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Chapitre III : Aérosols désertiques : cycle, zones sources et saisonnalité des émissions

3. Cycle des aérosols désertiques ; de la formation de la matière érodable au dépôt des particules

Les aérosols désertiques obéissent à un cycle qui comporte trois phases distinctes, au cours desquelles ils sont en interaction avec leur environnement : le soulèvement depuis les zones source, le transport dans l’atmosphère et le dépôt (sec ou humide). Mais l’on doit comprendre que pour qu’il ait ce cycle il faut au préalable la formation du matériel érodable.

Au sortir de la lecture de plusieurs travaux abordant le cycle des aérosols désertiques, BOU KARAM (2008) est l’une des rares pour ne pas dire la seule auteure à avoir mentionné ce point (la formation de la matière érodable) et avoir avancé de façon détaillée les divers processus qui le conditionnent.

Selon elle, au-delà de l’existence de conditions météorologiques propices à l’érosion éolienne (ex. vents forts), la nature des sols joue un rôle important dans le processus de soulèvement d’aérosols désertiques, étant donné que ces particules résultent de l’action mécanique du vent sur le sol érodable.

Ainsi la disponibilité de matériel fin à la surface des sols et un facteur déterminant pour les émissions d’aérosols. Plusieurs facteurs géologiques, topologiques, biologiques et climatiques contribuent à la formation de particules fines à la surface des sols faisant intervenir divers processus (ROGNON et al., 1989) tels que :

- L’érosion hydrique (CALLOT, 1987) ; les particules fines issues de l’érosion hydrique sont souvent transportées sur de longues distances par les cours d’eau pour se déposer et s’accumuler dans les lacs et les fonds marins. Par exemple, les lacs asséchés du nord du Sahara résultant en des sols à très forte proportion de dépôts sédimentaires.

- Les réactions chimiques (LAURENT, 2005) ; sont prépondérants dans la plupart des régions humides, notamment en zone tropicale. Les processus chimiques impliqués mettent en jeu divers agents d’altération tels que l’eau, l’oxygène, les acides minéraux ou organiques. Il en résulte la formation de particules de plus en plus petites, généralement stables chimiquement par rapport à leur environnement local.

- Les processus biologiques (CHAMLEY, 1987), comme l’expansion des racines durant la croissance de la végétation au cours de périodes plus humides qui contribuent à la formation des

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particules fines et au remaniement de la structure du sol par fragmentation mécanique des sédiments.

- L’abrasion éolienne (DIETRICH, 1977) ; l’impact de particules soulevées par le vent sur une surface est également une source potentielle de fines particules, qui redéposées conduisent à la formation des sols fins plus facilement érodables.

- La désagrégation des roches (MILLOT, 1964 ; GOUDIE et al., 1979 ; WELLMAN et WILSON, 1965 ; COOKE et WARREN, 1973), notamment dans les régions désertiques chaudes où des cristaux de sel se développent dans les interstices de la roche exerçant ainsi des pressions capables de la fissurer (GREELEY et IVERSEN, 1985).

Etant donné la nature des roches et minéraux communément présents dans les environnements terrestres, l’ensemble des processus d’altération conduit au final à la production de grains de quartz, de petites particules de mica (comme la muscovite), de minéraux argileux (comme la montmorillonite), de carbonates solubles, et d’oxydes de fer (GREELEY et IVERSEN, 1985 ; Laurent, 2005)

La plupart de ces processus génère des particules fines, de taille micronique, à partir de grains plus grossiers. Les particules fines ainsi formées seront par la suite soumises à différents phénomènes qui entrainent leur agrégation (PETTIJOHN, 1972 ; GREELEY et IVERSEN, 1985 ; RAJOT et al., 2003).

3.1. Mécanismes d’émission des aérosols désertiques

Les aérosols désertiques sont mis en suspension dans l’atmosphère par un processus mécanique d’arrachement au sol sous l’action de la force de frottement du vent. En effet, les régions sources d’aérosols minéraux sont les zones arides et semi-arides dont les sols sont constitués d’agrégats érodables (grains de sable) (PETITJOHN et al., 1972 ; GREELEY et IVERSEN, 1985). Les agrégats sont mis en mouvement sous l’action du vent qui exerce une contrainte de cisaillement à la surface au travers de force de frottement (Ƭ) reliée au gradient de vent par la relation :

)

Ζ

(

μa

τ

161 : vitesse du vent,

μ

a: coefficient de viscosité dynamique de l’air, Z : hauteur (m) au-dessus du sol

Figure 43 : Représentation de l’effet du sol sur l’écoulement de l’air et de la contrainte tangentielle Ƭ exercée par l’écoulement sur le sol (ALFARO, 1997)

