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De la co-originarité des deux versants de la démocratie

Pour saisir l'originalité de la dernière position, il est nécessaire de récapituler brièvement le chemin parcouru au cours de cette typologie. Après avoir postulé que la démocratie était travaillée de l'intérieur par une tension entre les deux dimensions qui la constituent (son autodétermination collective et l'universalité de ses normes fondamentales), nous avons cherché à voir comment différents courants philosophiques articulaient ces visages contradictoires de la démocratie. De ces différentes articulations, on espérait déduire les critères d'exclusion de la communauté démocratique. On a, jusqu'à maintenant, observé trois stratégies de réconciliation différentes qui correspondent à trois conceptions du rôle de la frontière. Schématiquement, Schmitt a pris position pour une forme dévoyée de la démocratie résolument anti-libérale. Son refus intransigeant de considérer le domaine juridique comme autre chose qu'une simple régulation illusoire et temporaire du politique exclut d'y voir les bases théoriques d'une démocratie authentique. On en prend pour preuve le fonctionnement purement arbitraire qu'il préconise pour la frontière, où l'exclusion peut allègrement se passer de critère. Ensuite, Rawls et les arpenteurs de la justice qui ont marché sur ses traces ont effectivement articulé les deux versants démocratiques mais toujours au prix d'une ordination lexicale. Les libéraux souverainistes subordonnent la souveraineté de la décision populaire aux principes libéraux de justice, tandis que les communautariens font dépendre la conception de la justice de l'autodétermination collective. Cela les mène à réclamer des politiques d'admission sélectives basées sur des critères utilitaristes ou identitaires. Enfin, les cosmopolites libéraux plaident pour une démocratie globale reposant en priorité sur des principes juridiques et, accessoirement, sur une instrumentalisation de la souveraineté. Au sein de cette démocratie à l'extension illimitée, les frontières, si elles devaient être maintenues, ne pourraient plus interférer avec la liberté individuelle de mouvement. Néanmoins, le peu d'intérêt manifesté par les cosmopolites libéraux pour la question de la participation populaire laisse craindre que la démocratie évanescente qu'ils promeuvent souffre d'un déficit de légitimité.

Dans ce paysage conceptuel, la position d'Habermas fait preuve de créativité. Plutôt que de se focaliser sur un versant unique de la démocratie ou de hiérarchiser ses différentes composantes,

219J'emprunte cette expression à Étienne Balibar qui l'a forgée dans son article « Europe difficile. Les chantiers de la démocratie » dans Nous, citoyens d'Europe ? Les frontières, l'Etat, le peuple, coll. « Cahiers libres », La Découverte, Paris, 2001, pp. 286-318.

celui-ci choisit de postuler leur co-originarité :

« il existe de ce fait un lien conceptuel entre souveraineté populaire et droits de l'homme, démocratie et État de droit. La décision initiale de s'engager dans l'autolégislation démocratique ne peut, en effet, être mise en œuvre autrement que par la réalisation des droits que les intéressés doivent s'accorder réciproquement s'ils souhaitent réglementer légitimement leur vie en commun par les moyens du droit positif. Or, pour parvenir à cette fin, il faut recourir à une procédure d'instauration du droit qui garantit la légitimité et confère au développement du système des droits une forme durable. »220

En d'autres termes, la constitution de la démocratie requiert une participation rigoureusement égalitaire de ses deux versants. Si l'une de ces deux fondations venait à se trouver dans une position subalterne, l'équilibre fragile de l'édifice démocratique s'en trouverait affecté et, au bout du compte, mis en péril. Autodétermination collective et droits subjectifs, liberté des Anciens et liberté des Modernes pour parler comme Benjamin Constant, sont dans l'obligation de participer équitablement à la constitution de la démocratie s'ils veulent que celle-ci s'avère être stable. Mieux, ils doivent s'imbriquer l'un dans l'autre pour participer, de conserve et sans ordre de primauté, à la constitution du régime politique démocratique :

