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Tel qu’abordé précédemment, la restauration écologique tend à ramener un écosystème vers sa trajectoire historique. Il est donc primordial, avant d’entamer une telle démarche, de s’assurer de connaître le contexte et l’évolution historique du site étudié.

Cependant, l’atteinte de cet objectif n’est pas toujours possible. En effet, les successions de dégradations et de modifications (tant superficielles que profondes) survenant sur un site perturbé peuvent empêcher la détermination précise de la trajectoire que ce dernier aurait pu adopter. Il est, dans ce cas, nécessaire de recourir à des études approfondies sur, par exemple, l’organisation du ou des écosystèmes présents sur certaines parties du site, leur fonctionnement écologique, les interactions qu’ils peuvent avoir avec les autres écosystèmes et les paysages alentours, etc. Il est également primordial de posséder une base de comparaison avec d’autres sites, au fonctionnement ou à la structure similaire, afin de mieux appréhender les différents scénarios d’évolution possibles. Toutes ces données écologiques vont ainsi conduire à la création de modèles permettant de prédire les éventuelles trajectoires d’évolution du site et donc d’amorcer une démarche de restauration écologique adaptée aux différentes situations. (Society for Ecological Restoration (SER), 2004)

Chaque site diffère de par son histoire, les différentes modifications écologiques et culturelles auxquelles il a pu être confronté, ainsi que la gravité et la durée des perturbations dont il a pu faire l’objet. Dans les contextes les plus simples, il suffit parfois de supprimer la source de perturbation pour que la restauration puisse se faire de façon autonome et naturelle. Mais dans le cas d’une ISD, les modifications de l’écosystème (de la flore et la faune y évoluant, jusqu’à son substrat) sont tellement importantes qu’il semble impossible qu’un tel site puisse retrouver sa trajectoire historique de façon autonome. Une démarche de restauration écologique constitue alors la seule option permettant d’assister ce type de milieu à retrouver sa trajectoire attendue.

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La figure 4.1 expose les différents stades d’évolution possibles d’un écosystème subissant une dégradation continue dans le temps. En fonction de la durée et de l’intensité des perturbations, certains seuils, une fois franchis, nécessitent une adaptation des méthodes de génie écologique afin de permettre le rétablissement complet d’un site.

Figure 4.1 Modèle conceptuel de la dégradation et de la restauration d’un écosystème (inspiré de : Whisenant, 1999, p. 4 et de Hobbs et Harris, 2001, p. 243)

Sur cette figure, la profondeur de chaque creux correspond au degré de perturbation auquel le site a été sujet. L’inclinaison et la longueur des courbes reliant l’un de ces creux à un sommet (seuil de basculement) symbolise la difficulté qu’il y aura à faire revenir un site d’un état dégradé à un état moins dégradé. Les barrières abiotique et biotique matérialisent les « fractures » naturelles qui rendront encore plus difficile cette résilience et imposeront le besoin de fournir un important effort de restauration écologique.

Considérons, par exemple, un écosystème se trouvant au point numéro 2. On constate que ce dernier a subit une dégradation qui l’a fait basculer de l’état quasi intact et pleinement fonctionnel (numéro 1), à un état de qualité inférieure et moins fonctionnel. Alors :

- La pente de la courbe séparant le point 2 du point 1 indique qu’il faudra une amélioration assez importante des modalités de gestion écologique pour rendre sa fonctionnalité et son état d’origine à cet écosystème.

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- La première pente positive située à sa gauche symbolise la résistance de l’écosystème. Elle montre qu’il faudra encore exercer une certaine pression néfaste sur ce dernier avant qu’il ne bascule vers l’état encore plus dégradé (numéro 3).

- À l’inverse, la pente beaucoup plus abrupte séparant le point numéro 2 du point numéro 3 symbolise le retour très difficile de l’écosystème à sa position initiale. Cette pente est beaucoup plus abrupte car la barrière biotique a été franchie, c’est-à-dire que certaines espèces animales et végétales ont disparu. Il sera donc très difficile de recréer des conditions favorables à un retour au point numéro 2, à moins d’une modification biologique comme, par exemple, la réintroduction d’espèces indigènes au sein de l’écosystème.

L’enfouissement des déchets réalisé au sein des ISD entraîne, par exemple, des modifications topographiques du site et donc une modification, voire une altération ou un remplacement du substrat. De telles exploitations seraient donc symbolisées par les points n° 5 ou 6 concernant la zone d’exploitation et les sphères 4 à 1 pour les zones annexes, parfois laissées en libre évolution.

Compte tenu de l’ensemble de ces facteurs, une démarche de restauration écologique doit donc être entreprise de façon prudente, logique et réfléchie. Il est nécessaire d’établir à l’avance et de suivre un cadre directeur ou « plan de restauration » fondé sur un diagnostic précis (identification des communautés végétales et animales, de la nature des substrats, de la topographie, etc.) de l’état initial du site avant les travaux de restauration. Le diagnostic aura d’autant plus d’intérêt s’il repose sur une méthodologie standardisée et donc reproductible (voir sous-section 4.3.2) permettant de comparer les situations antérieures et postérieures à la démarche de restauration.

Dans le cas d’une ISD, les étapes décrites au sein des sections suivantes peuvent constituer une base pour la réalisation d’une opération de restauration pendant ou après exploitation d’un terrain. Les paramètres étant extrêmement variables selon les sites, il demeure cependant important que cette trame commune ne constitue pas une restriction quant à la prise en compte de toutes les composantes du projet. Elle doit rester générale et modulable afin de convenir à chaque situation.

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Figure 4.2 Trame proposée pour la réalisation d’une démarche de restauration écologique (inspiré de : Clewell et autres, 2010, p. 267-292)

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