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CHAPITRE I : ÉTUDE BIBLIOGRAPHIQUE 7

I.3. Généralités sur les actinides 24

I.3.1 Définition

Les actinides sont constitués par les quinze éléments de la seconde rangée du bloc f allant de l’actinium (d’où ils tirent leurs noms ; Z = 89) au lawrencium (Z = 103). Tous les actinides sont des radioéléments dont les isotopes radioactifs se désintègrent spontanément par émission de rayonnement (généralement α ou β-) avec une période propre appelée temps de demi-vie. Il s’ensuit que les isotopes les plus stables sont ceux possédant les temps de demi-vie les plus longs, pouvant aller jusqu’à 80,8.106 années pour le 244Pu (isotope artificiel) et 14.109 années pour le 232Th (isotope naturel).

Les actinides offrent un grand nombre d’états d’oxydation. L’exemple le plus remarquable est celui du plutonium, qui peut exister en solution aqueuse simultanément dans quatre états d’oxydation (+3, +4, +5, +6) (Tableau I. 2).

Tableau I. 2 : Structure électronique et états d’oxydation des actinides. Les états d’oxydations instables sont indiqués entre parenthèses.

Actinides Symbole Z Configuration électronique Degré d’oxydation Actinium Ac 89 6d1 7s2 3 Thorium Th 90 6d2 7s2 (2) (3) 4 Protactinium Pa 91 5f2 6d1 ou 5f1 6d2 7s2 (3) 4 5 Uranium U 92 5f3 6d1 7s2 3 4 5 6 Neptunium Np 93 5f4 6d1 7s2 ou 5f5 7s2 3 4 5 6 7 Plutonium Pu 94 5f6 7s2 3 4 5 6 7 Américium Am 95 5f7 7s2 (2) 3 4 5 6 Curium Cm 96 5f7 6d1 7s2 3 4 Berkélium Bk 97 5f9 7s2 3 4 Californium Cf 98 5f10 7s2 3 Einsteinium Es 99 5f11 7s2 3 Fermium Fm 100 5f12 7s2 3 Mendélévium Md 101 5f13 7s2 3 Nobelium No 102 5f14 7s2 2 3 Lawrencium Lw 103 5f14 6d1 7s2 3

I.3.2 Comparaison actinides/lanthanides

Les actinides possèdent une configuration électronique générale [Rn]5fn6dm7s2 et correspondent à des orbitales 4f et 5d totalement remplies. Depuis leur découverte, les actinides sont considérés comme des analogues des lanthanides (de configuration électronique [Xe]4fn5dm6s2) et possèdent des propriétés physico-chimiques similaires du fait qu’ils appartiennent tous deux à une série correspondant au remplissage d’une sous- couche nf. Les orbitales 4f et 5f disposent d’une faible extension radiale, induisant que les couches saturées 5s2-5p6 et 6s2-6p6 viennent écranter ces orbitales qui se retrouvent ainsi protégées des interactions avec les ligands. Il en découle que ces électrons n’interagissent que très faiblement avec ceux des ligands voisins et donc que leurs propriétés électroniques ne sont que très peu affectées par l’environnement.

Il convient néanmoins de noter que les orbitales 4f sont des orbitales de cœur et sont donc beaucoup plus localisées que les orbitales 5f. Il s’ensuit que la faible extension des orbitales 4f entraine le fait que les lanthanides disposent d’un degré d’oxydation classique de +III. A l’inverse, les électrons 5f étant moins localisés, ils participent d’autant plus à la liaison chimique et les interactions avec les ligands sont alors d’autant plus importantes. Cet effet est plus marqué pour les actinides de la première moitié de la série (de Pa à Am). Cela est dû au fait que les orbitales 5f, 6d, 7s et 7p sont suffisamment proches pour s’hybrider, rendant possible un recouvrement spatial entre celles-ci et celles des ligands. Le caractère ionique ou covalent de ce type de liaison est donc souvent difficile à déterminer.

Une propriété remarquable des actinides du début de la série, est l’aptitude des éléments au degré d’oxydation +5 et +6 à former des entités oxo-cations avec une configuration linéaire. Cette forme se nomme actinyle, le suffixe -yle signifiant la présence d’une forme trans-dioxo AnO2n+.

