• Aucun résultat trouvé

Dans ces cas, nous avions formulé la remarque que le passage à l’écrit, dans la logique des investissements de libido, pouvait au moins équivaloir à la formation de substitut

Dans le document tel-00576284, version 1 - 14 Mar 2011 (Page 156-159)

psychotique, c’est-à-dire la formation des symptômes de la psychose ; second temps de la maladie (refonte de la réalité). Cela dit, nous ne posions pas qu’un tel passage à l’écrit serait du registre de la refonte de la réalité. Il s’agissait en fait d’envisager que le passage à l’écrit puisse réussir à localiser dans l’écriture le quantum d’affect laissé libre des

438 - FREUD, S., "Le créateur littéraire et la fantaisie," L'inquiétante étrangeté et autres essais, (Paris:

Gallimard, 1985) 29-46.

439 - Id., 44.

tel-00576284, version 1 - 14 Mar 2011

représentations de la première relation à la réalité dans le premier temps de la psychose et qui demeure alors replié sur le moi. Seulement ceci n’était pas sans une condition précise, celle de l’engagement du lecteur ou de celui qui en prend la fonction, mais nous y reviendrons.

Il semblerait alors que le cas de JF nous permette davantage de fonder cette hypothèse que nous avions soulevée depuis l’étude des textes freudiens. Plutôt que d’être un cas où fut mis en œuvre le processus de refonte de la réalité sous-tendue par la création de nouvelles représentations (refonte de la réalité), il fut un cas où une pratique de l’écriture est venu court-circuiter la formation de substitut psychotique tout en autorisant un investissement de libido tourné vers le monde extérieur. Plusieurs éléments nous mettent sur cette voie.

D’abord, il paraît peu certain que l’écriture « prère » fut à elle seule de l’ordre d’une refonte de la réalité. Par comparaison, rappelons-nous seulement le foisonnement de l’expérience dont Daniel Paul Schreber fit preuve dans son texte Mémoires d’un névropathe, et que Sigmund Freud prit pour une reconstruction de la réalité

440

.

Par ailleurs, toujours dans "La perte de la réalité dans la névrose et dans la psychose", Sigmund Freud a détaillé quelques-uns des mécanismes en jeu dans le second temps de la psychose, lorsque la refonte de la réalité se produit. Ainsi, il écrivait : « De la sorte la psychose a pour tâche elle aussi de créer de telles perceptions propres à correspondre à la nouvelle réalité, but qui est atteint de la façon la plus radicale sur la voie de l’hallucination. Si les illusions mnésiques, les délires et les hallucinations dans tant de formes et de cas de psychose, ont un caractère si pénible et sont liés à une montée d’angoisse, cela montre bien que tout le processus de refonte s’accomplit contre de violentes forces opposées »

441

. Or, du côté de JF, nous n’avons pas observé de telles montées d’angoisse, pas plus qu’il ne sembla halluciner ni se plaignit d’hallucinations. La seule véritable poussée pulsionnelle fut observée lorsqu’il se précipita vers l’adolescent ayant dérobé des cahiers à l’atelier d’écriture, réaction qui, même si elle fut exagérée, ne

440 - « Pour parler comme Schreber, l’univers a subi « une profonde modification interne ». » FREUD, S.,

"Remarques psychanalytiques sur l'autobiographie d'un cas de paranoïa," Cinq psychanalyses, 18 éd., (1911;

Paris: Presses Universitaires de France, 1993) 315.

441 - FREUD, S., "La perte de la réalité dans la névrose et dans la psychose," Névrose, psychose et perversion, 10 éd., (1973 ; Paris: Presses Universitaires de France, 1997) 303.

tel-00576284, version 1 - 14 Mar 2011

4.3. L’écriture généalogique, sa fonction, ses mécanismes :

Commençons par nous rappeler ce que nous avons extrait de la doctrine freudienne dans notre étude des textes de Sigmund Freud (Partie I, chapitre A.).

En procédant à l’étude du texte "Le créateur littéraire et la fantaisie"

438

, nous avons commenté l’hypothèse selon laquelle ce que Sigmund Freud appela « l’autre classe d’œuvres »

439

regroupait préférentiellement les œuvres composées par des sujets de structure psychotiques (Partie I, chapitre A, paragraphe 2.1.). Nous avions ainsi vu que la création littéraire chez des sujets psychotiques pouvait permettre à ces derniers de retirer de leur art les bénéfices que Sigmund Freud reconnaissait à tout créateur, c’est-à-dire la guérison sans les inconvénients du symptôme ; symptôme dont la refonte de la réalité est une des composantes.

Dans l’étude de ce texte de Sigmund Freud, nous avions aussi souligné que, comme dans la plus grande majorité de ses textes proposant des éléments théoriques sur les fonctions de l’écriture, Sigmund Freud avait abordé la question de l’écrit depuis les créations littéraires (romans, poésies, théâtres). Mais en étudiant les limites et les perspectives de ce modèle et de cette hypothèse de « l’autre classe d’œuvres », nous avions tenté de développer ce qui pourrait en être impliqué pour des sujets de structure psychotique chez lesquels la pratique de l’écriture ne serait pas du registre de la création littéraire au sens où Sigmund Freud l’entendait (Partie I, chapitre A, paragraphe 2.2). Nous avions ainsi étudié les enjeux des pratiques de l’écriture dans les psychoses déclenchées, où l’écriture ne serait pas de la création littéraire mais pourrait en avoir les caractéristiques.

Dans ces cas, nous avions formulé la remarque que le passage à l’écrit, dans la logique des investissements de libido, pouvait au moins équivaloir à la formation de substitut psychotique, c’est-à-dire la formation des symptômes de la psychose ; second temps de la maladie (refonte de la réalité). Cela dit, nous ne posions pas qu’un tel passage à l’écrit serait du registre de la refonte de la réalité. Il s’agissait en fait d’envisager que le passage à l’écrit puisse réussir à localiser dans l’écriture le quantum d’affect laissé libre des

438 - FREUD, S., "Le créateur littéraire et la fantaisie," L'inquiétante étrangeté et autres essais, (Paris:

Gallimard, 1985) 29-46.

439 - Id., 44.

tel-00576284, version 1 - 14 Mar 2011

même à cette seule condition d’une prime de séduction, qu’il envisagea la création

Dans le document tel-00576284, version 1 - 14 Mar 2011 (Page 156-159)