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Filtrage couleur dans un espace projectif avec l’algèbre quaternionique

6.3 Les opérateurs de filtrage quaternionique

6.3.2 Filtrage couleur dans un espace projectif avec l’algèbre quaternionique

Quaternions et espace projectif

Cette méthode [45] s’appuie sur la géométrie projective. Nous ne revenons pas ici sur la définition et les propriétés des quaternions qui ont été décrites dans le chapitre 4. L’ensemble V (H) des quater-

nions dont la partie scalaire est nulle correspond à l’ensemble des vecteurs euclidiens. Toutefois un des problèmes de cette représentation est que cet ensemble n’est pas fermé par la multiplication quaternio- nique. En effet, le résultat de la multiplication de deux vecteurs peut engendrer un réel ou un quaternion complet. Sangwine souligne l’importance d’être vigilant lors de la construction d’opérations de filtrage avec des quaternions pour que le résultat reste à l’interieur de l’espace des vecteursV (H). En revanche,

une interprétation d’un quaternion complet consiste à le représenter par un point de R3 avec un poids donné [29, 32], et avecs = S(q) et v = V (q) :

avecp = v/s

Sous cette forme q représente le point d’extremité du vecteur p depuis l’origine avec un poids s.

SoitP = q ∈ HkS[q] 6= 0 l’ensemble de tous les points pondérés. Plutôt que de décomposer H en deux parties scalaires et vectorielles, deux ensembles disjoints sont créés : les points P et les vecteurs V, tel

que H = P ∪ V. Autrement dit, l’espace des quaternions est interprété comme un espace projectif P3. Sous cette interprétation, un point de poids unitaire à l’origine s’écrit :

q = 1[1 + i0 + j0 + k0] = 1

.

L’algèbre des vecteurs de V ∈ H et l’algèbre des points de P ∈ H, décrit en utilisant l’algèbre quaternionique, sont légérement différents et ne sont par conséquent pas complétement équivalents. Par exemple, la somme de deux vecteurs, v1 etv2 suit la loi du parallèlogramme (figure 6.9.), tandis que

la somme de deux points p1 etp2 suit le principe du centre de masse. En effet, dans le cas de points

non-pondérés, nous avons :

q = q1+ q2 = v1+ v2.

et, dans le cas de pointsp1etp2pondérés pars1ets2, le centre de masse apparaît sur la partie vectorielle :

q = q1+ q2 = s1(1 + p1) + s2(1 + p2) = (s1+ s2)  1 + (s1p1+ s2p2)/(s1+ s2)  = (s1+ s2)1 + (v1+ v2)/(s1+ s2) | {z } centre de masse  .

La figure 6.9. illustre ces propriétés. Ainsi, multiplier un vecteurv ∈ V par un scalaire α ∈ R change sa longueur mais conserve sa direction, tandis que multiplier un pointp ∈ P par α ne change pas sa position mais modifie son poids commeαq = αs[1 + p]. La table 6.1. résume les différentes opérations

algébriques entre points et vecteurs.

Opération Interprétation dans l’espace projectif

α ◦ V → V change la longueur du vecteur, direction inchangée

α ◦ P → P change le poids du point, position inchangée

V ± V → V loi du parallèlogramme

P ± V → P translation du point en direction du vecteur

P + P → P principe du centre de masse

P − P → V ou P V si les poids sont égaux

V ◦ V → V ou P V si les vecteurs sont perpendiculaires P ◦ P → V ou P V si p1.p2 = 1

TAB. 6.1 – Résumé des opérations algébriques entre les points P et les vecteurs V. ◦ représente la

6.3. Les opérateurs de filtrage quaternionique 87

FIG. 6.9 – Différence entre somme de deux vecteurs deV et de deux points de P. Représentation d’un pixel par des points pondérés

En respectant la définiton précédente, il est possible de coder un pixel de coordonnées(x, y) d’une

imagef par un point pondéré de la façon suivante :

fx,y = 1.0 r(x, y) g(x, y) b(x, y)



, (6.10)

oùr, g et b sont les coordonnées chromatiques dans l’espace couleur RGB.