Le profil de vitesse du vent est représenté par différentes U (z), composante horizontale de la vitesse du

vent, en fonction de l’altitude z. (MOKHTARI31)

Cette force de frottement (τ ) exercée par le vent tend à mettre en mouvement les grains de sable du sol. Le poids (), les forces de cohésions interparticulaires (

Ip

) (IVERSEN et WHITE, 1982) et les forces de tension capillaires (F cap ) (McKENNA-NEUMA et NICKLING, 1989 ; FECAN et al., 1999 ; ISHIZUKA et al., 2005), quant à elles, s’opposent à la force de frottement et maintiennent les grains de sable au sol. Le bilan des forces est ainsi égal à :

PIF

cap

31 MOKHTARI M., 2012, Amélioration de la prise en compte des aérosols terrigènes dans les modèles atmosphériques à moyenne échelle, Thèse de Doctorat, Université de Toulouse, Discipline ou spécialité : Océan Atmosphère, E.D. : Sciences de l'Univers de l'Environnement et de l'Espace, Unité de recherche : CNRM-GAME U.R.A 1357, 185p.

162 Figure 44 : Bilan des forces auxquelles est soumis un grain de diamètre Dp sous la contrainte de cisaillement

(Ƭ) :

Force générée par l’action mécanique du vent (Fu), poids de la particule (P), forces interparticulaires (Ip),

forces capillaires (Fc), et force résultante (Fr) (LAURENT, 2005), reprise par MOKHTARI (2012)

Pour mettre les grains du sol en mouvement, il faut alors que s’exerce sur le sol, une force supérieure à la somme des forces de gravité, des forces de cohésion interparticulaire et des forces capillaires. Cela signifie que, pour chaque type de sol, il existe une vitesse de friction minimale, dite vitesse de friction seuil du vent qu’il est nécessaire de dépasser afin d’arracher la particule du sol.

Tableau 22 : Vitesse de friction seuil (en m/s) pour différents types de surface sec.

Nature du sol Vitesse de frottement seuil (m.s-1)

Dunes de sable fin à moyen (erg) 5-8

Région sableuse avec de petites zones caillouteuses 10

Matériaux fin, désert plat 10-13

Vallée alluviale et dépression saline croutée (chott) 15-18

Désert de caillou (reg) 20

Lorsque ces valeurs sont dépassées, les poussières s’arrachent du sol. La compilation est faite à partir du travail de BEUCHER et al., (2010), d’après BEGUE (2012)

, suivant la nature du sol (rugosité, granulométrie du sol, humidité), le seuil de vent moyen de surface nécessaire pour soulever les particules n’est pas le même (CHEPIL, 1951 ; GILLETTE et al., 1982). La vitesse seuil de soulèvement des aérosols désertiques est estimée entre 6 et 20m.s -1 suivant la nature du sol (CHOMETTE et al., 1999).

Les données expérimentales de BAGNOLD (1941) et CHEPIL (1951) indiquent que pour les gros grains, la vitesse de friction seuil du vent augmente quand la taille des agrégats augmente

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du fait de la force de gravité. En parallèle, il a aussi été constaté une augmentation de la vitesse de friction seuil du vent quand la taille des grains diminue dans le cas des plus petits agrégats (du fait de la force de cohésion interparticulaire qui renforce le lien entre les agrégats) (IVERSEN et WHITE, 1982). Ces deux effets conduisent à une taille optimum de grain de sable (~80 μm) pour laquelle la vitesse de friction seuil est la plus faible.

3.1.1. Les mouvements des particules mobilisées

Les particules arrachées du sol vont présenter différents mouvements, comme illustré sur la figure 45. Une fois soulevée, la particule est soumise à deux forces qui sont la force de gravitation et la résultante verticale des forces aérodynamiques. Dans le but de connaître si la particule arrachée du sol continuera son ascension ou retombera, il faut comparer la vitesse limite de chute de la particule dans l’air et la vitesse de friction.

Figure 45 : Mouvements des grains du sol sous l’action du vent (Illustration des phénomènes régissant la mobilisation d’une particule par le vent)

Figure adaptée de Schepanski (2008, d’après PEYRIDIEU (2010)

Dans le cas où la vitesse de friction est supérieure à la vitesse limite de chute de la particule, celle-ci est entraînée dans un mouvement ascendant appelé « suspension » (figure 45). Les particules entraînées en suspension sont les particules dont le diamètre est inférieur à 60 μm (HAMBLIN et CHRISTIANSEN, 2001). Pour les particules dont le diamètre est compris entre 20 μm et 60 μm, la mise en suspension est relativement brève et les particules retombent assez près des zones sources. Lorsque le diamètre de la particule est inférieur à 20 μm, le temps où la particule est en suspension, celle-ci pourra être transportée.

