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Chapitre III : Aérosols désertiques : cycle, zones sources et saisonnalité des émissions

1. Généralité sur les aérosols

1.1. Caractéristiques générales

1.1.1. Les sources et les flux des particules d’aérosols à l’échelle globale

Selon leur origine, les aérosols sont classés en deux familles, les aérosols d’origine naturelle et ceux d’origine anthropique. Dans les deux cas on peut séparer les aérosols primaires formés directement, des aérosols secondaires qui eux se forment dans l’atmosphère à posteriori de l’émission par le biais de processus de transformation de gaz en particules.

Les estimations des émissions des particules d’aérosols en fonction de leur origine (anthropique ou naturelle) ou leur mode de formation (primaire ou secondaire) sont résumées dans le tableau 13. Les émissions naturelles représentent 90 à 95% de la masse totale des aérosols émis avec environ 1500 Mt/an d’aérosol désertique et 1300 Mt/an d’aérosol marin, pour un flux total de 3450 Mt/an (ANDREAE, 1995) alors que les émissions anthropiques uniquement 5 à 10%. L’information issue de ces estimations est une faible contribution des activités anthropiques au cycle des aérosols. Pourtant cette vision est trompeuse. En effet, les activités anthropiques sont responsables de 70 à 90% de la concentration en nombre d’aérosols émis dans l’atmosphère (DELMAS et al., 2005).

L’aérosol naturel est composé essentiellement de particules d’origines minérale et marine. Ces particules sont, pour une grande part, les produits de l’action mécanique exercée par le vent sur les surfaces marines et continentales. Les caractéristiques physico-chimiques de cet aérosol résultent de son mode de production. Ce sont des particules majoritairement supermicroniques (taille supérieure à 1μm) et sa composition chimique est très proche de celle du matériau d'origine.

L’aérosol anthropogénique est généralement concentré autour des régions industrielles. Il est produit soit par combustion, soit par émission directe à l’état liquide ou solide, soit par l’intermédiaire des processus de conversion gaz-particule faisant intervenir des produits gazeux de combustion. Cette dernière catégorie est constituée de particules de taille submicronique

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(WHITBY, 1978). Les évaluations récentes pour l’émission de cet aérosol vont environ de 100 Mt/an (ANDREAE, 1995) à 200 Mt/an (WOLF et HIDY, 1997). Les transports, les combustions industrielles et domestiques, la fabrication du ciment, la métallurgie et l’incinération sont parmi les activités industrielles et techniques qui produisent les particules primaires de cet aérosol. En moyenne globale, plusieurs centaines de millions de tonnes d’aérosols sont émis chaque année par une multiplicité de sources à la fois naturelles (volcaniques, biologiques, désertiques, marines) et humaines (combustions, poussières industrielles, émissions agricoles), ce qui induit une très grande diversité de leurs propriétés.

Dans les deux cas (naturels et anthropiques) on distingue les aérosols primaires et les aérosols secondaires.

Les aérosols primaires sont émis directement dans l’atmosphère sous forme solide ou liquide. Ils représentent une fraction importante de ces aérosols d’origine naturelle (tableau 12). Les principales sources sont les aérosols désertiques (PROSPERO et al., 2002 ; GINOUX et MIDDLETON, 2001), les sources biogéniques, les embruns marins (DELEEW et al., 2011), les cendres issues de l’activité volcanique (STOHL et al., 2011) et des feux de forêts (ANDREAE, 1991 ; LIOUSSE et al., 2004). Les aérosols primaires sont produits principalement par des processus mécaniques, tels que l’abrasion, l’érosion liée à des phénomènes éoliens ou encore les frottements. L’intensité de ces émissions est donc directement proportionnelle à l’intensité de ce phénomène de frottement. Les aérosols primaires d’origine anthropique tels que le carbone suie, le carbone organique ou les poussières organiques résultent principalement de combustion (industrielle, domestique, feux de biomasse), du transport, ou des chantiers de construction. La taille des aérosols désertiques est généralement supérieure au micron lorsqu’ils sont produits mécaniquement et inférieure au micron lorsqu’ils sont issus de processus de combustion.

