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d. La notion de consommation de l’entourage

1. Histoire du cannabis

A. GENERALITES

1. Histoire du cannabis

Le cannabis ou chanvre est l’une des plantes les plus anciennement connues et cultivées par l’homme, tant pour son intérêt agricole que pour ses propriétés médicinales et psycho actives selon la variété. Son utilité l'a fait conserver par tous les peuples au travers des migrations à partir des régions centrales d'Asie, d'où son joli surnom évocateur de "suiveur d'hommes". On le trouve aujourd'hui répandu dans presque toutes les régions du globe, sauf dans les régions constamment froides ou dans les forêts primaires humides [3].

Le cannabis a été décrit en Chine au troisième millénaire avant l’ère chrétienne. La fibre de chanvre était utilisée pour l’habillement, les cordes, les arcs et le papier ; et bien que l’intoxication récréative ne fût pas particulièrement encouragée par la culture taoïste, le cannabis était utilisé en médecine ainsi que pour les rites religieux et magiques. Ses effets toxiques ont plutôt été exploités dans l’Inde ancienne ; selon les Vedas hindous, le dieu Siva a découvert le cannabis et a élaboré la boisson rafraîchissante appelée bhang (qui contient également des graines de pavot, du gingembre, du giroflier, de la cardamome, de la muscade et du lait). Un breuvage encore plus puissant préparé à partir des sommités fleuries est appelé ganja, et une concoction encore plus forte faite à partir de plantes très riches en résine est appelée charas [4].

Les intoxications orales au cannabis chez l’enfant : aspects épidémiologique clinique évolutif et médico-légal

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Au Ve siècle avant J.-C., Hérodote décrivit les rites funéraires des Scythes : du chanvre était placé sur des pierres chauffées au rouge dans une pièce fermée et produisait des vapeurs toxiques [5]. Pline et Dioscoride ont également décrit l’intoxication au cannabis, et il est possible que les termes de l’Ancien Testament « rayon de miel » dans le Cantique des cantiques de Salomon et « plante de miel » dans le premier livre de Samuel (SmI, 14, 25-30) fassent référence au cannabis [6].

Au Moyen-Orient, pendant le XIe siècle, les membres de la secte islamique soufie utilisaient le haschisch – dont la puissance était comparable au charas et qui était soit ingéré sous forme de pâte soit mélangé avec du sésame puis mâché comme un chewing-gum – pour atteindre l’extase religieuse [7]. L’association du cannabis avec cette minorité méprisée et opprimée est à l’origine de la réputation d’initiateur de violence attribuée à tort au cannabis. La référence arabe aux consommateurs de haschisch (haschischins) sera transcrite pendant les Croisades par le mot « assassin ».

Le cannabis fut d’abord introduit en Europe pour ses fibres au XVIe siècle. Rabelais décrivait de nombreux merveilleux usages du cannabis – qu’il nommait le « Pantagruelon » – mais l’intoxication n’en faisait pas partie [8]. À cette époque, il était utilisé dans la médecine populaire (notamment pour prévenir les crises convulsives) ; l’ingestion dans un cadre non médical était principalement limitée aux cultes religieux [7].

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L’Afrique a une longue tradition de consommation de cannabis fumé ; les colons hollandais ont observé cette coutume chez les Hottentots, qui appelaient la plante de cannabis « dagga ». Avec l’invasion de l’Égypte par Napoléon, une nouvelle génération d’Européens a découvert le haschisch et, au milieu du XIXe siècle, le fameux « Club des Hachichins » comptait quelques membres illustres : Théophile Gautier, Victor Hugo, Alexandre Dumas, Eugène Delacroix et Charles Baudelaire [9].

Au XVIIe siècle le cannabis arrive en Amérique latine et en Amérique du Nord par le biais des Européens. Aux États-Unis, au XVIIIe siècle, le cannabis était également cultivé pour ses fibres. Au milieu du XIXe siècle, il était inscrit dans l’US Dispensatory pour le traitement de « la névralgie, la goutte, le tétanos, l’hydrophobie, les convulsions, la chorée, l’hystérie, la dépression mentale, la folie, l’hémorragie utérine et du choléra épidémique ». Au Canada, William Osler considérait le cannabis comme le traitement de choix de la migraine [10].

Le cannabis figurait dans le premier Codex français des médicaments datant de 1818 et a été successivement indiqué dans le traitement entre autres de la peste, du tétanos, de la chorée et des tics douloureux, du choléra, de l’épilepsie, de la rage et de l’hydrophobie, des névralgies, de la fièvre intermittente, des douleurs rhumatismales, des céphalées et migraines ,des dysménorrhées, des dermatoses prurigineuses[11].

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En fait, quelle que soit la maladie visée, on insiste généralement sur le fait que le haschich serait un sédatif, un hypnotique et un antalgique, présentant moins d’inconvénients que l’opium, et susceptible donc de s’y substituer [12].

Cependant le cannabis reste un médicament particulièrement rétif. Il est, selon la préparation, la dose, et la susceptibilité individuelle soit excitant soit calmant, soit spasmolytique soit spasmogène [13]. « Non seulement la même dose agit ou n’agit pas suivant les individus, mais encore elle agit ou n’agit pas sur le même individu suivant le jour où on l’administre [14]. De ce fait, il est pratiquement inutilisable en pratique thérapeutique.

L'histoire récente du cannabis est dominée par celle de sa prohibition. Le chanvre indien est classé "stupéfiant" par la Convention de Genève de 1925, mais la France, dans sa loi de 1916, en avait déjà fait une drogue, alors même qu'il resta légalisé dans les colonies jusque dans les années 50 sous le contrôle de régies locales qui en avaient le monopole. Les Etats-Unis prohiberont le chanvre dès les années 20, "the weed of Madness", l'herbe de la folie, semblant aux yeux de la population puritaine blanche représenter un danger social, car conduisant les noirs et immigrés à des actes de violence et de rébellion contre l'establishment moral (Godot 1992). Ce fut néanmoins surtout le Marihuana Tax Act américain de 1937 qui marqua véritablement le début d'une traque parfois hystérique du consommateur de cannabis. Mais les diverses mesures et les campagnes de prévention n'ont eu en fait que des résultats relatifs: le cannabis est aujourd'hui la substance psychoactive illicite la plus universellement consommée [3].

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