C. Le métabolisme et la reproduction
4. Les médiateurs
4.3. Les autres hormones
D’autres hormones sont impliquées dans le contrôle de l’homéostasie énergétique et la prise
alimentaire. Un certain nombre d’entre elles participent à la régulation de la fonction de
reproduction au niveau central et/ou ovarien (Figure 35) (
301). Il ne s’agit pas ici d’en faire la
liste exhaustive. Je voudrais simplement aborder le rôle de la résistine et de l’Adipo (figure
36).
4.3.1. La résistine
Cette adipocytokine a déjà été décrite dans le premier chapitre de l’introduction. Lors de sa
découverte, sa fonction au sein du métabolisme semblait prometteuse ; aujourd’hui elle n’est
pas claire. La résistine est exprimée dans l’hypophyse et l’hypothalamus (
416). La sur- ou la
sous-expression de cette molécule ne semble pas avoir de conséquence sur la reproduction,
chez le rat (
78,417). L’expression de la résistine dans le tissu adipeux et au niveau pituitaire
augmente en pré-pubertaire chez le rongeur (
416) en réponse à un signal hypothalamique
Tableau 6
:
Influence des stéroides sexuels, de la puberté, des troubles de fertilité sur la l’expression et la concentration plasmatique de l’Adipo,Adapté de Mitchell et al, 2005, (102)
(
102,416). Chez cette espèce, elle a été co-localisée avec les neurones contrôlant le
comportement alimentaire au niveau thalamique (
102). Chez le rongeur, l’expression
testiculaire de la résistine est régulée par les gonadotrophines (FSH et LH) (
102). In vitro, la
résistine peut augmenter la production de testostérone par des cellules de testicule de rat en
culture (
418). Dans des cellules de la thèque humaine en culture, la résistine peut augmenter
l’activité de la 17 alpha-hydroxylase en présence d’insuline, suggérant son rôle éventuel dans
l’hyperandrogénie présente dans le SOPK (
419).
4.3.2. L’adiponectine
L’adiponectine, produite essentiellement par le tissu adipeux, a été déjà décrite dans le
premier volet de cette introduction. Tout d’abord, elle a trouvé une place importante au sein
du métabolisme. De par ses propriétés, notamment insulino-sensibilisatrices et de par les
voies de signalisation (l’AMPK, par exemple) qu’elle utilise, l’Adipo semble être un lien très
fort, en physiologie et en pathologie, entre le métabolisme et la fonction de reproduction. Son
implication dans cette fonction est assez récente (
102,420). Dans les modèles pathologiques que
sont le diabète de type 2, l’obésité et le SOPK, la concentration d’Adipo est diminuée, en
probable relation avec l’insulino-résistance, existant dans ces différents modèles (
421). Cette
baisse de l’adiponectinémie peut-être indépendante de l’indice de masse corporelle mais
corrélée à l’importance de l’obésité abdominale et à l’hyperandrogénie (
422). Certaines études
ont suggéré que l’Adipo n’est pas directement liée à l’insulino-résistance (
423). Elle pourrait
être un facteur favorisant son apparition en raison de son action sur certaines cibles de
l’insuline, telle le foie ou le muscle squelettique (
422). Les pathologies sus-citées sont souvent
associées à une moindre fertilité (
421). Or, comme rapporté précédemment, des traitements
insulino-sensibilisateurs peuvent avoir une action favorable sur le taux d’ovulation (
424,425).
Les stéroïdes sexuels peuvent influencer la concentration plasmatique d’Adipo. Les
oestrogènes semble avoir un impact positif sur la concentration d’Adipo alors que les
androgènes (testostérone) diminue l’adiponectinémie (
102,426) (tableau 6).
Des modèles animaux ont été utilisés pour une meilleure connaissance de l’Adipo. Les souris
présentant une invalidation complète du gène de l’Adipo sont insulino-résistantes avec ou
sans infertilité (
135,427,428). Dans une autre étude, l’invalidation des gènes des récepteurs
AdipoR1 et AdipoR2, n’a pas entraîné de baisse de fertilité ni chez le mâle ni chez la femelle
(
109,420). Par contre, dans un travail différent, le sous-expression d’AdipoR2 a pour
conséquence une atrophie des tubes séminifères et une aspermie avec une testostéronémie
normale (
429). En cas de surexpression du gène de l’Adipo, la concentration d’Adipo est
élevée et associée à une hypo ou une infertilité (
137,420,430). Chez le rongeur, l’ensemble de ces
résultats sont donc contradictoires et ne permettent pas de conclure.