Par analogie avec les lanthanides, les actinides possèdent une particularité répondant au nom de contraction actinidique. Cette contraction correspond à la diminution du rayon ionique lors de l’augmentation du numéro atomique des éléments de cette série. Il est ainsi possible de conclure qu’un ion d’un élément ayant un numéro atomique élevé aura une réactivité chimique supérieure à celle d’un élément ayant un numéro atomique inférieur.72,73 Notons tout de même que cette assertion, bien qu’effectivement valide pour les ions au degré d’oxydation +III et +IV, ne l’est plus pour les ions au degré d’oxydation +V et +VI.

I.3.3 Condensation des actinides en milieu aqueux

Les actinides tétravalents sont des acides durs (au sens de Pearson).72 Leur forte densité de charge les rend donc particulièrement sensibles à l’hydrolyse et à la condensation, en suivant l’ordre Th < U < Np < Pu.74

Les complexes hydroxo sont capables de donner lieu à la formation d’un réseau macromoléculaire colloïdale, pratiquement inerte à toute réaction chimique. En conséquence, les synthèses mettant en œuvre des actinides doivent être menées dans des solutions suffisamment acides pour éviter leur hydrolyse.

La réaction d’hydrolyse augmente avec la charge effective de l’ion actinide, en suivant l’ordre : (4) An4+

> (3,3) AnO22+ > (3) An3+ > (2,3) AnO2+.

L’hydrolyse s’effectue en deux étapes : en premier lieu un proton appartenant à une molécule d’eau présent au sein de la première sphère de coordination est transféré vers la deuxième sphère de coordination. En second lieu, ce même proton sera expulsé de la deuxième sphère de coordination vers le milieu réactionnel.

Il a en outre été montré que l’hydrolyse des cations les plus acides (An4+ et AnO22+)

donnait lieu à des phénomènes de polymérisation tandis que celle des cations les moins hydrolysables (An3+ et AnO2+) conduisait à la formation d’espèces monomériques. Les

actinides(IV) prédominent sous forme An4+ uniquement en milieu très acide ([H+] > 0,5 mol.L-1). Les produits résultant de l’hydrolyse sont dans la très grande majorité des cas, des produits polymérisés.

Il existe de nombreux exemples traitant de l’hydrolyse d’actinides hexavalents et plus particulièrement de l’ion uranyle [UO2]2+.75 Cela est imputable au fait que

l’uranium(VI) est la forme la plus stable en solution aqueuse sous atmosphère ambiante, et qu’il s’agit, de plus, d’un élément faiblement radioactif. La nature des ions en solution est fortement dépendante du pH, de la concentration et de la température de la solution. Il est tout de même important de noter que dans le cas d’une solution diluée (de l’ordre de 10-6 mol.L-1), l’ion uranyle se trouve sous la forme d’ion isolé.

I.3.4 Complexation des actinides

Pour les états d’oxydation +III et +IV, les actinides forment en solution les ions hydratés An3+ et An4+, tandis que An(V) et An(VI) s’hydrolysent pour former des cations uranyles dioxo linéaires, AnO2+ et AnO22+. La présence d’une liaison covalente entre

l’actinide(VI) et les deux atomes d’oxygène dans l’ion actinyle (O=An=O)n+

diminue la charge effective de l’ion actinide central à 2,3 pour AnO2+ et 3,3 pour AnO22+. De plus, du

fait de la géométrie des cations actinyles, leur complexation s’effectue préférentiellement dans le plan équatorial. Il en découle alors que les actinides hexavalents de type uranyle, sont relativement de moins bons candidats que les actinides tétravalents pour la complexation. L’ordre de stabilité des complexes est alors classiquement défini comme suit : An4+ > An3+ > AnO22+ > AnO2+.

Concernant les nombres de coordination, il convient de remarquer que les techniques de caractérisations structurales font apparaître des polyèdres de géométrie antiprismatique, prismes capés ou dodécaèdres trigonaux pour des nombres de coordination généralement situés aux alentours de IX (pouvant néanmoins aller jusque XII pour le thorium(IV)) et pour des degrés d’oxydations de +III et +IV.

Les ions actinyles, eux, adoptent classiquement une géométrie de bipyramide à base tétra-, penta- ou hexagonale avec des nombres de coordination compris entre VI et VIII. Ils sont aisément complexés par les ligands anioniques via des interactions électrostatiques. La liaison actinide-ligand étant faiblement ionique, il en résulte que la position et le nombre de ligands chélatant l’actinide sont déterminés par les contraintes stériques et électrostatiques des ligands.