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en fonction de différents paramètres

L’origine des oscillations étant éclaircie, on peut se demander ce qui détermine quan-titativement la taille finale des cellules. Les déterminants directs sont bien sûr la durée d’élargissement et la vitesse moyenne d’élargissement de chaque cellule. Mais ces deux facteurs peuvent être liés entre eux et, surtout, ils dépendent eux-mêmes de la cinéma-tique d’ensemble du système. En effet, les cellules se repoussent les unes les autres et la trajectoire de chaque cellule dépend des trajectoires des cellules qui la précèdent côté cambial.

La complexité et la subtilité des effets mutuels entre la division cellulaire, l’élargis-sement cellulaire, le transport des signaux et la croissance globale d’un tissu sont abon-damment évoquées dans la littérature (Beemster et Baskin,1998;Harashima et Schnittger,

2010;Powell et Lenhard,2012;Sablowski et Dornelas,2014). Tous ces auteurs soulignent les difficultés expérimentales qu’il y a à vouloir démêler les causes et les effets. En vou-lant analyser l’action d’un paramètre, le plus souvent par mutation génétique, d’autres paramètres sont inévitablement affectés et ce de façon difficilement contrôlable et quan-tifiable.

Avec les modèles CoXyS, je dispose d’un outil approprié pour explorer une partie de ces effets subtils. Je peux modifier un paramètre et observer avec précision dans l’espace et le temps toute l’évolution du système. Ainsi, je peux suivre les répercussions de cette modification sur tous les aspects de l’évolution du système, jusqu’à l’effet sur la taille finale des cellules. Bien sûr, ce système est une idéalisation, partielle et partiale, qui a pour limites la validité des hypothèses sur lesquelles elle repose. Cependant, l’hypothèse du gradient est couramment admise et il est donc nécessaire d’en saisir toutes les conséquences, même si le phénomène d’oscillation a déjà jeté le doute sur sa validité. De plus, ces explorations donnent à réfléchir sur la cinématique du xylème en formation, permettant de repérer les zones d’ombre dans la compréhension que l’on en a.

5.2.1 Effet d’une modification du taux de réponse des cellules au

signal

Il est possible d’agir sur le taux d’élargissement par le biais du préfacteur de réponse du taux de grandissement au signal, kg. Pour rappel, kgfait le lien entre la concentration en signal dans une cellule et le taux d’élargissement de cette cellule :

1 Li(t)

dLi(t)

dt = kgCi(t). (5.1)

La vitesse d’élargissement de la cellule à l’instant t est dLi(t)

dt = kgCi(t)Li(t). (5.2)

kgagit donc directement sur la vitesse d’élargissement des cellules. Augmenter kgpeut accroitre les effets de la dilution et de l’advection sur le transport d’un signal, puisque ces effets dépendent de la vitesse de croissance (par rapport à la vitesse de transport). L’augmentation de kg(ou sa diminution) a alors un impact sur le profil de concentration du signal. Pour analyser l’effet d’une variation de kg sur la taille finale des cellules, il est donc utile de distinguer deux cas :

1. Le cas où le transport du signal est suffisamment rapide pour que la dilution et l’ad-vection soient négligeables. Pour un signal diffusif, cela correpond aux conditions d’application de l’approximation de l’état stationnaire. Pour un signal PAT, il faut que la perméabilité des membranes soit suffisamment élevée pour que la dilution soit compensée par l’afflux de signal. Dans cette situation, une modification de kg

(tant qu’elle est modérée) n’a pas d’effet sur le profil de concentration du signal et donc sur la zonation.

2. Le cas où la dilution et l’advection ne sont pas négligeables. Dans cette situation, toute modification de kg change le profil de concentration du signal.

Commençons par le premier cas, où la modification se fait sans altération du profil de concentration. Les zones conservent donc les mêmes longueurs. Si on augmente kg, le taux d’expansion de chaque cellule augmente dans les mêmes proportions. Les divisions sont plus fréquentes, car les cellules en capacité de se diviser atteignent plus vite la taille critique de division (il n’y a pas pour autant plus de cellules cambiales puisque la zona-tion est inchangée). Les cellules dans la zone d’élargissement s’élargissent plus vite. Mais elles se déplacent aussi plus vite dans cette zone, puisqu’elles sont poussées plus rapi-dement par les suivantes (notamment par les cellules cambiales). La longueur de la zone n’a pas changé, donc le temps de résidence y est plus court. L’augmentation de la vitesse d’élargissement et la diminution du temps de résidence se compensent exactement, de

telle sorte que la taille finale des cellules reste rigoureusement identique. À l’inverse, si on diminue kg, la fréquence des divisions baisse. La vitesse d’élargissement diminue elle aussi tandis que la durée d’élargissement augmente, ce qui aboutit encore à un effet global nul sur la taille finale des cellules. En résumé, dans le cas d’un signal à transport rapide, le préfacteur kg ne fait que fixer la vitesse de production et de différenciation des cellules, sans affecter la largeur des trachéides produites.

Ce résultat pourrait avoir un certain intérêt biologique. On peut imaginer qu’un stress hydrique amoindrit la capacité des cellules à répondre aux signaux de croissance. Dans mon modèle, cela correspond à une diminution de kg. Le stress hydrique devrait alors faire diminuer le rythme de création de trachéides par le cambium, mais sans conséquence sur l’anatomie du bois formé, par effet de compensation entre vitesse et durée d’élargisse-ment. Les expériences récentes de Lorena Balducci et al. concordent avec cette prédiction (communication personnelle).

Dans le second cas, en revanche, la dilution et l’advection ne sont plus négligeables. Il faut donc prendre en compte l’effet supplémentaire de la modification du profil de concen-tration du signal. Une augmentation de kgaccroît la dilution, ce qui réduit l’étalement du profil. Inversement, une diminution de kg réduit la dilution, ce qui accroît l’étalement du profil. Une altération de la forme du profil a un impact sur toute la cinématique du sys-tème puisque la taille de chaque zone s’en trouve modifiée. Cet effet spécifique est analysé dans la sous-section qui suit.

5.2.2 Effet d’une modification de l’étalement du gradient

Ici, je suppose que le profil de concentration a approximativement la forme d’une exponentielle décroissante. J’associe l’étalement à la longueur caractéristique λ de cette exponentielle. Plus λ est grand, plus l’exponentielle est étalée. Voir la figure5.6pour une illustration.

Plusieurs phénomènes peuvent modifier l’étalement du gradient. Notamment : 1. Comme on vient de le voir, une variation du préfacteur kg accroît ou amoindrit la

dilution, ce qui joue sur l’étalement si cet effet est non négligeable.

2. Pour un signal diffusif, une variation du taux de dégradation agit directement sur λ. Dans le chapitre précédent, c’est de cette façon que j’avais pu faire varier le nombre de cellules dans les zones au cours d’une saison de croissance.

3. Pour un signal à transport actif polaire, avec des transporteurs orientés vers la source, une variation de la densité des transporteurs agit sur l’étalement en confi-nant plus ou moins le signal près de la source.

Afin d’étudier l’effet d’une modification de l’étalement du gradient sur la zonation et in finesur la taille des cellules, je me replace dans une situation simple dans laquelle je peux

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