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Marquage des ligands et étude des complexes

III.4 Etude in vivo de Trias-Tc

Afin de compléter notre évaluation du complexe TriaS-99mTc, nous en avons réalisé une étude in vivo chez la souris saine dans le but d’évaluer le comportement du traceur et sa biodistribution. En effet, les études précédement réalisées sur des complexes du cœur oxotechnétiums avec des ligands similaires à TriaS mais comportant un noyau pyridyle à la place du triazole ont révélé une rétention élevée du complexe dans les tissus, et une élimination lente du sang. En outre ces complexes étaient éliminés essentiellement par voie hépatobilliaire. Dans le cas de ligands à noyau imidazoyle, cette rétention dans les tissus s’est avérée être bien moindre et le complexe était éliminé beaucoup plus rapidement du sang [22]. Il était donc impossible de tirer des conclusions générales sur ce type de complexes et d’anticiper les résultats in vivo de TriaS-99mTc. Nous avons donc réalisé une étude de la biodistribution de ce complexe chez la souris ainsi qu’une acquisition de clichés « full body » afin de caractériser la rétention dans les tissus et le sang et d’identifier la voie d’élimination de TriaS-99mTc.

III.4.1. Biodistribution

L’étude de biodistribution du complexe TriaS-99mTc a été réalisée sur un lot de 3 souris Balb-C femelles, lignée régulièrement utilisée lors d’études en modèle tumoral (tumeur xénogreffée sur des souris athymiques Balb-C Nu/Nu). Afin d’évaluer précisément l’influence de la complexation par le ligand TriaS par rapport à du technétium libre réduit, la même étude a été réalisée après injection de 99mTc-réduit (99mTcO3+) dans les mêmes conditions en l’absence de ligand. Deux heures après injection par voie intraveineuse caudale, les animaux sont sacrifiés par exsanguination et les différents organes sont prélevés, pesés et la radioactivité associée est mesurée par comptage !.

La figure III.18. représente la biodistribution observée dans chaque cas (Trias-99mTc et 99mTc- réduit) deux heures après injection.

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Fig. III.18. : Biodistribution 2h après injection chez la souris (n=3) de Trias-99mTc (!) et 99mTc-réduit (!).

On constate que le technétium libre (réduit en l’absence du ligand TriaS) s’accumule essentiellement dans le foie (60%) et l’estomac (5%), ce qui suggère une métabolisation hépatique de 99mTcO3+ et de ses éventuels produits de réoxydation. En revanche, dans le cas de Trias-99mTc, l’activité mesurée dans le foie ne correspond qu’à environ 2% de l’activité injectée. L’essentiel de la dose injectée est récupérée dans les urines et les reins (80% au total). Le complexe semble donc être éliminé essentiellement par voie rénale et ne pas se répartir significativement dans les autres organes fixant habituellement les composés technétiés. Ce résultat est très intéressant car dans de nombreux cas, une part importante de l’activité est observée, quelques heures après injection, dans les organes du tractus gastrointestinal [1], réduisant ainsi le contraste en imagerie et rendant même difficile voire impossible la visualisation d’une cible située dans la cavité abdominale.

Il convient à nouveau de comparer ces résultats à ceux observés dans le cas de complexes mettant en jeu des ligands à noyau pyridyles et imidazoyle. Le tableau III.8. présente une comparaison entre les biodistributions de TriaS-99mTc et des complexes de ces deux types [22].

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Organe TriaS-99mTc A : Pyr-OH A’ : Pyr-COOH B : Imi-OH Sang Foie Reins Rate Muscle Urine Feces Total excreté 1.2 2.7 4.5 0.3 0.0 74.4 NA 74.4 17.5 25.5 7.9 0.5 8.6 24.5(*) 16.9(*) 41.4(*) 20.5 10.1 8.5 NA 10.2 35.2(*) 51.5(*) 86.8(*) 0.3 5.0 0.3 NA 0.3 44.4(*) 46.3(*) 90.6(*)

Tableau. III.8. : Comparaison des biodistributions à 2h de complexes à ligands triazoyle, pyridyle, et imidazoyle en pourcentage de la dose injectée (les valeurs d’excrétions marquées par (*) correspondent à une mesure

effectuée 24h après injection).

