• Aucun résultat trouvé

Les hypothèses de recherche : le rôle modérateur de l’implication

Section 3 : Les hypothèses de recherche : le rôle modérateur de l’implication

3. Les hypothèses de recherche : le rôle modérateur de l’implication

Nous allons maintenant présenter nos hypothèses relatives au rôle modérateur de l’implication. Pour cela, nous allons présenter les différentes conceptualisations de l’implication. Puis, nous justifierons nos hypothèses de recherche.

1. Le concept d’implication

Le concept de l’implication a été beaucoup étudié par des chercheurs en comportement du consommateur depuis l’étude de Krugman (1965) sur la relation entre l’attitude du consommateur à une marque et le message publicitaire télévisé. Dans cette étude, Krugman prétend que le consommateur n’adopte pas une attitude précise à l’égard d’une marque ou ne tente pas de lier à son besoin le message publicitaire. Il est en effet exposé à la publicité mais ne la regarde pas attentivement. Il adopte une attitude à l’égard d’une certaine marque après l’avoir acheté (Assael, 1992). Depuis, plusieurs conceptualisations et échelles de mesure de l’implication ont été proposées dans la littérature, ce qui a eu pour conséquence de soulever un certain nombre de critiques. Des auteurs comme Houston et Rothschild (1978), Bloch (1981a) et Bloch et Richins (1983) ont proposé différents modèles d’implication. Ils ont mis en évidence les déterminants et les conséquences de l’implication. La principale classification porte sur une distinction entre implication durable et implication

circonstancielle.

Les recherches se sont également intéressées aux déterminants de l’implication du consommateur. Bloch et Richins (1983) en distinguent trois catégories : les caractéristiques personnelles, les facteurs liés au produit, et les facteurs situationnels (cf. Figure 9).

Figure 9 : Les déterminants de l’implication

Source : Bloch, P. H. et Richins, M. L. (1983), “A Theoretical Model for the Study of Product Importance Perceptions,” Journal of Marketing, 47(3), pp. 69-81.

D’abord, les besoins et les impulsions du consommateur provoquent l’implication. En particulier, si le consommateur pense qu’un produit reflète bien son image personnelle. Il montre alors une forte implication pouvant durer longtemps. Ensuite, plus le consommateur prend conscience des risques au moment d’achat ou de consommation, plus le niveau de l’implication à l’égard du produit ou de la marque est élevé. En d’autres termes, lorsque le consommateur perçoit un certain risque dans l’acte d’achat ou de consommation, les caractéristiques du produit déterminent le niveau d’implication plus que des facteurs personnels. Bloch et Richins (1983 ; voir aussi Bloch, 1981 ; Houston et Rothschild, 1978) distinguent également entre implication durable et implication situationnelle. L’implication durable fait plus référence à des facteurs individuels et produits alors que l’implication situationnelle concerne la situation de consommation. L’implication situationnelle est de courte durée par rapport à l’implication durable, puisque la situation n’aura plus

Facteurs personnels - image de soi - valeur, objectif Facteurs produits - prix - risque Facteurs situationnels - limite temporelle - situation d’achat Implication durable Implication situationnelle Niveau d’implication

d’importance une fois l’acte d’achat ou consommation terminé.

L’implication a eu des applications diverses : par exemple, l’implication produit (Petty et Cacioppo, 1981), l’implication dans la cause (issue involvement ; Petty et Cacioppo, 1981), l’implication réactive (Chaiken, 1980) et l’implication cognitive (Lastovicka et Gardner, 1978). Traylor (1981), Engel et Blackwell (1982), Petty, Cacioppo et Schuman (1983) et Assael (1992) ont étudié diverses dimensions de l’implication. La plupart de ces auteurs parlent de deux niveaux d’implication : forte implication et faible implication. D’autres auteurs ont présenté d’autres classifications de l’implication (cf. Vaughn, 1980, 1986 ; Mittal, 1982 ; Park et Mittal, 1985 ; Laurent et Kapferer ; 1985 ; McQuarrie et Munson (1987). Vaughn (1980) parle d’implication cognitive et d’implication affective. Park et Mittal (1985) parlent, eux, d’implication utilitaire et d’implication expressive. Dans une conceptualisation similaire, Park et Young (1986) parlent d’implication cognitive, qui reflète une motivation utilitaire, et d’implication affective, qui reflète une volonté pour l’individu d’exprimer ses valeurs. Ces recherches montrent que l’implication peut être cernée par groupes ou catégories. Park et Mittal (1985) parlent d’implication utilitaire et d’implication expressive, arguant du fait que le processus de traitement d’information varierait selon le type de l’implication. Également, Laurent et Kapferer (1985) ont défini l’implication comme un concept multidimensionnel. Ils identifient quatre dimensions de l’implication : 1) l’importance liée au produit, 2) le risque perçu concernant l’achat du produit, 3) la valeur symbolique attribuée par le consommateur à l’égard du produit, de l’achat du produit et de la consommation du produit, 4) la valeur hédonique du produit. Maheswaran et Meyers-Levy (1990), eux se sont intéressés à l’implication générée par un message publicitaire. Petty, Cacioppo et Schumann (1983) ont étudié l’attention et le traitement d’information du consommateur.

