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gt; Au cœur des problèmes

Dans le document 68 : Rhône-Alpes (Page 65-67)

Qu’entend-on par « jeune adulte » et « littérature passerelle » ? Insa Sané, auteur de la collection « Exprim’ » aux éditions Sarbacane, rappelle que « l’adolescent », notion contempo- raine, est celui qui rejette les valeurs issues de la famille et prend des risques

pour créer les structures culturelles de demain. Les jeunes adultes vivant plus longtemps chez leurs parents, les fron- tières de l’adolescence sont constam- ment repoussées. Quant à la littérature jeune adulte, elle ne doit pas avoir pour vocation de « soigner les adolescents

de leur adolescence mais de leur per- mettre de s’amuser et d’être dans le

partage ». Pour Tibo Bérard, directeur

de la collection, la fougue et la moder- nité caractérisent l’adolescence. À ceci répondent une jeunesse d’esprit, une littérature « viscérale où le rythme de la

narration et de la lecture sont rapides »,

une littérature hybride qui mêle les genres et ne s’adresse pas à une tranche d’âge spécifique pour éviter une ghet- toïsation du public. Muriel Buhannic, libraire jeunesse de la Librairie Ravy à Quimper, précise qu’auparavant l’ado- lescent était défini comme un adulte en construction. Aujourd’hui, l’être humain étant en construction identitaire perma- nente et la littérature Jeunesse ayant pour thème cette construction identi- taire, la littérature jeune adulte peut s’adresser aux adolescents comme aux adultes. Quant au jeune adulte, « c’est

1. Voir le compte-rendu vidéo : www.quimper.fr/

actualite/9598/728-actualites-culturelles.htm

Geneviève Patte, laissez les lire. Mission lecture, Gallimard Jeunesse, 2012, 352 p., ISbN 978-2-07-057250-2 Réédition « remaniée et augmentée » de l’édition de 1987 (éd. Autrement) du même titre dont la première version remonte à 1978, ce classique dû à la fondatrice de La Joie par les livres et de la bibliothèque de Clamart a été revisité pour intégrer la révolution du numérique et de l’Internet, mais aussi Harry Potter, Les chroniques de Narnia et nombre de nouvelles références des dernières décennies dans sa réflexion sur le rôle de la littérature et des bibliothèques pour la jeunesse. Il opère à cette occasion un paradoxal retour aux sources puisque aux progrès inexorables du monde virtuel, et au sentiment de toute-puissance lié à la magie du clic, la bibliothèque est de plus en plus appelée à devenir un « centre de sociabilité ». Jeux vidéo, fanfiction, multimédia et interactivité sont ici évalués à l’aune d’une longue expérience, avec le recul d’une grande professionnelle qui profitera aux jeunes geek-bibliothécaires. PL

RAPPEL

bertrand Ferrier, les livres pour la jeunesse, entre édition et littérature, Presses universitaires de Rennes, coll. « Didact édition », 2011, 288 p., ISbN 978-2-7535-1457-7

Qu’est-ce que l’édition et le livre Jeunesse compris dans sa globalité, laquelle excède largement les « bons livres » ? L’objet est d’abord saisi en situation (marché, produits), puis selon ses enjeux (commerciaux et intellectuels, l’accent porté sur les déclinaisons multimédia). Cette approche distanciée traite sur le même plan l’écriture et les aspects juridiques comme techniques. La longue partie conclusive détaille les outils critiques (stylistiques,

sociologiques, multimédia). Le bourdieusisme est ici une arme de destruction massive : « Le fondement du succès des livres pour

la jeunesse réside dans la capacité de l’édition à remplir les fonctions qui lui sont assignées – intégration à l’économie du divertis- sement multimédiatique parfois, toujours diffusion d’une idéologie de la socialisation. » Un sévère rappel au réel, par l’auteur de Mais tout n’est pas littérature ! Le concept de littérarité à l’épreuve des livres pour la jeunesse (PUR, 2009). PL

Actualités de l’ABF

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un adulte tout court » et la question est

surtout de savoir comment le toucher. Quelle réception ? Une enquête menée par le CNL et Babelio a montré que les jeunes adultes qui lisent peu identi- fient mal les collections qui leur sont destinées. Tibo Bérard explique qu’au lancement de la collection « Exprim’2 », les couvertures des romans étaient volontairement très typées ado. La ligne éditoriale ayant changé, aujourd’hui les couvertures sont plutôt mixtes ado- adultes pour élargir le public et désa- craliser la littérature. Muriel Buhannic ajoute que l’offre éditoriale présente tous les cas de figure : des romans avec deux couvertures différentes selon le public, des romans avec une couver- ture typée ado pour un roman adulte, des romans avec une seule et même couverture pour les deux éditions. Quel accompagnement ? Muriel Buhannic précise qu’en librairie on conseille plutôt les adultes qui deviennent prescripteurs auprès de leurs enfants et leurs petits-enfants :

« La référence familiale marche aussi

fort que le conseil du libraire. » Pour

conseiller, le principe est de promou- voir les romans qu’elle a aimés. Ensuite,

elle fait la passerelle auprès des ado- lescents plus mûrs qui ont déjà lu de la littérature adulte pour les accompagner au rayon adulte.