« L'autonomie politique des citoyens doit s'incarner dans l'auto-organisation d'une communauté qui, par le biais de la volonté souveraine du peuple, se donne à elle-même ses lois. D'un autre côté, l'autonomie privée des citoyens doit se concrétiser par des droits fondamentaux qui garantissent l'autorité anonyme des lois. Ces orientations étant fixées, si l'une de ces idées est mise en valeur séparément, ce ne peut être qu'au détriment de l'autre. On perd du même coup de vue l'origine commune de ces deux idées. »221

Cette notion de la co-originarité va resurgir de façon récurrente tout au long de cette thèse. Il nous semble dès lors bon de ne pas se contenter de l'énoncer sommairement mais d'également prendre le temps d'en inspecter le mécanisme et les ressorts. Tout l'intérêt de cette position tient dans le délicat équilibre qu'elle instaure entre autodétermination et normes universelles. Cependant, on perçoit d'emblée que cette description de la démocratie libérale est aussi stimulante qu'elle

220Habermas, Jürgen, « L'inclusion : intégration ou enfermement ? Du rapport entre nation, État de droit et démocratie » dans L'intégration républicaine. Essais de théorie politique, trad. Rochiltz, Rainer, Fayard, Paris, 1998, p. 130.

fragile. On n'a cessé d'insister sur la tension qui existent entre les deux versants de la démocratie. Or, le moindre écart de la démocratie libérale par rapport à son point d'équilibre menace de faire retomber la co-originarité sur un ordre de préséance entre les droits de l'homme et la souveraineté populaire. Conscient de cette difficulté, l'effort de Habermas porte sur la démonstration de la robustesse de sa conceptualisation du régime démocratique, en dépit de sa tension intrinsèque. Il s'agit de donner à voir que l'équilibre sur lequel repose la démocratie libérale est plus stable que notre première description ne le suggère. Pour ce faire, il faut établir que souveraineté populaire et droits de l'homme ne se rencontrent pas fortuitement, selon une relation externe hasardeuse mais, à rebours de ce qu'on a affirmé jusqu'à maintenant, qu'ils s'appellent réciproquement en vertu d'un lien conceptuel intrinsèque. Selon ses propres mots, il faut prouver qu' : « [...] il existe, du point de vue normatif, non pas simplement un lien historique et contingent, mais un lien conceptuel ou interne entre la théorie du droit et la théorie de la démocratie. »222 Dans Droit et démocratie, son maître ouvrage dans le champ de la théorie politique, Habermas reformule la question de la façon suivante : comment « expliquer l'émergence paradoxale de la légitimité à partir de la légalité » ?223

Paradoxale car, d'un côté, le droit ne se soutient que par sa seule positivité. Les citoyens, dans l'usage de leur autonomie privée, ne respectent les lois édictées que par crainte de la sanction étatique dont s'assortit leurs violations. Néanmoins, d'un autre côté, les citoyens doivent pouvoir se concevoir, en fonction de leur autonomie publique, comme les auteurs des lois auquel ils obéissent. Dans ce cas, ce n'est plus par crainte de la sanction mais par respect de la norme qu'ils conforment leurs comportements aux exigences législatives. Comment harmoniser ces deux motifs d'obéissance à la loi ?224 La difficulté est d'autant plus épineuse que nous vivons dans un monde désenchanté qui ne peut plus en appeler à un ordre cosmique supérieur pour asseoir la légitimité de sa législation sur des droits naturels immuables.225 La clef de cette réconciliation entre légalité et légitimité, entre positivité et normativité est alors à chercher, selon Habermas, dans le principe de la discussion. Il faut faire sortir l'idée d'autolégislation du cadre trop étroit qui lui a longtemps servi de référence, à savoir celui d'une législation morale individuelle au cours de laquelle chacun se retrouve face à ses propres choix dans le tribunal de son for intérieur. L'autolégislation ne correspond guère à ce schéma car elle s'opère toujours sur le mode d'un agir communicationnel. Autrement dit, elle revêt la forme d'une procédure délibérative avant même que celle-ci soit institutionnalisée sous la forme

222Ibid., p. 276.

