• Aucun résultat trouvé

V. LES CELLULES SP

V.3.  La fonctionnalité SP : un marqueur des cellules souches hématopoïétiques ?

V.3.1.  Fonction SP et CSPH murins

V.3.1.1. Les cellules SP: un compartiment cellulaire enrichi en

CSH ?

Les travaux initiaux de Goodell et al. ont permis de montrer que les PH murins exprimant la fonctionnalité SP étaient fortement enrichis en PH Lin- Sca-1+, avaient une capacité de greffe augmentée, reconstituaient les lignées myéloïdes et lymphoïdes et correspondaient majoritairement à des LT-CSH (Goodell et al. 1996).

Sur le plan phénotypique, les CSPH exprimant la fonctionnalité SP sont essentiellement Lin-, Kit+, Sca-1+, CD34-/faible, Thy-1+ (Goodell et al. 1997). Les PH/CSH SPKLS sont également Flt3-(Camargo et al. 2006), CD48- (Weksberg et al. 2008), CD135 -(Pearce et al. 2004), CD201+ (Challen et al. 2009).

Ces données phénotypiques associées à des études de repopulation à long terme in vivo (Goodell et al. 1996; Goodell et al. 1997; Matsuzaki et al. 2004; Pearce et al. 2004; Robinson et al. 2005; Camargo et al. 2006; Challen et al. 2010) témoignent du caractère primitif des cellules SP. Bien que certains groupes décrivent des résultats contradictoires (Morita et al. 2006), la fonctionnalité SP apparaît donc comme un des marqueurs les plus puissants pour sélectionner les CSH médullaires murines. Au sein de la fraction SP, peuvent être identifiées des sous-populations en fonction de leur capacité à exclure le Hoechst 33342. Les populations qui excluent le plus fortement le Hoechst 33342 (SPbas) ont une plus grande capacité de greffe et de reconstitution à long terme que celles qui l’effluent moins (SPhaut) (Goodell et al. 1997; Matsuzaki et al. 2004; Robinson et al. 2005; Camargo et al. 2006) traduisant un gradient de capacité « souche » selon la capacité d’exclusion (figure 13).

Figure 13 : La capacité « souche » des cellules SP est corrélée au gradient d’exclusion du Hoechst 3342

A : Les cellules SP médullaires sont divisées en 3 fractions (R1, R2, R3) en fonction de leur capacité à exclure le

Hoechst 33342.

B : Evaluation de la capacité de greffe des cellules SP : des tests de CRU ont été réalisés avec des dilutions

progressives des 3 fractions de cellules SP. Evaluation du pourcentage de chimérisme dans le sang des souris à 12 semaines après greffe.

89

V.3.1.2. La capacité d’efflux du Hoechst 33342 ; un moyen

permettant de distinguer les CSH « myéloïdes » des CSH

« lymphoïdes » ?

Bien que la CSH reste définie par sa capacité d’auto-renouvellement et son potentiel de différenciation multilignée, des travaux récents ont montré que des CSH pouvaient avoir des prédispositions de différenciation vers l’une ou l’autre des lignées lymphoïde ou myéloïde (Dykstra et al. 2007; Papathanasiou et al. 2009; Challen et al. 2010; Morita et al. 2010). L’antigène CD150 a été utilisé pour distinguer ces sous-populations de CSH : les CSH CD150+ ont une prédisposition myéloïde alors que leur contrepartie CD150- a une prédisposition lymphoïde (Morita et al. 2010). La fonctionnalité SP a également été utilisée dans ce but, les cellules SPbas ayant une prédisposition myéloïde à l’opposé des cellules SPhaut qui ont une prédisposition lymphoïde (Challen et al. 2010). La moitié des cellules SP exprimant le CD150 (Weksberg et al. 2008; Challen et al. 2010), la combinaison des deux techniques permet, en fonction du gradient d’exclusion du Hoechst 33342, de mieux définir les sous population de CSH à prédisposition lymphoïde ou myéloïde (Figure 14). Les CSH à prédisposition myéloïde ont toutefois une plus grande capacité de greffe et de différenciation multilignée que celles à prédisposition lymphoïde, traduisant une probable plus grande immaturité (Challen et al. 2010).

Figure 14 : Le gradient d’exclusion du Hoechst 33342 combiné au marqueur CD150 permet de distinguer des sous types de CSH

Les CSH SPbas sont plus quiescentes, ont une prédisposition myéloïde, prolifèrent en présence de faibles doses de

TGF-β1, caractéristiques d’autant plus marquées qu’elles sont CD150+.

Les CSH SPhaut sont moins quiescentes, ont une prédisposition lymphoïde et sont inhibées par de faibles doses de

TGF-β1, caractéristiques d’autant plus marquées qu’elles sont CD150-.

Ce modèle est en faveur de la théorie de diversité clonale des CSH.

91

V.3.1.3. Régulation de la quiescence et du phénotype SP

Peu de données existent sur les mécanismes qui régissent l’acquisition/perte du phénotype SP par les CSPH (figure 15).

Les travaux d’Arai et al. ont fait apparaître le rôle du couple Tie2/Ang1 (Arai et al. 2004). Dans leur modèle, les CSH qui expriment Tie2 sont quiescentes, adhèrent fortement à la niche endostéale et sont pour la plupart des cellules SP. Le phénotype SP de ces CSH est associé à leur quiescence provoquée par l’activation de Tie2 par Ang1 au niveau de l’endoste. Cette activation favorise l’adhésion aux ostéoblastes de la niche par l’induction d’une hyperexpression des intégrines β1 et NCAD. L’invalidation de Tie2 s’accompagne d’une perte du phénotype SP. A la différence de leur contrepartie MP-Tie2-, les cellules SP-Tie2+ sont protégées des stress cytotoxiques (5-FU), et participent par leur mobilisation et leur mise en cycle à la reconstitution hématopoïétique secondaire. Cette mobilisation s’accompagne d’une perte du phénotype SP.