Dans le cas où la vitesse limite de chute de la particule est supérieure à la vitesse de friction, la particule est entraînée soit en reptation où soit en saltation (appelé aussi bombardement). Les

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particules entraînées en saltation sont les particules dont le diamètre est compris entre 60 μm et 500 μm, alors que la reptation ne concerne que les particules dont le diamètre est supérieur à 500 μm (HAMBLIN et CHRISTIANSEN, 2001 ; SHAO et al., 2000). Ces deux modes de déplacement conduisent à un processus de libération de fines particules connu sous le nom de sandblasting (figure 46)

Figure 46 : Illustrations du processus de sandblasting dans le cas où la particule entraînée dans un mouvement de saltation et de reptation

a) Saltation : les agrégats de taille inférieure à 500 μm sautent, retombent et éclatent

b) Reptation : les agrégats de diamètre supérieur à 500 μm roulent et éclatent

D’après BOUET et al., (2007), reprise par BOU KARAM32 et BEGUE (2012)

Lorsque les particules sont entraînées en saltation, après soulèvement elles sont déplacées à quelques centimètres voire quelques mètres du sol (MARTICORENA et BERGAMETTI, 1995). Les plus grosses particules tombent rapidement, non loin de leur origine. Quand ces dernières frappent la surface, leur énergie cinétique est transférée à la surface. Ces grains de sable sont cassés si l’énergie fournie est supérieure à l’énergie des forces de cohésion qui maintiennent les particules d’aérosols désertiques liées en agrégats et provoque ainsi la libération de particule plus

32 BOU KARAM D. 2008. Mécanismes de soulèvement d’aérosols désertiques en Afrique de l’Ouest, Thèse de Doctorat, Université Pierre et Marie Curie-Paris VI, E.D. Sciences de l’Environnement en Ile de France, 311p.

Sandblasting : les chocs entre agrégats produisent des particules fines (diamètre ˂ 20 μm) qui restent en suspension

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fine (figure 46a). Dans le cas de la reptation, les particules étant trop massives pour être soulevées roulent et éclatent par collision avec d’autres éléments présents à la surface, provoquant également la libération de particules plus fines (figure 46b). L’intensité de production des fines particules dépend du rapport entre le flux d’énergie cinétique transféré par les agrégats et les forces de cohésion des particules formant les agrégats. Du fait de leur faible taille, les fines particules libérées par sandblasting sont directement entraînées en suspension et constituent l’essentiel du flux vertical d’aérosols désertiques.

De nombreux travaux, théoriques et expérimentaux montrent que le flux horizontal de saltation est une fonction qui varie suivant la vitesse de friction du vent (BAGNOLD, 1941 ; CHEPIL, 1951 ; GILLETTE et GOODWIN, 1974). La vitesse de friction du vent est donc le paramètre clef pour la modélisation de l’érosion éolienne et des émissions de particules désertiques puisqu’il contrôle à la fois la fréquence et l’intensité des émissions d’aérosols désertiques. La vitesse de friction du vent est principalement fonction de la texture des sols (composition et la granulométrie des agrégats érodables dans les zones sources) (MARTICORENA et al., 1997 ; CALLOT et al., 2000 ; LAURENT et al., 2008), de la rugosité aérodynamique de l’ensemble de la surface et de la rugosité aérodynamique de la partie érodable de la surface, ainsi que de l’humidité du sol (FECAN et al., 1999).

Le continent africain est propice au soulèvement de poussière désertique du fait des conditions favorables réunies : à savoir de nombreuses zones sources (PROSPERO et al., 2002 ; CAQUINEAU et al., 2002 ; WASHINGTON et al., 2003 ; ENGELSTAEDTER et al., 2006 ; SCHEPANSKI et al., 2007), associées à des phénomènes météorologiques et dynamiques qui génèrent les rafales de petites échelles permettant d’atteindre le seuil d’érosion (ENGELSTAEDTER et WASHINSTON, 2007).

3.1.2. Phénomènes dynamiques et Processus météorologiques responsables du soulèvement des poussières désertiques en Afrique de l’Ouest

Les émissions de poussières désertiques en Afrique de l’Ouest sont régies par un certain nombre de processus météorologiques et dynamiques liés à cette région. BEGUE33 résume ces mécanismes en quatre processus : le contexte dynamique, les jets de basses couches, les activités cycloniques et l’activité convective (courants de densité associés à la convection humide) (figure 47).