Les aérosols secondaires inorganiques (sulfates, nitrates, ammonium) ou organiques sont formés à partir de processus de conversion gaz-particules au travers des phénomènes de nucléation, condensation ou adsorption (rétention à la surface d’un solide ou d’un liquide des molécules d’un gaz ou d’une substance en solution ou en suspension) ou par réaction en phase aqueuse par l’intermédiaire des gouttes d’eau nuageuses. Les gaz précurseurs peuvent provenir d’émission par le sol (par suite à l’utilisation d’engrais), par la végétation (Composés Organiques Volatiles biogéniques comme le terpène et l’isoprène), par les écosystèmes océaniques (le diméthyle sulfate émis par les phytoplanctons) où par les activités humaines (combustions de combustibles fossiles au travers de la production d’énergie, du transport, des activités

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industrielles…)12. Cette conversion gaz-particule peut donner lieu à la formation de nouvelles particules ultrafines (taille inférieure à 1μm), par nucléation, ou par condensation à la surface de particules préexistantes. Ainsi, une bonne partie des sulfates et des nitrates, ainsi que la majorité des particules organiques présentes dans l’atmosphère sont des aérosols secondaires13.

Tableau 13 : Estimation des émissions annuelles (en Tg/an) des principaux types d’aérosols

Source Estimation annuelle (Tg/an)

Aérosols primaires Carbone suie

Issus de combustibles fossiles Issus de feux de biomasse

2-8 3-14

Carbone organique

Issus de combustibles fossiles Issus de feux de biomasse

1-5 16-72 Aérosols désertiques 1000-3000 Poussières industrielles 40-130 Sels marins 1000-6000 Aérosols secondaires Sulfates

Issus de SO2 anthropiques Issus de dimethylsulfide

Issus des volcans

60-90 17-24 6-9

Nitrates

Issus de NOx anthropiques Issus de NOx Biogéniques

10-19 2-8

Carbones organiques

Issus de COV anthropiques Issus de COV biogéniques

0.3-1.8 8-40

Pourcentage des sources anthropiques 5-10%

Pourcentage des sources naturelles 90-95%

Sources : IPCC (2001, 2007). D’après PERE (2010)

Alors que l’aérosol primaire est directement émis dans l’atmosphère via une action mécanique relativement simple (frottement d’un fluide ou d’un solide sur une surface) ou par combustion incomplète (suies), les aérosols secondaires ont pour mode de formation une action mécanique plus complexe, la conversion gaz-particule.

12BEGUE N., 2012. Evolution des propriétés physico-chimiques des aérosols désertiques issus de l'outflow africain, Thèse de Doctorat Université de LA REUNION, E. D. Sciences, technologie et santé, Laboratoire de l‘Atmosphère et des Cyclones (LACy, UMR 8105), Discipline : Physique, Spécialité : Physique de l‘Atmosphère, 255p.

13 MICHAUD V., décembre 2009. Etude des propriétés hygroscopiques des aérosols atmosphériques, Thèse de Doctorat, Université BLAISE PASCAL, U.F.R. de Recherche Scientifique et Technique, Ecole doctorale des Sciences Fondamentales, (Spécialité Physique et Chimie de l'Atmosphère), N° 627, 305p.

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La nucléation homogène a lieu lors d’une sursaturation de la phase gaz. Le rapport de saturation S :

)

(

,

T

P

P

S

A sat A

où PA est la pression de vapeur du gaz A et Psat,A (T) est la pression de vapeur saturante de A à l’équilibre avec sa phase liquide à une température T, nous indique le degré de sursaturation (MICHAUD14). Lorsque la sursaturation (S>1) est suffisamment importante, les embryons de A (2 à 4 molécules de A au début) deviennent rapidement assez gros pour que certains d’entre eux atteignent la taille critique, ce qui leur permet de grossir encore plus vite pour former un nouvel aérosol A.

