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Plusieurs méthodes de préparation de substituts de peau reproduisant une ou plusieurs couches de la peau ont été développées au cours des dernières années (Jean, et al., 2011; MacNeil, 2007). Les substituts peuvent contenir du matériel allogénique, xénogénique ou autologue et peuvent être d'usage temporaire, semi-permanent ou encore permanent. Différents modèles sont actuellement disponibles sur le marché (Fodor, 2003; Horch, et al., 2005; Jean, et al., 2011). En raison des caractéristiques les différenciant, les substituts développés n'ont pas tous la même utilité. À ce jour, aucun substitut reproduisant intégralement la peau n’a été développé. Afin de reproduire pleinement les fonctions cutanées et d'avoir les mêmes propriétés, ce substitut idéal se devrait d'avoir entre autres les trois couches de la peau, soit l'épiderme, le derme et l’hypoderme, avec un épiderme bien différencié et un derme vascularisé (Gibot, et al., 2010; MacNeil, 2007). De plus, les propriétés du substitut devraient idéalement s'apparenter à celles de la peau. Une structure permettant une vascularisation et une réinnervation du derme rapide est ainsi recherchée. Également, la présence d’un derme permettant une réparation de la blessure rapide et d’un épiderme fonctionnel permettant de retrouver rapidement une bonne fonction barrière est grandement souhaitable. Le substitut doit aussi pouvoir bien s’intégrer au niveau du lit de la plaie lorsqu’il est utilisé en clinique (Auger, et al., 2004).

1.8.1. Modèles de substituts de peau saine

Les modèles de substituts de peau saine disponibles sur le marché peuvent être regroupés en trois catégories selon qu’ils contiennent seulement un derme, un épiderme ou bien encore ces deux couches. Il existe trois approches principales pour la production de substituts in vitro, soit les approches par gel, échafaudage et auto-assemblage (Auger, et al., 2004).

La méthode de production utilisant un gel comme matrice permet d’obtenir des reconstructions de peau intéressantes, mais avec des propriétés mécaniques assez faibles (Parenteau, et al., 2000). Un exemple de substituts utilisant cette méthode est Apligraf® (Novartis), qui a été approuvé dès 1998 par la FDA pour le traitement des ulcères. Ce substitut bicouche consiste en des fibroblastes allogéniques ensemencés dans un gel de collagène bovin de type 1, sur lequel sont ensemencés des kératinocytes (Wilkins, et al., 1994).

Les substituts cutanés peuvent également être produits à l’aide d’un échafaudage. Ce dernier peut être fait à partir de biomatériaux naturels ou bien encore synthétiques. Il peut également être ensemencé avec des cellules ou bien être acellulaire (Auger, et al., 2004; Auger, et al., 2004). Alloderm® (LifeCell), un substitut dermique obtenu à partir de traitements sur des peaux de cadavres, en est un exemple. Les substituts produits avec un échafaudage acellulaire ont l’avantage d’être rapidement disponibles pour une greffe, mais leur utilisation implique toutefois une 2e chirurgie afin de greffer par la suite un épiderme

autologue cultivé ou bien provenant d’un site donneur (Auger, et al., 2004). Ce type de substitut produit par échafaudage est par conséquent peu fréquent. Les substituts produits avec un échafaudage cellularisé sont, à l’opposé, retrouvés plus fréquemment. Dermagraft® (Shire), un substitut dermique avec un échafaudage de polyglactine, en constitue un exemple. On retrouve également des substituts à échafaudage cellularisé bicouches tels qu’Academia et OrCelTM. Ce type de substituts est principalement développé

en milieu académique.

Finalement, la méthode d’auto-assemblage constitue une autre approche pour produire des substituts cutanés. Celle-ci est basée sur la propriété qu’ont les cellules mésenchymateuses telles que les fibroblastes à produire leur propre matrice extracellulaire in vitro. Cette méthode permet de produire des substituts exempts de matériel exogène lorsque les cellules du patient sont utilisées. Cette méthode est également applicable à d’autres organes que la peau (Auger, et al., 2004).

1.8.2. Modèles de substituts de peau psoriasique

Le développement de modèles de peau psoriasique a également fait l’objet de recherches au cours des dernières années et différentes techniques ont été développées afin de produire des modèles in vivo et in vitro. Les premiers se divisent en différentes catégories, soit les mutations spontanées, les modèles produits génétiquement et les xénotransplantations (Jean, et al., 2012).

Les modèles à mutations spontanées, souvent chez la souris, ne représentent globalement pas de bons modèles puisqu’ils ne permettent pas de générer un phénotype psoriasique assez complet. Ils peuvent toutefois permettre l’étude de certains aspects spécifiques de la maladie (Mizutani, et al., 2003). Une centaine de mutations chez la souris menant à certaines caractéristiques du phénotype psoriasique a été recensée (Sundberg, et al., 1990) et de multiples modèles ont été développés dans les dernières décennies (Gudjonsson, et al., 2007).

Les modèles produits génétiquement sont les plus fréquents et incluent les modèles d’animaux transgéniques et knockout. Les modifications génétiques apportées ont différentes cibles telles que le système immunitaire, l’endothélium vasculaire et les protéines épidermiques. Ces modèles permettent de reproduire en tout ou en partie différentes caractéristiques importantes du phénotype psoriasique, soit l’épaisseur épidermique, la différenciation anormale des kératinocytes, l’augmentation de l’angiogénèse et l’infiltration épidermique de cellules T (Jean, et al., 2012).

