• Aucun résultat trouvé

Figures hôtes de Xochitécatl, une continuation de la tradition des figures hôtes

Chapitre 4 : Interprétation des données

4.2 La chronologie des figures hôtes

4.2.4 Figures hôtes de Xochitécatl, une continuation de la tradition des figures hôtes

Bien que les figures hôtes de Xochitécatl ne rentrent pas directement dans cette étude, il est important de les mentionner ici afin de montrer l’influence de Teotihuacan sur l’art même après son déclin. Ces figures hôtes nous permettent de constater une certaine évolution de la forme entre la période Classique et Épiclassique. En effet, tandis que les figures hôtes de la période Classique sont assises, sans ornements, et possèdent une ouverture sur le torse ou sur toute la longueur du corps, les figures de Xochitécatl se tiennent debout, portent des ornements, tels des coiffes et des colliers, et possèdent une ouverture sur le bas du ventre.

Le site de Xochitécatl est situé sur le plateau central du Mexique dans la province de Tlaxcala. Ce site cérémoniel se trouve en haut d’un ancien volcan portant le même nom (Serra- Puche 2001:255). D’après les fouilles archéologiques, Xochitécatl semblerait être un centre cérémoniel datant de la période Formative (400 ANE à 100 DNE). D’après Serra Puche, il deviendrait ensuite un lieu de culte féminin, lors de sa deuxième occupation, pendant la période Epiclassique de 650 DNE à 850 DNE (Serra-Puche 2001:256). Cette deuxième occupation correspond à la fin et à la chute de Teotihuacan. Les fouilles ont révélé la présence de nombreuses images de déesses, de dirigeantes, de femmes durant différentes étapes de leur vie, mais également de symboles de fertilité et de preuves de rituels liés au cosmos (Serra-Puche 2001:257). Sur ce site, situé à l’est des places cérémonielles centrales, se tient le plus important

111 des bâtiments, la pyramide des Fleurs, dans laquelle 32 sépultures, principalement de femmes et d’enfants, ont été découvertes (Serra-Puche 2001:260). Dans ces sépultures, des offrandes, souvent des figurines de genre féminin, accompagnaient les défunts (Serra-Puche 2001:262).

Parmi ces figurines, nous retiendrons les figures hôtes (Figure 17), qui sont présentées debout, à la différence de l’échantillon de figures hôtes de cette étude. Leurs membres inférieurs et supérieurs ont le bout arrondi et n’ont donc pas de pieds ni de mains, tout comme la figure hôte AIa1.1 (Figure 19). Leur ouverture se situe dans l’abdomen et elles possèdent une figurine intérieure, richement parée. De par cette ouverture au bas du ventre, Serra Puche décrit ces figures comme représentant des femmes portant un enfant (Serra-Puche 2001:265). Contrairement aux figures hôtes de cette étude, celles de Xochitécatl portent une coiffe et sont richement parées, suggérant que ces figurines auraient pu représenter des dirigeantes, des prêtresses ou des déesses.

Compte tenu de l’endroit où se trouve l’ouverture de ces figures hôtes, de l’apparence féminine des hôtes, et du contexte dans lequel elles ont été trouvées, il me semble que la conclusion de l’autrice est pertinente. Cependant, je ne pense pas que l’ensemble des figures hôtes provenant de Teotihuacan ou étant de style teotihuacanais puissent être classées dans la même catégorie. Premièrement, ces dernières ne comportent aucun signe apparent, vêtement ou attribut sexuel, permettant de les placer dans un genre ou dans l’autre. En comparaison, les figures hôtes de Xochitécatl portent une tunique et une jupe qui est peinte en blanc à même l’artéfact. Également, l’emplacement de l’ouverture ne se trouve pas au bas du ventre, mais beaucoup plus haut sur la poitrine ou dans d’autres cas sur l’ensemble du haut du corps, emplacements qui ne semblent pas avoir un lien direct avec la grossesse.

Il est important tout de même de mentionner ces figures hôtes, car elles prouvent que le style artistique de Teotihuacan a été largement diffusé à travers la Mésoamérique, et ce même après le déclin de la cité. Toutefois, même si les cultures retiennent certains traits stylistiques de Teotihuacan, nous pouvons voir leur capacité à intégrer à cet art leur propre manière de faire et leurs propres traits culturels par l’ajout d’éléments ou bien le changement de fonction d’une figurine.

112

Conclusion

À l’aide des indices mentionnés ci-dessus et de données provenant de la description de figures hôtes au chapitre 3, un tableau a été créé mettant en avant les différentes chronologies utilisées (Tableau 5). Grâce aux corrélations obtenues, il serait possible d’avancer une hypothèse concernant la période d’utilisation principale de ces figures hôtes, qui pourrait se situer entre 350 et 500 DNE, à Teotihuacan même avant d’être exportées hors de son territoire. Ces dates ne restent malheureusement qu’une hypothèse due au manque de données concernant les figures hôtes en contexte. Il est impossible à mon sens de construire une chronologie fiable pour chaque figure hôte, ce qui permettrait d’étudier leur évolution stylistique, puisque l’échantillon de figures connu à ce jour est mince et que leur provenance est trop souvent inconnue. Cependant, nous pouvons voir des évolutions stylistiques, notamment grâce aux figures hôtes de Xochitécatl.

Tableau 5 : Indices chronologiques pouvant servir à la déduction d’une chronologie des figures hôtes. 250 375 450 -100 350 400 250 250 550 450 750 450 650 600 500 550 -200 -100 0 100 200 300 400 500 600 700 800 Ech elle tem p o re lle Indices

Indices chronologiques

113

4.3 Quelles sont les différentes formes de figures hôtes, sont-elles

associées à différentes communautés de producteurs/

utilisateurs?

Dans le chapitre précédent, j’ai décidé de catégoriser les figures hôtes selon certaines caractéristiques afin de faciliter leur description et d’être en mesure de reconnaître certains traits communs. Les deux grands groupes que je distingue sont le groupe A, où les figures possèdent une ouverture sur le torse, et le groupe B, où l'ouverture se fait sur toute la longueur du corps. En me basant sur la provenance assurée de certaines des figures hôtes de chaque groupe, je considère que les figures du groupe A ont un style teotihuacanais, alors que celles du groupe B possèderaient un style maya-teotihuacanais. Il faut noter que bien que les figures hôtes semblent être originaires de Teotihuacan, d’autres cultures, comme les Mayas, ont choisi de reprendre cet artéfact et de l’adapter à leurs croyances et à leur style.

Je soulève ce point, car bien que le style maya-teotihuacanais et le style teotihuacanais de ces figures diffèrent sur plusieurs aspects, il est facile, d’un point de vue esthétique, de les classer dans la même famille. Leur aspect extérieur inexpressif, leur position assise et le fait qu’elles abritent plusieurs figurines sont des critères qui permettent en effet de les rapprocher. Notons qu’il existe des figures hôtes provenant de cultures postérieures à Teotihuacan, notamment Xochitécatl, et qui sont bien différentes puisqu’elles sont présentées debout, comportent une ouverture au bas du ventre et sont richement vêtues, entre autres. Ces figures hôtes appuient l’idée d’une continuité de cet art à travers le temps et l’espace.

Enfin la classification des figures du groupe A, de style teotihuacanais, me permet également de faire une distinction entre celles qui proviennent clairement de Teotihuacan et celles qui en imitent le style, mais semblent provenir d’une autre région, ou d’autres communautés d’artisans. Je fais référence ici à la figure AIa1.3, provenant du Michoacán et possiblement à la figure AIIb2.6, dont la provenance est inconnue.

114