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3.4 Mise en oeuvre de la démarche d’optimisation

3.4.1 Optimisation de la géométrie

3.4.1.3 Point de fonctionnement et calcul de la commande 46

Comme le préconise la démarche d’optimisation précédemment décrite, l’opti-misation de la géométrie du rotor se fait à commande fixe, ceci dans le but d’éviter que les contraintes d’alimentation (courant, tension...) n’interfèrent dans le pro-cessus de dimensionnement du rotor. Afin de déterminer la vitesse appropriée pour cette optimisation (Cf. partie (3.3.1)), nous avons réalisé une étude compara-tive consistant à optimiser de manière géométrique et électrique une machine test pour différentes vitesses. Nous en avons choisi 6, 3 vitesses pour chaque mode de fonctionnement : 2 000 tr/min, 6 000 tr/min, 12 000 tr/min en mode moteur et générateur.

La machine test comporte 8 pôles et les variables géométriques d’optimisation sont celles présentées sur la figure 3.4.4. A ce stade, la commande ne peut être im-posée car elle n’est pas connue. Ainsi, les éléments du vecteur de contrôle (Ief f, β), rentrent dans les variables d’entrée de l’optimisation portant le nombre total de variables d’optimisation à 17 (15 géométriques et 2 électriques). L’objectif est de maximiser la puissance utile ; il s’agit de la puissance mécanique en mode moteur et de la puissance électrique en mode générateur. L’unique contrainte concerne la tension aux bornes de la machine qui doit rester inférieure à la limite imposée par la batterie (bus continu) et l’électronique de puissance. Pour superviser le calcul, on fait le choix d’un algorithme à évolution différentielle [Prieto 13], de la famille

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3.4 Mise en oeuvre de la démarche d’optimisation

des algorithmes stochastiques.

La figure 3.4.5 présente les géométries obtenues pour chaque point de fonction-nement, et le tableau 3.3 regroupe les rapports de saillance des machines ainsi que le vecteur de contrôle au point de fonctionnement correspondant. Les inductances direct Ld et quadrature Lqsont calculées comme décrit dans [Bianchi 05]. L’induc-tance L est la grandeur établissant la proportionnalité entre le flux magnétique ψ et le courant i qui lui a donné naissance (ψ=L*i). Pour le calcul de Ld, on alimente la machine de telle sorte de id= Imax et iq= 0 (cf. annexe A). On détermine le flux dans l’axe dψdpar éléments finis et l’inductance Ld est donnée par l’équation (3.4.4). Pour le calcul de Lq, on opère de la même manière, mais cette fois on force le vecteur courant à s’aligner sur l’axe q.

Ld= ψd

id = ψd

Imax (3.4.4)

Le temps de calcul pour chaque optimisation est de 36 heures.

Figure 3.4.5 – Machines optimisées pour chaque point de fonctionnement

Chapitre 3 Conception optimale des machines synchro-réluctantes

2 000G 2 000M 6 000G 6 000M 12 000G 12 000M

ξ 3.9 3.8 3.8 3.5 2.9 3.1

Ieff(A) 200 200 200 200 200 200

β(o) 222.8 138 207.6 162.6 190.6 169.2

Table 3.3 – Caractéristiques des machines optimisées

Notons que la contrainte en tension est fixe en mode générateur, quelle que soit la vitesse de rotation. Tandis qu’en mode moteur, elle dépend de la résistance interne de la batterie et de l’amplitude du courant efficace (Cf. partie (3.4.2.1)).

En première analyse, les points de fonctionnement à 2 000 tr/min et à 6 000 tr/min en mode générateur sont équivalents et permettent d’obtenir les meilleurs rapports de saillance (Cf. Tableau 3.3). On peut d’ores et déjà éliminer les points à 12 000 tr/min et à 6 000 tr/min en mode moteur car ils présentent des rapports de saillance plus faibles.