La nucléation hétérogène, quant à elle, nécessite la présence d’un support solide ou liquide favorisant la nucléation (Noyau de Nucléation). La plupart du temps, ce noyau est en réalité une particule déjà formée dans l’atmosphère. Ainsi, la nucléation hétérogène ne contribue pas à créer de nouvelles particules mais plutôt à transformer les particules déjà existantes.

Puisque l’atmosphère abrite déjà des particules, il est logique de penser que les gaz vont avoir tendance à préférentiellement se condenser sur celles-ci (nucléation hétérogène) plutôt que de se condenser sur eux même (nucléation homogène) car les forces nécessaires à ce type de nucléation sont moindres. Ainsi, seules les atmosphères peu chargées en particules, mais avec beaucoup de gaz condensables, seront le terrain propice à la formation de nouvelles particules (canopée boréale, milieu marin).

En moyenne globale, plusieurs centaines de millions de tonnes d’aérosols sont émis chaque année par une multiplicité de sources à la fois naturelles (volcaniques, biologiques, désertiques, marines) et humaines (combustions, poussières industrielles, émissions agricoles), ce qui induit une très grande diversité de leurs propriétés.

La durée de vie des particules de l’aérosol est une fonction complexe de ses caractéristiques physiques et chimiques (taille, propriétés hygroscopiques…), et dépend aussi du lieu où elles sont libérées. La durée de vie des particules d’aérosol submicroniques dans la troposphère est

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estimée de l’ordre de quelques jours à une semaine. À cause de cette courte durée de vie l’aérosol est fortement variable dans le temps et dans l’espace.

Les particules de l’aérosol de taille 0,1-1 μm sont enlevées de l’atmosphère par les précipitations (déposition humide), tandis que pour les particules de taille 1-10 μm, la gravité de la terre (déposition sèche) est le processus dominant. La concentration des particules de l’aérosol varie considérablement en fonction du temps et de la région. MICHAUD15 parle de la nature et de la proximité des sources d’émission, mais aussi des transformations qu’ils peuvent subir. Elle est de l’ordre d’une cinquantaine de particules par cm3 dans un milieu "pur" (en Antarctique, par exemple), à plus de 100 000 particules par cm3 en milieu "pollué" (lors d’épisodes de pollution urbaine, par exemple). Lors d’une importante tempête de sable, comme en septembre 2009 à Sydney en Australie, les compteurs à particules ont enregistré jusqu’à 15 400 µg de particules par mètre cube d’air en certains points (RAMACHANDRAN, 2009). En temps normal, la concentration en particules n’est que de 10 µg/m3. EL AOUADI16 parle d’une concentration de l’ordre de 103 cm-3 au-dessus des océans, 104 cm-3 au-dessus des régions rurales et 105 cm-3 dans les villes. Le tableau 14 donne les gammes de concentration en masse et en nombre de l’aérosol dans des environnements typiques, d’après DELMAS et al., 2005.

Tableau 14 : Gammes de concentration en masse et en nombre de l’aérosol dans des environnements typiques Concentration massique (µg.m-3) Concentration en nombre (#.cm-3) Atmosphère urbaine 10-100 5 000-1 000 000 Atmosphère rurale 1-10 5 000-40 000 Troposphère libre 0.5-5 100- 10 000 Atmosphère marine 1-100 100- 1 000 Atmosphère polaire 0.1-100 1-10 000

Source : Delmas et al. (2005)

En général, la concentration diminue avec l’altitude (SEINFELD et PANDIS, 1998). À cause de la circulation atmosphérique générale les particules de l’aérosol atmosphérique ne restent pas dans leurs zones de production.