Figure 47 : Localisation des principaux processus météorologiques entraînant le soulèvement d’aérosols

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(Voir le texte pour les détails). Adapté de BOU KARAM (2008), d’après MOKHTARI (2012)

3.1.2.1. Le contexte dynamique

Les émissions d’aérosols désertiques depuis les zones sources nord africaines sont la conséquence d’un certain nombre de processus météorologiques et dynamiques propres au climat africain. En basses couches, on peut identifier les principaux acteurs responsables du transport des particules d’aérosols :

Durant la saison humide, le flux d’Harmattan (vent sec et très turbulent dans les basses couches, peut aller jusqu’à 5 km d’épaisseur et est très chargé en aérosols désertiques) et le flux de mousson (relativement plus froid que l’Harmattan, plus chargée en humidité par l’océan et d’épaisseur ≤ 2km) créent deux couches différentes d’un point de vue thermodynamique qui sont : la couche de mousson et la couche d’air Saharienne (SAL) (CARLSON et PROSPERO, 1972). Lorsque le flux d’Harmattan rencontre le flux de mousson, il est moins dense et passe au-dessus favorisant le transport en altitude des aérosols désertiques qui peuvent être ensuite transportés horizontalement sur de longue distance. De plus, durant cette période, lorsque le flux de mousson s’installe sur les terres, le FIT balaye de nombreuses zones sources d’aérosols désertiques (BOU KARAM et al., 2009 ; PROSPERO et al., 2002 ; SCHPANSKI et al., 2007) ce qui favorise un transport efficace de ces aérosols désertiques au-dessus de la couche limite du fait des forts phénomènes turbulents qui se produisent à proximité du FIT (BOU KARAM, 2008). En saison sèche, les aérosols désertiques sont, durant le transport transatlantique généralement plus bas en altitude (4 km) du fait que la SAL ne chevauche pas le flux mousson, comme c’est le cas en

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saison humide (BEGUE, 2012). En parallèle, d’autres processus dynamiques se produisent favorisant le transport des aérosols désertiques.

3.1.2.2. Les jets de basses couches

Les jets de basses couches constituent un mécanisme très efficace pour l’émission d’aérosols désertiques depuis les zones sources nord africaines. En effet, 65% de l’activation des zones sources de l’Afrique du Nord est associé aux jets de basses couches (SHEPANSKI et al., 2009). Les jets de basses couches se présentent ainsi comme le mécanisme de soulèvement dominant de la région nord-africaine (KNIPPERTZ et al., 2008 ; Todd et al., 2008). Ces jets de basses couches sont caractérisés par des maximums de vitesses de vent de surface de l’ordre de 20m.s-1 (BANTA et al., 2006 ; BEUCHER et al., 2010). Les jets de basses couches se forment au-dessus de l’Afrique du Nord tout au long de l’année, avec néanmoins une fréquence d’occurrence qui est plus importante en hiver qu’en été. De plus, la fréquence d’occurrence et l’intensité des jets de basses couches sont accentuées par l’orographie, comme c’est le cas au-dessus de la dépression de Bodélé.

Le couplage entre les émissions d’aérosols désertiques et la dynamique des jets de basses couches est bien illustré par les soulèvements d’aérosols dans la région de Bodélé au Tchad (PROSPERO et al., 2002 ; TODD et al., 2008 ; WASHINGTON et al., 2003). La campagne BoDEx (Bodélé Dust Experiment) a permis de mettre en évidence à partir des observations directes que les jets de basses couches constituent les principaux générateurs des vents intenses à la surface, responsables des soulèvements d’aérosols dans cette région. Ainsi les mesures de vent à Chicha (Tchad) ont montré un jet de basse couche à 960 hPa associé à des vents de 16 m.s-1 (TODD et al., 2008).

3.1.2.3. Les activités cycloniques

Les différences de températures entre le continent nord-africain et la méditerranée favorise la formation de systèmes cycloniques au-dessus du Sahara (ALPERT et ZIV, 1989 ; TRIGO et al., 2002). Ces cyclones sont connus sous le nom de cyclone Sharav ou encore dépression de Khamsin. La fréquence d’occurrence de ces cyclones Sharav est particulièrement importante à l’est et au sud des montagnes de l’Atlas marocain durant le printemps (BARKAN et al., 2005 ; SHEPANSKI et al., 2009). Ainsi, en plus du rôle du gradient de température, celui de l’orographie est également important dans la formation des cyclones Sharav au printemps. Les cyclones Sharav se déplacent à des vitesses supérieures à 10 m.s-1 vers l’est en longeant les côtes de l’Afrique du Nord (ALPERT et ZIV, 1989 ; ALPERT et al., 1990 ; BARKAN et al., 2005).

