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I.2. Technétium et rhénium 1 Le technétium

I.2.1. a Généralités, découverte, et production

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En 1869, D. Mendeleïev réalise la classification périodique des éléments. Il prédit alors l’existence d’éléments inconnus à l’époque mais indispensables pour combler les cases de la classification restées vides. Dès lors, les recherches se multiplient pour identifier ces éléments et l’on découvre le gallium (1875), le scandium (1879), le germanium (1886)… Les progrès technologiques et en particulier le développement des cyclotrons permettent en 1937 à Carlo Perrier et Emilio Segrè d’isoler l’élément de numéro atomique 43 à partir d’un échantillon de

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molybdène ayant été bombardé par des deutérions [92, 93]. En 1947, dans un très court article publié dans le journal Nature, C. Perrier et E. Segrè proposent le nom de « technétium » pour cet élément [94]. Ce nom, issu du grec, signifie artificiel. Le technétium est en effet le premier élément obtenu artificiellement en cyclotron. Théoriquement, le technétium ne peut pas exister à l’état naturel car tous ses isotopes présentent une demi-vie très faible par rapport à l’âge de la terre. Néanmoins, cet élément fut identifié et isolé à l’état naturel dans des mines d’uranium, la fission spontanée de l’ 228U, générant environ 1 ng de technétium par kg d’uranium. Le technétium existe donc aussi à l’état naturel mais en très faible quantités [92, 95].

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Aujourd’hui, le technétium utilisé pour les examens d’imagerie médicale est obtenu de deux façons : en cyclotron par

bombardement de molybdène, ou en réacteur nucléaire par fission de l’uranium (Tableau I.5.). Cette deuxième méthode est celle utilisée pour l’essentiel de la production. Elle permet d’obtenir 99Mo qui se désintègre naturellement en

technétium sous forme de deux isotopes : 99gTc (12.4%) et 99mTc (87.6%) qui décroit pour conduire à 99gTc. 99gTc se désintègre ensuite avec une période extrêmement longue (2,13.105 ans) pour donner 99Ru. (Fig. I.16.).

Fig. I.16 : Obtention et décroissance du 99Mo et du 99mTc

Réacteur Localisation Puissance (MW) NRU HFR Canada Pays-Bas 135 115 BR-2 Belgique 100

Safari Afrique du sud 100 Osiris CEA Saclay,

France

70

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I.2.1.b. 99mTc

Le 99mTc correspond à 87.6% des produits de décroissance du 99Mo. Dans la plupart des cas, un radioélément issu de la décroissance (! ou ") d’un élément père est obtenu dans un état excité à durée de vie extrêmement courte (de l’ordre de la picoseconde) est n’est donc pas observable. Dans le cas du technétium, la durée de vie de l’état excité est beaucoup plus élevée (demi-vie : 6,02 h). On parle alors d’état métastable (« m ») qui se stabilise vers un état plus stable (« g » ou ground state, 99gTc). Ce phénomène s’accompagne de l’émission d’un rayonnement # à TEL faible, d’énergie E = 140 keV. Toutes ces propriétés font de 99mTc un radionucléide idéal pour l’imagerie médicale.

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Outre ses propriétés physiques, c’est sa disponibilité qui fait du 99mTc le radionucléide le plus utilisé actuellement. Il est en effet disponible sous forme de générateurs 99Mo / 99mTc (Fig. I.17.) mis au point en 1958 par Tucker et Greene, commercialisés à un prix attractif et très facilement transportables. Pour les expériences impliquant le 99mTc réalisées dans le cadre de ce travail, nous avons utilisé des générateurs ELUMATIC-III produits par la société CisBio International (Fig. I.16.a.). Ce sont des générateurs calibrés à 4 GBq respectant tous les critères imposés par la pharmacopée européenne (efficacité d’élution, pureté du radionucléide élué, pureté radiochimique (supérieure à 95%), pH = 5 – 7, stérilité) [96].

(a) (b)

Fig. I.17. : Générateur 99Mo/99mTc (ELUMATIC-III, CisBio International). (a) Coupe latérale du générateur, (b) Caisson de protection anti-radiations

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Ce générateur qui est muni d’une première épaisseur de plomb afin de protéger l’expérimentateur permet d’éluer une solution de pertechnétate de sodium (Na99mTcO4) pendant 7

à 10 jours grâce à une colonne chromatographique d’alumine sur lequel a été fixé du 99mMo. La solution éluée étant très diluée (de 10-7 à 10-9 M), la formation des radiopharmaceutiques par complexation s’effectue donc en très large excès de ligand. Le complexe est alors obtenu dans des concentrations nanomolaires qui rendent difficile toute détection par UV. Nous utilisons donc pour étudier les solutions de complexes une radio-HPLC, constituée d’une HPLC analytique couplée à un détecteur de radioactivité. Une élution régulière du générateur est importante de façon à limiter la quantité de 99gTc résiduel issu de la décroissance naturelle de 99Mo dans la solution éluée [97, 98].