15 Op. CIt.

16AOUADI I. E., 2005. Estimation de la Quantité de Vapeur d’Eau Précipitable et du Forçage Radiatif de l’Aérosol atmosphérique à partir de la Télédétection passive à Oujda (Maroc), Thèse de Doctorat, Université Mohamed Premier, Faculté des Sciences OUJDA, Laboratoire de Physique de l’Atmosphère, Spécialité : Physique de l’Atmosphère, 164p.

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La répartition verticale des aérosols est déterminée par leur taille (les particules fines ayant plus d’aptitude à subsister dans les couches élevées) mais également par leurs sources. Ainsi les aérosols issus de la pollution sont généralement confinés à la couche limite atmosphérique (du sol à 2 ou 3 km d’altitude). Les aérosols troposphériques sont situés principalement dans les basses couches de la troposphère, jusqu’à 4 ou 5 km d’altitude. Les aérosols stratosphériques sont situés à plus haute altitude, entre 12 et 30 km environ.

1.1.2 Composition chimique et mélange des particules d’aérosols

La composition chimique des aérosols dépend à la fois des sources d’émission mais aussi des transformations qu’ils subissent dans l’atmosphère. Les travaux de CLAIN et al. (1995) illustrent bien la difficulté de connaitre la composition chimique de l’aérosol puisque des milliers d’espèces peuvent être identifiées, chacune d’entre elles ne représentant qu’une fraction limitée de la masse totale de l’aérosol. Les principales espèces chimiques constitutives de l’aérosol sont le carbone suie, les carbones organiques primaires et secondaires, les sels marins, l’ammonium, les sulfates, les nitrates, l’eau et les poussières.

Le carbone suie (BC) est une substance noirâtre particulièrement riche en carbone peu réactive chimiquement, résultant de processus de combustion (de fuel fossile et de biomasse). Le carbone organique peut être émis directement dans l’atmosphère (OC) par des sources d’origines anthropiques (combustion incomplète des dérivés du pétrole, de bois, d’ordure ménagères…) ou naturelle. Il peut aussi être formé par nucléation ou condensation des produits de dégradation photochimique des composés organiques volatils (COV). On parle d’aérosols organiques secondaires (SOA). Ces COV peuvent provenir de la végétation (terpène, limonène, isoprène…) ou être issus de sources anthropiques (benzène, toluène…).

Les poussières peuvent être naturelles (érosion des sols, aérosols désertiques) ou anthropiques (usures des pneus, cimenterie, agriculture…). Les émissions des sels marins sont quant à eux fonction du vent à la surface des océans.

L’ammonium est issu de la condensation de l’ammoniaque émis principalement par les activités agricoles. Les sulfates sont des particules formées essentiellement en phase aqueuse par condensation de l’acide sulfurique émis principalement par les activités industrielles.

Cette espèce peut aussi apparaître sous forme de particule lorsque les gouttelettes s’évaporent sans précipiter. Les nitrates se forment à partir de l’acide nitrique. L’acide nitrique à deux voies de formation privilégiées. D’une part, il apparaît en phase gazeuse et d’autre part en phase

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hétérogène sur les particules ou les gouttelettes d’eau nuageuse. La présence d’eau dans la particule dépend de la température ambiante, de l’humidité relative et de la composition chimique des particules. Certains sels comme le nitrate d’ammonium ou le sulfate d’ammonium ont une hygroscopicité élevée et peuvent fixer une quantité d’eau importante.

Figure 35 : Illustration d’un aérosol en mélange interne hétérogène.

Le carbone organique, le carbone-suie et les aérosols minéraux constituent préférentiellement les noyaux des aérosols en mélange interne hétérogène, alors que les espèces comme le sulfate, le nitrate et les sels marins se trouvent

préférentiellement à la surface des aérosols (D’après IPCC 2001).

