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Les figures hôtes et les encensoirs

Chapitre 4 : Interprétation des données

4.1 Les figures hôtes et Teotihuacan

4.1.3 Les figures hôtes et les encensoirs

Les encensoirs sont également similaires aux figures hôtes, puisque comme elles, ils sont composés de plusieurs pièces, possiblement pour combler les besoins des utilisateurs. Les encensoirs (Figure 61a) semblent apparaître en même temps que les complexes d’appartements, vers 250 DNE et ils persistent jusqu’à la fin de cette cité (Pasztory 1993:53; 1997). Quelques- uns ont été retrouvés à l’intérieur de sépultures importantes, à Tetitla et Tlamimilolpa, ou dans les patios avec les autels. Ainsi, les chercheurs pensent qu’ils étaient associés aux rituels de ces complexes d’appartements (Berrin et Pasztory 1993:216; L. Manzanilla et Carreón 1991:299). Tout comme c’est le cas pour les figures hôtes, nous retrouvons une grande variété d’encensoirs à Teotihuacan. Certains possédaient des ornements, mais le plus souvent, on retrouvait un

102 personnage debout sur le haut de cet objet. Ces personnages, appelés « des types théâtraux », ont une figure masquée et cachée par des bijoux de nez, d’oreille, et sont entièrement recouvert de symboles et de signes (Berrin et Pasztory 1993:216). Aux alentours du masque nous retrouvons des adornos (petits ornements), soit de petits symboles représentant des fleurs, des coquillages, des papillons, des têtes d’oiseau, des pointes de flèches, des cercles de plumes et des insectes fait en mica (Figure 61b) (Pasztory 1997:59). Pour Berrin, la figure principalement représentée sur ces encensoirs est la Déesse de Teotihuacan, du fait en partie de la présence du symbole du papillon et de l’ornement de nez que l’autrice attribut à cette dernière. Comme précisé plus tôt, il n’y a pas deux encensoirs semblables. Il est possible que ces adornos aient été produits en masse et assemblés d’une certaine façon sur l’encensoir, dans un but précis ou pour des raisons personnelles (Berlo 1984:52; Berrin et Pasztory 1993:216). Grâce au Teotihuacan Mapping Project, des preuves d’un atelier d’adornos rattaché à la partie Nord de la Citadelle ont été découvertes (Cowgill 2015b:154; Sullivan 2007:23). Cela pourrait signifier qu’il existait une production d’État mais réservée aux complexes d’appartements. L’existence de cette production de masse d’ornements pourrait signifier que durant sa durée d’utilisation, un encensoir pouvait être modifié afin de correspondre aux besoins particuliers des habitants. Grâce aux fouilles archéologiques, cette hypothèse peut être vérifiée, puisque ces encensoirs sont souvent retrouvés détachés dans les sépultures et les offrandes des complexes résidentiels (Berlo 1984:30; Berrin et Pasztory 1993:216).

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a) b)

Figure 61: a) Exemple d’encensoir, période Xolalpan 400-600 DNE, provenant de La Ventilla, structure 79 (Berrin et Pasztory 1993:218). b) Moules et adornos, provenant du coin nord-ouest de la Citadelle, Teotihuacan, période Tlamimilolpa-Metepec 170-650 DNE (Berrin et Pasztory 1993:120).

Les encensoirs de type « théâtraux » semblent être l’inverse des figures hôtes. Alors que ces dernières cachent à l’intérieur d’elles les figurines et symboles, les encensoirs eux se parent à outrance de fioritures pour afficher au spectateur toute la symbolique de l’objet. Il est impossible à ce jour d’affirmer que les figures hôtes et les encensoirs faisaient partis d’un même ensemble de rites, pour cela il serait nécessaire d’excaver plus de figures hôtes en contexte.

Conclusion

Du point de vue stylistique, les figures hôtes, plus précisément la figure extérieure, a un aspect neutre, impersonnel, elle permet à n’importe quel spectateur de s’y identifier, homme, femme, jeunes, adultes, personnes âgées. Les visages ainsi retrouvés chez les masques, les encensoirs et les figures hôtes possèdent les mêmes caractéristiques, c’est-à-dire la bouche entre ouverte, l’utilisation de peinture sur le visage ou de pyrite pour les yeux, mais également des

104 formes géométriques simples. Tout comme les masques, il semblerait que la figure soit figée dans une action, celle de parler par exemple avec l’ouverture de sa bouche. L’articulation de certaine figure hôte, nous incite à les associer aux figurines articulées provenant du plateau de Mexico. Ce type d’artefact populaire dans cette zone et non dans d’autres comme en territoire maya, nous permet de délimiter le lieu d’origine de ces figures au plateau de Mexico. Cette origine est d’autant plus intéressante qu’une figure hôte articulée provient de Teotihuacan même. Bien que ces figures extérieures possèdent des caractéristiques de l’art de Teotihuacan, il est intéressant de noter que les figurines se trouvant à l’intérieur rappellent l’iconographie de cette cité, et cela même lorsqu’on les retrouve en territoire maya ou autre. Certaines figurines du groupe B représentent des déités telles que le dieu Tempête ou le dieu Papillon, et arborent des caractéristiques semblables à leurs représentations à Teotihuacan même. Au contraire, les figurines du groupe A de notre échantillon ne représentent pas des déités, mais des êtres humains. Dans ce cas, il est intéressant de se pencher sur leur apparat et plus précisément leur coiffe. Les coiffes portent une importance et une signification particulière à Teotihuacan. Comme nous l’avons vu elles peuvent, selon les chercheurs, signifier l’appartenance à un ordre, un rang ou autre. Nous avons pu observer dans cette partie que non seulement plusieurs groupes de coiffe du même type apparaissaient souvent dans notre échantillon, mais qu’il était possible de retrouver ce même type de coiffe dans d’autres objets d’art de Teotihuacan. Je pense donc que l’idée comme telle de la figure hôte proviendrait effectivement de Teotihuacan, cependant au vue de la diversité des formes de l’échantillon à l’étude, il est fort possible que cet objet ait été repris et réadapté par d’autres cultures. Néanmoins, malgré cette adaptation nous pouvons remarquer que dans chaque figure hôte, un lien est toujours présent avec la cité de Teotihuacan.