223Habermas, Jürgen, Droit et démocratie. Entre faits et normes, trad. Bouchindhomme, Christian ; Rochlitz, Rainer, coll. « NRF essais », Gallimard, Paris, 1997, p. 98.

224Ibid., pp. 98-9.

225Id., « Du lien interne entre État de droit et démocratie » dans L'intégration républicaine. Essais de théorie politique, op. cit., p. 277.

d'un Parlement.226 Selon le développement, assez technique mais d'une logique implacable, de Habermas :

« L'idée décisive est que le principe démocratique est dû à l'intrication du principe de la discussion et de la forme juridique. Je comprends cette intrication comme une genèse logique des droits que l'on peut reconstruire pas à pas. Elle trouve son point de départ dans l'application du principe de la discussion au droit – constitutif pour la forme juridique en tant que telle – aux libertés subjectives d'action, et son terme avec l'institutionnalisation juridique des conditions préalables à un exercice de l'autonomie politique ayant recours à la discussion, grâce auquel il devient possible de conférer rétrospectivement la forme juridique à l'autonomie privée qui était initialement posée de manière abstraite. D'où, le principe démocratique ne peut se manifester que comme le cœur d'un système de droits. La genèse logique de ces droits forme un processus circulaire dans lequel le code du droit et le mécanisme destiné à produire le droit légitime, donc le principe démocratique, se constitue co-originairement. »227

Autrement dit, il existe un jeu d'anticipation et de rétrospection de la légitimité au sein du système des droits. Les droits subjectifs ne peuvent, suivant cette genèse, se revendiquer à l'origine que de l'étroite légalité contenue dans la forme juridique de l'autonomie privée. Un tiers autoritaire impose à chaque individu de n'agir que dans la mesure où il ne nuit pas à la liberté d'autrui. Néanmoins, cette légalité embryonnaire contient en germes la possibilité de son extension. Afin de spécifier les modalités concrètes de son application, elle appelle à une délibération partagée. Ce faisant, elle ne confère pas seulement une légitimité rétrospective à l'autonomie privée, elle anticipe également l'institutionnalisation d'une autonomie publique. Ainsi, on voit que, selon Habermas, le secret d'une réconciliation entre droits subjectifs fondamentaux et souveraineté populaire se loge dans l'application du principe de la discussion à la systématique des droits. Par delà leurs apparentes contradictions, le statut de personne juridique est donc déjà gros du principe démocratique.228

Dans le cas de la frontière, une telle position achoppe malheureusement sur le fait que, comme on l'a relevé précédemment, l'autodétermination collective propre à la démocratie a une fâcheuse tendance à pencher dans la direction du particularisme. Habermas lui-même, en dépit de l'universalisme intrinsèque de la genèse de son système de droits, reconnaît la nécessité de distinguer au sein de l'ordre juridique entre membres et non-membres.229 On peut observer

226Id., Droit et démocratie. Entre faits et normes, op. cit., p. 138. 227Ibid., pp. 139.

228 Ibid., pp. 147-8.

rétrospectivement que chaque fois qu'une déclinaison de la souveraineté populaire a été mobilisée, c'était dans le but de clôturer l'espace politique. Chez Schmitt, ce qui prime, c'est la survie de la communauté politique dans un environnement instable et dangereux. À ce titre, la souveraineté – vaguement populaire dans la mesure où elle se trouve entre les mains d'un leader charismatique supposé incarner à lui seul la volonté collective – a parmi ses attributions fondamentales l'exclusion de tout individu qui représente potentiellement un danger. Chez les disciples de Rawls, c'est au nom des relations de réciprocité entre citoyens jugées consubstantielles à la souveraineté populaire que les politiques d'admission sont soigneusement régulées tandis que chez les communautariens, l'autodétermination collective prend une tonalité identitaire qui justifie le rejet de l'étranger. Ce qui est encore plus parlant, c'est que le seul groupe d'auteurs qui refuse tout principe de fermeture de la communauté politique choisisse de confier la souveraineté à la loi plutôt qu'au peuple. On peut temporairement en conclure que, malgré la diversité de leurs motivations, toutes ces approches choisissent de se tourner en priorité vers la souveraineté populaire lorsqu'ils cherchent à légitimer l'exclusion.

