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1.   INTRODUCTION 1

1.4.   La progression en cancer de la prostate résistant à la castration et résistant

1.4.3.   Hormonothérapie de seconde génération 55

1.4.3.1. Abiraterone

L’Abiraterone acétate est un inhibiteur sélectif de la synthèse des androgènes. Son élément actif, l’Abiraterone, bloque la CYP17 de façon irréversible (Yin and Hu, 2014; Loriot et al., 2013). La CYP17 est une enzyme qui joue un rôle clé dans la biosynthèse de la testostérone, à la fois au niveau des testicules (voie hypothalamo-hypophysaire testiculaire), des glandes surrénales ou encore des cellules tumorales prostatiques (tel que présenté dans la section 1.1.1). L’Abiraterone permet ainsi un blocage androgénique complet. De plus, sa structure stéroïdienne lui permet d’être converti en Δ4-Abiraterone par la 3β-HSD, qui aura une structure à la fois suffisamment similaire à la testostérone pour se lier au AR, mais différente pour que sa liaison au AR l’inhibe (Li et al., 2015).

Les résultats des essais cliniques COU-AA-301 et COU-AA-302 ont permis de mettre en évidence une amélioration de la survie globale. Cette dernière est prolongée de 4.7 mois

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(COU-AA-301) et 8.2 mois (COU-AA-302) après traitement combiné d’Abiraterone et Prednisone comparativement à un placebo combiné au Prednisone chez des patients naïfs (COU-AA-302) ou ayant été premièrement traités au Docetaxel (COU-AA-301) (Ryan et al., 2013; Fizazi et al., 2012; de Bono et al., 2011). De plus, l’Abiraterone améliore le contrôle des douleurs et retarde l’utilisation de la chimiothérapie. Les effets indésirables liés à l’excès de minéralocorticoïdes et aux anomalies hépatiques sont plus fréquents avec l’Abiraterone, mais restent de faible intensité. C’est pour cette raison que des corticostéroïdes sont utilisés à faible dose simultanément, afin d’inhiber la stimulation d’ACTH et donc l’augmentation de minéralocorticoïdes qui favorisent la rétention d’eau, l’hypokaliémie et l’hypertension. L’Abiraterone est le seul inhibiteur recommandé comme traitement standard pour le CRPC métastatique (approuvé en 2011 par la FDA en post- chimiothérapie, et en 2012 pour tout CRPC métastatique).

On peut noter que le Ketoconazole était le premier inhibiteur de la CYP17, mais qu’il présentait une faible spécificité pour cette enzyme, un effet anti-tumoral limité et un blocage androgénique incomplet (Attard et al., 2009; Small et al., 2004). De plus, il entrainait une forte toxicité, notamment hépatique, et n’est donc plus recommandé par la FDA depuis 2013.

1.4.3.2. Enzalutamide

L’Enza est un anti-androgène de seconde génération, aussi connu sous le nom de MDV- 3100. Il a été développé dans le but d’inhiber la voie du AR réactivée chez les patients CRPC. Son développement a été basé notamment sur les mécanismes de résistance apparus après traitement avec des anti-androgènes de première génération (Tran et al., 2009; Chen et al., 2004).

1.4.3.2.1. Mode d’action

L’Enza se lie au AR au niveau du LBD et entre en compétition avec les androgènes (testostérone et DHT), qui ne peuvent donc plus activer AR (Figure 1.9). La fixation de l’Enza au AR va également empêcher la translocation au noyau du complexe DHT-AR, ainsi que le recrutement de cofacteurs et la fixation du AR à l’ADN, ce qui permet donc d’inhiber la transcription de ses gènes cibles (Sternberg et al., 2014a; Scher et al., 2010; Tran et al., 2009). Cependant, les mécanismes sous-jacents demeurent inconnus. Ce blocage entraîne une diminution de la prolifération et une augmentation de l’apoptose. Cet

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effet anti-tumoral a été observé dès les essais ex vivo à partir de modèles de xénogreffes CRPC, puis confirmé dans des essais de phase I/II, où le taux de PSA était réduit de moitié chez 51% des patients, et où une régression de la tumeur était visible par imagerie (Scher et al., 2010).

