• Aucun résultat trouvé

Essais d’intervention en santé publique (EISP)

Études expérimentales et quasi-expérimentales

4.6 Essais d’intervention en santé publique (EISP)

En règle générale, les essais d’intervention en santé publique se déroulent en milieu hospitalier ou dans des dispensaires et visent un groupe de patients qui présentent un état de santé déterminé. Il existe aussi des essais randomisés conduits dans la population générale.

L’exemple classique d’un essai d’intervention en santé publique est celui de la vaccination. Certaines zones de la population sont choisies au hasard pour recevoir un vaccin, et d’autres zones de la population ne sont pas vaccinées ou sont vaccinées avec un placebo. Un autre exemple est l’essai d’introduction de sel additionné de fer dans une population pour constater son effet sur l’incidence d’anémie ferriprive dans cette population.

La différence essentielle entre ces études et l’essai clinique randomisé est que l’affectation randomisée concerne des zones de population et non pas des individus. Les zones de population sélectionnées en vue de l’étude doivent être aussi similaires que possible, d’autant plus que seul un nombre limité de zones de population sera exploité.

Très souvent il n’est pas possible de conduire ce type d’étude en aveugle, et la contamination et les interventions concomitantes deviennent des problèmes sérieux. La contamination a lieu lorsque des individus appartenant à l’un des groupes expérimentaux reçoivent le traitement d’intervention en provenance de l’autre groupe expérimental. Par exemple, dans le cas de l’essai d’administration de sel additionné de fer, certains individus de la zone de population qui ne reçoit pas le sel additionné de fer, entendent parler de ce produit et l’obtiennent en s’adressant à la zone de population traitée par l’intervention. (Le cas inverse est également possible). Si les deux zones de population sont proches géographiquement le risque de

contamination est plus élevé. Il y a intervention concomitante lorsque d’autres interventions se déroulent dans les mêmes zones de population en même temps, à l’insu ou non des chercheurs qui conduisent l’essai d’intervention en question. Dans ce cas, la comparaison des résultats des deux groupes randomisés ne reflète plus l’essai d’intervention en question. La randomisation par zone de population dans ces essais réduit forcément la taille de l’échantillon ; la taille effective de l’échantillon est le nombre de zones de population et non pas le nombre d’individus dans ces zones de population. Des méthodes statistiques spécifiques sont appliquées pour tenir compte de cet “effet de grappe”.

Beaucoup d’essais d’intervention en santé publique font appel à des stratégies d’évaluation pour étudier les services de santé publique.

Des exemples types de tels essais impliquent :

• l’évaluation du besoin d’un service, autrement dit, un diagnostic de population (estimation ou évaluation des besoins) ;

• l’évaluation de la conception d’un service de santé (évaluation de conception) ;

• l’évaluation de la performance ou de l’efficience d’un processus de prestation de services (évaluation d’efficience ou de processus) ;

• l’évaluation de l’efficacité et de l’impact d’un programme ou d’une procédure (évaluation d’efficacité ou d’impact) ;

• l’évaluation des résultats du programme par rapport aux apports et aux contraintes du programme (évaluation de système), y compris l’analyse coûts-avantages.

La figure 4.3 est une illustration des étapes à suivre dans la mise en oeuvre d’un essai de santé publique.

FIGURE 4.3 PROCÉDURES D’UN ESSAI SUR LE TERRAIN

Population ou groupe cible qui bénéficiera du programme à évaluer

Échantillon de population (échantillon de probabilité) utilisé pour l’évaluation

Affectation aléatoire

Groupe expérimentale Groupe témoin ne reçoit pas le programme

reçoit le programme ou reçoit un placebo

Administration du stimulus ou du programme

identique à celle prévue Placebo ou autre pour la population cible programme

Mesure ou Mesure ou

observation observation

conformément aux conformément aux

critères retenus critères retenus

Comparaison, relevé des écarts, évaluation statistique de l’erreur d’échantillonnage

Exemple

Une étude est élaborée pour évaluer l’effet d’une augmentation du dépistage du cancer du col utérin sur la mortalité imputable à cette maladie. On affecte au hasard six villes de taille moyenne et de caractéristiques analogues du sud des États-Unis dans trois grappes chacune comportant deux villes qui sont traitées de la façon suivante :

>

< >

> > >

>

Grappe A : bénéficie d’une compagne intensive d’informations de proximité de même que des annonces par les média, destinées à inciter les femmes de plus de 30 ans à participer au programme de dépistage du cancer du col.

Grappe B : ne reçoit que les annonces par voie des média.

Grappe C : ne bénéficie pas du programme spécial d’informations mais seulement des services de dépistage de routine. Cette grappe sert de témoin “sans intervention”

pour savoir quelle serait la mortalité imputable au cancer du col utérin sans l’introduction de programmes spéciaux d’informations pour encourager le recours aux services de dépistage.

On notera que les média étaient l’un des moyens utilisés pour la diffusion des informations. Il s’ensuit une contamination potentielle de la population témoin, surtout si les média comprennent des émissions de télévision qui peuvent être captées par la population témoin.

Le critère de réussite de cette étude d’évaluation (de type expérimental) est une diminution relative du taux de mortalité annuel imputable au cancer du col dans les trois grappes. Il faut donc mesurer la mortalité avant l’étude (le taux moyen pour les trois années qui précèdent l’intervention) et après l’étude. Pour limiter le risque d’erreur écologique dans la comparaison des trois grappes (puisque la diminution de mortalité peut avoir d’autres causes que les services de dépistage), on tient un registre du nombre et des caractéristiques des femmes ayant recours aux services de dépistage. D’autre part, les cabinets de médecine libérale rendent compte de leurs activités en matière de dépistage. Le nombre d’utilisatrices des services de dépistage donne une indication du rôle du dépistage dans la diminution de la mortalité.

L’étude a duré deux ans. Au cours de cette période, la diminution relative du taux de mortalité imputable au cancer du col utérin était le plus élevé dans la Grappe A, et intermédiaire dans la Grappe B. On a constaté en parallèle une augmentation dans le nombre d’utilisatrices des services de dépistage, la Grappe A ayant la plus forte augmentation, suivie par la Grappe B, tandis que la plus faible augmentation était constatée dans la Grappe C.

4.7 Références et pour en savoir plus

Altman, D. G. Statistics and ethics in medical research. British Med J 1980; 281: 1336-1338.

Angell, M. The ethics of clinical research in the third world. N Engl J Med 1997; 337(12): 847.

Berry, A. D. Statistical issues in drug research development. New York: Marcel Dekker, 1990.

Buncher, R. C. and Tsay, J. Y. Statistics in the pharmaceutical industry. New York: Marcel Dekker, 1981.

Friedman, L. M.,.Fuberg, C. D. and DeMets, D. L. Fundamentals of clinical trials. Boston: Wright, 1983.

Gore, S. M. Assessing clinical trials: why randomize? British Med J 1981; 282: 1958-1960.

Lilford, R.F. and Jackson, J. Equipoise and the ethics of randomization. J R Soc Med 1995; 88(10): 552-559.

Peto, R. [et al.]. Design and analysis of randomized clinical trials requiring prolonged observation of each patient.

I. Introduction and design. British J Cancer 1976; 34: 585-612.

Peto, R. [ et al.]. Design and analysis of randomized clinical trials requiring prolonged observation of each patient.

II. Analysis and examples. British J Cancer 1977; 35: 1-39.

Rothman, K. J. and Michels, K.B. The continuing unethical use of placebo controls. N Engl J Med 1994; 331(6):

394-398.

Chapitre 5

Méthodes d’échantillonnage et