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Facteurs prédictifs du devenir fonctionnel après un AVC

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1 L’accident Vasculaire Cérébral (AVC), les séquelles post-AVC et les parcours de prise

1.3 Le devenir fonctionnel après un AVC et ses facteurs prédictifs

1.3.2 Facteurs prédictifs du devenir fonctionnel après un AVC

De nombreuses études ont étudié les facteurs prédictifs du devenir fonctionnel suite à un AVC. Ceux-ci peuvent être classés en trois catégories: les facteurs liés à l’état antérieur du patient (l’âge, le sexe, l’histoire du patient, les antécédents et l’autonomie avant l’AVC ainsi que la situation socio-familiale), les facteurs liés à l’AVC (la gravité de l’hémiplégie au travers des déficiences, limitations d’activité et restriction de participation) et enfin les facteurs liés au parcours de soins du patient (rapidité de prise en charge à la phase aigüe, accès à une unité neuro-vasculaire, retour notamment précoce à domicile).

1.3.2.1 Variables liées à la situation socio-démographique et l’état antérieur du

patient

 Poly-pathologie, incapacités pré-existantes et facteurs de risque cardio-vasculaires

De nombreux travaux ont montré que l’état fonctionnel avant l’AVC est un important facteur prédictif du devenir fonctionnel à distance. Les plus anciens d’entre eux ont été repris dans une revue de la littérature (75) et les travaux plus récents confirment ces résultats (76–79). Pour Tilling et al., l’existence d’un mauvais état fonctionnel avant l’AVC est l’un des plus puissants facteurs prédictifs du devenir fonctionnel défavorable à un an (RR =3,52 ; IC95% : [2,26-4,79]) (78).

L’existence d’antécédents de démence (80–82), un état général dégradé antérieur à l’AVC, ainsi que la présence de facteurs de risque cardio-vasculaires (tabac, diabète, fibrillation auriculaire) (82) sont également des éléments déterminant d’un devenir fonctionnel défavorable post-AVC (27–29,82–85).

 Age avancé

L’effet d’un âge avancé au moment de l’AVC sur le devenir fonctionnel fait l'objet de multiples controverses (85,79,83,84,77,29,86–88). Il semble difficile de trancher de façon définitive sur l’impact de l’âge chronologique sur le devenir fonctionnel. Pour Daviet et al.(89), il est probable que ce sont les polypathologies associées qui jouent un rôle non négligeable plus que l’âge avancé en termes de devenir fonctionnel.

 Facteurs familiaux et socio-économiques

Selon un consensus d’experts (86), un statut socio-économique faible est un facteur de risque d’AVC, de mortalité post-AVC et représente un risque accru de dépendance post-AVC. Il a été montré qu’un support familial, efficace et organisé, améliorait le statut fonctionnel et la récupération fonctionnelle des hémiplégiques (90). Des travaux montrent le rôle considérable du soutien des proches en termes de récupération fonctionnelle dans les six premiers mois après un AVC, en particulier pour les hémiplégies les plus graves (91,92). Des travaux corroborent ce rôle joué par les proches (27,88,92-93) et montrent

que le fait de vivre seul est un élément déterminant de devenir fonctionnel défavorable (RR à 3 mois =3,10 ; IC95%: [1.10-8,80]) (95) et d’institutionnalisation (RR à 3 mois =2,28 ; IC95% : [2,28- 3,05])(96).

1.3.2.2 Variables liées à l’AVC

 Type d'AVC

Comme cela a été souligné par de nombreux travaux de littérature (77,78,97–100) et la conférence de consensus de la Société Française de Médecine Physique et de Réadaptation, de 2008, sur les parcours de soins de patients victimes d’un AVC (86), la nature hémorragique de l’AVC ainsi que sa sévérité révélée par le type et le nombre de déficiences qu’il entraine à la phase aigüe, ont une influence péjorative sur le devenir fonctionnel post-AVC (RR à 1 an =1,26 ; IC95% : [1,20-1,32])(82).

