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Identification de traceurs à l’échelle moléculaire : exemple du levoglucosan

Two years of near real-time chemical composition of submicron aerosols in the region of Paris using an Aerosol

V.3. Identification de traceurs à l’échelle moléculaire : exemple du levoglucosan

Nous venons de voir dans la section précédente que l’obtention de spectres de référence (de telle ou telle source) était un point de passage obligé pour obtenir des résultats pertinents par PMF « contrainte ». Il a également été souligné que les spectres de référence disponibles dans la littérature pour le levoglucosan peuvent être très variables d’un instrument à l’autre. Ce composé étant un traceur particulièrement important de la source BBOA, j’ai souhaité approfondir le comportement de notre ACSM vis-à-vis de ce traceur.

Une méthodologie a récemment été proposée pour estimer les concentrations de levoglucosan avec partir de données AMS. Elle est notamment basée sur la concentration du fragment m/z 60 (Aiken et al., 2009), selon l’équation :

!". !"#$ = 1

!!"!"#$∙ !"60 − !!"!"#$%&!"#$∙ !" [30] Néanmoins cette méthodologie conduit à une surestimation de l’ordre d’un facteur 3 des réelles concentrations de levoglucosan (Aiken et al., 2009 ; Elsasser et al., 2012).

J’ai voulu ici essayer de tirer parti de la puissance de la méthode PMF « contrainte » du logiciel SoFi en forçant un spectre de référence de levoglucosan, au lieu de forcer un profil de source BBOA ; l’objectif ici étant d’obtenir en sortie de PMF non pas des concentrations de BBOA mais des concentrations de levoglucosan. L’analyse des sucres à partir de prélèvements sur filtres au SIRTA n’a pas été réalisée

181 en routine durant la période étudiée dans ce manuscrit, mais des données sont disponibles pendant l’intercomparaison ACSM de novembre 2013. Ces données de levoglucosan mesuré sur filtres ont été obtenues par analyse IC-PAD au LSCE (Bressi et al., 2013) ; technique qui a donné des très bons résultats (Z-score) lors de l’intercomparaison des mesures de levoglucosan organisée par le LCSQA/INERIS en 2013 dans le cadre du programme EU-ACTRIS (LCSQA, 2013b).

L’application de la méthode proposée par Aiken et al. (2009) conduit ici aussi à une surestimation des concentrations de levoglucosan d’un facteur proche de 3 (Figure 89).

Figure 89: Corrélation entre le levoglucosan filtres, et celui estimé par la méthode d’Aiken et al. (2009)

Des résultats de « source apportionment » sont d’ores et déjà disponibles pour le jeu de données obtenu au cours de l’intercomparaison ACSM de Novembre 2013. Ils mettent en évidence la présence de 4 facteurs différents : HOA, BBOA, COA et OOA (Fröhlich et al., en prep). Afin de rechercher les concentrations de levoglucosan au sein du spectre organique obtenu par l’ACSM du SIRTA à partir du spectre de référence propre à cet instrument (custom levo), j’ai réédité l’analyse PMF de ce jeu de données en contraignant un cinquième facteur (HOA et COA étant forcés et 2 facteurs restant libres, comme pour l’obtention des 4 facteurs cités plus haut). L’idée sous-jacente à l’ajout de ce cinquième facteur est de pouvoir différencier le levoglucosan du reste du spectre de BBOA sans modifier les autres facteurs. Néanmoins, cette méthodologie conduit à nouveau à une forte surestimation du levoglucosan, comme illustré par la figure ci dessous.

y"="3,36x R²"="0,96 0,0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0 3,5 0 0,2 0,4 0,6 0,8 1 Equ iv al ent "le vog lucos an AC SM "(µ g/ m 3) Levoglucosan filtres"(µg/m3)

182 Figure 90: Corrélation entre le

lévoglucosan filtres et celui estimé par PMF

Dans une troisième approche, j’ai cherché à distinguer le levoglucosan du reste des émissions de combustion de biomasse en déconvoluant directement le facteur BBOA obtenu par analyse PMF à 4 facteurs du jeu de données de l’intercomparaison. Pour ce faire, il est possible de reconstruire une matrice de concentration à partir du profil et des variations temporelles de BBOA :

!!"! = !!!∙ !!!, [31]

où !!"! est la jth concentration de la m/zi dans le facteur p; !!! la jth concentration du facteur et !!!, la contribution relative de la m/zi dans le profil du facteur.

La matrice d’erreur associée peut être construite en supposant une combinaison linéaire suivant les contributions des différentes m/z à chaque ti :

!!"! = !!"!"! ∙ !!" ! !!"! !

!, [32]

où !!"! est la jth incertitude de la m/zi dans le facteur p, !!"!"!la jth incertitude de la m/zi dans la matrice d’organique, et !!"!

!!"!

! la contribution du facteur p à la j th m/z

i.

J’ai ensuite utilisé ce couple de matrices (concentrations-incertitudes) dans une deuxième analyse PMF. Cette dernière est réalisée pour 2 facteurs, l’un représentant une contrainte sur le levoglucosan (custom levo) et l’autre étant laissé libre. La figure 91 ci-dessous présente les variations temporelles du levoglucosan sur filtres (noir) et celui obtenu par double analyse PMF (rouge). Une bien meilleure corrélation est trouvée ici, avec une pente de 1.11.

183 Figure 91: A gauche, série temporelle du levoglucosan sur filtres et estimé par PMF2,

et BCwb ; a droite, corrélation entre levoglucosan filtres et estimé par PMF2.

Ainsi, l’application d’une double PMF - une première PMF pour obtenir le spectre de BBOA suivie d’une deuxième PMF pour y rechercher les concentrations de levoglucosan - semble permettre une bonne approximation des concentrations de cette dernière espèce chimique. Une autre indice de la validité de cette méthode est l’obtention d’un rapport levoglucosan / BBOA moyen égal à 10 (Figure 92), en accord avec les valeurs couramment utilisées pour les études de sources sur filtres (e.g., Puxbaum et al., 2007).

Figure 92: Résumé de la

méthodologie, avec à gauche la contribution moyenne des facteurs PMF (Frohlich et al., en prep), et à droite la contribution du

levoglucosan par PMF sur le BBOA.

Ces résultats sont susceptibles d’ouvrir de nouvelles perspectives. En effet, fort de ces résultats, cette méthodologie pourrait également permettre l’identification d’autres traceurs, même s’il est important de garder à l’esprit que le levoglucosan a une fragmentation relativement singulière.

Cette méthodologie fait actuellement l’objet d’un article en cours de rédaction qui devrait être soumis prochainement à Atmospheric Measurements and Techniques.

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