Han (1992) et Hawkins et Hoch (1992) ont observé que le niveau de traitement de l’information par le consommateur variait selon le niveau de l’implication. Le consommateur fortement impliqué tentait de mieux comprendre l’information offerte dans un processus de traitement d’information. Park et Hastak (1994) et Mulvey, Olson, Celsi et Walker (1994) considèrent que l’implication est le degré d’attention et d’importance induites par une stimulation obtenue dans des circonstances particulières. Pour Mano et Oliver (1993), l’implication est le degré d’importance personnelle ou le lien avec le

produit/service ressenti par le consommateur lors de son choix.

Un certain nombre de recherches sur ce sujet portent également sur les activités de loisir. D’après Manfredo et Yuan (1992), un individu possède une forte implication lorsque son attitude est positive à l’égard des loisirs. Hong (2001) observe que l’implication influence le niveau de fidélité dans des activités de loisir. Selon cet auteur, l’implication constitue une variable médiatrice entre l’attitude et la fidélité.

La majorité des études a, tout de même, porté sur des biens. Certains auteurs comme Zaichkowsky (1985) ont considéré que l’attitude du consommateur à l’égard d’un service serait la même qu’à l’égard d’un bien, ce qui lui a conduit une échelle unique dénommée PPI (Personal Involvement Inventory). Day, Stafford et Camacho (1995) ont observé que l’implication influençait à la fois l’achat des biens et des services. Ce qui signifie que les mêmes méthodes peuvent être utilisées entre biens et services. Cependant, comme Zeithaml et Parasuraman (1985) l’ont remarqué, il y a des différences importantes entre le service et le produit. Donc, il faut faire attention dans l’utilisation des échelles pour éviter d’affecter la validité et la fiabilité des mesures. Nous retiendrons toutefois la définition suivante. L’implication représente l’importance ressentie ainsi que l’intérêt accordé par le consommateur à l’égard du produit/service.

2. L’implication et le comportement du consommateur

Le niveau d’implication influence le processus de choix du consommateur. Le tableau ci-après proposé par Robertson, Zielinski et Ward (1984) synthétise les effets possibles de l’implication sur les attitudes et comportements des consommateurs.

Par ailleurs, un certain nombre d’auteurs montrent que l’influence de l’implication sur le comportement du consommateur est fonction du type d’implication. Hirschman et Holbrook (1982) parle d’un rôle plus important pour l’implication affective. Mittal (1989) observe, lui, que l’intensité de la recherche d’information est fonction du type d’implication, un produit impliquant de manière utilitaire incite à une plus fort recherche d’information qu’un produit à forte implication affective. En résumé, plus l’implication utilitaire du consommateur envers le produit est forte, plus celui-ci essaie d’analyser des attributs du produit et d’obtenir plus de connaissances sur ce produit. Ce qui n’est pas le cas pour l’implication affective car l’implication affective, provoquée par une volonté d’exprimer ses valeurs accorde plus d’importance à l’image globale du produit plutôt qu’à une analyse détaillée des attributs du produit (Hirschman, 1983 ; Park et Young, 1983).

