• Aucun résultat trouvé

Les facteurs à prendre en compte dans la conception et l’analyse des essais cliniques

Études expérimentales et quasi-expérimentales

4.5 Les facteurs à prendre en compte dans la conception et l’analyse des essais cliniques

a. Agent, traitement ou variable expérimentale :

Tous les chercheurs doivent avoir accès à un maximum d’informations concernant le traitement. Ces informations proviennent des essais de la Phase I et de la Phase II et de multiples sources complémentaires. Il faut connaître, entre autres, l’action pharmacologique, la toxicité, la dose, la sécurité et le mode d’administration d’un médicament, par exemple.

b. Pathologie à traiter :

Tous les chercheurs doivent avoir accès à des informations cliniques et épidémiologiques suffisantes concernant la pathologie à traiter. Entre autres, ils doivent connaître l’historique de la pathologie, les critères de diagnostic, la prise en charge médicale classique, et les autres variables qui influencent l’évolution de la pathologie (âge, sexe, catégorie sociale, poids, tabagisme, états pathologiques concomitants, médicaments administrés pour d’autres raisons). Les protocoles de traitement détaillés doivent être explicités et observés.

c. Population cible :

Il faut spécifier clairement la nature des cas à inclure dans l’essai, avec des critères explicites pour l’inclusion et pour l’exclusion. La taille des échantillons doit être déterminée au préalable. Si l’échantillon requis ne peut être obtenu d’un seul établissement, il faut prévoir des essais menés en collaboration avec d’autres centres, ce qui nécessite une planification minutieuse et des protocoles rigoureux. Un essai mené dans un centre unique a l’avantage d’une meilleure homogénéité des sujets, mais un essai dans plusieurs centres est plus propice à la généralisation. Il faut noter également que lorsque plusieurs centres sont impliqués dans les essais, il est beaucoup plus difficile d’assurer une quantité et une qualité comparables des données recueillies dans les différents centres que dans le cas d’un centre unique où se trouve le chercheur responsable de l’essai. Avant l’affectation des cas dans les groupes expérimentaux et témoins, chaque participant doit donner son consentement éclairé. Cette affectation par groupe fait l’objet de procédures rigoureuses.

d. Aspects éthiques :

Il ne faut jamais engager un essai clinique sans un examen approfondi des aspects éthiques. En général, avant d’engager un essai clinique, le protocole est soumis pour approbation à un examen éthique soit interne soit par un conseil d’éthique indépendant. La plupart des instances chargées des autorisations de mise sur le marché exigeront la preuve de l’approbation éthique de l’essai clinique, avant d’accepter d’examiner les résultats de l’essai en termes d’efficacité clinique ou de performance effective.

e. Résultats à mesurer :

Il faut définir explicitement les résultats attendus et les critères à utiliser pour juger du succès ou de l’échec de l’essai. Les résultats à constater peuvent être la prévention, la guérison, l’amélioration d’un état pathologique ; le soulagement de la douleur ; l’amélioration de la santé physique ou mentale.

f. Effets secondaires :

Il faut aussi spécifier les critères d’observation et de constatation des effets secondaires. Si certains effets secondaires risquent de compromettre la santé d’un patient, celui-ci doit être exclu de l’étude et il doit recevoir un traitement approprié. On doit incorporer dans le plan d’étude des procédures pour mettre fin à l’essai si l’on constate trop d’effets indésirables.

g. Moyens de l’étude :

Il faut également spécifier les moyens de l’étude, dont les essais de laboratoires, les diagnostics cliniques, les procédures, les comptes-rendus d’interrogatoires et les questionnaires, ou l’emploi d’informations en provenance de tiers (l’époux, des parents, des voisins, le médecin traitant), pour reconstituer les antécédents médico-sociaux des patients.

h. Conduite en aveugle :

Il est fortement conseillé de renforcer l’objectivité des mesures en conduisant l’étude “en aveugle”, c’est-à-dire sans révéler l’identité du traitement au sujet, au chercheur qui en évalue le résultat, et quelquefois à la personne qui enregistre et analyse les données. Le type d’étude clinique le plus courant est conduit

“en double aveugle”, c’est-à-dire que le chercheur ainsi que le patient, ne connaissent pas la nature du traitement appliqué.

Les informations concernant l’application du traitement seront connues des membres d’un comité ad hoc, indépendants des chercheurs, qui seront chargés de contrôler le déroulement de l’étude et de mettre fin à l’essai si (a) une conclusion peut être tirée et justifiée bien avant l’exploitation de toute la taille de l’échantillon ou si (b) un niveau inacceptable d’effets secondaires a été constaté.

