• Aucun résultat trouvé

Chapitre I : Cancer et Approches Moléculaires

IV. Exemples des gènes impliqués dans le cancer

IV.2. Gène LMTK3

La Lémur tyrosine kinase-3 (LMTK3) fait partie des sérine-thréonine-tyrosine kinases(47, 48). Elle a récemment été identifiée comme un nouveau régulateur de l'Erα, en jouant un rôle central dans la résistance endocrinienne du cancer du sein(49). Elle peut également jouer un rôle dans d’autres cancers non lié à l’ERα. LMTK3 est aussi associée à la voie de signalisation Wnt/β-caténine(50), connue comme une voie essentiel dans la progression du cancer colorectal. Cependant, la fonction biologique du gène demeure incertaine.

1. Régulation de LMTK3

Il a déjà été rapporté que LMTK3 était un régulateur de la fonction ERα. Ceci en régulant la stabilité et l'activité de ERα au niveau de l'ARNm, interagissant avec FOXO3a et conduisant à une activité de transcription accrue de ERα via une liaison accrue de FOXO3a au promoteur ERα, et au niveau de la protéine phosphorylant ERα, ce qui lui confère une protection contre la dégradation protéosomique(51).

Plusieurs récepteurs tyrosine kinases (RTK), en particulier ERα, sont localisés dans le noyau, où ils peuvent réguler l'expression des gènes (transactivation) en se liant à l'euchromatine(52). KAP1 est un co-répresseur de transcription dont l'activité est régulée par des modifications post-traductionnelles telles que la phosphorylation et la sumoylation. Une fois phosphorylée, KAP1 affecte la décondensation globale de la chromatine(53), ce qui entraîne à son tour la dérépression de gènes liés à KAP1 tels que ceux impliqués dans l'arrêt du cycle cellulaire et

35

l'apoptose(54). Il a été démontré que la phosphorylation de KAP1 est régulée par les protéines phosphatases 1a (PP1a) et 1b (PP1b), responsables du maintien de sa fonction répressive(55).

2. Dérégulation de LMTK3

La lémur tyrosine kinase-3 (LMTK3) est une nouvelle protéine kinase qui régule la stabilité et l'activité de l’ERα. Une dérégulation de l’expression de cette protéine dans les cancers du sein est associée à un phénotype plus agressif et pouvait prédire la résistance endocrinienne. L'inhibition de LMTK3 entraîne une re-sensibilisation au tamoxifène(49). Elle est capable de moduler l'expression de la protéine 8 de choc thermique de 22 kDa (HSPB8)(49). Cette dernière protège les cellules du cancer du sein contre le tamoxifène et bloque l'autophagie. Le fait de la rendre silencieuse, HSPB8 induit l'autophagie et provoque la mort cellulaire. La voie LMTK3-HSPB8 pourrait donc constituer l'un des mécanismes sous-jacents à l'endocrinésistance des cancers du sein ERa-positifs.

Les mécanismes de résistance endocrinienne dans les cancers du sein ERα positifs incluent la perte de l'expression de ERα, des modifications post-transcriptionnelles de ERα, une augmentation de l'activité de la protéine activatrice 1 (AP1), une dérégulation des co-activateurs de ERα et une augmentation du signal du récepteur tyrosine kinase (RTK), ce qui provoque l’activation des voies ERK et PI3K et la dérégulation du cycle cellulaire et le mécanisme apoptotique(54, 55).

LMTK3 supprime l’expression de gènes analogues à un suppresseur de tumeur en fixant la chromatine à la périphérie nucléaire, fonctionnant comme une protéine catalytique d'échafaudage. La liaison de LMTK3 à la chromatine est médiée via l'interaction avec PP1a et KAP1. La formation de ce complexe conduit à la suppression de la phosphorylation de KAP1, renforçant à son tour cette fonction de répression transcriptionnelle unique.

La protéine kinase LMTK3 possède des propriétés d'échafaudage, elle crée un système qui permet d'accroître la complexité de la signalisation dans la carcinogenèse. L’incidence accrue de divers type de cancer est étroitement associée à une dérégulation de LMTK3.

