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Chapitre III : Caractérisation fonctionnelle et structurale de polysaccharidases de R. baltica

II. A - La famille GH57

La famille GH57 est une famille multispécifique comprenant un peu moins de 300 séquences avec cinq activités enzymatiques recensées (Figure III-45) dont quatre sont liées au métabolisme de l’amidon (α-amylases, enzymes de branchement, 4-α-glucanotransférases, amylopullulanases) et une à la dégradation d’α-galactanes (voir http://www.cazy.org/fam/GH57.html).

Figure III-45 : Activités de la famille GH57.

Activités de la famille GH57 et nombre des structures disponibles par activité

La première séquence caractérisée date de 1988 avec l’α-amylase de Dictyoglomus

thermophilum (Fukusumi et al., 1988) mais il faudra attendre plus de dix ans pour qu’une

première structure tertiaire, celle de la 4-α-glucanotransférase TLGT de l’archée hyperthermophile Thermococcus litoralis (code PDB 1K1W, Imamura et al., 2003), soit publiée. Depuis, deux autres ont été publiées : l’enzyme non caractérisée TT1467 de

Thermus thermophilus (code PDB 1UFA, Idaka, 2003) et l’α-amylase de Thermotoga

maritima (code PDB 2B5D, Dickmanns et al., 2006). Le repliement de la famille GH57 a ainsi

pu être caractérisé comme présentant une architecture en tonneau de type (β/α)7. Ce repliement est assez rare au sein des glycoside hydrolases, mais il est néanmoins rencontré dans quelques familles, notamment la famille GH38 (composée de β-mannosidases), qui semble d’ailleurs apparentée à la famille GH57 (Imamura et al., 2003). La Figure III-46

présente les structures tertiaires de l’α-amylase de la bactérie hyperthermophile Thermotoga

maritima, (Dickmanns et al., 2006) et celle de la 4-α-glucanotransferase TLGT.

Structure de l’α-amylase de T. maritima 2B5D

Structure de la 4-α-glucanotransferase de T. littoralis 1K1W

Figure III-46 : Structures caractéristiques de la famille GH57.

Sur les structures de la Figure III-46ci-dessus, les domaines catalytiques en TIM barrel (β/α)7 ont été représentés en vert (2B5D) et en bleu (1K1W). Topologiquement, ces domaines centraux constituent le domaine A. Les deux structures présentent en outre deux domaines additionnels, peu similaires, mais superposables : le domaine B, qui est un domaine fonctionnel constitué d’hélices α insérées entre des éléments de structure secondaire du domaine A (en jaune), et le domaine C, qui est de composition variable et qui est situé en position C-terminale (en rouge). La 4-α-glucanotransferase TLGT présente en outre un module additionnel dont je parlerai plus tard, situé dans le prolongement du domaine C et constitué d’un sandwich β (extension rouge au-dessus de la structure).

Les acides aminés catalytiques de la famille GH57 ont été déterminés. Dans la structure de la 4-α-glucanotransferase TLGT, il apparaît que l’attaque nucléophile est réalisée par l’acide glutamique E123. L’acide aminé donneur de proton n’a lui toujours pas été identifié expérimentalement, même si l’acide aspartique D214, conservé dans le voisinage stérique de E123, est un bon candidat du fait de son orientation, très favorable à cette fonction, et de sa conservation dans tous les représentants de la famille. De plus, sa position à environ 7 Ǻ du résidu nucléophile est cohérente avec un mécanisme catalytique libérant des produits

A A B C B C Extension β

Le repliement (β/α)7 peut être considéré comme une version incomplète du repliement TIM barrel (β/α)7 (classification CATH code : 3.20.20.80), qui est très fréquemment rencontré dans les glycoside hydrolases, et en particulier dans le clan structural GH-H. Ce clan est composé des familles GH13, GH70 et GH77, qui sont connues sous le nom global de « famille des α-amylases » car elles regroupent la majorité des enzymes amylolytiques connues (α-amylases ou autres). Les ressemblances entre la topologie des enzymes du clan GH-H et celle des enzymes de la famille GH57 sont assez frappantes : un domaine A constitué du centre catalytique de type TIM barrel (β/α)n, un domaine B essentiellement constitué d’hélicesα imbriquées dans le domaine A et permettant la fixation de cations divalents, et un domaine C de taille et composition variables. La Figure

III-47 présente un diagramme topologique de l’α-amylase de Thermotoga maritima illustrant

l’imbrication des domaines A et B.

Figure III-47 : Topologie de 2B5D. Diagramme extrait de (Dickmanns et al., 2006)

Cependant, la famille GH57, malgré une prédominance d’activités amylolytiques, ne présente pas de similitude de séquence avec les familles du clan GH-H, et en particulier, ne possède pas les régions conservées caractéristiques des enzymes de la famille GH13 (Janecek, 2002).

Il apparaît également que si les différents domaines définis dans la Figure III-47 sont situés aux mêmes places topologiques, les tailles de ces différents domaines peuvent être assez variables. Ainsi, le domaine B de l’α-amylase de Thermotoga maritima est très étendu (120 résidus répartis sur deux zones constituées d’une série d’hélices α ; Figure III-47) en comparaison de celui de la 4-α-glucanotransferase de Thermococcus litoralis (seulement 20 résidus, également sur deux zones, constituées chacune d’une petite hélice α). Leur domaine C est de taille comparable (une centaine de résidus) et est constitué d’une série

C

B

d’hélices α. Il constitue un domaine de fonction inconnue avec un repliement de type immunoglobine, référencé comme DUF1925 dans la base PFAM. Cet alignement met de plus en évidence que la structure de la 4-α-glucanotransferase de Thermococcus litoralis présente un module supplémentaire de 280 résidus constitué d’une dizaine de brins β repliés en sandwich β. Cette extension β du domaine C, référencée en tant que domaine DUF1926 dans la base PFAM, est, non seulement exclusivement rencontrée dans la famille GH57, mais est également assez conservée. La Figure III-48 présente un alignement des domaines (β/α)7 de ces deux structures et permet de mettre en évidence les topologies semblables de ces enzymes.

Figure III-48 : Superposition des structures 1K1W et 2B5D.

Superposition des structures 1K1W (bleu) et 2B5D (vert) avec alignement structural de leur domaine A. Un zoom sur le site actif est également présenté avec les acides aminés catalytiques superposés sur leur structure respective.

Au-delà de son repliement, cette famille présente plusieurs originalités. Elle n’est en effet présente que chez les procaryotes, dont un grand nombre est issu de milieux extrêmes, en particulier de milieux à hautes températures. De plus, même si les 3 structures publiées depuis 2001 ont permis de lui attribuer le repliement (β/α)7 ainsi que la détermination de ses

en particulier source de nombreuses questions. En effet, moins d’une vingtaine de séquences de la famille GH57 présentent cette extension modulaire d’architecture en sandwich β. De plus, il semble qu’il s’agisse d’un module structuralement indépendant, présentant une large surface d’interaction avec le tonneau (β/α)7 du domaine A, ce qui suggère qu’il pourrait ne pas être indépendant du reste de la structure. Sa fonction n’est pas connue, mais il est actuellement considéré comme pouvant participer à la transglycolylation (Imamura et al., 2003). Cela est néanmoins à relativiser avec le fait que l’α-amylase AMY1 de Dictyoglomus thermophilum (AmyA ; P09961) et la malto-oligasaccharidase de

Pyrococcus furiosus (Q8U2G5) possèdent également ce domaine, ce qui pourrait suggérer

une activité biologique sensiblement différente.