Les modèles produits par xénotransplantation, quant à eux, consistent en la greffe d’un morceau de peau psoriasique ou d’un substitut de peau psoriasique sur une souris génétiquement modifiée. Trois types de souris sont principalement utilisés, soit la souris nue athymique qui n’a pas de thymus et donc de cellules T (Raychaudhuri, et al., 2001), la souris SCID qui n’a pas de cellules T et B (Gudjonsson, et al., 2007) et finalement la souris à mutations spontanées AGR129 qui n’a pas non plus de cellules T et B en plus d’avoir des cellules NK immatures (Boyman, et al., 2004). Ce dernier modèle permet d’obtenir un taux moins élevé du rejet des greffons par rapport aux deux autres. Les modèles de

xénotransplantation ont toutefois le désavantage de ne pas permettre l’étude de l’implication du système immunitaire dans la maladie.

Différents modèles in vitro existent également et peuvent se diviser en trois catégories, soit les modèles monocouches, les modèles sur gel de collagène et les modèles par auto- assemblage. Les modèles en monocouche ne permettent pas d’étudier les interactions entre les différents types cellulaires de la peau pouvant être impliqués dans la pathologie, mais permettent toutefois d’analyser séparément certains mécanismes cellulaires et de mieux en comprendre le fonctionnement (Jean, et al., 2012). Les modèles sur gel de collagène, quant à eux, consistent globalement en des fibroblastes ensemencés dans cette matrice avec des kératinocytes ensemencés par dessus. Plusieurs caractéristiques du psoriasis telles que l’hyperprolifération et la différenciation anormale des kératinocytes de même que la dérégulation de certains marqueurs sont retrouvées dans ces modèles, ce qui les rend intéressants pour l’étude de la pathologie. Il reste toutefois que ces derniers contiennent du matériel exogène, ce qui les différencie de la peau normale humaine. La méthode d’auto- assemblage développée au LOEX permet d’éliminer l’utilisation de ce dernier et de produire des substituts bicouches avec des fibroblastes et des kératinocytes lésionnels. Ces substituts possèdent un phénotype psoriasique et réagissent à un traitement anti-psoriasique comme le ferait la peau lésionnelle (Jean, et al., 2009). La compagnie MatTek propose également un substitut psoriasique bicouche sans matrice de gel qui présente un bon phénotype psoriasique. Le substitut est produit à partir de fibroblastes lésionnels et de kératinocytes sains. Néanmoins, il est cultivé sur un substrat exogène, soit un insert à culture cellulaire Millipore MillicellTM sur lequel le substitut reste accroché à la fin de la

culture.

1.8.3. Utilisation et conservation

Au cours des dernières années, différents modèles de substituts de peau humaine ont été développés afin de traiter différentes blessures cutanées telles que les brûlures et les ulcères (Dougherty & Chalabian, 1995). En plus de leurs applications cliniques, les substituts cutanés sains et pathologiques peuvent être utilisés en recherche pour diverses études dermopharmacologiques et de toxicité (Auxenfans, et al., 2009). Des compagnies

renommées en utilisent d’ailleurs déjà, telles que L’Oréal qui utilise des substituts du laboratoire SkinEthic pour des tests. En outre, le développement de substituts cutanés est d’autant plus important que l’utilisation d’animaux en recherche appliquée et fondamentale est de plus en plus sujet à des débats sociaux dans le domaine de l’éthique. Ces derniers ont d’ailleurs mené à des législations plus restrictives, surtout sur le continent Européen où les réformes du 7e amendement de la Directive Cosmétique sont rentrées totalement en vigueur

depuis le 11 mars 2013, interdisant l’usage de tests sur les animaux pour les produits cosmétiques et leur ingrédients fabriqués au sein de l’Union Européenne de même que la vente de produits cosmétiques et ingrédients ayant été testés sur des animaux (European- Union, 2003; Fentem, et al., 2004). En plus d’être une méthode alternative à ces tests, les substituts de peau peuvent offrir des caractéristiques se rapprochant davantage de la peau normale humaine in vivo par rapport à la peau animale (Welss, et al., 2004). Cependant, afin de permettre un accès efficace et rapide aux tests physiques et chimiques sur les substituts cutanés, des méthodes optimales de conservation de ces derniers sont souhaitables (Chen, et al., 2011).

La conservation par congélation est une méthode qui pourrait se révéler efficace. Différents groupes ont déjà étudié l’impact de la congélation sur la perméabilité de la peau de différents animaux tels que le cochon (Bosman, et al., 1998; Hawkins & Reifenrath, 1984; Schreiber, et al., 2005), le rat (Babu, et al., 2003; Hadzija, et al., 1992), la souris (Holland, et al., 1984), le singe (Kemppainen, et al., 1986) et le chien (Ahlstrom, et al., 2007). Ces analyses ont montré dans tous les cas une augmentation de la perméabilité, sauf dans le cas d’une analyse sur la peau porcine (Schreiber, et al., 2005). Des études de perméabilité ont également été réalisées sur de la peau humaine avec diverses molécules. Les études avec de l’eau (Astley & Levine, 1976; Bronaugh, et al, 1986; Burch & Winsor, 1944; Harrison, et al., 1984) et avec des solvants organiques (Nakai, et al., 1997) ne montrent pas de différences de perméabilité alors que celles avec de l’acide contenant un groupement chromone (Swarbrick, et al., 1982) et avec la toxine T-2 (Kemppainen, et al., 1986) montrent une augmentation de la perméabilité. Différentes méthodes de congélation ont été utilisées lors de ces expériences telles que l’emploi de coton imbibé d’une solution saline et placé dans un pétri (Burch & Winsor, 1944), de gazes stériles imbibées également d’une

solution saline et placées dans une contenant fermé (Astley & Levine, 1976), de sacs de plastique (Bronaugh, et al., 1986) ou encore de feuilles d’aluminium (Swarbrick, et al., 1982).

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