Les auteurs que nous allons maintenant aborder refusent d'y voir une fatalité et relèvent le défi de faire mentir l'association conceptuelle entre souveraineté populaire et particularisme. En cela, ils s'inscrivent dans la continuité de l'hypothèse habermassienne d'une co-originarité des droits de l'homme et de la souveraineté populaire. Pour eux, l'autodétermination collective peut aussi agir comme un principe d'inclusion.230 Habermas n'a-t-il d'ailleurs pas été le premier à affirmer que, en vertu de ce principe de co-originarité, on pouvait conclure que le lien entre nation et démocratie était conceptuellement contingent et qu'il était donc possible de réfléchir aux possibilités d'une extension de la démocratie au-delà de son cadre historique, l’État-nation ?231 Néanmoins, ils rompent tous partiellement cette filiation théorique au moment d'aborder la question de la conflictualité inhérente à cette articulation. On a vu que Habermas insistait lourdement sur l'harmonie, voire sur l'implication logique et nécessaire de ces deux principes. Or, les auteurs que nous rangerons sous l'appellation de la « co-originarité » partagent l'intuition d'une impossible

déterminée de sociétaires juridiques et permettent par là même de différencier les membres des non-membres, les citoyens des étrangers. » Néanmoins, et toute la difficulté de sa position est perceptible dans la volonté d'observer conjointement ces deux principes, Habermas précise son propos et ajoute à la même page que cette différenciation ne peut se faire sur une base arbitraire et qu'elle se doit d'opérer dans le respect d'un universalisme moral qui proclame l'égalité fondamentale de tous les êtres humains : « Parallèlement, l'immigration, et donc l'ouverture de la communauté juridique à des étrangers souhaitant acquérir des droits d'appartenance, exige un règlement qui soit dans l'intérêt égal des membres et des requérants. », cf. Habermas, Jürgen, Droit et démocratie. Entre faits et normes,op. cit., p. 142.

230Benhabib, Seyla, « Twilight of Sovereignty or the Emergence of Cosmopolitan Norms ? Rethinking Citizenship in Volatile Terms », Citizenship Studies, vol 11, n°1, 2007, p. 32.

231C'est l'objet de ce bref recueil d'articles qui aura fait couler beaucoup d'encre : Habermas, Jürgen, Après l’État-nation. Une nouvelle constellation politique, trad. Rochiltz, Rainer, Fayard, Paris, 2000.

préséance entre les deux versants de la démocratie libérale mais sans aller jusqu'à affirmer que leur agencement se fait de manière spontanée et paisible. Pour l'illustrer, nous suivrons la reconstruction de ce principe chez trois auteurs qui cherchent à démocratiser la frontière sans passer exclusivement par des solutions libérales. Nous commencerons par nous pencher sur le concept d'itération démocratique établi par Benhabib pour ensuite le contraster avec deux tentatives similaires : la citoyenneté comme activité productrice de statuts chez Balibar et le demos virtuellement illimité d'Abizadeh. Après avoir exposé ces trois thèses originales, nous tenterons de démontrer qu'elles partagent des intuitions communes, empruntées aux travaux de Claude Lefort, quant à la part d'indéterminable dans les fondements de la démocratie.

