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Fluidifier les passerelles entre milieu scolaire ordinaire et spécialisé. spécialisé

RESTAURER LES CONDITIONS DE LA CONFIANCE : RENFORCER LE LIEN SOCIAL DANS LA PROXIMITÉ

CHAPITRE 6 : RESTAURER LES CONDITIONS DE LA CONFIANCE : EVITER LES RUPTURES DE DROITS POUR FLUIDIFIER LES PARCOURS

C. Fluidifier les passerelles entre milieu scolaire ordinaire et spécialisé. spécialisé

Outre la scolarisation en milieu ordinaire, beaucoup d’enfants et d’adolescents en situation de handicap sont orientés en milieu spécialisé, à temps plein ou à temps partiel, au sein d’établissements médico-sociaux. En effet, selon les données publiées par la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance du ministère de l’Education nationale, sur les 350 300 enfants et adolescents en situation de handicap scolarisés à la rentrée 2015, 79 714 le sont en milieu spécialisé.

Il existe actuellement différents types de structures permettant l’accueil d’enfants en situation de handicap parmi lesquels :

► Les instituts médico-éducatifs (IME) qui accueillent les enfants et adolescents atteints de troubles des fonctions cognitives. Ils ont pour objectif de dispenser une éducation et un enseignement spécialisés prenant en compte les aspects psychologiques et psychopathologiques et recourant à des techniques de rééducation. Ils regroupent ce que l’on désignait auparavant sous le nom d’instituts médico-pédagogiques (IMP) et d’instituts médico-professionnels (IMPro) ;

► Les instituts thérapeutiques, éducatifs et pédagogiques (ITEP) ont pour mission d’accueillir les enfants, adolescents et jeunes adultes présentant des difficultés psychologiques s’exprimant par des troubles du comportement perturbant gravement leur socialisation et leur accès à la scolarité et à l’apprentissage. Ils conjuguent, au sein d’une même structure et d’une même équipe institutionnelle des interventions thérapeutiques, éducatives et pédagogiques.

► Les établissements pour enfants et adolescents polyhandicapés (EEAP), accueillent et accompagnent les enfants et adolescents souffrant d’un polyhandicap (association d’une déficience mentale grave à une déficience motrice importante) entraînant une réduction notable de leur autonomie.

► Les établissements et services pour enfants et adolescents déficients sensoriels (EEDS) qui accueillent les enfants et adolescents porteurs de handicaps auditifs et visuels.

► Les instituts d’éducation motrice (IEM) qui proposent des prises en charge pour les enfants et adolescents sujets à une déficience motrice importante afin de les accompagner dans leur intégration familiale, sociale et professionnelle. De manière marginale, ils peuvent également mettre en œuvre un suivi à domicile.

1. Prévoir dès le départ les conditions d’un passage en école ordinaire.

L’orientation en établissement spécialisé découle de la demande effectuée par les parents à la MDPH et est décidée par la CDAPH. De la même manière que pour les orientations en ULIS, le retour en milieu ordinaire doit également faire l’objet d’un passage en CDAPH.

L’un des obstacles majeurs à ces transitions entre milieu ordinaire et spécialisé réside donc dans ce passage obligé devant la CDAPH induisant des délais particulièrement longs et potentiellement déconnectés de l’évolution des besoins de l’enfant. Les parents ne percevant pas l’AEEH pendant le placement de leur enfant en établissement médico-social, ils sont également contraints d’attendre une nouvelle décision pour bénéficier des moyens adaptés à un retour de leur enfant en milieu ordinaire. Il en est de même pour l’octroi d’un AESH et des aménagements pédagogiques, nécessaires à cette transition. La nécessité de repasser par la case MDPH, si elle correspond au besoin de réévaluer les conditions d’accompagnement du jeune en milieu ordinaire, n’en constitue pas moins dans les faits un frein à la fluidité vers l’école inclusive. On touche là du doigt les rigidités de notre double système, entre orientation en établissement et notification de droits à compensation individualisés, où le passage de l’un à l’autre exige de réévaluer les besoins. Et laisse craindre aux parents des ruptures de droits.

Dans l’attente de mettre un jour peut être fin à cette dualité de notre système, et d’adopter une véritable idée de notification de parcours, chère à Jean-Yves Hocquet142, nous pensons qu’il faut offrir aux familles les conditions favorables à un passage fluide de leur enfant vers le milieu scolaire ordinaire.

Pour signifier, aussi, que l’école inclusive reste le projet de vie « de droit commun », il conviendrait ainsi que la notification de la CDAPH orientant le jeune en établissement spécialisé prévoit systématiquement les modalités nécessaires à sa scolarisation en milieu ordinaire. Ainsi, les droits seraient ouverts (AEEH, AESH, aménagements pédagogiques, etc.) mais non activés.

Lorsque l’équipe de suivi de la scolarisation, en accord avec la famille, estime que le jeune est en mesure de rejoindre une scolarité en milieu ordinaire, l’enseignant référent en informe la MDPH, charge à elle d’activer automatiquement les droits correspondants (Proposition 61). La CDAPH ne serait alors saisie qu’en cas de désaccord entre la famille et les acteurs concernés, pour évaluer la situation de l’élève et arbitrer en faveur des modalités de prise en charge les plus adaptées à celui-ci.