La nature du mélange d’un aérosol représente la manière dont les différents composés formant la particule sont mélangés entre eux. Au cours de leur transport, les aérosols vieillissent et peuvent se retrouver sous forme de mélanges complexes de différents composés chimiques. Près des sources, les études montrent que les espèces chimiques sont généralement séparées les unes des autres, formant un mélange externe (CHOW et al., 2004 ; MALLET et al., 2004). Au cours de leur transport cette configuration évolue, les particules peuvent interagir entre elles et se mélanger pour former une seule particule, on parle alors de mélange interne (LESINS, 2002 ; PERE et al., 2010). Le mélange interne peut être homogène lorsque les différentes espèces sont bien mélangées entre elles.

Cependant le mélange interne homogène est peu observé dans l’atmosphère. À la différence du mélange interne hétérogène qui correspond à ce qui est le plus fréquemment rencontré dans la réalité, et représente l’inclusion d’une espèce insoluble (noyau) à l’intérieur d’une enveloppe d’espèces condensées (figure 35).

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Par exemple, on peut observer des particules formées d’un cœur de carbone suie, d’aérosols désertiques, enrobées de carbone organique, de sulfates ou de nitrates.

1.1.3 Distribution granulométrique et évolution des populations d’aérosols

La diversité des sources et des processus mécaniques et chimiques intervenant lors de la production des particules a pour conséquence une multitude de morphologie et de taille d’aérosols. Pour caractériser cette population complexe, on utilise le concept de distribution granulométrique. Celle-ci donne, de façon continue, la concentration en particules d’aérosols en fonction du diamètre, et présente généralement un ou plusieurs maxima, constituant les modes de la distrijbution. La distribution granulométrique d’une population de particules d’aérosols peut s’exprimer en nombre, en surface ou en masse. Les aérosols atmosphériques consistent à des particules de taille sur une gamme allant de quelques nanomètres jusqu’à quelques centaines de micromètres. Les particules plus petites, inférieures à 2 μm de diamètre sont généralement appelées fines et celles plus grandes de plus de 2 μm grosses. En général, les modes fine et grosse d’aérosols ont des caractéristiques différentes comme : l’origine, la transformation, les mécanismes d’éloignement par l’atmosphère, les techniques de mesure, la composition chimique, les propriétés optiques et les parcours suivis dans le système respiratoire, et pour ces raisons la discrimination entre les deux modes est fondamentale17. La figure 36 montre les modes de population d’aérosols fréquemment observés, ainsi que les mécanismes d’évolution des particules auxquelles elles appartiennent. Les populations d’aérosols communément rencontrées se répartissent en mode ultra fin, en mode d’accumulation et en mode grossier.

Le mode ultra fin est constitué de particules d’aérosols dont le diamètre est inférieur à 0.1 μm. Ce mode ultra fin peut se décomposer en deux modes distincts : le mode de nucléation dont le diamètre des aérosols est compris entre 0.001 et 0.01 μm, et le mode d’Aïtken correspondant aux aérosols dont le diamètre est compris entre 0.01 et 0.1 μm. Les aérosols de ce mode ultra fin résultent des processus de conversion gaz-particule, tel que la nucléation et la condensation. Dans des conditions thermodynamiques spécifiques de sursaturation, les molécules de gaz subissent un changement de phase. Les embryons ainsi formés dépassant une taille critique deviennent stables et continuent d’évoluer vers des diamètres plus grands. Il est également possible de trouver dans la partie supérieure de ce mode des particules de carbone suie ultra fines directement émises par les processus de combustion. Ce mode domine la distribution en nombre mais leur

17TSAMALIS C., 2009. Variabilité de la distribution verticale de l’ozone et des aérosols troposphériques en région méditerranéenne : processus de transport et impacts radiatifs, Thèse de Doctorat, Université Pierre et Marie Curie, E. D. des Sciences de l’Environnement d’Ile de France, Spécialité : Physico-chimie de l’atmosphère, 200p.

