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Claire : Il y 78 PF, les associations sont départementales mais pas dans tous les départements. 5 en Outre-Mer et 73 en France métropolitaine. Sur certains départements il y plusieurs antennes, si le besoin et les bénévoles sont présents. Après, il y a des différences selon les PF. À Toulouse, nous avons été les premières à avoir un CA collégial, pas une présidente, une secrétaire, une trésorière mais des

personnes qui ont le même niveau de responsabilités collectives dans chaque domaine. Cela a été porté plus tard au niveau national, des débats ont eu lieux et depuis cela permet que cela soit possible. Il y a trois niveaux d’action : les associations sont départementales, les confédérations sont régionales et la fédération est nationnale. Il y a des textes qui sont votés tous les ans lors d’un congrès national. Cela permet de définir des lignes politiques.

en consultations48, selon le site web de l’association. Il

existe également un centre de documentation, à Paris, qui propose, moyennant une adhésion, l’accès à de nombreux ouvrages, documents et matériels pédagogiques, et dont les documentalistes me furent d’une grande aide pour ma recherche. Le Planning Familial a donc une fonction informative plus que celle d’une référence médicale, car il n’y est pas systématiquement pratiqué d’examen médical. Les consultations individuelles ont plutôt pour but de conseiller et donner un panel d’informations aux personnes qui en ont besoin. Il incarne un lieu alternatif aux cabinets médicaux pour accéder à une forme d’autonomie corporelle. Claire, une militante du Planning Familial à Toulouse m’expliquait qu’iels utilisaient par exemple, dans les lycées le jeu de la ligne, qui consiste à poser une affirmation sur laquelle les adolescent·e·s doivent se positionner par oui ou non. Cette méthode permet d’ouvrir le débat sur des questions qui sont souvent plus complexes qu’une réponse par l’affirmative ou la négative. Le Planning Familial utilise un ensemble de méthodes éducatives issues de l’éducation populaire, et qui ne sont pas forcément reconnues comme telles. Il est donc nécessaire de valoriser les initiatives à visée informative ou éducative qui émanent de structures hors médical.

Un ouvrage fut la figure de proue d’une volonté de partage autour des questions liées au corps et à la sexualité des femmes : Our Bodies Ourselves est publié aux États-Unis en 1970 par un collectif de femmes, puis traduit par une autre collectif en français, sous le titre Notre Corps Nous Même en 1977 et publié chez Albin Michel. Il s’agit alors pour ces femmes de s’approprier leur corps pour mieux le connaître, de ne plus abandonner cette connaissance au seul monde médical, et de s’adresser à l’ensemble des femmes. Ce qui n’était d’abord qu’une brochure devient un livre qui sera réédité plusieurs fois. En 2018, un nouveau collectif de femmes se rassemble en France pour travailler à une actualisation de cet ouvrage.

J’ai mentionné plus tôt la publication, à partir de l’invention de l’imprimerie d’ouvrages traitant de santé (Sekeness of wymmen de Trotulla …). Ces ouvrages pouvaient parfois revêtir la forme de grimoires. L’ouvrage d’Owen Davis, The History Of Grimoires49, m’a apporté un éclairage sur

l’histoire de ces livres si particuliers. Il y relate l’évolution de ces livres, tant dans leur forme, leur contenu que des publics visés. Selon lui, « [Les grimoires] sont des répertoires de savoirs qui arment les gens contre les esprits démoniaques et les sorcières, soignent leurs maladies, stimulent leur désir sexuel, prédit et modifie leur destinée » 50. L’origine du terme « grimoire »

n’est pas totalement certaine. Il fut suggéré qu’il provienne de l’italien « rimario » , un livre de versets de la Bible, ou bien encore du français « grammaire » , qui renvoie à un texte écrit en latin. Il est souvent utilisé pour qualifier un ouvrage difficile à lire. L’auteur précise que les grimoires n’ont jamais représenté l’ensemble des expériences personnelles et des savoirs sur la magie. Un grand nombre de charmes, sorts et rituels ont été transmis de façon orale et n’ont été par la suite écrits que plus tard par des professionnel·le·s, des antiquaires à partir du XIXe siècle. Il est à noter que les femmes ont toujours été

aussi importantes que les hommes dans l’histoire des pratiques magiques, mais par leur accès limité à l’alphabétisation, elles ne furent que très peu impliquées dans l’histoire des grimoires jusqu’au XVIe siècle.

Les grimoires doivent leur existence à la volonté profonde de créer des traces tangibles des connaissances magiques reflétant des préoccupations concernant le caractère incontrôlable et corruptible de la transmission orale. Albertus Magnus, aussi appelé Albert le Grand, produit l’un des oeuvres magiques les plus influentes, une de celles qui représente cette volonté de pérenniser la connaissance : Le Petit Albert. L’Allemand dominicain qui vécut au XIIIe siècle, fut évêque

de Cologne, écrivit, plutôt qu’une grimoire, un ouvrage sur la science de la magie, un livre de magie naturelle et de médecine.

49 DAVIS Owen, The History of Grimoires. Oxford : OUP Oxford, 2010.

Cet ouvrage fut, au fil des siècles, considéré comme un ouvrage dangereux.

Owen Davis note que l’élaboration des grimoires passe par l’acte même d’écrire, imprégné de pouvoirs : « Un livre de magie est aussi un livre magique » 51. Les mots sont chargés

d’intention, les encres spécifiques (du sang par exemple). Certains livres ou grimoires comme la Bible étaient utilisés comme talismans, possédant des pouvoirs de protection propres. On plaçait la Bible sous son oreiller pour se protéger.

L’apparition de l’imprimerie permit un plus large accès à des ouvrages de magie, renforçant d’une certaine façon leur pouvoir d’influence bien que vidant les grimoires de leur intensité magique. Les grimoires produits en masse en Europe à partir de l’invention de l’imprimerie étaient des chapbooks (littérature dite « populaire » constituée de supports imprimés sur papier bon marché, dont la commercialisation et la diffusion s’étend du XVIe siècle à la seconde moitié du XIXe siècle). Ces

formats n’apparaissent aux États-Unis qu’à partir des années 1920 sous l’appellation de « pulp literature » . Ce terme « pulp » renvoie à la fois à la qualité moindre des objets produits

mais aussi à leur contenu de faible qualité. Cette époque est marquée par un intérêt fort pour la magie et la divination : en 1943, on estimait qu’environ 200 millions de dollars étaient remis à environ 80 000 diseur·euse·s de bonne aventure professionnel·le·s aux États-Unis52. Le livre de Black Herman,

Secrets of Magic-Mystery, qui contenait essentiellement des tours de passe-passe, horoscopes de base pour chaque mois de l’année et des guides concernant la signification des rêves (et dont beaucoup de « sorts » cachaient des « placements de produits » , même si ce terme est anachronique), est représentatif de la production de « grimoires » de cette époque.

On voit alors les grimoires se scinder en deux catégories : des livres d’arts aux reliures et enluminures soignées, et des formats de grimoire populaires et de qualité moindre, tant en terme de contenu que de format de publication.

51 Ibid, p. 2.