Calcul magnétostatique

En parallèle de cette optimisation, nous avons entrepris de réaliser un calcul magnétostatique à partir de la géométrie initiale de la machine test. Ce calcul a consisté à évaluer le couple developpé par la machine en fonction du vecteur de contrôle (Ieff,β) (Fig. 3.4.6). Pour un courant efficace de 200 A, le couple maximal est atteint pour un β = 223° en mode générateur et β = 138° en mode moteur (on rappelle que la position des axes d et q est donnée par la figure 2.2.3). En comparant ces valeurs à celles obtenues après optimisation (Tableau 3.3), on en déduit donc que la plage de vitesses dans laquelle la géométrie et la commande sont faiblement liées se situe à très basses vitesses (< 3 000 tr/min). Ceci peut s’expliquer par le fait que dans cette zone, la machine est dans le Mode I (cf.

partie (3.4.2.3)), et donc la tension à ses bornes y est inférieure à la limite imposée par la batterie et l’électronique de puissance. De plus le vecteur de contrôle peut être obtenu en amont de l’optimisation grâce à ce calcul magnétostatique. On peut ainsi éliminer le point à 6 000 tr/min et revenir à 15 variables exclusivement géométriques.

Enfin, le choix entre le mode moteur ou générateur s’est fait par retour d’ex-périence industriel par rapport au projet ESSENCYELE. Le point basse vitesse en mode générateur semble être à la fois très dimensionnant pour les construc-teurs automobiles, mais également très difficile à satisfaire en termes de puissance utile. C’est donc sur ce point de fonctionnement que nous allons concentrer nos efforts d’optimisation. Le tableau 3.4 regroupe les caractéristiques de la machine optimisée sur le point de fonctionnement choisi.

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3.4 Mise en oeuvre de la démarche d’optimisation

Figure 3.4.6 – Cartographie du couple en fonction du vecteur de contrôle Puissance utile Ondulations de couples Facteur de puissance

3.1 kW 5.9 % 0.62

Table 3.4 – Caractéristiques à 2 000 tr/min en mode générateur de la machine test optimisée

Ainsi, le point sur lequel est menée l’optimisation est donc celui à basse vitesse 2 000 tr/min en mode générateur (on l’appelle point P1). La machine est alimentée en courant dont la valeur efficace est déduite de la densité maximale de courant admissible dans les conducteurs en régime permanent (Cf. partie (3.5.1.2)). De ce fait, on prend donc implicitement aussi en compte les contraintes et limites thermiques.

3.4.1.4 Fonctions d’optimisation : objectifs et contraintes

Outre les puissances utiles requises, les machines synchro-réluctantes présentent certaines faiblesses auxquelles nous allons essayer de remédier à travers le dimen-sionnement de la géométrie. Comme exposé dans (1.2.2.4), les machines synchro-réluctantes présentent en général de fortes ondulations de couple et un faible fac-teur de puissance. La question est de savoir si dans l’optimisation de la géométrie, on doit/peut les considérer comme des fonctions objectifs ou seulement les traiter comme des contraintes.

Chapitre 3 Conception optimale des machines synchro-réluctantes

Nous avons donc mené une nouvelle étude comparative sur la même machine test, au point de fonction précédemment identifié (2 000 tr/min en mode généra-teur). Dans cette étude, on mène deux optimisations distinctes, la première avec comme objectif de minimiser les ondulations de couple ∆C et la seconde avec pour objectif de maximiser le facteur de puissance f. Les ondulations de couple sont calculées comme décrit dans l’équation (3.4.5) et le facteur de puissance par (3.4.6).

Comme contraintes, en plus de celle sur la tension aux bornes de la machine, on en rajoute une sur la puissance utile. Cette dernière ne doit pas être inférieure à celle obtenue dans la partie (3.4.1.3) après optimisation. On conserve le même algorithme à évolution différentielle pour superviser les calculs.

Les figures 3.4.7b et 3.4.7c présentent les rotors obtenus pour chaque fonction objectif et le tableau 3.5 regroupe les caractéristiques de chaque rotor.

(a) Machine initiale optimisée(b) Machine optimisée pour

les ondulations de couple(c) Machine optimisée pour le facteur de puissance

Figure 3.4.7 – Machines optimisées pour différentes fonctions objectif L’examen des figures 3.4.7a et 3.4.7b montre qu’avec une légère modification de la géométrie, sur la largeur d’extrémité de barrière (paramètre « Eba ») notamment [Bianchi 09, Bianchi 15], il est possible de réduire les ondulations de couple d’un tiers. Ceci conforte l’idée de la forte dépendance des performances par rapport à la géométrie de la machine. D’autre part, cette diminution des ondulations de couple n’a quasiment pas impacté la puissance utile de la machine (la contrainte sur la puissance n’a pas pu être respectée, on a perdu 100 W de puissance utile (Cf.