Le générateur est placé dans un conteneur qui constitue un deuxième blindage au plomb (Fig. I.17.b). Une 3ème barrière de protection constituée d’un mur de plomb disposé sur la paillasse protège encore le manipulateur. A titre d’information, le débit de dose (µSv.h-1) enregistré sans blindage à 1m du générateur est donné par : 0.71 x Activité en GBq.

Malgré son apparente simplicité d’utilisation, ce type de générateur doit être manipulé dans des conditions très strictes de sécurité et de radioprotection par un personnel habilité et est stocké dans des salles à accès réglementé. Un suivi de la dose reçue par le manipulateur est effectué par des services spécialisés (IRSN) grâce à un système de dosicards, relevés régulièrement. Enfin, un protocole d’évacuation des déchets impose de les laisser décroitre complètement (environ 10 à 15 jours) avant une élimination par voie classique.

I.2.1.c. 99gTc

Le 99mTc décroit avec une demi-vie de 6.02 h vers un état beaucoup plus stable, le 99gTc où « g » signifie « ground ». Celui-ci se désintègre ensuite avec une période de 213 000 ans en émettant un rayonnement !- (E = 294 keV). Il est produit en réacteur en tant que produit de fission de l’uranium: un réacteur de 100MW produit chaque jour environ 2.5g de 99gTc soient 6% des produits de fission. De par sa très longue période radioactive, il peut être considéré comme « froid » et nécessite des conditions d’utilisations moins drastiques que pour son parent métastable. Ainsi il peut être utilisé en quantités bien supérieures (de l’ordre du milligramme).

45 Néanmoins sa période et son énergie sont telles qu’il doit être utilisé avec précaution afin d’éviter la contamination récurente des laboratoires.

Le 99gTc est extrêmement utile. D’une part, il permet de réaliser des complexes « froids » de technétium que l’on peut ensuite caractériser par les méthodes classiques : RMN, MS, LC-MS. On l’utilise également pour déterminer les caractéristiques structurales des complexes par cristallographie. D’autre part, il permet d’effectuer les études in vivo sur des mélanges homogènes. La préparation des solutions injectables en mélange 99mTc + 99gTc étant réalisée en proportions stoechiométriques, elle évite l’injection simultanée de complexe et de ligand libre. Les protocoles de complexation similaires et la possibilité de réaliser des complexes homogènes constituent deux arguments de poids pour l’utilisation du 99gTc lors de la réalisation des complexes froids plutôt que du rhénium comme cela est souvent proposé.

99m

Tc et 99gTc sont les isotopes du technétium les plus importants car les plus utilisés et étudiés. On dénombre 28 autres isotopes allant de 90Tc à 110Tc dont 94mTc, émetteur !+ (E = 244 eV, t1/2 = 52 min) [99, 100] dont l’utilisation en TEP est extrêmement limitée, 18F lui étant

préféré.

I.2.2 Le Rhénium

I.2.2.a. Généralités

Découvert en 1925 par Walter Noddack, Ida Tacke et Otto Berg, le rhénium est l’un des éléments naturels les plus rares sur terre. Il est aussi l’un des quelques éléments à exister sous forme d’un mélange de deux isotopes stables 185Re (37,4%) et 187Re (62,6%). Ce métal blanc très dur, possède une très bonne résistance à l’usure et à la corrosion. Il est donc utilisé, brut ou en alliages, pour la fabrication d’instruments de précision, de thermocouples, et de composants électroniques.

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Le rhénium est utilisé en chimie en raison de quelques propriétés très particulières [101] :

- Il peut être observé à des états redox allant de -Ià +VII (C5Me5ReO3) tout comme le

technétium.

- Il peut former des complexes insaturés ce qui rend possible certains mécanismes catalytiques atypiques.

C’est ainsi que son utilisation s’est développée en catalyse dans de multiples domaines de la chimie organique comme, par exemple, l’époxydation des styrènes [102], l’ hydrogénation stéréospécifique d’énamides [103], ou l’élongation de chaine carbonée par addition d’alcyne [104].