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Comme mentionné dans le premier chapitre, l’identification de nouveaux biomarqueurs, comme des biomarqueurs moteurs, est un enjeu important de la clinique en psychiatrie, notamment pour identifier plus précocement et spécifiquement les jeunes patients susceptibles de basculer dans la maladie (Millan et al., 2016). L’ensemble des mesures de la dextérité que nous avons effectuées avec le FFM chez des patients schizophrènes nous donnent quelques indications quant à des marqueurs moteurs potentiels pour cette maladie. Notre groupe de patients était exclusivement constitué de patients stabilisés sous traitement avec donc de faibles symptômes. Ceci nous permet de dire que nos mesures de la dextérité reflètent soit les effets du traitement sur les fonctions motrices comme discuté plus haut soit les effets moteurs de la charge neurodéveloppementale de ces patients (Krebs et al., 2000 ; Chan et al., 2010). Actuellement on peut distinguer deux types de marqueurs pour la schizophrénie ; les marqueurs « traits », qui vont rester stables au cours du temps, et les marqueurs « états », qui vont fluctuer avec l’évolution de la maladie. Il a été montré que différents items des SNM correspondent à l’un ou l’une de ces catégories de marqueurs. A première vue, en regardant l’évolution entre T1 (avant la remédiation cognitive) et T2 (après la remédiation cognitive), on constate que deux scores FFM évoluent et s’améliorent au cours du temps : l’erreur pendant le tracking et la mémorisation de la séquence. Ces deux scores pourraient être considérés comme des marqueurs « états » de la maladie. En revanche, les scores SD tap

interval et individualisation ne s’améliorent pas après la remédiation. Ceci pourrait suggérer

qu’ils correspondraient plus à des marqueurs « traits » de la maladie. Nous n’avons testé l’évolution au cours du temps que des principaux scores FFM clés mais peut-être que d’autres fluctuent également au cours du temps et par exemple à la suite d’une remédiation. Ce ne sont pour le moment que des suppositions et il serait nécessaire pour confirmer ces résultats d’effectuer des mesures chez des patients à différentes phases de la maladie. Enfin, une fois ces potentiels marqueurs moteurs identifiés, il faudrait ensuite les tester chez des jeunes patients à haut risque et les suivre au cours du temps pour vérifier si l’un de ces marqueurs est présent en phase prodromique et s’il peut servir de prédicteur pour l’évolution ou non du patient vers la maladie.

Il est intéressant de noter que ces différents scores informent différemment sur les composants de la dextérité affectés chez les patients mais également qu’ils donnent différentes informations concernant d’autres aspects de la maladie qu’elles soient cliniques, neurologiques ou cognitives.

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Discussion : Comparaison AVC – SCZ

Un des objectifs de cette thèse était d’essayer d’identifier des profils de dextérité typique pour les différentes pathologies étudiées. Aux vues des profils de déficit dans les deux groupes de patients très différents en sévérité et en homogénéité, des comparaisons directes entre les scores des deux groupes n’étaient pas pertinentes.

D’un point de vue faisabilité et utilisation du FFM dans ces deux pathologies, la principale différence entre les deux groupes est que les patients SCZ contrairement aux patients AVC, n’ont pas éprouvé de grandes difficultés pour effectuer les tâches. L’autre principale différence est que même si les patients SCZ ont presque tous pu effectuer la tâche de

sequential finger tapping contrairement aux patients AVC, c’est tout de même la tâche pour

laquelle ils ont la moins bonne performance comparée à celle des témoins. Sur cet exercice, les deux groupes ont montré des difficultés mais pour des raisons différentes. Les patients AVC ont rencontré plus de problèmes de rapidité d’exécution et n’étaient pas en mesure d’effectuer la séquence (Raghavan, 2007) alors que les patients SCZ étaient tout à fait en mesure d’effectuer la séquence mais se confrontaient plus à un problème de mémorisation de cette dernière (Adini et al., 2015). Comme mentionné plus haut, ceci suggère bien que c’est l’aspect cognitif de la tâche qui limite la performance des patients SCZ alors que c’est son aspect moteur complexe qui limite celle des patients AVC.

On retrouve la même opposition dans un autre aspect de la dextérité qui différencie les deux groupes, le timing. En effet les patients AVC rencontrent des difficultés pour accélérer leur vitesse de tapping mais n’ont pas de problème de régularité (du moins à 1Hz) alors que les patients SCZ ne rencontrent aucun problème dans l’exécution et l’accélération du tapping mais on une plus grande irrégularité. Ainsi les deux groupes s’opposent par les patients AVC qui souffrent d’une limitation dans l’exécution motrice (Raghavan, 2007) et par les patients SCZ qui sont plus limités par un aspect cognitif de la tâche (ici une plus grande variabilité du

timing interne, Bolbecker et al., 2014).

On constate également que les profils de dextérité ont des formes d’hétérogénéités différentes chez les patients AVC et chez les patients SCZ. Nous trouvons un genre de score global de dextérité affectée chez les patients SCZ qui informe plus sur le fond neurologique de la maladie à la manière des SNM, à l’inverse l’hétérogénéité des scores chez les patients AVC,

98 avec différents niveaux de gravité, va plutôt nous informer sur la spécificité du déficit chez chaque patient, pouvant potentiellement nous donner des informations sur la lésion, les structures touchées et quels aspects les thérapeutes pourraient faire travailler au patient pendant la rééducation.

Deux caractéristiques différentes du FFM sont mises en évidence dans ces deux pathologies. Dans des pathologies où la dextérité est gravement atteinte comme l’AVC, les patients sont capables d’utiliser le FFM, et contrairement à ce qui était attendu, on peut tout de même différencier les sujets entre eux. Peut-être que si nos patients avaient eu des niveaux plus bas de dextérité nous n’aurions trouvé que des profils saturés en scores affectés à l’image de nos patients les plus affectés. Dans une pathologie où la dextérité et le contrôle moteur ne sont pas les symptômes principaux, et dans laquelle la dextérité n’est pas connue comme étant très perturbée, nous trouvons avec seulement une trentaine de patients des aspects affectés de la dextérité dans chacune des 4 tâches FFM. Sans réellement comparer statistiquement les scores pour chaque tâche entre les deux pathologies, ces mesures de la dextérité nous informent différemment. Pour les patients AVC elles complètent le bilan moteur et nous permettent de préciser le déficit individuel de dextérité et chaque score a une importance explicative du déficit. Chez les patients SCZ, même si les profils sont hétérogènes, c’est plus l’ensemble et la globalité des scores dans les quatre tâches qui nous informent sur l’ensemble du déficit de dextérité et sur son importance, et donc plus sur le background neurodéveloppemental, et pouvant éventuellement servir de marqueur de la maladie contrairement à chaque score pris indépendamment.

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Pa tie : Pe spe tives

Discussion : Utilisatio du FFM da s d aut es aladies et dans

le vieillissement

Au cours de cette thèse nous nous sommes principalement intéressés à des pathologies affectant la dextérité ayant des origines neurologiques. Cependant comme mentionné dans le premier chapitre, d’autres types de pathologies peuvent affecter la main et la dextérité.