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3.4 Mise en oeuvre de la démarche d’optimisation

Machine initiale Machine « ∆C » Machine «f »

Puissance utile (kW) 3.1 3.0 3.0

∆C (%) 5.9 1.9 8.5

f 0.62 0.60 0.64

Table 3.5 – Caractéristiques des machines optimisées pour différentes fonctions objectif

tableau 3.5). On peut en conclure que ces deux grandeurs ne sont que faiblement couplées et qu’il est donc possible de les optimiser en parallèle [Moghaddam 12].

Pour ce qui est du facteur de puissance, on ne note qu’une amélioration mi-neure suite à l’optimisation de la géométrie (Cf. Tableau 3.5). Nous en concluons que cette dernière n’a presque aucune influence sur cette grandeur et qu’il n’est donc pas nécessaire de l’inclure dans les fonctions d’optimisation à ce stade de la démarche.

En définitive, il ressort de cette analyse qu’une des manières de dimensionner la géométrie des machines synchro-réluctantes de manière optimale passe par une optimisation bi-objectif : maximiser la puissance utile tout en minimisant les on-dulations de couple.

Contraintes mécaniques

La tenue mécanique des rotors est un élément clé dans la conception des ma-chines électriques, qui plus est quand les rotors étudiés incluent des parties fines et extrêmement sensibles que sont les ponts magnétiques. Les différents parties du rotor, dont les dimensions découlent des variables géométriques d’optimisation, doivent donc pouvoir résister aux couples et vitesses élevés. D’autre part, les pos-sibles déformations de ces organes ne doivent mettre en péril ni les performances, ni la robustesse globale de la structure.

Le calcul de ces contraintes est complexe et son intégration dans un modèle élec-tromagnétique est délicate. Elles seront spécifiquement étudiées dans le chapitre 4 afin de les prendre en compte au mieux au cours du processus de conception optimale des machines.

3.4.1.5 Algorithmes d’optimisation

Jusque-là nous avions eu recours à un algorithme stochastique de type évolution différentielle afin de superviser l’optimisation. Cette famille d’algorithmes présente de nombreux avantages, mais est aussi très gourmande en temps de calcul. Dans une approche industrielle, ce facteur temps est primordial et donc se doit d’être maîtrisé au mieux.

Chapitre 3 Conception optimale des machines synchro-réluctantes

Ainsi nous avons entrepris une dernière étude comparative afin de déterminer l’algorithme d’optimisation le mieux adapté pour le dimensionnement du rotor.

Toujours sur la même machine test, nous avons comparé 2 optimisations utilisant 2 algorithmes : la première avec un optimiseur SQP (Optimisation Quadratique Sé-quentielle) qui appartient à la famille des algorithmes déterministes, et la deuxième supervisée par un algorithme à évolution différentielle (DE) qui appartient à la fa-mille des méthodes stochastiques.

L’algorithme SQP [Cedrat 15c] est une méthode newtonienne appliquée aux conditions d’optimalités du premier ordre d’un problème sous contraintes. Il bé-néficie donc d’une convergence locale rapide à condition que ses points initiaux soient dans le voisinage d’un point stationnaire et de ses multiplicateurs associés.

Il est cependant possible de globaliser cet algorithme, c’est-à-dire ajouter une étape améliorant la convergence même si le premier itéré n’est pas proche d’une solution.

Mais ceci ne garantit toujours pas d’aboutir à un optimum si les points initiaux ne sont pas proches d’une solution.

L’évolution différentielle quand à elle est inspirée des algorithmes génétiques et par les stratégies évolutionnistes combinées avec une technique géométrique de re-cherche. Dans la méthode DE, la population initiale est générée par tirage aléatoire uniforme sur l’ensemble des valeurs possibles de chaque variable. Le DE standard utilise 3 techniques (croisement, mutation,sélection) à l’instar des algorithmes gé-nétiques. Ces trois techniques sont successivement appliquées sur chaque vecteur afin de produire un vecteur d’essai. Une opération de sélection permet de choi-sir les individus à conserver pour la nouvelle génération. L’évolution différentielle est devenue une méthode incontournable pour une grande quantité de problèmes scientifiques et industriels [Prieto 14b].

