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1-! Facebook organise des contenus et reprend des formes médiatiques héritées des médias traditionnels.

Promettre à un public des contenus de qualité, c’est le propre d’une industrie médiatique. On va s’intéresser ici au fonctionnement de Facebook pour montrer qu’intrinsèquement, le site fonctionne comme une industrie médiatique. Si l’on cherche à définir ce qu’est Facebook, on se rend compte que c’est un espace de médiations, Facebook organise des contenus. C’est le fondement même du fil d’actualité. On a un espace structuré par une organisation de différents contenus. En effet, l’algorithme de Facebook permet de trier différents types de contenus pour construire un fil d’actualité par utilisateur selon ce qu’il aime, le type de publications auxquelles il est le plus réactif etc… Ce tri incarne la promesse qui est faite par une industrie médiatique de fournir du contenu de qualité à son public. Le fil d’actualité étant le dispositif clé de Facebook, c’est cela que viennent consulter les utilisateurs en premier lieu. L’utilisateur y retrouve l’ensemble des contenus que Facebook a sélectionné pour lui. Pour montrer l’importance de ce dispositif construit par Facebook, on peut simplement rappeler que toute connexion sur la plateforme, que ce soit depuis un ordinateur, sur mobile ou sur tablette, s’ouvre sur le fil d’actualité de l’utilisateur.

Dans son essai Émergence et transformation des formes médiatiques, Dominique Cotte s’intéresse à l’évolution des formes médiatiques et à leur fonction. Il explique que les formes « parlent avant même que nous ayons commencé à prendre connaissance de leur contenu. Par forme, nous entendons […] l’ensemble des composantes formelles qui agencent la matérialité des objets de la communication113 ». Nous allons donc nous intéresser ici aux mutations des

formes médiatiques, des médias traditionnels à Facebook et nous verrons également que de

nouvelles formes médiatiques sont apparues avec Facebook lesquelles ne peuvent être distinctes du processus de communication qui lie le public au contenu.

Pour identifier les formes médiatiques qui auraient mutées en passant de supports médiatiques traditionnels (presse écrite, radio, télévision) vers les écrits d’écran et ici en l’occurrence vers Facebook que ce soit sous sa version Web ou mobile, une analyse de la composition technique du fil d’actualité est nécessaire. Ce qu’on remarque sur les différentes captures d’écran du fil d’actualité c’est que les publications reprennent la forme du sous-titre ou du chapeau de la presse écrite114. Tout article est composé d’un titre et d’un chapeau qui permet en quelques

lignes d’expliquer l’enjeu de l’article qui suit. On remarque que quel que soit le type média qui publie sur Facebook (presse, télévision, radio), on conserve sur la forme le titre et le chapeau. Les publications prennent le plus souvent la forme de liens vers le site du média afin de drainer du trafic depuis Facebook vers le site. Ce qui se traduit en termes de forme par l’affichage d’un titre et ce contenu, ce lien est accompagné par un court texte qui donne quelques informations supplémentaires sur le contenu.

Autre forme qu’on retrouve sur Facebook, c’est la présence de la photo. Comme dans la plupart des articles de presse, les publications sur Facebook sont quasiment systématiquement illustrées. Techniquement, il n’est pas obligatoire d’intégrer une image à sa publication mais dans les faits, les usages montrent que toute publication s’accompagne d’une illustration. On note également que peu importe l’éditeur du contenu (page, compte personnel ou autre), l’affichage s’uniformise. Un lien vers un contenu d’un média en particulier prend la même forme sur Facebook qu’il soit publié par le média qui a produit le contenu ou qu’il soit publié par un individu qui souhaite partager cet élément sur la plateforme. L’équivalent en termes de forme, du chapeau journalistique n’est pas identique car sa composition dépend de la personne qui publie le contenu. On remarque aussi que les utilisateurs ont tendance à écrire également un court texte en guise de chapeau pour accompagner leur publication. Ce qui nous laisse dire que les utilisateurs qui sont présents en tant qu’individu sur la plateforme copient les usages des médias en termes de diffusion des contenus édités par des tiers. De plus, on peut ajouter qu’on assiste à une standardisation de la forme des contenus laquelle est structurée par Facebook.

Il est intéressant de noter que ces formes qui sont passées des médias traditionnels, au sens de médias préexistants à Facebook (presse, radio, télévision), sont essentiellement empruntées au média presse écrite. On peut citer à nouveau le titre, le chapeau, l’illustration. Cela peut

s’expliquer par la promiscuité entre ce support médiatique et Facebook où l’essentiel de la consommation se fait historiquement par la lecture. Or depuis quelques temps, Facebook développe la vidéo sur sa plateforme. Notre analyse de la forme des contenus sur le fil d’actualité de Facebook lorsqu’elle se focalise sur les médias éditant du contenu vidéo, nous montre que les publications même vidéos reprennent encore des formes de la presse écrite comme le chapeau115. Cela pourrait également s’expliquer pour des raisons de référencement,

le chapeau sur les publications Facebook permet de mettre du texte dans l’interface de publication de Facebook ce qui facilite la recherche d’éléments sur la plateforme et permet aussi à Facebook de mieux identifier les contenus publiés. On peut imaginer que cette pratique évolue au fur et à mesure que Facebook développera des techniques permettant d’identifier précisément ce que contient une vidéo ou un enregistrement audio.