2. La nécessité de réaffirmer le rôle de l’établissement scolaire de référence.

De droit, et malgré une orientation au sein d’un établissement médico-social, l’ensemble des enfants et adolescents en situation de handicap doit demeurer inscrit dans l’établissement scolaire ordinaire le plus proche de leur domicile et dans lequel se déroulerait leur scolarité compte tenu de leur âge si aucune décision de la CDAPH n’était intervenue. Il s’agit de l’établissement scolaire de référence de l’enfant, et il le demeure tout au long de sa scolarité.

Si l’enfant effectue sa scolarité au sein d’un établissement différent, il est administrativement inscrit dans celui-ci mais demeure lié à son établissement scolaire de référence qu’il peut réintégrer de droit en cas d’évolution positive de sa situation. En effet, la circulaire n°2006-126 du 17 août 2006 relative à la mise en œuvre et au suivi du projet personnalisé de scolarisation dispose que l’enfant « garde un lien particulier et indissoluble avec son établissement scolaire de référence qui reste explicitement mentionné comme tel dans le PPS, sous la forme d’une “ inscription inactive ” au sein de celui-ci, au maintien de laquelle veille l’enseignant référent ».

142 « Contribution à la réflexion sur l’apport des organismes du secteur médico-social à l’inclusion des personnes handicapées – Des clefs pour la cité », Jean-Yves Hocquet, 2012

Le maintien de ce rattachement est une condition du retour de l’enfant dans son établissement « naturel », notamment parce qu’il est ainsi considéré comme partie intégrante de son effectif. Or, beaucoup de témoignages nous ont fait part de la difficulté rencontrée par certains parents pour rendre effective cette inscription au sein de l’établissement scolaire de référence, lorsqu’il s’agit d’y scolariser leur enfant, faisant face à l’opposition des directeurs d’établissements et des enseignants. Elément essentiel à un éventuel retour en milieu ordinaire, il conviendrait de réaffirmer le droit pour tout enfant de voir son inscription maintenue au sein de son établissement scolaire de référence auprès de l’ensemble des établissements scolaires et des enseignants référents, garant de l’effectivité de ce droit. Il conviendrait également de mieux informer les familles sur l’existence de ce droit et des enjeux qui lui sont liés (Proposition 62).

3. Le « fonctionnement en dispositif intégré », une organisation à développer.

Afin de fluidifier les parcours des enfants et adolescents en situation de handicap, et de leur offrir une réponse au plus proche de leurs besoins, l’Association des directeurs d’ITEP (AIRe), la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) et la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) expérimentent depuis 2013 et dans 5 régions le

« fonctionnement en dispositif intégré ».

L’article 91 de la loi du 26 janvier 2016 relative à la modernisation de notre système de santé autorise la généralisation progressive de ce dispositif pour les ITEP à l’ensemble du territoire, sous réserve d’une délibération de la commission exécutive de la MDPH et par convention entre celle-ci, l’ARS, les organismes de protection sociale, le rectorat et les établissements et services intéressés. Le décret du 24 avril 2017 en précise les conditions d’application.

Véritable changement de paradigme, cette nouvelle organisation repose sur une confiance partagée, responsabilisant les acteurs au plus proche du jeune. Elle permet en effet un parcours plus fluide pour les jeunes concernés en permettant de l’adapter à l’évolution de leurs besoins sans avoir à repasser systématiquement devant la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH). Ainsi, l’équipe de suivi de la scolarisation (ESS) est autorisée à modifier les projets personnalisés de scolarisation (PPS) du jeune, sous réserve de son accord s’il est majeur ou de celui de ses représentants légaux pour les jeunes mineurs. Une fiche de liaison est alors transmise à la MDPH pour l’informer des évolutions mises en œuvre.

Avancée majeure au service des usagers concernés, ces nouvelles modalités de fonctionnement permettent en effet de fluidifier le parcours des jeunes et de leurs familles en leur proposant des solutions d’accompagnement assouplies mettant en synergie les acteurs concernés, dans une logique de plateforme, pour proposer une réponse globale et évolutive tout en participant au désengorgement des MDPH.

Nous nous inscrivons donc pleinement dans cette logique d’organisation innovante, visant à dépasser les logiques d’établissements ou de services et permettant d’adapter la prise en

charge de manière continue en fonction des besoins de l’élève. Bien qu’une mission d’évaluation, confiée à l’IGAS, à l’IGEN et à l’IGAENR, soit actuellement en cours, nous encourageons la généralisation de ce mode de fonctionnement à l’ensemble du territoire. De plus, et sur la base des conclusions issues de la mission en cours, il conviendrait d’engager une réflexion visant à étendre ce fonctionnement en dispositif intégré à l’ensemble des établissements médico-sociaux accueillant des élèves en situation de handicap (Proposition 63).

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