Ces deux optimisations sont formulées comme suit :

— Point de fonctionnement : 2 000 tr/min en mode générateur

— Optimisation bi-objectif :

— Maximiser la puissance utile : foP =max(Putile)

— Minimiser les ondulations de couple : fo∆C =min(∆C)

— Contrainte en tension : gV =Vef fVlim <0

Les figures 3.4.8a et 3.4.8b présentent les rotors obtenus pour ces 2 optimisations, et le tableau 3.6 récapitule les performances des machines ainsi que les temps de calcul.

Les 2 optimisations aboutissent à 2 machines de même puissance utile (3.1 kW).

SQP met 2.5 fois moins de temps de calcul que DE. Cependant, dans notre cas de figure (machine initiale choisie, réglage des paramètres de l’optimiseur), les ondulations de couple du rotor SQP sont 2 fois plus élevées. Certes le temps de calcul avec SQP est très attractif, cependant partant d’une feuille blanche, il est préférable d’utiliser l’algorithme à évolution différentielle. En effet le fait d’aboutir

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3.4 Mise en oeuvre de la démarche d’optimisation

(a) Rotor optimisé avec SQP (b) Rotor optimisé avec DE

Figure 3.4.8 – Machines optimisées avec différents algorithmes

à un optimum global avec SQP est très dépendant de la machine initiale. Alors qu’avec DE, la probabilité est plus forte car le point de départ est en réalité une population de départ. En général DE est utilisé en premier rideau et SQP en surcouche afin de raffiner localement l’optimum obtenu [Cupertino 12]. Dans la suite de notre travail nous avons conservé l’utilisation unique de l’algorithme DE.

Rotor SQP Rotor DE Puissance utile (kW) 3.1 3.1

∆C (%) 7 2.9

Temps de calcul (H) 20 50

Table 3.6 – Performances des machines optimisées avec différents algorithmes

Optimisation multi-objectif

Les méthodes stochastiques sont très bien adaptées au traitement d’un problème d’optimisation multi-objectif [Collette 11]. Les figures 3.4.9a et 3.4.9b présentent les schémas de fonctionnement d’un algorithme pour la résolution d’un problème mono-objectif et multi-objectif respectivement. La différence importante concerne l’étape de « transformation vecteur/efficacité ». Elle permet de transformer un vec-teur (qui contient les valeurs de fonctions objectif pour chaque individu) en une efficacité (une efficacité correspond à la performance d’un individu dans la résolu-tion d’un problème posé ; par exemple, si l’on considère un problème de maximi-sation d’une fonction, l’efficacité de l’individu croît avec sa capacité à maximiser cette fonction).

Chapitre 3 Conception optimale des machines synchro-réluctantes

(a) Fonctionnement de l’algorithme pour

un problème monoobjectif (b) Fonctionnement de l’algorithme pour un problème multiobjectif

Figure 3.4.9

Pour résoudre un problème multiobjectif, diverses stratégies peuvent être adop-tées. On a :

— Les méthodes dites « agrégatives » qui permettent de se ramener à un pro-blème d’optimisation monoobjectif en utilisant une fonction objectif équi-valente. La fonction monoobjectif équivalente est obtenue en effectuant une somme pondérée des différents objectifs.

F(x) = X

i

αifobj,i 0< αi <1et X

i

αi = 1 (3.4.7)

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3.4 Mise en oeuvre de la démarche d’optimisation

Avec :

— x : le vecteur des variables d’entrées

αi : coefficient de pondération de chaque fonction objectif

— Les méthodes dites « non agrégatives » qui n’opèrent pas de fusion des dif-férentes fonctions objectif pour se ramener à un problème d’optimisation monoobjectif.

Sans rentrer dans les détails, nous avons fait confiance à la méthode « agréga-tive » proposée par Got-It. Dans notre cas, et sachant que nos deux objectifs sont quasiment indépendants (Cf. partie (3.4.1.4)), nous avons affecté le même poids à chacun.