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3.3 Les différentes hypothèses que la mission ne retient pas

3.3.2 Les autres hypothèses pouvant être évoquées, que l’analyse conduit à écarter

3.3.2.1 Un CPP national pour les recherches interventionnelles sur les médicaments et maintien de CPP locaux pour les autres domaines.

[190] La principale contrainte qui va s’imposer très prochainement sur le champ des essais cliniques sur les médicaments est le délai qui sera extrêmement réduit par le prochain Règlement européen, assorti d’une mesure d’autorisation tacite en cas de non-réponse dans ledit délai.

Mobiliser l’ensemble des CPP autour de ces objectifs alors que le futur Règlement ne concernera qu’une partie de leur activité a fait émerger, au cours de l’enquête menée par la mission, l’éventualité d’une dissociation entre :

 Les essais cliniques interventionnels sur le médicament, sur lesquels vont effectivement peser les nouvelles contraintes de délais ;

 Les essais cliniques sur les DM et les DM-DIV, qui feront également l’objet de Règlements Européens comportant des contraintes de délais, mais avec une application plus éloignée dans le temps ;

 Les autres recherches appartenant aux trois catégories Jardé, sur lesquelles ne pèseront pas ces contraintes.

[191] Historiquement, la règlementation européenne en matière de recherches sur le médicament a été motrice pour l’ensemble des recherches auxquelles, en France, les mesures ont été élargies. On pourrait cependant imaginer que, compte tenu des contraintes importantes de délais prévues par le prochain Règlement, l’organisation soit repensée pour répondre spécifiquement à cette contrainte, sans s’imposer pour toutes les recherches.

[192] Il pourrait ainsi apparaître logique de constituer un comité de protection des personnes national pour les essais cliniques sur le médicament (dont les missions pourront ensuite être élargies aux essais sur les DM et DM-DIV) placé auprès de l’ANSM, et de conserver l’évaluation par les CPP actuels des autres projets de recherches.

[193] Bien que séduisante, cette option a été toutefois très vite abandonnée par la mission, pour plusieurs raisons :

 Le nombre de dossiers à traiter (environ un millier par an) imposerait, comme dans l’option CPP unique professionnalisé ci-dessus envisagée, une professionnalisation des membres du nouveau comité, avec les inconvénients cités supra et sans garantie que les délais puissent être tenus ;

 Les coûts de fonctionnement d’une telle structure seraient conséquents, alors même que ceux aujourd’hui consacrés aux CPP ne diminueraient pas sensiblement ;

 Le recrutement des experts serait d’autant plus difficile pour ce nouveau comité que ceux qui participent aux CPP actuellement continueraient à y consacrer leur temps disponible pour cette activité ;

 Par ailleurs, les membres de CPP ont unanimement indiqué à la mission que le retrait du champ du « médicament interventionnel » enlèverait tout intérêt à la participation à un CPP : c’est sur ce champ que s’acquiert l’expertise, la compréhension du fonctionnement, des enjeux de la recherche, des nuances des différents protocoles et des conséquences sur les patients inclus, y compris pour les autres types de recherches. C’est également là que se trouvent les principaux risques ;

 L’idée d’un comité d’éthique national « noble » pour le médicament et du reste revenant aux CPP serait de nature à démotiver les membres à participer aux CPP locaux, qui seraient rapidement désertés et détruits, laissant une grande partie des recherches sans évaluation, donc dans l’impossibilité d’être mises en œuvre.

[194] Ainsi, cette option paraît cumuler les inconvénients de l’instance unique professionnalisée et du maintien de la multiplicité des CPP et ne peut être retenue.

3.3.2.2 1 CPP par interrégion

[195] Une autre option étudiée est celle de la fusion des CPP actuels en 7 comités interrégionaux, en cohérence avec l’actuelle organisation de la recherche en France. Permettant un regard plus précis sur le terrain par rapport à des enjeux nationaux, une telle organisation, qui devra toutefois bénéficier d’une coordination nationale, pourrait favoriser les convergences entre les différentes instances de recherche interrégionales et les CPP.

[196] C’est l’organisation qu’ont retenue les pays scandinaves : Suède (6 comités régionaux et un national), Danemark et Finlande (9 comités régionaux et 1 national). L’extrapolation à la France n’est toutefois pas pertinente, compte tenu de la faible densité démographique de ces pays et de la place mineure qu’ils tiennent dans la recherche internationale.