Dans certains cas, il n’est pas possible de procéder à l’insu de tous les intéressés. Par exemple, dans la plupart des essais en chirurgie ou ceux impliquant des dispositifs médicaux, il est facile de constater si le patient fait partie du groupe traité ou non.

Cependant, même pour la chirurgie, on peut avoir recours à une procédure chirurgicale fictive (analogue à un placebo dans un essai de médicament).

i. Fin de l’essai :

Il faut définir les critères pour mettre fin à l’essai. La règle générale est de poursuivre l’essai tant que la taille imposée de l’échantillon n’est pas atteinte. Dans l’essai clinique séquentiel, toutefois, les mesures de résultats sont analysées à intervalles réguliers et on met fin à l’essai dès que des écarts statistiquement significatifs sont constatés. (Bien entendu, ces analyses répétées des données augmentent le risque d’erreurs de première espèce pour lesquelles il faut faire un ajustement statistique). Il faut aussi définir et respecter des procédures pour mettre fin à l’essai par anticipation dans le cas d’effets indésirables.

j. Plans d’analyse :

Aucun essai clinique ne doit être envisagé par une équipe de recherche qui ne peut pas se prévaloir de compétences en épidémiologie et en statistique. Avant d’engager l’essai, l’équipe élaborera tous les détails des plans d’analyse. Un niveau de connaissance insuffisant dans les techniques d’élaboration d’un plan de recherche et d’analyse des données entraîne obligatoirement une faute sur le plan éthique lorsqu’il s’agit d’une expérimentation sur des êtres humains.

k. Attrition sélective :

Après l’affectation aléatoire des patients dans les groupes de l’essai, l’attrition des patients (soit avant de commencer le traitement, soit après un traitement partiel) compromet gravement la validité de l’essai clinique. L’attrition diminue la puissance statistique de l’étude (par la réduction de la taille de l’échantillon) et augmente le risque de biais (les patients perdus pour l’essai peuvent être différents de ceux qui restent). Il est donc essentiel de limiter l’attrition au minimum.

Comme certaines causes d’attrition sont inévitables (par exemple, l’aggravation notable d’un état, la constatation tardive d’une erreur de diagnostic ou d’une mauvaise interprétation des critères de diagnostic), il est habituel de gonfler l’évaluation initiale de la taille d’échantillon de 10 % afin de ne pas diminuer gravement sa puissance statistique. Le problème de biais ne peut être abordé qu’a posteriori, par une comparaison des variables essentielles des patients perdus de vue et des patients qui poursuivent l’essai. Dans tous les cas, plus le taux d’attrition est important, plus les résultats de l’essai seront douteux.

l. Méthodes pour assurer l’intégrité des données :

Il va sans dire qu’une tenue impeccable des dossiers est une nécessité absolue dans toute activité de recherche, et cette nécessité s’impose de toute évidence lorsqu’il s’agit d’essais cliniques. La bonne tenue des dossiers est non seulement nécessaire pour assurer l’intégrité des résultats de la recherche mais souvent aussi pour satisfaire des exigences réglementaires et des obligations légales de conserver des informations et d’assurer une surveillance adéquate du recueil des données, du contrôle qualité, des analyses et des comptes-rendus.

m. Choix du plan d’expérience :

Il existe différents plans d’expérience pour des essais cliniques.

Le choix dépendra de la nature des composantes de l’essai et de la composition de l’équipe de recherche. Le plan habituel est l’essai clinique contrôlé, randomisé, en double aveugle (voir figure 4.3). Parmi les autres plans qui ne sont pas décrits ici on peut citer : (i) le plan à doses multiples (ii) le plan à traitements multiples, (iii) le plan séquentiel, (iv) le plan factoriel et (v) les différents types de plan à “blocs” tel que le carré latin, le plan à blocs incomplets équilibrés, les essais croisés, etc.

n. Durée à prévoir :

Il faut prévoir plusieurs mois pour la préparation de l’essai, comprenant : l’élaboration des protocoles, des procédures d’échantillonnage, la détermination de la taille de l’échantillon, l’identification des sources d’obtention des sujets, l’esquisse des procédures administratives dont le contrôle qualité, la planification et le dépouillement des données. Parfois une étude de faisabilité sera nécessaire avant de commencer l’essai, afin de tester le protocole et de déterminer ce qui peut et ne peut pas être réalisé.