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petite taille ne leur permet d’avoir qu’une contribution massique et optique assez faible. Ces aérosols peuvent croître en s’agglomérant les unes aux autres pour former une nouvelle particule, on parle alors de coagulation homogène. Elles peuvent également tendre vers des diamètres plus grands en entrant en contact avec des particules de taille supérieure. Ce dernier processus est appelé coagulation hétérogène. Dans certains cas, la nouvelle particule formée par coagulation peut appartenir au mode intermédiaire supérieur, c’est -à-dire le mode d’accumulation. Les particules d’Aitken jouent un rôle important dans la formation des nuages en favorisant la condensation de vapeur d’eau en gouttelettes d’eau et/ou de cristaux de glace

Figure 36 : Description granulométrique d’une population d’aérosols et de leurs processus de formation et de dépôt. Adaptée de WHITBY (1978)

Le mode d’accumulation contient des aérosols dont le diamètre est compris entre 0.1 et 2 μm et en général il contient la plus grande partie de masse d’aérosols. Les sources des aérosols dans le mode d’accumulation sont la coagulation des particules du mode nucléation et la condensation des vapeurs aux surfaces des aérosols existants en causant l’augmentation de leur taille. Le nom de ce mode vient du fait que les mécanismes d’éloignement des aérosols de l’atmosphère ne sont tellement efficaces dans ce mode et comme résultat les particules s’accumulent. Ces fines particules peuvent rester dans l’atmosphère durant des jours ou des semaines. Les dépôts sec et

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humide sont les principaux processus par lesquels ces particules sont finalement éliminées de l’atmosphère.

Le mode grossier est composé des aérosols dont le diamètre est supérieur à 2 μm. Ce mode contient essentiellement des aérosols primaires comme les aérosols désertiques, les sels marins. Du fait de leur taille, les aérosols du mode grossier participent de manière importante à la masse totale des aérosols. Par contre ces aérosols sont beaucoup moins nombreux et ne peuvent rester dans l’atmosphère à l’état libre que pour une durée limitée, au voisinage des sources d’émission, dû aux larges vitesses de déposition provoquées par leur taille (SEINFELD and PANDIS, 2006).

Figure 37 : Trois modes de l’aérosol atmosphérique suivant leur distribution en nombre (PUTAUD et al., 2003).

Une population de particules peut donc être décrite par sa distribution en nombre, mais également en surface, en volume ou en masse. L’information relative de la distribution en masse des aérosols est en général plus pertinente pour les considérations relatives à la composition chimique des particules. En revanche, l’impact radiatif ou sanitaire des aérosols est appréhendé à partir d’une distribution en nombre (DELMAS et al., 2005).

Au cours de leur transport, les aérosols subissent de multiples interactions. La distribution granulométrique apporte ainsi des informations importantes sur l’évolution d‘une population d’aérosols. La distribution granulométrique des populations d‘aérosols constitue donc un paramètre majeur (CHOU et al., 2008 ; PATTERSON, 1981 ; TEGEN et LACIS, 1996).

134 1.1.4 Transformations physiques, élimination et temps de résidence des aérosols atmosphériques

Une fois dans l’atmosphère, la composition, la taille et le nombre des particules de l’aérosol changent par de nombreux mécanismes physiques dont l’efficacité est fonction de la gamme de taille dans laquelle se trouvent les particules. Après un temps de résidence au voisinage de la surface terrestre qui peut varier de quelques jours à quelques semaines, elles sont éliminées par voie sèche ou humide. Les réactions chimiques, faisant intervenir les phases gazeuses, liquides et solides sont également très nombreuses et contribuent à modifier l’aérosol.

Les caractéristiques de l’aérosol changent d’autant plus qu’on s’éloigne de la source, de sorte que la composition de l’aérosol tend à devenir uniforme. Près de la source, par contre, la composition de l’aérosol est étroitement liée à celle de la source (CHESTER, 1990).