Benhabib : l'itération démocratique

Le monde dans lequel nous vivons a beau être divisé le long de frontières nationales, il n'en est pas moins progressivement devenu un ordre politique régulé par des normes universelles. Negri n'hésite pas à dire que dans l'univers politique contemporain : « [...] la loi supranationale surdétermine puissamment la loi domestique. »232 Benhabib y voit la réalisation graduelle de la prédiction kantienne selon laquelle le monde politique s'ordonnerait, à terme, en trois niveaux distincts de relations juridiques. Au droit étatique, qui régule les relations entre les concitoyens et leur État, s'ajoute un droit des gens qui traite des rapports entre États. Mais cet édifice serait incomplet s'il n'était pas surmonté par un droit cosmopolitique qui se préoccupe des relations entre individus et États étrangers.233 À chacun de ces niveaux juridiques correspond son lot particulier de droits et de devoirs dérivés depuis les droits que l'homme possède à l'état de nature. Or, Kant pense que la juridiction cosmopolitique s'organise autour d'un droit subjectif que tout individu peut légitimement opposer aux États : le droit à l'hospitalité. Toute personne potentiellement menacée de « destruction » - selon le terme vague employé par Kant - par le refus d'un séjour temporaire doit en théorie bénéficier d'un droit inconditionnel à l'admission sur le territoire.234 C'est ce que le droit moderne a retenu sous le nom du principe de non-refoulement. Ce que Kant ne dit pas, en revanche, c'est que les individus disposent d'un droit de séjour illimité. La formulation qu'il donne de l'hospitalité ne laisse aucune place au doute, celle-ci ne peut être que conditionnelle. Dès lors, puisqu'elle ne peut faire l'objet d'aucune revendication sur la base d'un droit subjectif, la résidence

232Hardt, Michael et Negri, Antonio, Empire, trad. Canal, Denis-Armand, coll. « Faits et causes », dir. Jallon, Hugues, Exils, Paris, 2000, p. 42.

233Benhabib, Seyla, The Right of Others. Aliens, Residents and Citizens, Cambridge University Press, Cambridge, 2004, p. 25.

dans un État étranger reste un privilège qui ne peut être accordé que par le souverain.235 Kant nous laisse donc avec un héritage ambigu. Bien qu'il ouvre la porte à la possibilité d'un droit subjectif cosmopolitique, il s'empresse de redessiner l'écart entre un droit inconditionnel de séjour et le privilège de la résidence qui reste dépendant du bon vouloir du souverain. « Le système étatique moderne est coincé entre la souveraineté et l'hospitalité. », en conclut Benhabib.236 La question qui reste irrésolue est celle de la distance qui sépare ces deux concepts. Comment faire en sorte que souveraineté et hospitalité convergent jusqu'à se rejoindre ?

Une chose est certaine : les principes libéraux ne peuvent à eux seuls combler cet écart. La perspective d'une justice globale qui se fondrait dans le réseau de la gouvernance mondiale plutôt que de s'asseoir sur l'autorité d'un gouvernement par le peuple ne trouve pas grâce aux yeux de Benhabib.237 Elle détaille trois raisons qui la poussent à rejeter l'emploi du paradigme de la justice globale comme procédure de décision des politiques d'admission. La première raison est épistémologique. En supposant même que l'on parvienne à mettre sur pied un schéma de redistribution des richesses (parmi lesquelles on compte l'appartenance, considérée comme un bien social) sans passer par l'élaboration d'un gouvernement supranational (hypothèse, il est vrai, peu plausible), comment définir la part de responsabilité de chaque État dans des phénomènes globaux ? sur la base de quelle clef de répartition assumer les coûts d'un principe global de différence ? Tant que ces questions n'auront pas trouvé de réponse, Benhabib juge que le principe d'une justice globale ne peut être qu'un horizon moral. Cela ne veut pas dire qu'il doit être rejeté en soi mais cela indique qu'il est incapable d'être à lui seul le principe effectif de la redistribution des biens sociaux.238 La seconde raison est herméneutique. Comment évaluer les notions de bien-être ou de richesse alors qu'elles varient sensiblement d'une culture à l'autre ? Et si on admet que ces notions ne connaissent pas de définition transculturelle unique, comment procéder à une redistribution juste des biens sociaux en l'absence d'unité de mesure de leurs valeurs respectives ?239 La dernière objection est aussi la plus sérieuse. Selon Benhabib, c'est précisément parce qu'il n'existe de réponse unique à aucune de ces questions qu'il est tout à fait impossible de confier les politiques d'admission

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