La seule différence par rapport au codage traditionel des vecteurs couleurs est l’ajout d’un poids unitaire sur la partie scalaire du quaternion. Une image ainsi codée est dite sous forme de points pondérés. Le décodage d’un pixel d’une image sous cette forme implique une simple division de la partie vectorielle par la partie scalaire pour déterminer sa position dans l’espace couleur :

px,y = V [fx,y]/S[fx,y] (6.11)

Filtrage couleur dans un espace projectif

Le diagramme de la figure 6.10. décrit le principe général [45] utilisé pour construire des filtres couleurs avec un espace projectif. Le filtre se divise en trois niveaux : un discriminateur couleurD, un

filtre spatialF , une réponse couleur R. Le discriminateur D est construit pour isoler une caractéristique

couleur spécifique. La sortie deD est une image scalaire, telle que, D : Hx×y → Rx×y. Le filtre spatial

F applique un filtrage standard en niveau de gris sur la sortie dx,ydu discriminateur et fournit un facteur

de mélangekx,y. Par exemple, il est possible de l’utiliser pour lisser l’image. Pour cette raison la sortie

du discriminateur est normalisée entre±1. Finalement, le bloc R utilise deux images et le principe du centre de masse pour mélanger les deux images en accord avec le facteurkx,y.

Sangwine propose une illustration de cette méthode avec le filtre que nous allons décrire ci des- sous [45]. Le discriminateur qu’il propose a pour objectif d’identifier des régions d’une couleur donnée dans l’image. L’équation donnée qui permet d’effectuer cette opération est la suivante :

FIG. 6.10 – Schématique du filtre couleur à 3 niveaux

dx,y =

1 √

2|fx,y− µfx,yµ − 2|. (6.12)

avecµ ∈ V [H], |µ| = 1 et pointe vers une couleur d’intêret. Cette relation exprime la projection de la position de chaque pixel dans l’espace couleur vers la couleur d’intérêt. Ainsi dx,y représente

l’importance de la composante de la couleur d’intérêt dans le pixel étudié. Un deuxième traitement, en s’appuyant sur le discriminateur a pour but de modifier tous les pixels éloignés de la couleur d’intérêt vers le gris moyen tandis que les pixels proches sont conservés. La transformation suivante réalise cette opération :

gx,y = (1 + kx,y)fx,y+ (1 − kx,y) ¯fx,y. (6.13)

Les exemples donnés dans la figure 6.11. n’utilisent pas de filtrage spatial pour simplifier l’illustra- tion : ainsikx,y = dx,y. Le filtrage effectué pour l’image Lena avec la couleur d’intérêt(237, 204, 164)

isole les pixels jaunes de l’image. Le résultat obtenu sur l’image Peppers et la couleur d’intérêt rouge

(255, 0, 0) est similaire : les pixels rouges des poivrons sont bien extraits.

Cependant, cette méthode présente l’inconvénient de ne considérer que l’importance de la couleur d’intérêt dans le vecteur considéré. Ainsi, une couleur très différente de la couleur d’intérêt mais qui possède une composante importante sur l’axe défini par cette couleur est elle aussi extraite. La figure 6.12. illustre ce problème : lorsque l’on extrait les pixels jaunes(255, 255, 0), les pétales des fleurs sont

bien extraits. En revanche, le filtrage avec la couleur rouge (255, 0, 0) a comme objectif de récupérer

uniquement le coeur des fleurs. Or, bien que le coeur soit correctement extrait, une partie des pétales possèdant une forte composante rouge est aussi extraite. Ce phénomène peut alors s’interpréter comme de la sur-segmentation. L’étude de ces opérateurs et l’observation et l’analyse des résultats associés nous conduisent ainsi à la recherche de solutions permettant d’extraire une ou plusieurs zones de l’image possèdant une caractéristique colorimétrique commune et unique dans le sens d’une gamme de couleur unique.