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I.2.2 Influence des charges de silice incorporées

Le renfort apporté par les charges de silice se traduit sur la courbe de traction par la supériorité des modules sécants et tangents des nuances chargées de silice par rapport au caoutchouc naturel non chargé NRPG. Nous pouvons constater que le module tangent du

caoutchouc naturel non chargé augmente peu en fonction de l’élongation même à une élongation de 4. En présence des charges de silice, le renforcement est différent selon qu’on se trouve en petites ou en grandes déformations.

Le module tangent à l’origine pour le matériau BII est égal à 8,4 MPa. Il est supérieur à celui

matériau BII chargé de la silice II l’emporte sur celui du matériau BI renforcé par la silice I,

Figure B.4. A partir de λ1 = 1,4, cette tendance s’inverse, le matériau BI présente une

meilleure rigidité aux grandes déformations.

Le renforcement de la matrice par les charges de silice doit être tributaire de la surface d’interactions mise en jeu entre les charges et la matrice. Le renforcement doit dépendre, en partie, du nombre de sites d’interactions possibles entre la gomme et la charge. Ainsi la surface spécifique de la charge apparaît comme un paramètre primordial pour le renforcement (cf.A.IV.3). Tout portait donc à croire que la silice II disposant d’une plus grande surface spécifique présenterait un meilleur renforcement que la silice I de plus petite surface

spécifique. Or, les résultats des essais de traction montrent une tendance inverse.

En effet, ces résultats sont liés directement aux formulations des mélanges. Aux petites déformations, le renforcement est attribué à la présence des agglomérats (Si-Si) [Klüppel1995] non rompus en agrégats lors du mélangeage à cause du déficit de l’agent de recouvrement (cf. A.IV.4.1) ou encore à la contribution des agglomérats (Si-Pl-Si) (cf. B.I.3) créés à partir de l’adsorption d’une couche vitreuse de polymère liée [Klüppel2004] [Ramier2004].

La silice II présente des agglomérats de plus grande taille que la silice I

(cf. A.IV.4.1) et puisqu’il existe une proportion de sa surface restée libre et non recouverte par le silane, la silice II est susceptible de développer des agglomérats de silice reliés entre eux

par une couche de polymère lié. Ces différents agglomérats sont une source de renforcement aux toutes petites déformations.

Pour le matériau BII, les agglomérats se comportent comme des hétérogénéités et agissent

comme des concentrateurs de contraintes en renforçant le matériau aux toutes petites déformations. Ensuite à cause de la faible adhésion à la matrice, ils affaiblissent le comportement du matériau. En effet, lors de son étude sur le SBR chargé de silice sans traitement par le silane, [Robisson2000] observe un module de traction à l’origine très élevé de l’ordre de 100 MPa, ceci est dû à la présence d’agglomérats de silice mal dispersés pouvant atteindre une taille allant jusqu’à 100 µm. Ensuite, le module tangent décroît fortement Figure B.7. Le module tangent aux grandes déformations SBR chargé est comparable à celui du SBR non chargé « pur », ce qui indique qu’après rupture interne ou décohésion des agglomérats, la sollicitation mécanique est supportée seulement par la matrice.

Figure B.7 – Essais de traction uniaxiale. Comparaison entre le SBR pur et le SBR chargé de silice. Chute du module tangent aux grandes déformations

Aux grandes déformations, nous constatons une augmentation du module tangent en fonction de l’élongation pour les nuances chargées de silice, alors que le caoutchouc naturel non chargé ne présente pas de renforcement. Ceci est signe de l’apport des agrégats de silice dont le couplage à l’interface avec le caoutchouc naturel est assuré par le silane. Les agrégats bien couplés à la matrice peuvent agir comme des « charges réticulantes » [Ansarifar2003]. Le renforcement aux grandes déformations est donc lié à l’étendue de surface mise en jeu à l’échelle de l’agrégat. Les agrégats présents dans le matériau BI apportent un meilleur

renforcement que ceux du matériau BII puisque la silice I comporte un plus grand nombre de

sites d’adsorption à l’échelle de l’agrégat (cf. B.IV.2). Les agrégats de silice I, bien couplés à la matrice, jouent le rôle de nœuds de réticulation conduisant à des niveaux de renforcement supérieurs à ceux obtenus pour la silice II, dont le nombre et la taille moyenne des agrégats

restent inférieurs à ceux de la silice I.

En effet, lors de l’élaboration de nos mélanges, une même quantité de l’agent de couplage a été employée pour les deux matériaux. Cette quantité égale à 4 phr semble ne pas suffire pour la totalité de la surface de la silice II (de plus grande surface spécifique). En revanche, cette

quantité améliore les propriétés du mélange chargé de la silice I.

En conclusion, nous attribuons le meilleur renforcement aux petites déformations apporté par la silice II à un apport plus important des agglomérats (Si-Si) et (Si-Pl-Si). Aux grandes

déformations, quand l’étendue de surface mise en jeu entre les agrégats de silice I est plus

grande, il en résulte un meilleur renforcement.

Le changement de pente aux grandes déformations est lié également à la cristallisation de la matrice caoutchoutique. Nous pouvons d’ores et déjà supposer que la cristallisation apparaît pour un seuil d’allongement plus petit dans le matériau BI du fait de la distribution des

agrégats et de la topologie de réticulation fournissant des chaînes macromoléculaires plus courtes dans le matériau BI et amenant vers une proportion de phase cristalline plus élevée.

En effet, la caractérisation de l’apparition et du développement de la phase cristalline dans les deux matériaux est menée pour les deux matériaux grâce aux essais de diffraction aux rayons X (cf. B.II.2).

Il est à noter, par ailleurs, que le matériau BI présente un adoucissement de son module

tangent signe d’un endommagement qui surviendrait à partir d’une élongation égale à 3,7. L’interface agrégats / matrice assurant le renforcement aux grandes déformations semble être affectée à partir de cette élongation.