On constate que deux heures après injection, les complexes à motifs pyridyles A et A’ sont très présents dans le sang, le foie et les muscles. A l’inverse, dans les cas de complexes à ligands imidazoyles B, aucune accumulation dans ces organes n’est observée : les complexes à ligands pyridyles ont donc une élimination lente. Ces complexes sont donc moins intéressants car après deux heures, ils conduiront à une visualisation moins efficace de la cible du fait d’un contraste plus faible.

Le complexe TriaS-99mTc donne des résultats comparables aux complexes à ligands imidazoles du point de vue de la rétention dans les tissus et les organes du tractus gastrointestinal. Nous pouvons aussi remarquer que les complexes à ligands pyridyle sont éliminés beaucoup moins efficacement de l’organisme que les complexes à ligand imidazole ou triazole (TriaS-99mTc) : après 24h, seule 41% de l’activité injectée a été éliminée de l’organisme. Cette valeur monte à 87% lorsqu’une fonction acide carboxylique est ajoutée à sa structure (A’). Cette donnée confirme qu’il sera possible d’améliorer l’élimination des complexes par l’ajout de groupements hydrophiles par exemple. TriaS-99mTc se démarque néanmoins de ces analogues puisque près de 75% de l’activité injectée a été éliminée après

N O N O S Tc O N N N Ph N O N O S N Tc O HO N O N O S N Tc O HOOC N O N O S Tc O HO N NH

153 seulement deux heures. Enfin, dans le cas de TriaS-99mTc, le complexe est essentiellement éliminé par voie rénale. Ceci contraste avec les résultats des trois autres complexes présentés pour lesquels 40 à 60 % de l’activité est détectée dans les feces, indiquant une élimination par la voie hépatobilliaire. TriaS-99mTc apparait donc comme une structure de complexes très intéressante en comparaison à ses analogues pirydyle et imidazoyle car il bénéficie d’une faible accumulation dans les tissus et le sang et d’une élimination rénale rapide.

Afin de confirmer cette observation, une 4ème souris ayant reçu le complexe TriaS-99mTc a été sacrifiée puis congelée afin de réaliser des coupes au microtome. Ces coupes ont ensuite été visualisées après une nuit d’acquisition au !-imager en utilisant le faible caractère émetteur !- de 99mTc (E = 2 keV).

Le !-imager est un dispositif permettant de visualiser une émission !- avec une extrème sensibilité (Fig. III.19.) et une résolution largement supérieure à celle d’une "-caméra. L’échantillon à analyser est placé dans une chambre (3) dans laquelle circule un gaz (argon 98%, triéthylamine

2%) (4). Dans la chambre d’analyse, deux grilles permettent d’appliquer un fort champ électrique (5). Les particules !- émises par l’échantillon ionisent le gaz, produisant une lumière ultraviolette détectée par la caméra CCD (8) qui reconstitue une image (source : biospacelab.com).

La figure III.20.gauche. montre l’un des clichés obtenu lors de la visualisation d’une coupe de souris sacrifiée deux heures après injection de TriaS-99mTc. On y distingue très nettement la forme d’un rein plus lumineuse qui contraste avec le reste du corps. Pour cette mesure, la sensibilité choisie était très élevée, pourtant aucune radioactivité résiduelle significative n’est observée en dehors des reins. Ceux-ci sont donc visibles de façon très nette. A titre de comparaison, la figure III.20.droite. montre le cas d’un complexe présentant une forte accumulation dans les organes du tractus gastrointestinal : le contraste est moins bon et une cible située à proximité d’un de ces organes pourrait ne pas être visible. L’élimination rapide du complexe du milieu circulant est donc un résultat très positif.

Fig. III.19. : Principe de fonctionnement du !-imager

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Cette observation confirme les résultats de l’étude de biodistribution : le complexe TriaS-99mTc est donc éliminé très efficacement par voie rénale sans accumulation significative dans d’autres tissus.

Fig. III.20. : Visualisation au !-imager. A gauche: coupe de souris sacrifiée 2h après injection de TriaS-99mTc ; A droite : coupe de souris après injection d’un complexe ayant une accumulation résiduelle importante dans les organes du tractus gastrointestinal.