Figure 1.9: Mode d’action de l’Enzalutamide

L’Enza bloque la voie du AR au niveau de trois endroits clés afin d’empêcher la progression tumorale. Il inhibe à la fois la liaison des androgènes au AR par sa fixation compétitive au LBD (1), la translocation nucléaire du AR (2), ainsi que sa liaison à l’ADN (3).

L’Enza a une plus grande affinité pour le LBD du AR que ses prédécesseurs, le Bicalutamide ou le Flutamide, et présente ainsi une efficacité supérieure à ces derniers. En effet, son affinité pour le LBD du AR serait jusqu’à 9 fois plus élevée que celle du Bicalutamide dans un modèle cellulaire CRPC (Guerrero et al., 2013; Tran et al., 2009). L’Enza ne possède également aucune activité agoniste sur la transcription de gènes cibles tels que la PSA, contrairement aux anti-androgènes de première génération (Tran et al.,

Testosterone 5α-reductase DHT Dimérisation et Phosphorylation HSP AR ARE Gènes cibles (PSA)

Survie Prolifération Croissance

HSP AR P P P P AR AR P P P P AR AR cofa cteu rs Cyto plasm e Noy au Enzalutamide (Enza) 3 2 1

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2009). De plus, il reste efficace même lorsque AR est surexprimé ou muté. En effet, il a été montré que l’Enza conserve une activité inhibitrice même en présence d’un variant du AR ayant perdu le LBD (AR-V7) (Antonarakis et al., 2014). L’Enza est donc un traitement de choix puisqu’il peut agir aussi bien par le biais de mécanismes dépendants qu’indépendants du ligand.

1.4.3.2.2. Études AFFIRM et PREVAIL

Les résultats concluants de deux essais cliniques ont permis l’approbation de l’Enza par la FDA en 2012, pour les patients CRPC métastatiques. En effet, l’étude internationale en double aveugle AFFIRM (Safety and Efficacy Study of MDV3100 in Patients With Castration-Resistant Prostate Cancer Who Have Been Previously Treated With Docetaxel- based Chemotherapy) démontre que les patients atteints de CRPC résistants au Docetaxel ont une survie prolongée de 4.8 mois après traitement à l’Enza comparée à un placebo. Cette étude a également mis en évidence une diminution de 37% de risque de décès (Scher et al., 2012). De plus, une diminution de plus de 50% du taux de PSA a été observée, ainsi qu’un retard de 5.3 mois sur une ré-augmentation de ce taux. Cependant, 25% des patients étaient primo-résistants à l’Enza dans cette étude, et tous les patients ont développé une résistance en moins de 24 mois (Sternberg et al., 2014b). De son côté, l’étude PREVAIL (A Safety and Efficacy Study of Oral MDV3100 in Chemotherapy-Naive Patients With Progressive Metastatic Prostate Cancer) montre que l’Enza est également efficace chez les patients CRPC métastatiques hormono-naïfs en pré-chimiothérapie (Beer et al., 2014). En effet, une survie prolongée de 2.2 mois et un risque de décès diminué de 29% ont été observés après traitement à l’Enza par rapport à un placebo. Un délai de 18 mois avant qu’un traitement par chimiothérapie soit nécessaire a également été constaté.

De plus l’Enza semble, d’après ces deux études cliniques, améliorer la qualité de vie des patients, soulager la douleur et retarder l’apparition d’un nouvel événement métastatique (Beer et al., 2014; Scher et al., 2012). L’Enza est également bien toléré par les patients. En effet, la fatigue, les bouffées de chaleur et les nausées sont les effets secondaires les plus rapportés dans l’essai AFFIRM et le risque de complications associées aux corticoïdes (comme pour l’Abiraterone) est évité. Cependant, l’évaluation des effets indésirables à plus long terme que pour l’étude PREVAIL pour les patients traités en pré-

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chimiothérapie ne pourra être réellement effectuée qu’après approbation de l’Enza pour cette catégorie de CaP (Greasley et al., 2015).

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