Forte implication Faible implication Recherche

d’information

Recherche d’information active sur le produit et la marque

Recherche d’information limitée sur le produit et la marque

Réaction cognitive Réclamation et réfutation aux informations

désaccordées Acceptation passive

Processus du traitement de l’information

Traitement d’informations selon la hiérarchie d’effet

Irrégularité de l’ordre et du niveau de traitement d’information

Attitude Résistance au changement de l’attitude à long

terme

Changement facile et temporaire de l’attitude

Répétition Le contenu de répétition est plus important

que le nombre de répétition

L’exposition fréquente est efficace pour convaincre le consommateur

Préférence de marque Établissement de la fidélité sur la marque Achat habituel ou changement de marque

Désaccord cognitive Plus d’expérience en fonction du désaccord cognitif

Peu d’expériences en fonction du désaccord cognitif

Influence d’autrui Influence forte sur la prise de décision Influence faible sur la prise de décision Source : Robertson, Zielinski et Ward (1984), Consumer Behavior, Robertson & Robertson, Inc, p. 125

3. Hypothèse de recherche – le rôle modérateur de l’implication

En général, les ouvrages en comportement du consommateur, considèrent que le processus de choix est plus réfléchi, détaillé en situation de forte implication qu’en situation de faible implication. Le consommateur consacre plus de temps dans sa recherche d’informations, procède à une évaluation systématique des différentes options (marques, produits), et procède à une évaluation post-achat (qualité, satisfaction) plus explicite. Par contre, en cas de faible implication, le consommateur est dans un processus de réponse routinière (Howard et Seth, 1969).

Un certain nombre d’auteurs montrent que l’implication influence la manière dont se forme la satisfaction du consommateur (Oliver, 1976 ; Gronhaug, 1977 ; Day, 1977 ; Swan et Trawick, 1979 ; Bearden et Teel, 1983 ; Barber et Venkatraman, 1986 ; Swan, 1988; Richins et Bloch, 1991 ; Patterson, 1993 ; Anderson, 1994 ; Peterson et Power, 1995). L’explication est que les individus impliqués recherchent plus et mieux de l’information, ce qui fait que leurs attentes sont plus réalistes que celles des individus peu impliqués. Oliva, Oliver et Bearden (1995) observent aussi que les individus impliqués sont plus tolérants

dans leur évaluation de la qualité que les individus peu impliqués. Or ce résultat est différent de celui obtenu par Goodman et al (1995) puisque ces auteurs observent que l’implication a tendance à rehausser (augmenter) l’insatisfaction des consommateurs, en particulier lorsque le consommateur estime avoir consenti un effort important (exemple, le prix). En réalité, cela dépend de la nature de l’aspect du produit qui est source d’insatisfaction du consommateur (Ngobo, 1997). Lorsqu’il s’agit d’un aspect périphérique, le résultat d’Oliva et al (1995) expliquera mieux les choses (tolérance) alors que l’explication de Goodman et al (1995) sera plus pertinente en cas d’insatisfaction sur un aspect central de la prestation.

Par ailleurs, les auteurs semblent indiquer que les déterminants de la satisfaction et, par extension, de la fidélité varieront selon le niveau d’implication voire même selon le type d’implication. Pour ce qui est du niveau d’implication, Churchill et Surprenant (1982) constatent que le processus de jugement de satisfaction du consommateur est différent selon qu’il s’agit d’un produit durable ou d’un produit non durable. Oliver (1989 ; voir aussi Tse et Wilton, 1988) souligne que le processus de conformation/infirmation des attentes n’influence pas la satisfaction des consommateurs en situation de forte implication. Oliver et Bearden (1983) mettent en évidence la prépondérance de la qualité perçue sur le processus de confirmation/information des attentes en situation de forte implication. En situation de forte implication, Bolfing et Woodruff (1988) observent que le consommateur accorde une plus grande importance à la performance du produit qu’à la comparaison entre performance et attentes, et qu’en situation de faible implication, cette comparaison est plus importante que la performance.