3. Implication de LMTK3 dans le cancer

À la différence des deux autres LMTK, les études fonctionnelles de LMTK3 sont principalement axées sur le cancer à ce jour. Elle est exprimée dans plusieurs types de cancers, dont le cancer du sein(51), le cancer gastrique(56), la leucémie neutrophilique chronique (LCN)(57), la thyroïde, cancer du poumon et le cancer colorectal(58).

36

L’implication de LMTK3 dans le cancer a débuté à partir des expériences de criblage d’ARNi ciblant, d’une part le kinome et d’autre part(59), l’ensemble des tyrosines kinases dans des lignées cellulaires de leucémie myéloïde aiguë (LMA) et des cellules humaines stimulées par Wnt3a. LMTK3 a un rôle putatif dans la voie Wnt/β-caténine et un régulateur de l’ERα et marqueur pronostique du cancer du sein. Il a été prouvé que LMTK3 co-localise avec ER dans le noyau, augmentant ainsi sa transcription, sa stabilité et son activité. Ce qui est étroitement associé à la progression et à l'évolution de la maladie dans les cellules cancéreuses du sein(51). De même la suppression de LMTK3, réduit la prolifération, l’invasion et la migration des cellules cancéreuses de la thyroïde, en partie par la médiation de l’activité ER.

4. Mécanisme d’inhibition de LMTK3

a. LMTK3 et Cancer colorectal

L'inhibition de LMTK3 pourrait entraîner une réduction de la transcription dépendante de la β-caténine. La β-caténine est un médiateur clé de la voie de signalisation canonique Wnt/β-caténine, considérée comme l'un des principaux moteurs de la cancérogenèse colorectale. Lorsque le signal Wnt est présent, l'activité de GSK3β est inactivée, de sorte que la β-caténine s'accumule dans le cytoplasme et se déplace ensuite dans le noyau (60). La β-caténine nucléaire interagit avec des membres de la famille des co-facteurs de transcription TCF/LEF pour activer des gènes cibles en aval, tels que les gènes régulant le cycle cellulaire (c-myc et cycline D1) et les gènes associés aux métastases et à l’invasion des cellules cancéreuses (MMP). -7 et uPA)(61). Le blocage de la protéine LMTK3 pourrait être bénéfique pour le pronostic des patients atteints de CCR.

b. LMTK3 et cancer lié aux hormones

Les cancers liés aux hormones, notamment les cancers du sein, de l'endomètre, de l'ovaire et de la thyroïde, ont des mécanismes cancérogènes communs(62). LMTK3 induit la voie des œstrogènes via la phosphorylation de l’ERα. Par ailleurs, l'expression élevée de LMTK3 est associée à une survie globale plus faible et sans maladie(59). Par conséquent, l'inhibition de LMTK3 par l'interférence de l'ARN(MicroRNA-34a) a considérablement amélioré l'effet inhibiteur de la croissance des lignées cellulaires de cancer du sein résistant au tamoxifène. Selon la fonction de LMTK3 dans le cancer du sein, une inhibition ciblée de LMTK3 visant à renforcer l'effet de l'endocrinothérapie peut constituer une stratégie de traitement efficace du cancer, en particulier chez les patients exprimant ERα.

37

5. LMTK3 et SNP

L'initiation et la progression du cancer passent par l'accumulation de multiples altérations génétiques et épigénétiques de molécules critiques et de voies de signalisation. L'identification des responsables moléculaires modifiés est cruciale pour le diagnostic et le traitement du cancer.

L'abondance de LMTK3 et ses polymorphismes étaient significativement associés au phénotype de plusieurs tumeurs malignes. Elle a été reconnue comme un biomarqueur potentiel ou un marqueur pronostique de diverses tumeurs malignes. L'expression de la protéine LMTK3 et ses polymorphismes de lignée germinale, rs9989661 et rs8108419(56), ont été associés de manière significative à des profils clinico-pathologiques et à un meilleur pronostic du cancer du sein ERαp, gastrique et Cancer colorectale.

38