[197] Après analyse, la mission ne retiendra pas non plus cette option :

 La disponibilité des membres posera problème : les déplacements au sein d’une même région (hors Ile-de-France) peuvent déjà être complexes, mais dans une interrégion, cela peut être infaisable, le passage par Paris étant parfois nécessaire. Les coûts de déplacement s’en verraient sensiblement augmentés, mais surtout, les membres déserteraient rapidement les comités ;

 Le nombre de dossiers à traiter par CPP serait beaucoup trop important pour pouvoir être assurés dans les délais nécessaires : si l’on ne considère que les 3000 dossiers initiaux des recherches interventionnelles actuellement soumis aux CPP, une telle fusion au niveau interrégional représentera une concentration de 430 dossiers annuels à traiter par chaque CPP ;

 A raison de 5 dossiers initiaux (sans compter les amendements, ni les nouvelles études dont la loi Jardé exige la soumission) par séance comme indiqué supra, il sera nécessaire

d’organiser au moins 86 séances par an, soit environ une séance tous les trois jours ouvrés, ce qui est incompatible avec une activité professionnelle principale et un bénévolat pour la participation au CPP ;

 La solution de la tenue de vidéoconférences a été évoquée à plusieurs reprises, mais tenir une séance de plusieurs heures avec un tel média apparaît à l’usage très désagréable, techniquement peu stable (coupures,...), la tenue des débats s’en trouve perturbée, surtout lorsqu’apparaît un désaccord.

[198] Là encore, la faisabilité d’une telle hypothèse ne peut être garantie et en tout état de cause les gains pouvant en être attendus en termes de délais et de simplification ne seraient pas, loin s’en faut, proportionnels aux coûts supplémentaires tant financiers qu’humains et organisationnels d’un tel changement.

3.3.2.3 4 CPP par interrégion ou 1 CPP par région

[199] Le groupe de travail sur le décret de la loi Jardé a envisagé une option séduisante, qui est la rationalisation de la répartition des CPP sur le territoire, en ne maintenant que quatre comités par interrégion. L’avantage serait pour les promoteurs d’avoir la garantie de la tenue d’une séance validant les avis au moins une fois par semaine sur l’interrégion, chaque comité se réunissant au moins une fois par mois.

[200] La logique sous-tendant cette option est qu’un nombre limité de « gros » CPP importants et bien équipés seront en capacité de traiter plus efficacement un nombre nettement plus important de dossiers que beaucoup de « petits » comités. De fait, on peut imaginer des gains d’efficience en augmentant raisonnablement la masse critique, pour autant que les moyens alloués à chaque comité soient dimensionnés pour lui permettre de traiter plus rapidement une quantité plus importante de dossiers. Avec 4 CPP par interrégion, la faisabilité paraît pouvoir être atteinte (22 séances par an, ce qui exige la tenue d’une séance par quinzaine, voire par semaine si les CPP se voient effectivement soumis les projets d’études observationnelles), sous réserve d’une restructuration planifiée et pilotée au niveau interrégional.

[201] Cette dernière exigence se heurte toutefois d’une part, à l’absence de structure interrégionale à même d’assurer un tel projet, d’autre part à l’absence d’évaluation précise des CPP, fondant les décisions éventuelles de création ou suppression de comités.

[202] Surtout, pour de nombreux comités, le passage d’une séance par mois à une séance par semaine ou quinzaine supposera une réorganisation profonde, y compris en termes de recrutement des membres bénévoles. Ces derniers devront dégager plus de temps à consacrer à l’activité du CPP, sauf à augmenter leur nombre (ce qui va être difficile et par ailleurs contreproductif) ou à considérer les actuels suppléants comme des membres à part entière. Les frais de déplacement et d’hébergement des personnes seront de plus conséquents. Enfin, une certaine lassitude risque de naître d’une trop grande fréquence des réunions, préjudiciable à la qualité et à l’efficacité des travaux. Le respect des quorums risque alors de devenir un problème crucial.

[203] Une dernière remarque concerne la volonté du législateur, qui a adopté le principe d’une désignation aléatoire du CPP chargé de chaque projet pour neutraliser les conflits d’intérêts : la présente hypothèse rendrait délétère un tirage au sort faisant risquer une programmation de la séance suivante trop précoce pour permettre au CPP désigné de traiter le dossier dans les temps, ou au contraire trop tardive pour permettre de tenir les délais exigibles. De plus, le tirage au sort deviendra inutile, le promoteur pouvant de fait choisir le CPP qu’il préfère en déposant son dossier en fonction du calendrier de programmation des séances dudit CPP.

[204] Il apparait ainsi que, sans constituer une solution véritablement adaptée, l’option « 4 CPP par interrégion », similaire à celle d’un CPP par région, serait envisageable à moyen ou long terme, mais ne constitue pas une solution susceptible d’être adoptée dans l’immédiat pour répondre aux défis liés à l’arrivée des Règlements Européens et aux mesures exigées par la loi Jardé.

3.4 Les deux scénarios retenus par la mission : complémentaires dans