Récemment, le système Adipo a été décrit dans l’hypothalamus de rat et d’humain (
111) et au
niveau hypophysaire (
431). L’Adipo recombinante semble pouvoir réguler l’expression des
récepteurs du GnRH des cellules hypophysaires, en culture primaire (
431). Cette hormone peut
aussi inhiber la sécrétion basale de la LH et celle stimulée par le GnRH dans des cellules
gonadotropes LβT2 en culture et dans des cellules hypophysaires de rat (
431,432). De plus,
l’Adipo et ses récepteurs ont été mis en évidence dans le placenta de rate et de femme et plus
particulièrement au niveau du syncytiotrophoblaste (
433-435). Dans le placenta de rate, le
niveau d’expression de l’ARN messager de l’Adipo augmente beaucoup pendant la gestation
tandis que celui de l’AdipoR2 décroît (
434). Ce système a été isolé dans l’endomètre de souris
et de lapine en début de gestation (
435) et dans l’endomètre de femme tout au long du cycle
menstruel. L’expression de l’Adipo est plus importante en phase proliférative précoce alors
qu’elle l’est au milieu de la phase sécrétoire pour les récepteurs (
436). Cette expression est
aussi retrouvée dans l’oviducte de rate (
437). L’Adipo et ses récepteurs ont été identifiés dans
le testicule de rat (
438) et dans l’ovaire de nombreux mammifères telles que la truie (
439,440), la
poule (
441-443) et la rate (
443). L’Adipo a été identifiée dans le liquide folliculaire (femme et
truie (
440,444), dans l’ovocyte de rate (
443), le corps jaune (
443), dans les cellules de thèque
(
442,443) et en quantité plus faible dans les cellules de la granulosa de poule (à tous le stades du
développement folliculaire et de rate (
443). Chez la femme, la LH recombinante induit, in vivo,
une élévation de la production d’Adipo dans le liquide folliculaire (
445). Dans le testicule de
rat, l’Adipo recombinante inhibe la sécrétion basale de testostérone et celle stimulée par
l’hCG exogène (
438). Enfin, le groupe de Ledoux a montré que l’Adipo recombinante avait des
effets directs sur l’expression de certains gènes exprimés dans les cellules folliculaires de
truie et impliqués dans le développement folliculaire (
440).
L’ensemble des connaissances exposées dans cette introduction montre que l’Adipo est
surtout connue pour son action métabolique. Des données suggèrent par ailleurs qu’elle
pourrait jouer un rôle important dans la fonction de reproduction. L’Adipo pourrait être un
élément clé en physiologie comme en pathologie. Cependant, il existe encore beaucoup
d’inconnues et de contradictions. Ce travail de thèse a tenté de répondre à un certain nombre
d’interrogations afin de mieux comprendre le rôle de l’Adipo et la relation existant entre la
pathologie de la reproduction et les anomalies du métabolisme. Ces désordres sont, en effet,
rencontrés chez certaines patientes obèses, diabétiques et / ou porteuses d’un SOPK.
Le premier de nos objectifs était de savoir si l’Adipo et ses récepteurs étaient exprimés au
niveau de l’ovaire. In vivo, nous avons étudié leur expression dans l’ovaire de poule, de rate et
de femme. Dans une seconde partie du travail, nous avons voulu décrire le rôle du système
Adipo au niveau ovarien. Pour cela, nous avons exploré, in vitro, son rôle dans la
stéroïdogenèse ovarienne chez ces trois espèces, en utilisant de l’Adipo recombinante.
L’Adipo possède une structure extrêmement conservée chez les mammifères. Le pourcentage
d’identité entre les adiponectines de différentes espèces est souvent de plus de 80 %
(rongeurs, porc et humain). Nous nous sommes intéressés à l’expression des protéines de la
stéroïdogenèse en présence d’Adipo et à l’implication de certaines voies de signalisation
(AMPK, MAPK ERK1/2 et p38 et Akt) dans la transduction du message « adiponectine ».
Enfin, pour mieux comprendre la pathologie, nous avons exploré ce système Adipo
respectivement dans l’ovaire de rate diabétique (diabète induit par la streptozotocine) et dans
des cellules de la granulosa de rate cultivées en présence de fortes concentrations de glucose.
Dans le document
Expression, régulation et rôle du système adiponectine dans l'ovaire chez trois espèces
(Page 99-105)