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Abréviations des noms des régimes et des substrats utilisés

Chapitre 3 Métabolisme ruminal des acides gras

II. Digestion ruminale des lipides et leur devenir dans l’organisme

1. Facteurs de variation de l’efficacité globale de la biohydrogénation

L’efficacité globale de la BH peut être évaluée in vivo ou in vitro par le calcul de la disparition des AGI (Fievez et al., 2007), et l’apparition des produits (Troegeler-Meynadier et al., 2006).

71 c9,c12-C18:2 t10,c12-CLA t11-C18:1 C18:0 c9,t11-CLA t10-C18:1 Isomérisation

diminue avec foin (/herbe, ensilage d’herbe), concentrés et/ou pH bas,

excès de c9,c12-C18:2

in vitro

Réduction 1

ralentie avec excès de c9,c12-C18:2

in vitro, extrusion

Réduction 2

ralentie avec les concentrés et/ou pH bas, excès de c9,c12-C18:2 in

vitro, extrusion, huile de

poisson

Voie t10 favorisée par l’ensilage de maïs, les concentrés et/ou pH bas, concentrés xc9,c12-C18:2

Voie t11 favorisée par les fourrages et/ou pH élevé, c9,c12-C18:2

Figure 8. Les principaux effets de l'alimentation sur les trois étapes de la biohydrogénation

ruminale de l’acide linoléique (c9,c12-C18:2). D’après Troegeler-Meynadier et al. (2006)

a. Composition de la ration en fourrages et en concentrés

- Nature du fourrage

Les teneurs des AG en CLA dans la matière grasse du lait sont élevées quand les vaches sont au pâturage (Dhiman et al., 1999; Palmquist 1998; Loor et al., 2003). Cependant, le stade physiologique de l’herbe pâturée peut être un facteur de variation de la teneur en AG. La teneur en CLA du lait diminue avec la maturation de l’herbe (Chouinard et al., 1998). Collomb et al. (2001) ont noté dans le lait de vaches au pâturage, une augmentation de la concentration en CLA et en t-C18:1 avec l’altitude où l’herbe serait plus riche en AGPI. Excepté l’ensilage d’herbe (Doreau et al., 2005), les fourrages conservés sont moins efficaces, en particulier les foins (Ribeiro et al., 2005) et l’ensilage de maïs (Chilliard et al., 2001). Ce résultat provient en partie du fait que le foin contient généralement des quantités plus faibles d’AG que l'herbe, mais aussi d’une moindre disparition des AGPI.

72 - Ratio fourrages / concentrés

Des études ont montré que lorsque la part de fourrages dans la ration augmente, la teneur en CLA et en t-C18:1 du lait augmente (Jahreis et al., 1997; Dhiman et al., 1999b; Ward et al., 2003). Par opposition, l’augmentation de la proportion de concentrés dans la ration diminue l’efficacité de la BH du c9,c12-C18:2 in vivo (Loor et al., 2004; Glasser et al., 2008; Enjalbert et Troegeler-Meynadier et al., 2009). Par exemple, Gerson et al. (1983) ont constaté que la diminution de la part de fibres (cellulose brute) dans la ration de 42,8 à 19,5% et l’augmentation du pourcentage d’amidon de 12,2 à 35,7 % entraînent une chute de la BH d’environ 50%.

Ce phénomène serait dû principalement à une acidification du milieu induite par l’amidon (Gerson et al., 1983). Sachant que le pH optimal de l’isomérase de Butyrivibrio fibrisolvens (principale bactérie étudiée et impliquée dans la BH) est proche de la neutralité, un pH acide inhiberait alors son activité et par conséquent la BH. Des études menées in vitro (Latham et al., 1972; Gerson et al., 1985) ont montré que la BH des AGPI était plus lente lorsque les vaches recevaient une alimentation riche en concentrés. Latham et al. (1972) ont constaté, parallèlement à ce phénomène, une augmentation du nombre de bactéries lactiques et productrices de propionate et une diminution du nombre de Butyrivibrio spp..