 Déficiences post-AVC

Une très grande majorité de déficiences consécutives à un AVC ont une influence, plus ou moins grande, sur le devenir fonctionnel comme cela a été souligné lors de la conférence de consensus de la Société Française de Médecine Physique et de Réadaptation (100). L'importance du déficit moteur, les déficiences sensitives superficielles et profondes, les troubles de la posture et de l'équilibre, les déficits neuropsychologiques, la dépression, l'incontinence anale ou urinaire, les troubles du langage et de la déglutition sont tous des facteurs défavorables (101).

o Déficience motrice

La déficience motrice a été la plus étudiée (77,78,101,102). Certains symptômes ont une valeur pronostique négative notamment la persistance d’un déficit postural, le déficit complet du membre supérieur ou le déficit massif de la sensibilité profonde (83,103) La plupart des travaux et revues de la littérature (88,100,104) la retiennent comme un facteur prédictif indépendant important à prendre en

le SSS (Scandinavian Stroke Scale) (84) et récemment le score d’OPS (Orpington Pronostic Scale) sont les échelles les plus utilisées pour mesurer les déficiences motrices.

o Déficience cognitive

La déficience cognitive (démence post-AVC) à la phase aigüe, quant à elle, évaluée à l’aide de différentes échelles (MMSE - Mini Mental Test, MIF - Mesure d’indépendance fonctionnelle), est retenue parmi les facteurs prédictifs du devenir fonctionnel à court et moyen termes, augmentant le risque de perte d’autonomie ou d’institutionnalisation (105–108).

o Trouble de la déglutition

L’existence ou la persistance de troubles de la déglutition à la phase initiale post AVC est associée à moyen et long termes, à un plus mauvais pronostic fonctionnel (OR à 3 mois = 2,84 ; IC95% : [1,7-4,7]) (109), au risque d’institutionnalisation et à une augmentation de la mortalité (110).

o Incontinence urinaire (IU)

Elle est souvent multifactorielle. Peu d’études distinguent l’IU antérieure à l’AVC et l’IU post AVC. L’existence ou la persistance d’IU à la phase aigüe représente un facteur indépendant de mauvais pronostic fonctionnel à long terme (OR à 1 an = 7,49 ; IC95% : [2,2-25,35]) (109,111) et de surmortalité à 3 mois (112). Elle est associée à une augmentation des complications infectieuses urinaires, du risque de dénutrition, d’institutionnalisation et diminue la qualité de vie (113).

La multiplicités des déficiences consécutives à l’AVC aggrave le pronostic fonctionnel (29,100,114). Les scores ou échelles neurologiques regroupant plusieurs de ces déficiences permettent une stratification de la gravité de l’AVC et une prédiction du devenir fonctionnel (114).

 Score de gravité clinique de l’AVC

l’évolution initiale et clinique à 3 mois et à 1 an (OR =1,33 ; IC95% : [1,21-1,46]) (84) ainsi que du lieu de vie après AVC (86,116–119). Le score NIHSS est identifié comme un critère pronostic robuste et reproductible (86,120).

 Mesure du niveau de limitation fonctionnelle

Le niveau de limitation fonctionnelle initial est probablement le facteur prédictif le plus important du devenir fonctionnel à un an (28,108,116,119,122–125). Le score de Rankin modifié au 3ème jour (mRS>4 vs 4) est un facteur de mauvais devenir fonctionnel à 1 an (OR =1,69 ; IC95% : [1,08-2,65]) (85). L’Index de Barthel (IB) initial à la phase aigüe de l’AVC (mesure de la performance du patient dans dix activités de la vie quotidienne) est un facteur prédictif de la durée du séjour hospitalier, du niveau de récupération fonctionnelle et de la destination à la sortie (86,120).

1.3.2.3 Variables liées au parcours de prise en charge

 Rapidité de prise en charge à la phase aigüe (orientation ; délai de transfert ; rapidité d’accès à l’imagerie, rapidité de mise en œuvre du traitement fibrinolytique, rapidité de démarrage des soins de rééducation)

De façon globale, la précocité de l’orientation et la rapidité de prise en charge en urgence sont des facteurs prédictifs favorables du devenir fonctionnel du patient (126). Par ailleurs, la rapidité de prise en charge à la phase aigüe permet d’assurer la fluidité de la filière et de faire bénéficier au plus grand nombre de patients une prise en charge adaptée (127).

Un accès rapide à une imagerie serait d’un grand apport pronostique et d’un intérêt thérapeutique majeur à la phase aigüe, quel que soit le type d’AVC (128,129).

Le traitement fibrinolytique intraveineux (rt-PA) diminue les risques de séquelles fonctionnelles et de mortalité (92,130). L’efficacité de ce traitement, en termes de réduction du risque de séquelles et de mortalité, est inversement corrélée au délai d’administration, qui doit être le plus court possible et respecter le délai de sécurité.