L’évolution éditoriale. Tibo Bérard pré- cise qu’au lancement de la collection, le terme de jeune adulte n’existait pas. À l’époque, deux éditeurs produisaient de la littérature jeune adulte : Au diable Vauvert et Rouergue (« Doado »). Puis, les gros éditeurs sont apparus, affu- blant leurs collections du « label » jeune adulte sans qu’il y ait nécessaire- ment partage de la définition. En même temps, il considère l’arrivée de ces gros éditeurs comme un phénomène très positif, qui fait bouger les lignes, affirme et renforce l’existence de ces collections dans les librairies et les bibliothèques. Muriel Buhannic dresse un rapide historique des collections ado-adultes : la collection « Médium » (l’École des loisirs, 1978), « Doado » (Le Rouergue, 1998), « Tribal » (Flammarion, 1998), « Scripto » (Gallimard, 2002), « Macadam » (Milan, 2004), « Exprim’ » (Sarbacane, 2006), « Black moon » (Hachette, 2007)…

Romans d’Insa Sané : quel profil de lec- teurs ? Insa Sané rencontre son lectorat sur les festivals où les lecteurs vont des 9-11 ans aux retraités. Il rencontre aussi les publics lors des ateliers d’écriture ou des interventions dans les collèges et les lycées. Et, contrairement aux idées reçues, les jeunes lisent ses livres

avant sa venue sans y être contraints. Tibo Bérard explique que le public est mixte et différent selon les lieux : « le

public de Saint-Malo n’est pas le public

de Montreuil. » Il ajoute que la différen-

ciation fille-garçon est une réalité et que d’un point de vue éditorial, il a déjà joué sur cette différence en marquant plus les visuels des romans qui allaient atti- rer les garçons.

> Oser, innover

Cette journée a rempli son objectif : permettre aux différents acteurs de la chaîne du livre et de la lecture publique de présenter leur propre expérience pour la reconnaissance d’une littéra- ture passerelle entre public Jeunesse et public adulte. Au terme de ces riches échanges, Marie-Hélène Le Goff a sou- ligné l’importance du projet d’équipe. Il faut prendre le temps de tisser des partenariats, de travailler ensemble et faire preuve d’un militantisme certain. Deux maîtres mots : Innovons et Osons !

« La littérature passerelle se vit très simplement : un livre coup de poing qui

n’a pas d’âge et qui se partage. » Pour

illustrer cela, Insa Sané a également ravi les participants par une lecture de texte pleine de fougue.

Groupe ABF Bretagne

Remerciements à Rozenn Davenel,

responsable informatique documentaire et multimédia de la médiathèque Madame-

de-Sévigné de Vitré (35) et Isabelle Baillet,

responsable des préparations aux concours des bibliothèques au CFCB Bretagne et Pays de la Loire à Rennes (35) pour leurs notes et

Marie-Hélène le Goff, responsable du centre

technique de la médiathèque des Ursulines de Quimper (29) et le groupe ABF Bretagne pour l’organisation de la journée.

64 bibliothèque(s) - Revuedel’associationdesbibliothécaiResde FRance n° 68 - juin 2013

Insa Sané

À LIRE ÉGALEMENT

Annick Lorant-Jolly (entretien avec Philippe Levreaud), « Du noir pour tout le monde. Le polar dans l’édi- tion Jeunesse », Bibliothèque(s), n° 57, juillet 2011, pp.36-41.

Pour en savoir plus

www.scoop.it/t/litterature-passe- relle-qui-parle-de-quoi

2. La collection « Exprim’ » des Éditions Sarbacane est

née de la passion de Tibo Bérard, son directeur, pour la littérature américaine et de son envie de proposer au lectorat une littérature percutante avec « des scènes

urbaines et des auteurs qui soient connectés à leur époque et sachent en parler avec style et avec des modes d’écriture modernes. »

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Ce voyage a été placé d’emblée sous le signe de la convivialité et de la gastrono- mie par l’accueil chaleureux du passion- nant Luc Battieuw, sous-directeur de la BM de Laeken et directeur du Centre de la littérature de Jeunesse de Bruxelles (CLJBx), et du royal buffet qu’il nous a offert. Si la réhabilitation récente de la BM de Laeken intégrant la RFID nous laisse sceptiques, la diversité des animations hors les murs et des ateliers de formation a séduit le groupe très impressionné par le nombre de partenariats locaux. À deux pas de la bibliothèque, Luc, pre- mier bibliothécaire masculin de l’Heure joyeuse, nous dévoile le fonds impres- sionnant mis à disposition par le CLJBx : pop-up, kamishibaï1 du monde entier, dépôt légal de l’École des loisirs, fonds patrimoine Jeunesse (50 000 titres) sont accueillis dans un local bien petit pour la mission qu’il développe. Le CLJBx pilote et/ou participe à divers projets : Lire dans les parcs (66 lieux dans la ville), la Semaine du livre Jeunesse, la Semaine Paul Hurtmans du livre Jeunesse… Créé en 2006, le centre composé de quatre personnes est la section belge de l’IBBY (International Board on Books

for Young People). Le CLJBx prête éga-

lement du matériel d’animation, orga- nise des formations et des colloques et rédige la revue professionnelle Lu et

approuvé. Devant tant d’actions et de

dynamisme avec une équipe si réduite nous sommes déjà éblouis.

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