tM' , qui apparaît dans ce graphe, n'a pas la même

signification que celui mesuré précédemment et qui correspond à la durée d'éclairage tM nécessaire à observer le début de la nucléation du liquide dans le

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solide. D'après les expériences décrites dans le paragraphe IV.2.b.ii, nous avons observé que si l'excitation lumineuse appliquée au cristal dépasse environ 70% de son temps moyen de fusion tM, celle-ci ne peut plus être relaxée. Il semble

donc que la nucléation du liquide commence un certain temps avant que l'on puisse l'observer. Nous avons donc poser tM' =70% tM. Nous supposons ici que le

facteur 70%, évalué dans l'air ambiant est indépendant de la quantité d'oxygène dans laquelle les mesures sont effectuées.

En réduisant la quantité d'oxygène présente dans le système à moins de 1%, nous mesurons un temps de fusion supérieur à 6 minutes alors que celui-ci est de 1 minute dans l'air (21% d'oxygène).

A l'opposé, nous pouvons augmenter la quantité d'oxygène dans le système en envoyant un flux continu de ce gaz. Dans ce cas, l'oxymètre ne nous permet plus la mesure de la teneur en oxygène car celle-ci est trop élevée. On estime alors le pourcentage d'oxygène de l'ordre de 90% avec une incertitude cette fois-ci d'au moins 5%. Le temps moyen de fusion mesuré n'a pratiquement pas diminué par rapport à sa valeur dans l'air.

Ces résultats suggèrent fortement qu'une réaction photochimique réversible a lieu entre les molécules du cristal et les molécules d'oxygène les environnant. Cette réaction conduit soit à une modification des liaisons intermoléculaires par insertion d'oxygène dans le cristal par exemple, soit à la formation de nouvelles molécules oxydées jouant le rôle d'impuretés dans le cristal. Dans les deux cas, ceci implique une diminution du point de fusion du cristal, mais les liaisons avec l'oxygène sont suffisamment faibles pour être réversibles lorsque cesse l'éclairage. Nous n'avons donc pas une explication définitive pour comprendre nos observations.

Néanmoins, nous sommes conduit à proposer un modèle dans lequel l'abaissement du point de fusion du cristal est dû à l'augmentation du nombre d'impuretés dans le cristal, quelles que soient ces impuretés.

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