 Structure de prise en charge aigüe : Unité Neuro-Vasculaire (UNV)

Il a été démontré qu’une prise en charge spécialisée pluri professionnelle (131) en unités neuro- vasculaires (UNV) diminuait la mortalité et les séquelles post- AVC (87,132,133). Les données de la littérature montrent en effet qu’un accès direct à un service disposant de moyens diagnostiques et des compétences pour une intervention immédiate en urgence est un facteur important d’amélioration de survie immédiate et de réduction de séquelles. L’amélioration du pronostic vital et fonctionnel liée à une prise en charge en UNV a été confirmée par de nombreuses publications (133–135)(137). Les UNV permettent l’application de mesures diagnostiques et thérapeutiques adaptées et efficaces dont la rééducation précoce, qui a prouvé son impact positif majeur sur le futur fonctionnel des patients (135,138).

 Eléments du parcours d’aval

o Prise en charge en structure de rééducation et de réadaptation

Il a été démontré que la prise en charge en unités de soins de suite et réadaptation essentiellement neurologiques ou gériatriques comprenant notamment une rééducation précoce (kinésithérapie, orthophonie, ergothérapie, psychomotricité, neuropsychologie), diminuait la mortalité et les séquelles des AVC (87,131,139–141). Pollock et al. a montré que le risque de séquelle était diminué d’un facteur 0,78 (IC 95 % : [0,58 à 0,97]) après la prise en charge en rééducation (142).

Le bénéfice de la rééducation dépend pour une large part de l’intensité et de la durée du traitement (131,143).

o Early supported discharge

Le modèle de l’ESD ou «early supported discharge» développé dans le monde anglo-saxon consiste en l’organisation d’une sortie précoce de l’établissement de santé et d’une prise en charge précoce et coordonnée à domicile (142–148). Il intègre la participation d’unités mobiles de réadaptation, rééducation et de réinsertion créant un lien étroit entre les équipes hospitalières et la ville, indispensables au maintien à domicile des patients. Une sortie précoce diminuerait le risque de décès et de dépendance

pour les AVC peu sévères (Barthel > 45 ; OR=0,82 ; IC 95% [0,67 à 0,97]) et améliorerait la performance dans les activités du quotidiens (OR=0,14 ; IC 95% [0,02à 0,26]) (56,120,151-152).

Les coûts moyens globaux seraient environ 15% plus faibles pour l'intervention de retour précoce au domicile en comparaison aux soins standards (153) tout en réduisant le risque de décès ou d’institutionnalisation (154).

o Le retour au domicile

Ce retour dépend, certes du niveau d’indépendance fonctionnelle du patient, mais aussi de la capacité d’une équipe mobile à en assurer, autant que possible, les conditions matérielles et psychologiques les plus favorables. Ce mode de retour est significativement associé à une meilleure évolution à moyen terme (de 3 à 12 mois, médiane à 6 mois), que ce soit en termes de décès, d’autonomie ou de satisfaction (120,86).

Par ailleurs, parmi les facteurs prédictifs du devenir fonctionnel post-AVC identifiés dans la littérature, on distingue les facteurs non modifiables, les facteurs partiellement modifiables et les facteurs modifiables. Si les facteurs non modifiables (tels que l'âge ou la gravité de l'AVC) ont été largement étudiés, certains facteurs modifiables ou partiellement modifiables comme la situation socio-familiale (tels que le soutien social, l'éducation), les déficiences post-AVC (tels que la dépression, les troubles cognitifs, etc.) pouvant être modifiés dans une certaine mesure après un AVC sont moins connus de la littérature.

Une grande partie de la variabilité des résultats sur le long terme s'explique par des facteurs « modifiables ». La connaissance de ces facteurs « modifiables » offre l'occasion d'élaborer des interventions ciblées pour améliorer les résultats (le devenir fonctionnel) post-AVC (155).

d'AVC fréquents et modifiable. Ces facteurs sont habituellement évalués et pris en charge dans le cadre de la prévention (primaire et secondaire) des AVC. Par ailleurs, la dépression et la déficience cognitive (déficiences post-AVC) sont sous-évaluées et peu prises en charge malgré des éléments de preuve montrant une amélioration des résultats suite à leur prise en charge (156,157). Ainsi, identifier les prédicteurs, non modifiables et modifiables, et traiter les affections modifiables pourrait constituer la meilleure stratégie pour optimiser les résultats suite à un AVC.

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