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Chapitre I Contexte technologique et scientifique

I.3 C ONTEXTE SCIENTIFIQUE DE LA THESE

I.3.1 Généralités sur les écoulements diphasiques

I.3.1.1 Régimes et cartes d'écoulement

La prédiction des régimes d'écoulement est nécessaire à la mise en œuvre des écoulements diphasiques. Elle est aussi importante que de connaître le caractère laminaire ou turbulent d'un écoulement monophasique [38].

Selon le débit et la quantité de chaleur apportée au système, du liquide et de la vapeur coexistent dans le récepteur, amenant la formation de différentes configurations d'écoulements diphasiques [39;40] (Figure I-21).

Figure I-21. Configurations d'écoulement lors du processus d'évaporation

En partant du liquide sous-refroidi entrant dans le récepteur, le flux de chaleur imposé sur la surface extérieure du tube va d'abord induire une ébullition partielle puis nucléée à la paroi interne de celui-ci. Il en résulte donc des bulles qui vont grossir à la paroi et se détacher, formant un régime à bulles. Ces bulles coalescent ensuite pour former de plus larges structures, et à mesure que la vitesse de vapeur augmente au cours de l'évaporation, des poches se forment (Figure I-22).

A faibles débits de gaz et de liquide, un écoulement stratifié se forme, le liquide étant séparé par gravité de la vapeur, et une interface lisse se forme. Si les débits sont plus importants, la stratification est moins stable et des vagues se forment à l'interface liquide-vapeur. Ces vagues peuvent, sous certaines conditions, grandir et rejoindre le haut du tube, formant ainsi des bouchons de liquide qui avancent ensuite le long du tube. Les régimes à poches et à bouchons sont aussi appelés régimes intermittents. Vers la fin du processus d'évaporation, lorsque de grandes quantités de vapeur ont été créées, le liquide peut être poussé sur les bords du tube par la vapeur circulant à grande vitesse dans le tube. Il s'agit alors du régime annulaire. Dans le cas où la vapeur ne va pas trop vite, l'anneau de liquide a tendance à se stratifier, mais continue de remonter sur les bords du tube (Figure I-21).

21 Dans le cas de l'étude de l'évaporation dans un tube il est important de connaitre les configurations d'écoulement présentes à l'intérieur de celui-ci, afin de mieux comprendre et contrôler l'échange thermique de la paroi avec le fluide, et prévenir les instabilités qui peuvent le limiter.

Les écoulements diphasiques peuvent être caractérisés par des paramètres permettant d'avoir des informations sur les quantités de liquide et vapeur dans l'écoulement. Le titre massique x (souvent juste appelé titre) est ainsi défini comme le rapport du débit massique de vapeur mv sur le débit massique total

tot m : tot v m m x    I.1

Le titre thermodynamique xth est défini comme la différence entre l'enthalpie du mélange diphasique hm et l'enthalpie de saturation du liquide hl,sat, sur l'enthalpie de changement de phase hlv :

lv sat l m th h h h x,I.2

A l'équilibre thermodynamique, ces deux titres sont égaux. Cependant hors de l'équilibre, leur égalité est tout de même supposée expérimentalement.

Alors que la notion de titre traite du rapport de débit, le taux de présence de vapeur, ou taux de vide, noté α, représente la proportion du volume occupé par la vapeur dans un volume de contrôle :

tot v V V   I.3

Le taux de vide peut être également défini de façon surfacique, par le rapport entre la surface occupée par la vapeur sur la surface de contrôle totale.

Expérimentalement, le titre d'un écoulement peut être obtenu par mesure des débits de liquide et de vapeur, ou en réalisant un bilan de puissance pour calculer le titre thermodynamique. Le taux de vide est quant à lui plus difficile à déterminer expérimentalement. Outre des méthodes de visualisation directe, des sondes (optiques ou résistives par exemple) sont développées pour tenter de remonter à cette grandeur [41]. C'est pourtant une donnée très importante car elle détermine la place qu'occupe la vapeur dans un écoulement diphasique, et donc la structure même de l'écoulement.

Des graphes, appelés cartes d'écoulement, ont été développés dans le but de prédire les régimes diphasiques dans des tubes et donc la structure de l'écoulement. Ces cartes sont le résultat soit d'une compilation de données expérimentales obtenues avec différents fluides (comme celle de Baker [42]), soit de la construction de modèles semi-empiriques (comme la carte de Taitel et Dukler [8]).

La plupart ont été construites pour des écoulements diphasiques adiabatiques, c’est-à-dire sans apport de chaleur extérieur sur le tube. Les cartes de Baker [42], Mandhane [43] (Figure I-23), Taitel et Dukler [8], (Figure I-24) Hashizume [44] et de Steiner [45] comptent parmi les plus connues pour les écoulements horizontaux. Ces cartes sont tracées en fonction des propriétés physiques de l'écoulement, et des débits de liquide et vapeur.

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Figure I-23. Carte d'écoulement de Mandhane [43]. Figure I-24. Carte d'écoulement de Taitel et Dukler [8]

La notion de vitesse superficielle J est également souvent utilisée. Elle correspond pour une phase à son débit volumique divisé par la section totale du canal. Il s'agit donc d'une vitesse [m/s] qui peut également être considérée comme un flux volumétrique [(m3/s)/m2]. Elle est définie par l'équation I.4 pour la phase vapeur, en fonction du titre x, du flux massique total Gtot et la masse volumique ρv :

v tot v G x J   I.4

Il existe peu de cartes spécifiques aux écoulements non adiabatiques (c’est-à-dire avec un apport de chaleur), et l'utilisation de cartes adiabatiques pour des écoulements avec changement de phase est souvent peu fiable, car celles-ci ne prennent pas en compte l'effet du flux de chaleur apporté.

Une des premières cartes d'écoulements prenant en compte le flux de chaleur est celle de Kattan-Thome-Favrat [46] en 1998. Elle est issue de leur étude de cinq réfrigérants en évaporation dans des tubes horizontaux, et est une modification de la carte de Steiner [45], elle-même étant une modification de la carte de Taitel et Dukler [8]. Depuis, de nombreuses adaptations de cette carte ont été faites pour d'autres réfrigérants, comme par exemple celles de Zürcher [47], Thome et El Hajal [48], Wojtan [49] et Cheng [50]. Pour plus de lisibilité, ces cartes sont souvent construites avec le titre de vapeur x en abscisse et le flux massique total G en ordonnée (Figure I-25).

Figure I-25. Carte d'écoulement de Wojtan, tracée pour le R-22 à Tsat = 5°C

dans un tube de diamètre interne 13,84 mm, pour un flux de chaleur de 2,1 kW/m2 [51]

Ainsi pour suivre les régimes d'écoulement obtenus lors de l'évaporation, il suffit de se placer au flux massique total en entrée du tube et de progresser horizontalement pour un titre croissant.

23 Cependant, il n'existe pas actuellement de carte d'écoulement spécifique pour de l'eau en évaporation dans des tubes horizontaux, encore moins sous haute pression. En effet les cartes présentées ci-dessus ont été construites d'après des visualisations sur l'évaporation de fluides frigorigènes changeant de phase à basse température.

Les installations expérimentales permettant de construire ces cartes étant difficiles et coûteuses à mettre en œuvre, la simulation numérique de ces écoulements peut constituer une alternative intéressante pour le dimensionnement.

I.3.1.2 Pertes de pression