Ainsi, les fourrages peuvent agir en apportant des AGPI (essentiellement l’herbe), des fibres favorisant un pH ruminal proche de la neutralité et enfin en stimulant des bactéries fibrolytiques, dont Butyrivibrio fibrisolvens, qui représentent 25% des bactéries ruminales lorsque le régime est riche en fourrages mais seulement 2.3% lorsqu’il en est pauvre Lock et Garnsworthy, 2003).

b. Effet d’une supplémentation lipidique

L’addition d’AGPI dans la ration des vaches a également un fort impact sur le métabolisme ruminal puisque les AGPI ont une action plus négative que les AG saturés (Jenkins, 1993). L’addition d’huiles végétales dans la ration des ruminants laitiers est un moyen de modifier à court terme la production et la composition de la matière grasse du lait. Les effets de l’apport de lipides végétaux sur la production et la composition du lait de vache ont été très étudiés et de nombreuses revues ont été publiées (Bessa et al., 2000; Chilliard et al., 2001). L’addition

73 d'huile dans la ration augmente la concentration des AG dans le rumen, mais y diminue le pourcentage de c9,c12-C18:2, ceci est probablement dû à une efficacité élevée de la BH quand la matière grasse dans la ration augmente (Schmidely et al., 2008). Les principaux facteurs de variation de l’apport de lipides sont la quantité ajoutée, l’origine (nature des AGPI), le mode de présentation (huile ou graines) et les traitements technologiques appliqués. L’augmentation de la quantité de matières grasses en fortes concentrations dans le milieu ralentit la BH (Beam et al., 2000). In vitro, un excès de c9,c12-C18:2 inhibe sa propre BH (Kepler & Tove 1967) en entraînant une accumulation des intermédiaires et une saturation des différentes réactions de la BH (Troegeler-Meynadier et al., 2006).

D’autre part, la nature de la matière grasse agit différemment sur la BH, par exemple, l’adjonction d’huile de tournesol dans le régime des vaches augmente de manière plus importante la teneur en CLA dans le lait qu’une supplémentation en huile de soja, ou en huile de lin, plus riche en c9,c12,c15-C18:3 (Kelly et al., 1998; Dhiman et al., 2000; Chouinard et al., 2001). L’apport simultané en même quantité de c9,c12-C18:2 et de c9,c12,c15-C18:3 augmente les teneurs en t-C18:1 et en CLA dans le lait. D’autre part, les matières grasses sous forme de graines auraient un effet moins important sur la BH que les huiles. Cet effet s’expliquerait par une la nécessité d’une digestion préalable par les micro-organismes de la paroi végétale des graines d’où une libération progressive des AG dans le milieu qui prévient l’accumulation des intermédiaires de la BH (Chilliard et al., 2000). Toutefois, un traitement des graines par extrusion afin de fragiliser la paroi végétale peut rétablir la BH mais qui reste plus faible qu’avec les huiles. Chouinard et al. (2001) ont obtenu des teneurs en CLA élevées dans le lait lorsque les vaches recevaient des graines de soja chauffées.

c. Autres facteurs de variation

D’autres facteurs peuvent intervenir dans la possibilité d’accumulation des intermédiaires de la BH. Par exemple, le cuivre module la production de CLA en participant à la régulation de toutes les activités enzymatiques nécessaires à cette voie métabolique (Sol-Morales et al., 2000; Engle et al., 2000). Toutefois, l’influence du cuivre, probablement à cause de sa complexité, demeure floue. Il a été montré que d’autres substances peuvent affecter la BH, par exemple, l’addition de monensin à la ration peut augmenter la teneur en CLA dans le lait (Dhiman et al., 1996). Un autre facteur qui pourrait avoir un effet sur la BH est le temps de séjour des particules alimentaires. En effet, la vidange du rumen s’effectue plus rapidement

74 avec un régime riche en concentrés qu’avec un régime riche en fourrages, de ce fait, la BH pourrait être incomplète car elle n’a pas eu le temps de se terminer.