La même équipe, sur des modèles expérimentaux proches, a également mis en évidence le rôle du couple Tpo/Mpl dans la régulation de la quiescence et de l’acquisition du phénotype SP des CSH au niveau de la niche endostéale (Yoshihara et al. 2007). Ils ont montré que les CSH Mpl+ adhèrent à la niche endostéale, sont quiescentes et expriment un phénotype SP. La signalisation par Tpo/Mpl permet l’acquisition du phénotype SP en sur-exprimant les intégrines β1 et Tie2 et en activant ainsi leur adhésion et leur quiescence. L’inhibition de cette signalisation par des anticorps anti-Mpl s’accompagne d’une perte du phénotype SP et d’une mobilisation des CSH. Une autre équipe, sur un modèle murin Mpl-/- a confirmé le lien entre la signalisation Tpo/Mpl et l’acquisition du phénotype SP par les CSPH médullaires (Qian et al. 2007).

La famille des protéines roundabout (Robo) correspond à des récepteurs de type immunoglobuline exprimés préférentiellement dans le système nerveux, dont les ligands font partie de la famille slit composée de 3 membres (slit 1-3) (Wong et al. 2002). Robo4 est un membre de cette famille exprimé dans le système hématopoïétique, de façon plus importante dans les LT-CSH que dans les ST-CSH (Forsberg et al. 2005). Shibata et al. ont montré que Robo4 est exprimé dans les CSH et les PH immatures et que son ligand, Slit2, est exprimé

spécifiquement dans les cellules stromales médullaires et les ostéoblastes après un stress myélosuppresseur (5-FU). Ils ont ensuite montré que l’augmentation de signal Slit2-Robo4 s’accompagne d’une transition des CSH du compartiment SP vers MP (Shibata et al. 2009). Cette voie de signalisation pourrait donc être impliquée dans la régulation du compartiment SP au niveau des niches hématopoïétiques médullaires.

L’intégrine β3 (CD61) est potentiellement impliquée dans l’acquisition du phénotype SP au sein des niches. Cette intégrine, associée à α5, est fortement exprimée dans les cellules SP médullaires et son niveau d’expression est corrélé à l’intensité d’exclusion du Hoechst 33342. Les cellules SP Lin- β3+ sont quiescentes et ont une capacité de repopulation à long terme équivalente aux cellules SPKLS (Umemoto et al. 2006). Ces éléments font évoquer le rôle d’αvβ3 dans la régulation de la quiescence et du phénotype SP des CSH au niveau des niches hématopoïétiques, d’autant plus que cet hétérodimère a été récemment impliqué dans la régulation de la signalisation Tpo/Mpl au niveau des CSH (Umemoto et al. 2012).

NCAD est également impliqué dans le maintien du phénotype SP des CSH au niveau de la niche endostéale. Hosokawa et al. ont montré que la perte de l’expression de la NCAD à la surface des CSH s’accompagnait d’une perte du phénotype SP et de leur entrée en cycle (Hosokawa et al. 2007).

93

Figure 15 : Régulation de la quiescence et du phénotype SP au contact de la niche endostéale

Les CSH Tie2+ sont spécifiquement localisées dans la niche hématopoïétique et adhèrent aux ostéoblastes Ang1+

dans la moelle osseuse adulte. L’Ang-1 produite par les ostéoblastes active Tie2 sur les CSH et promeut une adhésion forte des CSH à la niche, à l’origine de leur quiescence. Le couple TPO/MPL jouerait un rôle semblable en favorisant la sur-expression de Tie2 par les CSH et leur quiescence. L’adhésion, dans ce modèle, est associée à une sur-expression des intégrines ß1.

D’après Arai et al.(Arai et al. 2005)

MPL/TPO

V.3.1.4. ABCG2 et CSPH murins

Nous avons vu que Zhou et al., à partir d’un modèle murin Mdr1a/1b-/- ont montré qu’ABCG2 était le déterminant principal du phénotype SP (Zhou et al. 2001). Ils ont confirmé ces résultats à partir d’un modèle murin ABCG2-/- en montrant que la moelle osseuse de ces souris était quasi dépourvue de cellules SP, que le peu de cellules SP retrouvées étaient Lin+ Kit- Sca-1-, n’avaient pas d’activité de greffe et ne correspondaient donc pas à des CSH (Zhou et al. 2002). Malgré ce déficit en cellules SP, ces souris avaient un nombre « normal » de cellules KLS, et leur hématopoïèse paraissait normale (Zhou et al. 2002). Toutefois lorsque ces souris étaient traitées par la mitoxantrone, elles présentaient une toxicité hématopoïétique majeure à la différence des souris « sauvages » (Zhou et al. 2002). ABCG2 pourrait donc protéger les CSH vis-à-vis de stress cytotoxiques. Secondairement, Krishnamurthy et al. ont montré qu’ABCG2 était sur-exprimé en hypoxie, sous le contrôle d’HIF-1, et servait à protéger les CSPH en effluant l’hème et les porphyrines (Krishnamurthy et al. 2004). Outre HIF-1, la régulation de l’expression d’ABCG2 au sein des CSPH murins pourrait être sous le contrôle d’Akt (Mogi et al. 2003).

L’expression d’ABCG2 n’est toutefois pas une exclusivité des CSH, Yamamoto et al. ont en effet montré que ce gène est fortement exprimé dans les érythroblastes, bien que ceux-ci ne présentent pas de fonctionnalité SP (Yamamoto et al. 2007).

95

V.3.2. Cellules SP dans les différents compartiments