Pour ce qui est du type d’implication, Hirschman et Holbrook (1982) indiquent que le caractère symbolique est plus important que le caractère concret dans le choix d’un produit à forte implication affective. De plus, Hirschman (1983) et de Park et Young (1983) considèrent que lorsque l’implication cognitive à l’égard d’un produit est forte, le consommateur tente d’analyser les attributs de ce produit (évaluation systématique, détaillée). Par contre, si l’implication émotionnelle est élevée, le consommateur tend à se centrer sur l’image globale du produit. Il procédera donc à une évaluation holiste. Ces résultats (Oliva et al. 1995 versus Goodman et al 1995 ; Park et Young, 1983), nous permettent de formuler les hypothèses suivantes :

H5 : Les visiteurs les plus impliqués (cognitivement ou émotionnellement) ont des opinions (qualité, valeur, satisfaction, intentions de fidélité) plus favorables que les consommateurs les moins impliqués.

H6 : En situation de forte implication (cognitive ou affective), les relations entre les variables (de notre modèle) seront plus fortes qu’en situation de faible implication.

Par ailleurs, on peut penser au regard de ces recherches qu’en situation de forte implication émotionnelle, le consommateur va procéder à une évaluation plus holiste, qui se manifesterait comme un effet de halo. S’il en est ainsi, alors on peut penser que leurs jugements seront plus favorables que ceux des individus qui sont cognitivement impliqués. De même, les relations (corrélations) entre les variables seraient plus fortes en situation de forte implication émotionnelle qu’en situation de forte implication cognitive. Par conséquent, nous formulons l’hypothèse suivante :

H7 : Les visiteurs les plus impliqués émotionnellement ont des opinions (qualité, valeur, satisfaction, intentions de fidélité) plus favorables que les consommateurs impliqués cognitivement.

H8 : Les relations entre les variables (de notre modèle) seront plus fortes en situation d’implication affective ou émotionnelle (phénomène de halo) qu’en situation de forte implication cognitive (plus de réalisme).

Passebois (2005) considère que la compétence esthétique est une variable capitale dans la littérature sur l’appréciation esthétique, en particulier dans les ouvrages en sociologie. La compétence esthétique est proche, mais distincte, des notions bien connues en marketing d’expertise, de familiarité et de connaissances détenues sur un produit/service ou une catégorie de produit/service (Aurier et Ngobo, 1999). Elle définit la compétence esthétique comme l’ensemble des connaissances acquises par le récepteur (visiteur) sur les œuvres d’art, sa capacité à porter des jugements esthétiques mais aussi son habileté à faire face à des situations diverses et à savoir se comporter dans une situation de consommation culturelle. Ainsi définie, la compétence esthétique se distingue, selon elle, de la

connaissance esthétique. La connaissance s’acquiert par apprentissage didactique mais la compétence esthétique résulte d’une acculturation avec le monde de l’art, donc de la familiarité.

En marketing, le rôle de l’expertise et de la connaissance des consommateurs sur la nature des processus de prise de décision, sur les évaluations de qualité ainsi que sur le processus de satisfaction a été mis en évidence. Également, certains travaux marketing (Passebois et Aurier, 2004 ; Passebois, 2005) encouragent à étudier le rôle de cette variable sur la consommation culturelle et la fidélité des consommateurs. Selon Passebois (2005), la fidélité à une institution et la compétence esthétique seraient intimement liées. La compétence esthétique joue tout d’abord un rôle important comme variable modératrice dans la formation de fidélité du visiteur de musées. Cependant, le rôle de la compétence esthétique est discutable dans la mesure où les visiteurs de musées, du moins dans le cas de la Corée du sud, sont des individus d’origines sociales diverses, qui y viennent pour des raisons différentes. Il est possible que la compétence esthétique joue un rôle important dans la formation de fidélité pour le visiteur qui a déjà eu beaucoup d’expériences et qui dispose d’un certain niveau de connaissances sur le musée et l’art. Mais, selon des études existantes, il s’avère que la plupart des visiteurs, surtout des visiteurs d’un musée national et international, ont rarement beaucoup d’expériences et de connaissances sur l’art et des activités du musée (Rhee, 2003 ; Combs, 1999 ; Yang, 2003 ; Yalowitz, 2001 ; Chadwick, 1998 ; Kolb, 2000 ; Kotler et Kotler, 1998).

Dans cette recherche, nous allons donc aborder l’implication du visiteur de musées au lieu de la compétence esthétique du visiteur, tout en la divisant en deux aspects. L’implication sur le plan cognitif d’une part et celle sur le plan affectif d’autre part, sans la limiter en compétence esthétique du visiteur.