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L’activation des zones sources d’aérosols par la dynamique des cyclones Sharav peut se produire à n’importe quel moment de la journée (THORNCROFT et FLOCAS, 1997 ; ALPERT et ZIV, 1989 ; PREZERAKOS et al., 1990 ; DAYAN et al., 1990). Plus récemment, BOU KARAM et al., (2009) ont notifié la formation de systèmes cycloniques au sud des massifs de l’Hoggar et l’Aïr au-dessus du Sahel durant la période de mousson. La formation de ces cyclones Sahéliens est due à des effets dynamiques faisant intervenir le cisaillement horizontal caractérisant le FIT renforcé par la présence de jets de basses couches induit par le blocage orographique des masses d’air froides en provenance de la méditerranée. Les forts vents de surface associés à la dynamique de ces cyclones sont capables d’initier de soulèvement d’aérosols au-dessus de la région du Sahel et de favoriser le mélange vertical des aérosols soulevés (BOU KARAM et al., 2009).

3.1.2.4. L’activité convective

Aux environs de la mi-mai, au début de l’été, la ZCIT, jusque-là située en dessous de 10°N, remonte. Les vents changent et soufflent alors de l’océan vers le continent, apportant ainsi un air chargé en humidité au-dessus des terres. Ceci conduit à la formation de systèmes convectifs de méso-échelle (Mesoscale Convective System, MCS), qui se présentent sous forme d’amas nuageux ou de ligne de grain. Les rafales de vent d’air humide et froid associés à la dynamique de ces systèmes convectifs produit au-dessus du Sahel peuvent atteindre des vitesses moyennes de 25 m.s-1. Les courants de densité émanant de ces systèmes convectifs peuvent se propager sur des centaines de kilomètres et atteindre le Sahara (FLAMANT et al., 2009).

Le soulèvement d’aérosols associés à la dynamique de ces systèmes convectifs est connu sous le nom de « Haboob » (FLAMANT et al., 2007). Les haboobs s’observent sur de petites distances (entre 100 et 150 km) mais elles sont très impressionnantes car elles ressemblent à de véritables murs de poussières (figure 48). Etant donné que les phénomènes convectifs sont associés à de la forte turbulence, les haboobs peuvent atteindre des épaisseurs de 1500 à 2000 mètres avec des records à 5000 mètres (BEUCHER et al., 2010). L’occurrence des haboobs est liée à la dynamique de la convection humide. Par ailleurs, ces systèmes convectifs humides contribuent très significativement à la mise en suspension d’aérosols désertiques (FLAMANT et al., 2009). De plus, par transport convectif, les aérosols désertiques peuvent être transportés à des altitudes élevées (TULET et al., 2010).

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Figure 48 : Images d’un soulèvement d’aérosols désertiques associé à la convection humide (Haboob)

3.2. Transport de particules d’aérosols désertiques

Une fois la particule injectée dans l’atmosphère, les forces auxquelles elle est soumise vont contrôler sa suspension. KOCHA34 affirme quelque chose d’important à cet égard. Il souligne en effet qu’une fois les poussières désertiques soulevées, elles peuvent rester en suspension dans l’atmosphère bien que les vents de surface puissent retomber en dessous de la valeur seuil nécessaire à leur soulèvement.

On admet généralement qu’au vu du bilan des forces, seules les particules ayant un diamètre inférieur à environ 20 μm peuvent être transportées. Ce sont ces fines particules qui constituent l’essentiel du flux vertical d’aérosols désertiques (NICKLING, 1994).

Un flux horizontal de particules est présent dès le début du processus de soulèvement. MOKHTARI35 soutient que si ce flux présente un caractère laminaire, les particules forment une couche de poussière localisée près de la surface. Si elles sont soumises à l’action de mécanismes turbulents, les particules fines issues de la corrasion (sandblasting), plus légères, sont plus efficacement élevées dans les couches supérieures de l’atmosphère et peuvent être transportées sur de longues distances. Il note que ces mécanismes peuvent être d’origine thermique

34 KOCHA C., 2011. Interactions entre poussières désertiques et convection profonde en Afrique de l’Ouest : observation et modélisation à échelle convective, Thèse de Doctorat, Université de Toulouse, Ecole doctorale : S.D.U.2, Unité de recherche : CNRM-GAME (URA 1357) CNRS/Météo-France, 204p.

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(mouvements convectifs) ou d’origine dynamique (liés aux conditions météorologiques ou aux influences orographiques) et affirme que le transport des aérosols désertiques émis depuis la